Maire-info
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Édition du mercredi 17 octobre 2018
Sports

Gouvernance du sport : ce qu'il faut retenir du rapport remis à Roxana Maracineanu

Le départ de Laura Flessel du gouvernement à la fin du mois d’août avait quelque peu retardé son officialisation : près d’un an après le début des travaux - le premier séminaire a été organisé le 22 novembre 2017 - le rapport « Nouvelle gouvernance du sport »  a finalement été remis hier à la ministre des Sports Roxana Maracineanu. Dès l’introduction, leurs auteurs, Laurence Lefèvre, directrice des sports au ministère des Sports, et Patrick Bayeux, docteur en sciences de gestion et consultant, décident de placer la barre haut : « Le sport a besoin d’une révolution »  pour « répondre à l’engagement de doubler le nombre de médailles [aux Jeux olympiques et paralympiques de Paris en 2024, ndlr] tout en permettant à près 3 millions d’habitants supplémentaires de pratiquer une activité physique et sportive de leur choix d’ici 2022. »  Le modèle de gouvernance actuel a été conçu après la débâcle du sport français aux JO de Rome en 1960. Il est aujourd’hui jugé en décalage avec les attentes sociales et n’est pas à la hauteur en matière de performance sportive.

Au niveau national : une agence unique
C’est dans ce contexte que le 15 mai, les acteurs du comité de pilotage - État, collectivités locales, mouvement sportif et monde économique - ont convenu d’une gouvernance du sport « partagée à responsabilités réparties »  avec la création au niveau national et au niveau territorial de « structures collégiales de concertation et de décision ». « Il y a des acteurs [État, collectivités, mouvement sportif et monde économique, ndlr], une pièce, deux scènes et plusieurs actes, résume Patrick Bayeux sur le site internet qu’il anime. C'est la première fois qu'on va leur permettre de jouer la pièce ensemble. » 
En clair, cette nouvelle gouvernance suppose, selon les auteurs du rapport, la constitution d’une agence nationale, qui « permettrait aux parties prenantes de construire un corpus commun de connaissances afin que chacun se positionne là où il paraît le plus utile » : soit « en matière de haute performance sportive »  soit « en matière de développement des pratiques ». Son cadre juridique « serait plutôt celui d’un groupement d’intérêt public » : le groupement « comprendrait des collèges qui désigneraient en leur sein leurs représentants au conseil d’administration ». On ignore encore qui pourrait en prendre la présidence.

Au niveau territorial : des conférences régionales du sport et des conférences des financeurs
En parallèle, pourraient être « systématisées »  des conférences régionales du sport que les auteurs imaginent comme des « Parlements du sport » : cette conférence régionale déterminerait le projet sportif territorial. Celui-ci comprendrait quatre grandes politiques publiques que sont la performance sportive et le haut niveau, le sport professionnel, les équipements sportifs structurants du territoire et l’égal accès de tous à la pratique sportive, et notamment des personnes handicapées.
Si les rapporteurs retiennent une déclinaison territoriale sous forme de conférence régionale, le bureau de l’AMF a déjà indiqué à ce sujet qu’il se montre défavorable à la déclinaison choisie, car « elle induirait de fait une spécialisation par niveau territorial, alors même que le sport doit rester une compétence partagée ». David Lazarus, maire de Chambly et représentant de l’AMF au sein du comité de pilotage, a rappelé par ailleurs que « le sport de haut niveau débutait nécessairement dans les clubs locaux et que le bloc local ne pouvait assumer seul, avec le mouvement sportif, le sport pour tous ».
Parallèlement à ces conférences régionales, les rapporteurs préconisent l’expérimentation de conférences des financeurs, qui réuniraient une fois encore tous les acteurs, afin de « définir sur la base du projet sportif territorial un programme coordonné de financement ». Il n’y aurait pas de modèle type, les collectivités (communes, départements, régions) n’ayant « pas souhaité répartir les compétences entre elles, ni désigner de chef de file »  au profit d’une « spécialisation à la carte »  dans le cadre, par exemple, de conventions territoriales d’exercice concerté des compétences (CTEC). La conférence des financeurs pourrait constituer « un guichet unique »  pour les clubs et acteurs du sport et limiterait les appels à projets.
Le projet sportif territorial ainsi conçu serait « présenté à l’agence nationale qui aurait vocation à le financer au titre de la performance sportive et au titre du développement de la pratique sportive dans le cadre de ses priorités ».

Un financement de l’État de 400 millions d’euros
D’après les calculs du mouvement sportif et des collectivités, cette gouvernance ne pourrait fonctionner qu’avec « un financement public d’État de l’ordre de 400 millions d’euros. Celui-ci correspond au montant des taxes existantes (taxes Buffet, sur les paris en ligne, FDJ…) qui ne seraient plus « plafonnées »  lors de l’élaboration du budget de l’État », écrivent les rapporteurs. La suppression des subventions aux clubs professionnels dont les droits TV sont supérieurs à 15 % du budget est aussi une des pistes évoquées.
La définition de la nouvelle gouvernance du sport ainsi que son modèle de financement seront deux des éléments du projet de loi Sports et société. Dans un tweet rédigé hier, Roxana Maracineanu indiquait qu’elle avait « entendu [les] préconisations [du mouvement sportif, des collectivités et du monde économique] »  et qu’elle « poursuivrait les échanges pour bâtir un nouveau modèle plus performant ». La présentation du projet de loi pourrait avoir lieu au cours du premier trimestre 2019.
Ludovic Galtier
Télécharger le rapport « Nouvelle gouvernance du sport ».

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