Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du vendredi 2 avril 2021
Services publics

Quel avenir pour les missions de service public de La Poste ?

La baisse de la distribution du volume de courrier s'accompagne pour La Poste d'une réflexion sur le financement et l'évolution de ses quatre missions : le service universel postal, la contribution à l'aménagement du territoire, le transport et la distribution de la presse et l'accessibilité bancaire. De nouvelles prérogatives pourraient également lui être confiées, selon les préconisations d'un rapport du Sénat.

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« Fournir des services de qualité de collecte et de distribution du courrier et des colis, sur l’ensemble du territoire, de manière permanente et à des prix abordables pour tous ». C’est la principale mission de service public assurée par La Poste. Or, depuis 2018, le compte de ce que l’on appelle le service universel postal (SUP) est en déficit. Comment, dans ce contexte, « préserver dans la durée le financement des services publics de La Poste » ? Les sénateurs Patrick Chaize (Ain - Les Républicains), Pierre Louault (Indre-et-Loire - Union centriste) et Rémi Cardon (Somme - Socialiste, Écologiste et Républicain) esquissent des pistes dans un rapport publié mercredi.
Il y a urgence à intervenir : « Si la baisse du volume du courrier est une tendance de long terme, elle a été accélérée par la crise économique et sanitaire, provoquant un déficit estimé à 1,3 milliard d’euros pour l’année 2020, malgré la hausse des activités de livraison de colis ». Le trio de sénateurs s’inquiète de « cette situation financière inédite », le déficit du SUP pourrait varier de 700 millions d’euros à 2,4 milliards d’euros d’ici 2025. 

Une compensation de l’État pour le service universel postal

Il est donc à craindre que « sans compensation de l’État à compter de l’année 2021, une « réduction »  du service public s’imposera dans les faits avec une diminution des services rendus aux usagers ». Pour « maintenir un modèle français exigeant de service public », les rapporteurs envisagent « un mécanisme de compensation mixte, associant un abattement fiscal jusqu’à 270 millions d’euros au titre de la taxe sur les salaires dont s’acquitte chaque année le groupe La Poste, et une dotation budgétaire annuelle permettant de compléter le montant de la compensation, jusqu’à 730 millions d’euros ». Pour déterminer plus précisément le montant de la compensation de l’État, les sénateurs proposent de « confier à l’Arcep une mission de calcul du coût net du service universel postal afin de disposer d’estimations chiffrées indépendantes et contre-expertisées ». 
Ils préconisent également plus d’interventionnisme de l’Arcep, dont l’usage du pouvoir de sanction est jugé trop « faible »  par les sénateurs, dans « le contrôle du respect de la trajectoire à la hausse des objectifs réglementaire de qualité de service pour la période 2021-2023, puis pour la période 2024-2026 ». Aux niveaux national et territorial, « les compétences de l’Observatoire national de la présence postale (ONPP) et des commissions départementales de présence postale territoriale (CDPPT) devraient être élargies pour permettre un suivi plus complet de l’organisation postale, du respect des obligations de service public et de la qualité de service ».

Des objectifs contraignants pour le transport et la distribution de la presse ?

Le mécanisme de compensation du transport et de la distribution de la presse doit, de la même façon, être réformé « dans la mesure où la hausse des tarifs n’a pas permis d’en assurer l’équilibre financier ». En réponse au « sentiment de dégradation récente de la qualité de service », des objectifs réglementaires et contraignants pourraient être fixés pour la première fois pour le service public de transport et la distribution de la presse, recommandent les sénateurs.
La mission d’accessibilité bancaire a révélé, enfin, son utilisé sociale puisqu’elle a permis à 1,2 million de personnes précaires « d’ouvrir un livret A auprès de La Banque Postale et de l’utiliser comme un quasi-compte courant ». « De manière complémentaire à cette mission » , les sénateurs préconisent « des mesures supplémentaires pour favoriser l’accès aux espèces, en particulier dans les zones peu denses, rurales et touristiques ».

Une contribution à l'aménagement du territoire sous-compensée

Symbole du modèle français de service public, la contribution à l’aménagement du territoire est la deuxième mission du groupe La Poste, qui doit « maintenir un réseau de 17 000 points de contact ». « En 2020, cette mission de service public était compensée à hauteur de 177 millions d’euros, pour un coût net évalué à 227 millions d’euros par l’Arcep. Déjà sous-compensé, le financement de cette mission doit être préservé des effets de la baisse des impôts de production évalués à 66 millions d’euros pour l’année 2022, ces derniers contribuant à son financement », préviennent les sénateurs. Ils préconisent, à cet effet, « d’abonder le fonds postal national de péréquation territoriale (FPNPT) dans la mission « Économie »  du projet de loi de finances pour 2022 ».
Sur le plan organisationnel, il apparait indispensable aux sénateurs « d’améliorer les modalités d’information des élus locaux qui dénoncent régulièrement les fermetures des bureaux de poste (…) Le cas échéant, la constitution d’agences postales communales (APC) ou intercommunales (API) est préférable aux fermetures sèches des bureaux de poste. »  Rappelons néanmoins que pour un grand nombre de bureaux de poste, en particulier dans le monde rural, la fermeture ne peut être décidée sans l'accord préalable du maire.
Les rapporteurs préconisent aussi de « renforcer le partenariat entre les maisons France Services et La Poste »  - si 84 départements respectaient cette condition au 1er janvier 2021, 17 départements ne disposaient pas d’un point de contact partenarial entre La Poste et France Services à cette date - et « d’augmenter le nombre de tournées de distribution du courrier et des colis le samedi. » 

Des nouvelles missions pour lutter contre la précarité numérique ?

La Poste est, enfin, invitée à se diversifier en assurant de nouvelles missions visant à lutter contre « la précarité numérique ». « Détecter la précarité numérique à domicile »  pourrait devenir ainsi la cinquième mission de service public, selon les sénateurs. « Dans cette perspective, les facteurs pourraient aussi devenir les « détecteurs »  à domicile de la précarité numérique. Il ne s’agit pas de faire des facteurs des médiateurs numériques, mais de leur permettre d’intervenir en amont : avant de pouvoir former, il faut pouvoir identifier. Une expérimentation convaincante a été réalisée en ce sens par la communauté d’agglomération du Sicoval, en partenariat avec La Poste ».
Une « précarité numérique »  qui rime de plus en plus avec « galère administrative »  avec la dématérialisation galopante des services publics. « Les facteurs pourraient devenir de véritables « représentants à domicile des maisons France Services », en identifiant les besoins des usagers et en établissant le lien avec les équipes compétentes des maisons France Services ».

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