Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du mardi 4 juillet 2017
Vie publique

Emmanuel Macron veut réformer les institutions et laisser les territoires « expérimenter »

Devant le Parlement réuni en Congrès hier à Versailles, le président Emmanuel Macron a notamment fait plusieurs annonces sur les réformes institutionnelles qu’il souhaite impulser et a évoqué sa vision des rapports avec les territoires.
Dans un discours d’une heure et demie, auquel le président de la République a voulu donner un ton grave et où est revenu à plusieurs reprises le mot « historique », Emmanuel Macron a détaillé sa volonté de « profond changement », estimant qu’elle correspond à « l’attente »  des Français. Sur le terrain institutionnel – sujet qui a occupé une large partie du discours – il souhaite « redonner tout son sens »  au mandat électif, au travers de trois axes : « efficacité, représentativité, responsabilité ». Pour aller dans ce sens, le président va impulser une réforme des institutions dont l’une des plus visibles conséquences va être la refonte totale de la carte des circonscriptions électorales. En effet, le nombre des membres de chaque assemblée (Assemblée nationale, Sénat et Conseil économique, social et environnemental) va être « réduit d’un tiers », en même temps qu’une « dose de proportionnelle »  va être introduite pour la désignation de l’Assemblée nationale.
Le nombre de députés serait donc réduit de presque 200 (192 pour être précis), pour tomber à 384. Les sénateurs, actuellement au nombre de 348, passeraient eux à 232. Quant au Cese, il comprend aujourd’hui 233 membres ; il en perdrait donc 77 pour aboutir à 155 (lire article ci-dessous). Mais c’est naturellement la réforme de l’élection des députés qui sera la plus visible, l’Assemblée nationale étant la seule à être élue au suffrage universel direct (lire article ci-dessous).
Tout comme l’avait fait le nouveau président de l’Assemblée nationale, François de Rugy, lors de son discours inaugural, le président de la République a appelé à ce que, d’une part, les lois se fassent plus rapidement, et que d’autre part le travail strictement législatif occupe une moins grande part du « temps législatif ». La navette, c’est-à-dire les allers et retours des textes entre Assemblée et Sénat devrait être « simplifiée »  et – ce qui constituerait une absolue nouveauté – que « dans les cas les plus simples »  certaines lois puissent même être votées « en commission ».
En d’autres termes, le président souhaite que le Parlement « légifère moins », afin non seulement « d’accorder plus d’attention aux textes fondamentaux »  mais ait aussi plus de temps pour se livrer « au contrôle et l’évaluation ». Le président souhaite notamment que les textes votés – ou du moins les plus importants – fassent l’objet d’une évaluation « deux ans après leur mise en application »  ; et que même des lois plus anciennes soient également évaluées « afin d’ouvrir la possibilité d’abroger des lois qui auraient par le passé été trop vite adoptées (ou) mal construites ».
Concernant le Cese, Emmanuel Macron veut réformer son fonctionnement et le renforcer – et l’une des formules qu’il a utilisées ne va pas manquer de poser question : le président souhaite que le Cese devienne « la Chambre du futur, où circulent toutes les forces vives de la Nation ; nous ferons de cette Assemblée le carrefour des consultations publiques et le seul ». Et d’insister : « Les instances de consultation se sont multipliées. Nous ne savons même plus les dénombrer. (…) Nous ferons (du Cese) l’instance unique de consultation ». 

« Pactes girondins »  avec les territoires
Le président s’est aussi exprimé sur les rapports entre l’État central et les territoires. Partisan d’une « République contractuelle », Emmanuel Macron veut « nouer avec les territoires des accords de confiance ». « Nous savons tous combien notre France est diverse, combien est importante l’intimité des décideurs publics avec le terrain de leur action. La centralisation jacobine traduit trop souvent la peur élémentaire de perdre une part de son pouvoir. Conjurons-là. »  Toute cette partie du discours a d’ailleurs été marquée par l’opposition entre une politique « jacobine »  et une politique « girondine » : « Osons conclure avec nos territoires et nos élus de vrais pactes girondins ! ». Il s’agit là d’une référence à la Révolution française, et à deux tendances politiques qui s’y sont affrontées : les Jacobins, partisans d’une plus grande centralisation, et les Girondins décentralisateurs et fédéralistes, dont l’un des députés à la Convention, Marc-David Lasource, se rendit célèbre en déclarant que, comme les autres départements, Paris devant « être réduit à un 83e d’influence ».
Il reste à savoir comment se traduiront, dans la réalité, ces déclarations d’intention. Les appels du président à « expérimenter et déconcentrer »  et ses références aux Girondins se traduiront-ils, comme on en entend parler depuis longtemps, par l’introduction progressive d’une dose de fédéralisme dans le fonctionnement de l’État ? L’avenir le dira, à commencer par la Conférence des territoires, qui se réunira à partir du 17 juillet.
Aujourd’hui, c’est au tour du Premier ministre, Édouard Philippe, de dévoiler devant l’Assemblée nationale sa très attendue feuille de route, lors de son discours de politique générale, à 15 heures.
Franck Lemarc

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