Édition du mercredi 12 février 2014
Agnès Le Brun, maire de Morlaix : « Nous demandons la mise en place d'un Papi depuis 10 ans»
© D.R.
Maire info. Quel est l’état d’esprit des Morlaisiens aujourd’hui. Incriminent-ils la fatalité ou sont-ils en colère ?
Agnès Le Brun. À Morlaix, les gens s’accrochent, n’ont pas de colère inutile. Il ne faut pas oublier que, de fait, les intempéries ont été réellement exceptionnelles – il est tombé en deux mois ce qui tombe normalement en un an. Maintenant, les gens ne savent pas forcément tout ce qui a été mis sur la table depuis des années – notamment toutes les études qui ont été faites, et en particulier celle de 2004 concernant la possible mise en place d’un Papi (Plan action et prévention inondations). Les préconisations ont été faites en 2004, et il ne s’est rien passé depuis.
Qu’est-ce qui bloque, depuis tout ce temps ?
Je rappelle que nous avons créé un syndicat mixte à la suite des inondations de 1974. Le syndicat mixte a écrit à plusieurs reprises aux services de l’État, pour lui demander de mettre en place un dossier Papi, c’est-à-dire un contrat de partenariat entre le territoire et l’État. La dernière relance aux services de l’État date de l’automne dernier... ils n’ont pas répondu. Alors, il ne s’agit pas de dire « c’est la faute à l’État ». Mais chacun doit remplir son rôle – et celui de l’État est parfaitement balisé : c’est un rôle d’impulsion, de coordination et d’instruction. Ce qui me met en colère, c’est que le chiffrage du Papi avait été établi à 5 ou 6 millions d’euros seulement ! Mais lorsque l’on se retrouve en alerte rouge et qu’on nous affecte, comme la semaine dernière, 60 personnes de la Sécurité civile, combien cela coûte-t-il ? Le rôle de l’État, c’est tout de même de s’assurer de l’organisation des choses sur le territoire. À Morlaix, nous sommes réceptacles de toute l’eau qui ruisselle de l’amont. Nous ne pouvons évidemment pas assumer l’ensemble des travaux qu’il y aurait à faire en amont… et mes pouvoirs de police s’arrêtent aux limites de ma ville. C’est donc bien l’État qui doit intervenir, non pas pour contraindre, mais pour organiser.
Que pensez-vous de la création d’une compétence gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations dévolue aux communes et aux intercommunalités ?
Pour ce qui est de ma commune, les inondations sont à Morlaix, mais l’eau est territoriale. Il s’agit donc d’un problème de solidarité territoriale. L’intercommunalité a donc naturellement un rôle à jouer. Par exemple, pour le Papi que nous voulons voir mis en œuvre, la maîtrise d’ouvrage doit être intercommunale.
Cette réforme prévoit aussi une taxe qui serait payée par les habitants. Pensez-vous que les Morlaisiens sont prêts à payer cette taxe pour que la situation s’améliore ?
Les Morlaisiens trouveraient injuste de payer pour quelque chose qu’ils subissent. Et les communes environnantes trouveraient probablement injuste aussi de devoir payer pour quelque chose qui ne les concerne pas directement. C’est dans ce sens que je dis qu’il faut reconstruire ce que j’appelle l’esprit de territoire. Les financements doivent venir, à mon sens, d’un partenariat entre les territoires et l’État. Mais en tenant compte du fait que, par exemple, dans la communauté d’agglomération à laquelle nous appartenons, Morlaix représente 25% de la population. Il faudrait donc réfléchir à la représentativité de chaque collectivité dans l’intercommunalité, et que les plus grandes communes aient plus de poids dans les décisions de l’intercommunalité.
Propos recueillis par Franck Lemarc
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