Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du vendredi 1er février 2019
Logement social

La politique du « Logement d'abord » manque d'ampleur et de portage politique, selon la Fondation Abbé-Pierre

Dans son 24e rapport sur le mal-logement, rendu public ce vendredi 1er février, la Fondation Abbé-Pierre constate des tensions toujours fortes sur l’accès à l’hébergement. Des tensions exacerbées par la crise économique, la pénurie de places, et les flux migratoires.
S’il y a bien « eu des efforts budgétaires sur l’hébergement », le problème est que « ce n’est pas la solution »  explique Manuel Domergue, directeur des études de la Fondation dans une interview accordée à Maire info – ou du moins cela ne peut être la seule : « On ne peut répondre au mal-logement par le seul hébergement d’urgence. La solution vient du logement. »  Or « le ministère du Logement est celui qui a été le plus affecté par les coupes budgétaires ». Une « incohérence »  qui doit être d’autant plus soulignée que le gouvernement a lancé un « plan quinquennal pour le logement d’abord et la lutte contre le sans-abrisme 2018-2022 ».

« Logement d’abord » … mais pas assez
Celui-ci repose sur l’orientation directe des personnes sans domicile vers un logement autonome. La Fondation encourage cette politique qu’elle considère comme « le levier essentiel ». Elle lui consacre un chapitre de son rapport. Le premier constat a la forme d’un regret : cette politique « peine à se mettre en place ». « Quelques initiatives commencent à se mettre en place, mais trop réduites pour changer la donne générale », résume Manuel Domergue.
Le gouvernement a fait appel dans un premier temps à des territoires volontaires. 23 conventions ont été signées – surtout par de grandes métropoles. « Manquent les deux principales, Paris et Marseille », relève Manuel Domergue. Manque aussi un réel coup de pouce malgré les promesses de l’État qui disait « vouloir accélérer les choses sur ces premiers territoires volontaires », rappelle le directeur des études de la fondation. C’est pourquoi cette dernière insiste sur la nécessaire « implication »  des maires et présidents d’EPCI, encore trop peu présents à son goût. Le rapport parle d’application « laborieuse et discrète du plan ». « Nous avons besoin d’une implication forte des élus et plus particulièrement des maires et présidents d’EPCI sur cet objectif ‘’zéro SDF’’, comme un axe structurant à moyen terme », plaide Manuel Domergue.

Clause de revoyure pour les HLM ?
Les efforts sur la production de pensions de famille (1000 places par an), l’augmentation de l’intermédiation locative (de 5 000 à 6 000 nouveaux logements par an), l’attribution de 1 000 à 2 000 logements sociaux ou la production de PLAI (34 000 agréés en 2018) sont « notables ». Mais ils « manquent d’ampleur »  pour la Fondation qui insiste aussi beaucoup sur la nécessité de revenir sur « les coupes subies par les HLM »  (via la réduction du loyer de solidarité et la hausse de TVA), de 800 000 euros en 2018 à 1,5 milliard prévus en 2020. La fondation espère un geste du gouvernement sur ce point, sous forme d’une « clause de revoyure ». Tout le monde écoutera avec attention, à ce sujet, le discours du ministre Julien Denormandie qui doit assister à la manifestation organisée ce matin à la Grande Arche de la Défense, en banlieue parisienne, par la fondation.
« Toutes les études le signalent, et même les agences de notation, le coup va être rude pour les bailleurs sociaux qui vont rogner sur l’investissement et donc à terme sur l’entretien, la rénovation urbaine, etc. »  insiste Manuel Domergue.

Des sorties prévisibles
Ce rapport annuel met également l’accent sur les « sortants d’institutions », de l’Aide sociale à l’enfance, de prison ou de psychiatrie. « Car on a constaté qu’ils étaient sur-représentés parmi le public à la rue », justifie Manuel Domergue. Par exemple, 26 % des personnes sans domicile nées en France sont des « anciens de l’ASE ».
E.S.
Télécharger le rapport annuel de la Fondation Abbé-Pierre.

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