Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux
Édition du mardi 6 novembre 2018
Numérique

Au colloque de l'Avicca, les collectivités attendent l'État et les opérateurs au tournant

C’est en faisant le constat « d’une musique plutôt agréable à entendre »  que le sénateur Patrick Chaize a ouvert, hier à l'Institut Pasteur à Paris, le « Trip d’automne »  de l’Association des villes et des collectivités pour les communications électroniques et l’audiovisuel (Avicca). « Le refrain du moment est : ‘’Ne vous inquiétez pas, les engagements [pris par les opérateurs] qui ne seront pas respectés seront impitoyablement sanctionnés’’ », a répété à la tribune le président de l’Avicca, en préambule de deux tables rondes, l'une sur le déploiement de la fibre optique, l'autre sur le New Deal Mobile.
Mais les faits, « têtus », lui ont appris à se méfier. Sept ans après sa création dans le cadre du Plan France Très Haut Débit (investissement de 20 milliards d’euros en dix ans, dont 3,3 milliards d’euros de l’État), « l’ensemble de la zone Amii [Appel à manifestation d’intention d’investissement, ndlr], sans exception, est en retard », déchante le sénateur de l’Ain. Et ce alors que les réseaux d’initiative publique (RIP) sont les principaux responsables de l’accélération du déploiement de la fibre FTTH et représentent 1,5 million de prises raccordables, selon l’Observatoire des RIP.
« Dans ce contexte, comment comprendre la démarche à contrecourant de l’État avec les Amel [Appels à manifestation d’engagements locaux] ? », s’interroge-t-il (lire Maire info du 26 octobre). Ces derniers, annoncés par Édouard Philippe en décembre 2017, ont pour objectif « d’inviter les opérateurs à déployer les réseaux »  dans les territoires ruraux afin d’accélérer la couverture numérique et de réduire les coûts pour les collectivités et par conséquent l’État. « Ma plus grande crainte, c’est la perte de contrôle de la collectivité sur l’aménagement numérique de son territoire au regard des Amel qui seront conclus », a encore alerté le sénateur.
 
« Une période d’incertitude » 
En réponse à ces inquiétudes, Régis Baudoin, directeur de la Mission France Très Haut Débit, a préféré parler hier de « processus de coopération »  entre les acteurs publics et les acteurs privés plutôt que de « processus de concurrence ». Contrairement à l’Avicca et à bon nombre d'élus qui se sont succédé à la tribune, il se montre « assez confiant »  quant à la tenue des délais dans les zones Amii (1) qui devront être éligibles au FTTH à fin 2020, mais aussi pour les RIP : « 75% de la zone RIP sera couverte en FTTH en 2022 ».
Au-delà des Amel, qui pourraient ne concerner in fine que quatre départements, Régis Baudoin, « conscient de la période d’incertitude qui s’est ouverte », se laisse jusqu’en avril 2019 pour « caractériser le montant du reste à faire »  (3 à 3,5 millions de prises). À ce moment-là seulement, l’État proposera « un mode d’intervention complémentaire »  et annoncera ou pas la réouverture du guichet du Fonds pour la société numérique (FSN), « suspendu »  depuis près d’un an au grand dam de l’Avicca.

L’Atlas, source d’incompréhension
Les élus se sont aussi fait entendre sur le volet mobile. La seconde table ronde, consacrée au New Deal Mobile, a ainsi donné lieu à un échange franc et direct entre Didier Casas, président de la Fédération française des télécoms (FFT), et un élu de la Mayenne. Ce dernier reprochant au premier le caractère « peu pertinent »  et « trop éloigné de la réalité quand il s'agit de la mesure de la couverture »  de l’Atlas. Ce document configuré par les opérateurs, « recense 2063 zones du territoire national jugées prioritaires en vue d’intégrer le dispositif de couverture ciblée (l’un des objectifs du New Deal Mobile) ».
Pour couper court à la polémique, Didier Casas a insisté : « Cet Atlas, les collectivités locales ont la liberté de s’en émanciper. C’est une proposition qui leur est faite : la collectivité décide et nous ferons. »  Ne pas se conformer à l’Atlas implique toutefois certaines difficultés : « Si vous souhaitez que les choses aillent le plus vite possible, il est opportun de choisir les zones situées dans l’Atlas », reconnaît Didier Casas. Au nom de l’AMF, Michel Sauvade, maire de Marsac-en-Livradois (Puy-de-Dôme), a invité ses homologues à « ne pas accorder à cet Atlas plus d’importance qu’il n’en a ».
485 sites prioritaires (« zones blanches » ) ont déjà été identifiés dans ce dispositif de couverture ciblée au mois de juillet, a rappelé Zacharia Alahyane, directeur de la Mission France Mobile. Les 115 suivants – ce qui portera à 600 le nombre de sites prioritaires en 2018 – seront annoncés « dans les prochains jours ». Les équipes projets, composées notamment de réprésentants des collectivités territoriales, travaillent maintenant à l’identification des 700 zones qui seront prioritaires en 2019.
À Paris, Ludovic Galtier
 
*Une zone Amii est une partie du territoire dans laquelle un ou plusieurs opérateurs privés ont manifesté leur intérêt pour déployer un réseau en fibre optique FTTH.

Télécharger « FTTH : quel est l’investisseur le plus efficace ? ».
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