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Édition du mercredi 27 octobre 2021
Énergie

Énergie : un « colossal » rapport de RTE pour ouvrir le débat public

Le rapport Futurs énergétiques 2050, publié lundi, vise à élaborer des scénarios sur les futures capacités de production énergétique du pays. Il présente plusieurs hypothèses pour aller vers l'horizon 2050, allant du 100 % renouvelable à diverses moutures d'un « mix » énergies renouvelables et nucléaire. 

Par Franck Lemarc

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Ce rapport, dont le seul résumé fait plus de 50 pages, est une somme d’informations considérable. Commandé par le gouvernement à RTE (gestionnaire du réseau de transport d’électricité) il y a deux ans, le rapport est tellement volumineux qu’il est publié, depuis lundi, chapitre par chapitre – l’ensemble devrait atteindre les 1000 pages. Barbara Pompili, ministre de la Transition écologique, a salué hier ce travail « colossal »  lors d’une conférence de presse : « Nous avons pour la première fois des bases scientifiques et techniques objectives pour décider de notre avenir énergétique jusqu’au milieu du siècle. (…) Nous sommes désormais dotés du GPS qui nous permettra de définir notre itinéraire jusqu’à 2050, jusqu’à la neutralité carbone. » 

Électrifier les activités

Le rapport part d’une idée claire : il est indispensable de sortir des énergies fossiles. Il va donc falloir « décarboner »  les activités du pays, c’est-à-dire aller vers la disparition progressive de l’usage du pétrole, du gaz et du charbon, dans des domaines aussi variés que l’industrie, les transports, le chauffage. Et dans certains domaines, presque tout reste à faire : dans les transports par exemple, 90 % de l’activité est encore dépendante des énergies fossiles. Globalement, détaille RTE, « 60 % de l’énergie utilisée en France est d’origine fossile ». 

Il y a donc une double nécessité : celle de diminuer la consommation globale d’énergie, et celle de « transformer le mix »  pour se débarrasser, peu à peu, des énergies fossiles. C’est le principe de la stratégie nationale bas carbone (SNBC) décidée par l’État. Elle suppose une diminution de 40 % de la consommation finale d’énergie en France d’ici 2050 – celle-ci passerait de 1 600 TWh à 930 TWh. 

Parallèlement, la diminution progressive du recours aux énergies fossiles suppose une augmentation équivalente du recours à l’électricité. Le pays va devoir se livrer à une « électrification massive »  de ses activités, notamment dans les transports et pour le chauffage. « La demande d’électricité va être multipliée par 8 »  dans les années à venir, a détaillé hier Barbara Pompili, avec l’électrification du parc automobile en particulier. Si la consommation électrique est, aujourd’hui, de 460 TWh, elle devrait passer, selon les scénarios retenus, à « 550 TWh au minimum et 750 TWh au maximum en 2050 ». 

Six scénarios

La question essentielle des années à venir va donc être : comment produire autant d’électricité ? Une difficulté supplémentaire est à prendre en compte : la fermeture progressive du parc nucléaire – problématique que RTE appelle, dans son rapport, « un impensé du débat ». Au fil des années, l’essentiel des centrales nucléaires du pays atteint la limite de 40 ans qui avait été retenue comme limite au moment de leur conception. Il va donc y avoir des « choix politiques »  à effectuer, explique RTE, entre la prolongation de la durée de certaines installations, le lancement de chantiers de nouvelles installations de troisième génération… ou un scénario à l’allemande, c’est-à-dire la fermeture définitive du parc nucléaire français. 

RTE résume le débat à deux options : continuer de tabler sur un mix énergie nucléaire et énergies renouvelables ; ou aller vers le « 100 % renouvelable ». Ces deux options sont possibles, jugent les auteurs du rapport, du fait de l’évolution rapide des technologies. Le 100 % renouvelable est bien « une possibilité à terme »  ; et l’usage du nucléaire peut également évoluer, avec l’apparition, à côté des grandes centrales de type EPR, de petites installations, aujourd’hui inexistantes en France (les SMR ou « petits réacteurs modulaires » ). 

Le rapport de RTE présente donc pas moins de six scénarios à l’horizon 2050, allant du 100 % renouvelable à un mix 50 % nucléaire/50% renouvelable. 

Développement « inéluctable »  des énergies renouvelables

Dit autrement, quel que soit le scénario retenu, la part du nucléaire ne dépassera « en aucun cas »  les 50 % du mix en 2050, a réaffirmé Barbara Pompili hier. Les énergies renouvelables vont donc « inéluctablement »  connaître un développement massif dans les années à venir, car « aucun scénario ne permet de s’exonérer d’un déploiement massif des différentes énergies renouvelables dans les prochaines décennies ». Et la ministre en a donné quelques exemples édifiants : dans tous les cas, l’éolien en mer devra être développé au rythme de 2 GW par an, pour atteindre entre 2000 et 4000 éoliennes en mer en 2050 (rappelons qu’il y en aujourd’hui zéro). Le nombre d’éoliennes terrestres devra être multiplié d’un facteur de 2,5 à 4, selon les scénarios ; les capacités photovoltaïques, d’un facteur de 7 à 12 !

Le débat va maintenant s’ouvrir pour choisir entre les différents scénarios proposés par RTE. Du côté de l’opérateur, il semble que la solution du 100 % renouvelable apparaisse comme la moins réaliste, et RTE juge que le maintien d’une part de nucléaire (qui passerait par la construction de nouveaux réacteurs) est « pertinent »  d’un point de vue économique : les scénarios où le renouvelable serait très majoritaire sont, de loin, « les plus onéreux ».

Mais Barbara Pompili a insisté hier sur le fait que l’heure n’était pas encore aux choix. « Il ne s'agit pas encore de choisir tel ou tel de ces scénarios. Chacun doit pouvoir s’en emparer », car il faut maintenant « comprendre les enseignements que nous pouvons retirer de l’ensemble de cette étude, (…) comprendre les enjeux économiques, sociétaux, environnementaux et techniques de chacun de ces chemins. » 

C’est donc une phase de débat, crucial pour l'avenir, qui va maintenant s’ouvrir dès le premier trimestre 2022, mais dont le gouvernement n’a pas encore dévoilé les modalités.

Accéder au rapport.

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