Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du mardi 9 mai 2023
Élus locaux

Aides de la PAC 2023 pour les agriculteurs anciens élus : le ministre de l'Agriculture accède à la demande de l'AMF

L'AMF a donné l'alerte, en février, sur une disposition entrée en vigueur à la fin de l'année, qui aurait tout simplement privé des aides de la Politique agricole commune (PAC) les agriculteurs touchant une retraite Ircantec en tant qu'anciens élus. Le ministre de l'Agriculture vient d'accepter de revenir sur cette décision. Explications. 

Par Franck Lemarc

Être privé des aides indispensables de la PAC parce que l’on a été élu local et que l’on touche, à ce titre, une pension de retraite. Cette disposition particulièrement injuste existe bel et bien, depuis la publication du décret du 30 décembre 2022 qui transpose en droit français une règle européenne. 

Pour toucher les aides de la PAC, indique le décret, il faut être « agriculteur actif ». Et pour être agriculteur actif, il est obligatoire, si l’on a plus de 67 ans, de « ne pas avoir fait valoir ses droits à la retraite auprès des régimes légaux ou rendus légalement obligatoires, de base et complémentaires ». Même si ces droits à la retraite n’ont rien à avoir avec l’activité agricole. 

Ne pas « pénaliser »  les anciens élus

Cette situation est précisément celle d’un agriculteur encore actif, ayant passé l’âge de 67 ans, mais ayant exercé une fonction d’élu local et touchant, à ce titre, une pension de retraite Ircantec. Si l’on s’en tient à la lettre du décret du 30 décembre 2022, le fait d’avoir fait valoir ses droits à la retraite d’élu local auprès de l’Ircantec (ce qui est possible même si l’on n’a pas liquidé sa retraite de base) suffit donc à se voir privé des aides de la PAC. Ce dispositif (lire Maire info du 1er mars 2023) a été confirmé par la Direction départementale des territoires. 

Cette disposition pourrait concerner plusieurs milliers d’anciens élus et les léser très gravement, les aides de la PAC étant indispensables à la survie de nombreuses exploitations. Les aides concernées sont en effet les aides couplées, les aides découplées et l’ICHN (indemnité compensatoire des handicaps naturels). 

C’est pourquoi le président de l’AMF, David Lisnard, a saisi le ministre de l’Agriculture, le 28 février, sur ce sujet. Le maire de Cannes a demandé à Marc Fesneau de revenir, dans ce cas précis, sur des dispositions qui « pénalisent »  les agriculteurs s’étant engagés dans la vie locale, estimant que ce geste « serait une juste reconnaissance pour ceux qui ont donné, souvent au détriment de leur exploitation, des années de leur vie au bénéfice de leur commune et de ses habitants. » 

Demande prise en compte

Le ministre de l’Agriculture se prépare à satisfaire cette demande. 

Dans un courrier à l’AMF que Maire info a pu consulter, le ministre justifie le dispositif général visant à « interdire le cumul entre une pension de retraite et les aides de la PAC », rappelant que ce dispositif fait l’objet d’un « large consensus », puisqu’il vise à accélérer la transmission des exploitations. 

Néanmoins, reconnaît le ministre, le Conseil d’État lui-même a reconnu que « le régime de retraite des élus locaux est de nature spécifique et (que) la pension versée au titre des fonctions électives n’est pas assimilable à un revenu de remplacement d’une activité professionnelle ». Par ailleurs, le ministre rejoint la position de David Lisnard en jugeant que « l’exercice de ces fonctions revêt un caractère d’intérêt général »  qu’il convient « d’encourager ». Il va donc donner instruction pour que « ce cas particulier »  soit « pris en compte », dès cette année. Ainsi, conclut Marc Fesneau, « les agriculteurs de plus de 67 ans qui ont fait valoir leurs droits à la retraite au seul titre de leurs anciennes fonctions électives, sans avoir fait valoir leurs droits aux autres régimes de retraite dont ils relèvent potentiellement, pourront continuer à percevoir les aides de la PAC. » 

Le ministre n’évoque pas, dans son courrier, une modification du décret, mais « une instruction aux services instructeurs ». 

Cette décision va être un soulagement pour les agriculteurs concernés. Reste que cette affaire pose une nouvelle fois la question du régime de retraite Ircantec des élus, qui devrait, estime l’AMF, être distingué une fois pour toutes de tous les autres régimes  de retraite afin d’éviter les problèmes récurrents qui se posent. L’AMF avait proposé de le faire à l’occasion de la réforme des retraites. Mais le gouvernement et la majorité ne l’ont pas suivie. 

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