Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux
Édition du vendredi 7 juillet 2023
ZAN

Proposition de loi ZAN : des avancées concrètes obtenues en commission mixte paritaire

La commission mixte paritaire députés/sénateurs qui s'est réunie hier a trouvé un consensus sur la proposition de loi relative au Zéro artificialisation nette. Le nouveau texte contient d'intéressantes avancées pour les collectivités. Premières explications. 

Par Franck Lemarc

Cette fois, ça y est presque. Sous réserve que l’Asemblée et le Sénat votent le texte issu de la commission mite paritaire (CMP), ce qui est très probable, la loi « visant à renforcer l’accompagnement des élus locaux dans la mise en œuvre de la lutte contre l’artificialisation des sols »  devrait pouvoir être promulguée avant la fin du mois de juillet, comme le souhaitait le gouvernement. 

À l’heure où nous écrivons, ni le texte de la CMP ni le rapport de la commission ne sont encore publiés, mais on connaît en revanche les grandes lignes des modifications apportées par celle-ci. Maire info reviendra plus en détail sur le texte dès qu'il aura été publié.

Garantie rurale étendue

L’une des évolutions les plus importantes, si l’on en croit le communiqué diffusé par le Sénat, est que – comme on pouvait s’y attendre – le droit de préemption urbain élargi a été rétabli dans le texte. On savait que le gouvernement n’était pas défavorable à cette mesure et qu’il avait discrètement œuvré pour qu’elle soit rétablie en CMP. Cette mesure figurait à l’article 12 de la proposition de loi après son examen au Sénat : il était instauré « un droit de préemption dans les espaces propices à la renaturation ou au recyclage foncier », dont les communes ou les EPCI pouvaient se saisir par délibération, notamment pour lutter contre la spéculation foncière. 

Les députés avaient supprimé cette disposition, préférant ne garder qu’un « sursis à statuer »  jugé par l’AMF très insuffisant. 

La CMP semble avoir rétabli le droit de préemption. 

Autre avancée souhaitée par l’AMF : l’allongement des délais accordés aux différentes strates de collectivités pour inscrire les objectifs du ZAN dans leurs documents de planification (Sraddet, SCoT, PLU/PLUi, carte communale). Le communiqué de Sénat indique que les collectivités « disposeront de six mois supplémentaires pour inscrire ces objectifs », sans plus de précision. Rappelons que le texte soumis à la CMP, issu du vote des députés, proposait la mise en conformité des Sraddet pour février 2024, celle des SCoT pour 2026 et celles des documents communaux pour 2027. On sait que le Sénat souhaitait, pour les Sraddet, ramener la date butoir à août 2024. On verra, dans le texte, ce qu’il en est précisément.

Une autre concession importante a été obtenue par le Sénat : l’extension de la « garantie rurale »  à toutes les communes. Explication : le texte issu des débats à l’Assemblée laissait aux plus petites communes (classées par l’Insee « denses ou très peu denses » ) une « enveloppe »  d’un hectare artificialisable, non décompté donc dans le ZAN, afin de leur laisser une certaine marge de manœuvre. Autre restriction : cette enveloppe, baptisée « garantie rurale », n’était accessible qu’aux communes dotées d’un PLU ou d’une carte communale – l’objectif étant très clairement de pousser les communes à s’en doter. 

Le communiqué du Sénat indique que cette garantie sera « applicable à l’ensemble des communes sans condition de densité ». Y compris les communes urbaines ? Et la condition liée aux documents d’urbanisme est-elle ou non conservée ? Pas de réponse encore, à cette heure. 

« Impératifs incontournables » 

Le communiqué du Sénat précise par ailleurs que les « impératifs incontournables »  de ce dernier ont été « repris » : « Accélérer l’implantation des projets de développement concourant à la transition écologique et préserver le rôle central de la région et des autres collectivités territoriales dans la mise en œuvre des objectifs de sobriété foncière, car elles seront les premières concernées et devront assumer les trajectoires adoptées auprès des citoyens et des acteurs économiques. » 

Par ailleurs, sur les « grands projets d’intérêt national », le Sénat confirme que l’artificialisation générée par ces grands projets ne sera pas imputée aux régions mais « mutualisée entre l’ensemble des régions métropolitaines dans la limite de 10 000 hectares, le surcroît étant exclu du décompte national ». Il faudra là encore attendre la publication du texte pour comprendre précisément ce qui a été modifié. 

L’AMF satisfaite mais prudente

Il restera aussi à attendre la publication des deux décrets Sraddet et nomenclature. Le Sénat indique qu’il sera « particulièrement attentif à ce que leur version finale soit conforme à ses attentes ainsi qu’à celles des associations d’élus ».

Du côté de celles-ci, justement, l’AMF a publié hier un communiqué pour se réjouir de la conclusion positive de la CMP. L’association salue les avancées « très attendues par les élus »  que sont la garantie rurale, qui consacrera « le droit au projet demandé par les territoires ruraux », l’allongement des délais qui permettra « une meilleure concertation locale »  et les outils de maîtrise foncière « permettant de gérer la rareté foncière ». 

Pour l’AMF, « la proposition de loi de Valérie Létard et Jean-Baptiste Blanc a permis d’enclencher un nouveau cycle législatif, avec l’appui du gouvernement et d’une majorité de députés. La volonté partagée de dialogue et de résultat des sénateurs, de l’AMF via David Lisnard et du gouvernement à travers le ministre Christophe Béchu a été déterminante ». Mais tout n’est pas réglé, loin de là. D’abord parce qu’il faut attendre la publication des décrets, et ensuite parce que « les situations, sur le terrain, seront compliquées ». Quel sera, par exemple, le modèle économique et financier « permettant le renouvellement urbain et la réaffectation des friches » ? L’AMF espère que cette question trouvera une réponse dans le projet de loi de finances pour 2024, pour combler « cet angle mort de la loi Climat ». 

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