Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du vendredi 24 septembre 2021
Sécurité

Adoption du texte sur la sécurité intérieure en première lecture à l'Assemblée nationale

Les députés ont tenu le calendrier prévu en adoptant, hier, en première lecture, le projet de loi Responsabilité pénale et sécurité intérieure. Peu de changements ont été adoptés par rapport au texte de la commission pour ce qui concerne les collectivités. La majorité a notamment rejeté l'idée d'un durcissement des peines pour les agressions contre les élus.

Par Franck Lemarc

Une grande partie de ce texte (comme le détaillait Maire info dans son édition de mercredi) concerne la responsabilité pénale, notamment la question de savoir si une personne qui a commis un crime ou un délit sous l’emprise de la drogue doit être considérée comme pénalement responsable. Les députés ont suivi le gouvernement pour répondre « oui »  à cette question, en modifiant le Code pénal pour y introduire l’idée d’une responsabilité pénale pour les personnes ayant, par exemple, consommé de la drogue « dans le dessein de commettre une infraction ou d’en faciliter la commission ». A aussi été introduite l’idée d’une responsabilité pénale si une personne a commis un homicide après avoir consommé de la drogue « en ayant connaissance du fait que cette consommation est susceptible de la conduire à mettre délibérément autrui en danger ». 

Atteintes contre les élus

Le titre II du projet de loi concerne la répression des atteintes commises contre les forces de sécurité. Il y est inscrit que des peines alourdies seront prévues pour les atteintes commises contre les militaires, gendarmes, policiers nationaux et municipaux, douaniers, gardiens de prison… Un amendement en séance a été adopté, qui ajoute à cette liste les atteintes contre les garde-champêtres.

En revanche, plusieurs amendements demandant que les atteintes contre les élus soient également plus durement punies ont été rejetés, après un débat assez fourni. 

Les défenseurs de cette mesure, dont Philippe Gosselin (LR, Manche), estiment, comme l’a expliqué ce dernier, que « les maires et les élus locaux figurent parmi les autorités qui doivent être protégées », et que « les agressions dont ils sont victimes doivent relever d’un délit spécifique ». Il a d’ailleurs rappelé que les maires et les adjoints sont officiers ou agents de police judiciaire, et qu’ils relèvent donc, de ce fait, du champ prévu par ce projet de loi. Dimitri Houbron (Nord) pour le groupe Agir ensemble, a défendu la même idée, jugeant « absolument indispensable de protéger ceux qui représentent l’autorité publique localement », au même titre que les policiers municipaux et les gardes-champêtres. 

Le ministre de la Justice, Éric Dupond-Moretti, a longuement répondu pour expliquer sa position et son rejet de cette disposition. Il a rappelé avoir lui-même pris, il y a un an, une circulaire pour exiger des procureurs de ne plus user du simple rappel à la loi en cas d’agression d’un élu. Niant donc toute « désinvolture à l’encontre des élus », le garde des Sceaux ne souhaite néanmoins pas que la mesure de durcissement des peines s’applique aux agressions contre ceux-ci : « Le projet de loi répond à la demande des forces de sécurité intérieures, qui souhaitent qu’une infraction spécifique soit prévue pour les violences qu’elles subissent ». Y ajouter les élus affaiblirait, pour le ministre, « la portée hautement symbolique »  de la mesure. Il a ajouté que cette mesure vise à « protéger ceux qui sont plus particulièrement au contact ».

Cette dernière remarque a, forcément, fait grincer des dents dans l’hémicycle. « Dans les villes et les villages, les maires sont bel et bien au contact (…) et sont en première ligne », a noté Emmanuelle Ménard (Hérault). « Pour avoir été maire pendant 22 ans, je peux vous assurer que l’on est au contact quotidiennement », a renchéri Philippe Gosselin. 

D’autres députés de l’opposition ont plaidé contre cet amendement, comme Marie-George Buffet (PCF, Seine-Saint-Denis), qui a estimé « qu’on ne peut pas amalgamer les forces de l’ordre, fonctionnaires qui ont pour métier de nous protéger, avec des élus qui ont choisi d’être élus mais dont ce n’est pas le métier. (...) Certains de nos concitoyens ne sont pas d’accord avec nous ; ils l’expriment parfois avec colère, mais ce n’est pas comparable avec l’agression d’un policier, d’un gendarme ou d’un pompier », a estimé l’ancienne ministre de Lionel Jospin.

Les amendements à ce sujet ont donc été rejetés, tout comme celui qui visait à intégrer dans la même liste les agents de surveillance de la voie publique (ASVP).

Les autres dispositions

Le reste du projet de loi adopté contient notamment un durcissement des mesures permettant de lutter contre les rodéos urbains, en permettant, par exemple, la confiscation systématique du véhicule qui a servi à commettre le délit, sauf s’il appartient à un autre propriétaire qui est en mesure de prouver sa bonne foi. 

Il encadre également beaucoup plus précisément la possibilité de procéder à la vidéosurveillance des cellules de garde à vue et l’usage de drones par les forces de sécurité (police et gendarmerie nationales) en particulier lors des manifestations. L’amendement porté par l’AMF proposant que les drones puissent également être utilisés par les polices municipales et les gardes champêtres pour veiller au respect des arrêtés de police du maire et lutter contre les atteintes à l'environnement n’a finalement pas été débattu. Il reviendra certainement lors du débat au Sénat.

Enfin, le texte autorise la mise en place de caméras embarquées dans les véhicules des forces de sécurité (police et gendarmerie nationales, agents des douanes, sapeurs-pompiers professionnels et volontaires, militaires…). Les véhicules des policiers municipaux ne sont pas concernés. Un amendement demandant le contraire (« On pourrait légitimement ajouter à la liste les policiers municipaux, (…) ce serait, pour eux aussi, un moyen de sécuriser leurs interventions », a plaidé Emmanuelle Ménard) a été rejeté sans débat.

Le texte a été transmis au Sénat, où il sera examiné à partir du 18 octobre.

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