Édition du mardi 20 mars 2018
« Gratuité » des transports collectifs : le débat relancé par Paris
Anne Hidalgo, la maire de Paris, a relancé hier le débat sur la « gratuité » des transports collectifs en annonçant, dans un entretien au journal Les Échos, qu’elle allait lancer une étude de faisabilité sur « la gratuité du transport pour les Parisiens ». Pour elle, « la question de la gratuité des transports est une des clés de la mobilité urbaine et beaucoup de villes s’y engagent ».
En affirmant que « beaucoup de villes s’y engagent », Anne Hidalgo est un tout petit peu excessive : sur plus de 300 réseaux existant dans le pays aujourd’hui, une quinzaine ont fait le choix de la gratuité. Et le mot de « gratuité » est d’ailleurs impropre : les transports collectifs ne peuvent jamais être gratuits, ils ont forcément un coût. La question est de savoir qui – de l’usager, de la collectivité ou des employeurs, prend en charge ce coût.
Dans tous les réseaux, une partie du coût est payé par les employeurs au travers du VT, le versement transport, taxe due par toutes les entreprises de plus de dix salariés et dont le taux est voté par la collectivité, jusqu’à un plafond qui varie selon les cas (nombre d’habitants, commune touristique, etc.) de 0,55 à 1,75 % de la masse salariale. Selon le Gart (Groupement des autorités responsables du transport), le VT finance 47 % du transport collectif en France. Pour le reste, ce sont les collectivités qui financent à hauteur de 35 % et les usagers à hauteur de 17 % (la contribution de l’État est estimée par le Gart à 1 %).
Certaines agglomérations ont fait le choix depuis très longtemps de prendre en charge la totalité du coût des transports non couverts par le VT : c’est le cas de Compiègne, depuis 1975. Des villes moyennes, comme Issoudun, Castres, Châteauroux, Gaillac, Senlis, Gap, ont fait le même choix dans les années 2000. La dernière agglomération en date à avoir instauré la gratuité pour l’usager est Niort, en septembre dernier.
À l’échelle internationale, on compte au maximum une centaine d’agglomérations ayant fait le même choix – au Brésil, au Canada, en Suède, en Grande-Bretagne… La seule capitale au monde à avoir instauré la gratuité pour l’usager est Tallin, en Estonie. Dans cet État balte, la mesure pourrait être généralisée à l’ensemble du pays.
Il sera donc intéressant de lire les conclusions du rapport demandé par Anne Hidalgo, à l’échelle d’une ville dont le réseau de métro est le plus dense du monde. Néanmoins, la partie s’annonce particulièrement compliquée dans la mesure où ce n’est pas la Ville de Paris qui gère ses transports mais l’autorité organisatrice régionale, Île-de-France Mobilités (ex-syndicat des transports en Île-de-France ou Stif).
La question de la gratuité pour l’usager des transports fait toujours débat, que ce soit au sein des associations d’élus que parmi les associations d’usagers. Moins chez les transporteurs, qui se montrent en général opposés à la mesure. Pas pour des questions de revenus – ils ne gagnent pas moins, puisque c’est la collectivité qui paye ce que l’usager ne paye plus – mais par crainte qu’un transport gratuit soit plus dégradé qu’un transport payant. C’est la position notamment de l’Union du transport public.
Le Gart, quant à lui, est nuancé sur cette mesure, mais plutôt opposé : le Gart « n’encourage pas cette pratique », rappelle-t-il dans une note publiée en 2012 et remise à jour l’an dernier. Elle ne peut, en tout état de cause, « pas être généralisable à l’ensemble des territoires ». Mais le Gart « défend et respecte » le droit des autorités organisatrices de faire librement leur choix en la matière.
Certaines collectivités qui l’ont mise en place constatent que la fréquentation a fortement augmenté – c’est le cas de Niort – et que l’investissement consenti par la collectivité en vaut la peine. D’autres estiment qu’elles n’ont pas les moyens de perdre les recettes des voyageurs ; d’autres encore, qu’il est « déresponsabilisant » pour l’usager de ne pas payer sa quote-part dans le coût du transport.
Un élément nouveau est cependant intervenu tout récemment, sur lequel s’appuiera peut-être la maire de Paris : depuis le 1er janvier dernier, le produit des amendes de stationnement (devenues forfait de post-stationnement) revient directement aux collectivités, dans le but exclusif de financer la mobilité. Cette recette nouvelle pourrait-elle permettre de financer tout ou partie d’une mesure de gratuité des transports collectifs ? Personne ne dispose du recul suffisant pour le dire aujourd’hui, mais la question mérite d’être posée.
En affirmant que « beaucoup de villes s’y engagent », Anne Hidalgo est un tout petit peu excessive : sur plus de 300 réseaux existant dans le pays aujourd’hui, une quinzaine ont fait le choix de la gratuité. Et le mot de « gratuité » est d’ailleurs impropre : les transports collectifs ne peuvent jamais être gratuits, ils ont forcément un coût. La question est de savoir qui – de l’usager, de la collectivité ou des employeurs, prend en charge ce coût.
Dans tous les réseaux, une partie du coût est payé par les employeurs au travers du VT, le versement transport, taxe due par toutes les entreprises de plus de dix salariés et dont le taux est voté par la collectivité, jusqu’à un plafond qui varie selon les cas (nombre d’habitants, commune touristique, etc.) de 0,55 à 1,75 % de la masse salariale. Selon le Gart (Groupement des autorités responsables du transport), le VT finance 47 % du transport collectif en France. Pour le reste, ce sont les collectivités qui financent à hauteur de 35 % et les usagers à hauteur de 17 % (la contribution de l’État est estimée par le Gart à 1 %).
Certaines agglomérations ont fait le choix depuis très longtemps de prendre en charge la totalité du coût des transports non couverts par le VT : c’est le cas de Compiègne, depuis 1975. Des villes moyennes, comme Issoudun, Castres, Châteauroux, Gaillac, Senlis, Gap, ont fait le même choix dans les années 2000. La dernière agglomération en date à avoir instauré la gratuité pour l’usager est Niort, en septembre dernier.
À l’échelle internationale, on compte au maximum une centaine d’agglomérations ayant fait le même choix – au Brésil, au Canada, en Suède, en Grande-Bretagne… La seule capitale au monde à avoir instauré la gratuité pour l’usager est Tallin, en Estonie. Dans cet État balte, la mesure pourrait être généralisée à l’ensemble du pays.
Il sera donc intéressant de lire les conclusions du rapport demandé par Anne Hidalgo, à l’échelle d’une ville dont le réseau de métro est le plus dense du monde. Néanmoins, la partie s’annonce particulièrement compliquée dans la mesure où ce n’est pas la Ville de Paris qui gère ses transports mais l’autorité organisatrice régionale, Île-de-France Mobilités (ex-syndicat des transports en Île-de-France ou Stif).
La question de la gratuité pour l’usager des transports fait toujours débat, que ce soit au sein des associations d’élus que parmi les associations d’usagers. Moins chez les transporteurs, qui se montrent en général opposés à la mesure. Pas pour des questions de revenus – ils ne gagnent pas moins, puisque c’est la collectivité qui paye ce que l’usager ne paye plus – mais par crainte qu’un transport gratuit soit plus dégradé qu’un transport payant. C’est la position notamment de l’Union du transport public.
Le Gart, quant à lui, est nuancé sur cette mesure, mais plutôt opposé : le Gart « n’encourage pas cette pratique », rappelle-t-il dans une note publiée en 2012 et remise à jour l’an dernier. Elle ne peut, en tout état de cause, « pas être généralisable à l’ensemble des territoires ». Mais le Gart « défend et respecte » le droit des autorités organisatrices de faire librement leur choix en la matière.
Certaines collectivités qui l’ont mise en place constatent que la fréquentation a fortement augmenté – c’est le cas de Niort – et que l’investissement consenti par la collectivité en vaut la peine. D’autres estiment qu’elles n’ont pas les moyens de perdre les recettes des voyageurs ; d’autres encore, qu’il est « déresponsabilisant » pour l’usager de ne pas payer sa quote-part dans le coût du transport.
Un élément nouveau est cependant intervenu tout récemment, sur lequel s’appuiera peut-être la maire de Paris : depuis le 1er janvier dernier, le produit des amendes de stationnement (devenues forfait de post-stationnement) revient directement aux collectivités, dans le but exclusif de financer la mobilité. Cette recette nouvelle pourrait-elle permettre de financer tout ou partie d’une mesure de gratuité des transports collectifs ? Personne ne dispose du recul suffisant pour le dire aujourd’hui, mais la question mérite d’être posée.
F.L.
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