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Édition du vendredi 21 janvier 2022
Sécurité

Loi sur la sécurité intérieure : le Conseil constitutionnel invalide l'utilisation de drones par les polices municipales 

Cette expérimentation aurait permis aux policiers municipaux d'assurer notamment « la sécurité des manifestations sportives, récréatives ou culturelles ». Les Sages ont, en dehors de ce cas, validé l'essentiel des mesures encadrant l'usage des drones par les forces de l'ordre.

Par A.W.

Les policiers municipaux ne pourront toujours pas recourir aux drones. Dans une décision rendue hier, le Conseil constitutionnel a, à nouveau, jugé que cette mesure introduite dans la loi sur la responsabilité pénale et la sécurité intérieure restait non conforme à la Constitution. Il a ainsi donné raison aux sénateurs et députés qu’ils l’avaient saisi dans la foulée de l’adoption de cette loi en décembre dernier.

Déjà une première censure l’an passé

Les décisions se suivent et se ressemblent donc pour le gouvernement. En effet, celle-ci fait suite à une première censure, au printemps dernier, de la part des Sages de la rue de Montpensier, dans le cadre de la loi de Sécurité globale. 

Le gouvernement avait pourtant revu sa copie en réintroduisant plusieurs mesures controversées de ce texte et pensait, cette fois, avoir donné toutes les assurances nécessaires pour garantir « le droit au respect de la vie privée ». Des garanties jugées insuffisantes en mai 2021.

Pour rappel, lors de l’examen du projet de loi sur la sécurité intérieure, à l’automne dernier, ce sont les sénateurs qui avaient à nouveau introduit dans le texte, à la demande de l'AMF, la possibilité pour les polices municipales d’utiliser les drones, mais à titre expérimental, pour cinq ans, et sous conditions. 

Encadrée par les préfets, cette mesure devait ainsi permettre à ces dernières de recourir à ce dispositif dans des cas précis : afin d’assurer « la régulation des flux de transport », « les mesures d’assistance et de secours aux personnes », mais aussi « la sécurité des manifestations sportives, récréatives ou culturelles ». 

L’utilisation par les gardes-champêtres ainsi que l’extension de cette expérimentation à la surveillance des espaces naturels, du respect des règles d’urbanisme et de dépôts sauvages avaient d’ailleurs été écartées par le Sénat.

Le droit à la vie privée toujours pas respecté

Ces adaptions adoptées par les parlementaires n’ont donc pas suffi à convaincre les Sages qui ont retoqué l'usage des drones pour les polices municipales, en toutes circonstances. Ceux-ci ont pointé trois critiques.

D’abord, pour ce qui est de l’utilisation des drones lors de manifestations, ils reprochent à cette expérimentation de ne pas être « limit[ée] aux manifestations particulièrement exposées à des risques de troubles graves à l’ordre public ».

Ensuite, bien que le recours aux caméras aéroportées ne puisse se faire qu’après autorisation du préfet, ils relèvent qu’il n’a pas été prévu que ce dernier « puisse y mettre fin à tout moment, dès lors qu’il constate que les conditions ayant justifié sa délivrance ne sont plus réunies ».

Enfin, ils rappellent que, en cas d’urgence résultant d’ « une exposition particulière et imprévisible à un risque d’atteinte caractérisée aux personnes ou aux biens », les polices municipales auraient pu « recourir immédiatement à ces dispositifs aéroportés, pour une durée pouvant atteindre quatre heures et à la seule condition d’en avoir préalablement informé le préfet ». De ce fait, la définition trop large de ces cas d’urgence n'aurait pas permis de réserver le recours aux drones « à des cas précis et d’une particulière gravité ».

Au regard de ces manquements, le Conseil constitutionnel a donc estimé que « ces dispositions n’assurent pas une conciliation équilibrée »  entre le droit au respect de la vie privée et la prévention des atteintes à l’ordre public.

Davantage de garde-fous

Concernant les policiers nationaux et les gendarmes, les Sages ont, là aussi, censuré la disposition leur permettant de recourir aux drones, pendant quatre heures, en cas d'urgence sans autorisation préalable du préfet. 

Pour le reste, ils ont estimé que la nouvelle loi a prévu davantage de garde-fous, celle-ci autorisant notamment l'utilisation de drones par les forces de sécurité pour « la prévention des atteintes à la sécurité des personnes et des biens », « la sécurité des rassemblements »  sur la voie publique, « la prévention d’actes de terrorisme », « la régulation des flux de transport », « la surveillance des frontières, en vue de lutter contre leur franchissement irrégulier »  et « le secours aux personnes ». 

« Le législateur a précisément circonscrit les finalités justifiant le recours à ces dispositifs », estime le Conseil constitutionnel dans sa décision et souligne que policiers, gendarmes et douaniers devront « préciser la finalité »  poursuivie et justifier « la nécessité »  de recourir aux drones pour obtenir l'autorisation préalable du préfet. 

Télécharger la décision.
 

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