Maire-info
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Édition du vendredi 4 mars 2022
Social

Aide à domicile : l'UNA interpelle les candidats à la présidentielle

Les services d'aide à domicile entrent dans la campagne de la présidentielle en posant sur la table 22 propositions pour le droit à l'autonomie pour tous. Autant d'alertes pour sortir l'aide à domicile de l'ornière. Difficultés budgétaires, pénurie de personnel, des prestations en-deçà des besoins, à la limite de la maltraitance des usagers et des salariés. Sombre tableau.

Par Emmanuelle Stroesser

L'Union nationale de l'aide, des soins et des services aux domiciles (UNA) ne va pas organiser de « grand oral »  des candidats à la présidentielle. Mais elle les invite « à venir s’immerger une journée dans nos structures, voir la réalité, comment travaillent nos professionnelles », lance Marie-Reine Tillon, présidente de l'UNA. 

Chiche !

Concrètement il s'agit de leur faire « comprendre notre difficulté et la nécessité de mettre vraiment l’accent sur le domicile, qu’on arrête de parler du virage domiciliaire, mais qu’on agisse ! », tempête la présidente. Les candidats repartiront aussi avec le plaidoyer de « 22 propositions concrètes pour le droit à l'autonomie pour tous » , rendu public ce jeudi 3 mars. 

« Il faut garantir des services de qualité, donc structurer la filière, l’aider à recruter et avoir des financements qui permettent de tenir tous les engagements. Il faut aussi en finir avec les iniquités criantes d’un département à l’autre. Le traitement des personnes n'est pas le même du fait de ces politiques fluctuantes. Là encore il faut se donner les moyens sur la base d’un cadre national », résume Marie-Reine Tillon. 

Le témoignage de ce qui ne tourne plus rond

Le témoignage de Jocelyne Laboure, directrice de deux structures associatives d’aide et d'accompagnement de soins à domicile dans les départements de la Loire et de la Haute-Loire, illustre ces difficultés. Le modèle économique « à bout de souffle » , « nous oblige à des pirouettes, en opposition avec notre coeur de métier qui devrait placer l’usager au centre », explique-t-elle. Elle brocarde, notamment, l'écart entre le tarif facturé aux usagers – « notre prix de vente »  – , fixé par les conseils départementaux, « inférieur à notre prix de revient ! » . Le tarif est différent entre la Loire et la Haute-Loire, ce qui aboutit à ce qu'un usager « ne paye pas même chose pour une prestation identique ! » 

Surtout, ce tarif est insuffisant. « Nous avons besoin de temps de formation, de coordination, d’accompagnement des salariés qui n’existent pas ou sont réduits au minimum car ils ne sont pas intégrés dans ce prix de revient ! », reprend la directrice. L'UNA milite notamment pour rénover les missions et compétences des services (pour une offre élargie), et « prendre le virage de la prévention ».

Des services et des salariés en mal de reconnaissance

Une autre demande récurrente porte sur l'attractivité des métiers. La revalorisation salariale obtenue grâce à l'avenant 43, « a été une réelle avancée » , « mais ce n’est que le rattrapage de douze années pendant lesquelles les salaires ont été bloqués », nuance l'UNA. Les services ne sont par ailleurs toujours pas tous assurés de recevoir les financements ad hoc des départements. Marie-Reine Tillon épingle les Yvelines ou les Hauts-de-Seine, « qui refusent de financer l'avenant 43 alors que les structures sont obligées de l’appliquer. Résultat, nous recevons des appels aux secours de structures étranglées ! ». 

Cette attractivité passe aussi « par l'amélioration des conditions de travail et de prévention des risques », pointe l'UNA, ce qui « ramène à l’aspect budgétaire » . « Une responsable de secteur a chez nous environ 60 salariés et 450 clients, comment voulez vous avoir le temps de travailler à bien s’occuper de nos salariés et usagers ? », explique la directrice. 

Le prix à payer

L'UNA estime à 32,17 euros le coût moyen du service d'aide à domicile « de demain » , soit 8 euros de plus par heure d'intervention qu'aujourd'hui. Dans certains départements, des tarifs tendent vers 27 euros, quand d'autres traînent encore à 19 euros… « Certains voudraient nous faire croire que le tarif socle fixé à 22 euros est une panacée. Mais je rappelle que l'Insee place le coût horaire moyen d’un salarié en France à 35 euros » , justifie Marie-Reine Tillon. Elle dénonce également la pratique du « fractionnement des heures d’intervention »  imposée par certains départements et qui entraine « de la maltraitance pour les personnes aidées et salariés » . Le terme de maltraitante fait écho à l'actualité autour du scandale de la gestion par Orpea de maisons de retraite (lire Maire info du 31 janvier). Le groupe privé intervient aussi à domicile, « c'est pourquoi nous demandons l’obligation de la généralisation de la tarification » , plaide Marie-Reine Tillon. 

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