Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du jeudi 23 novembre 2017
Intercommunalité

Intercommunalités et communes : plaidoyer pour « une agilité des territoires »

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© A.Faidy
« Il faut déléguer uniquement à l’intercommunalité ce que les communes ne peuvent pas faire seules, comme parfois l’eau et l’assainissement ou les déchets. Mais pour le reste, il ne faut pas nous obliger à nous regrouper ». Christian Bilhac, maire de Péret, a planté le décor au début du débat « Communes et intercommunalités, moteurs d’une nouvelle dynamique ». Le président de l’Association des maires de l’Hérault, membre du bureau de l'AMF, a aussi tenu à « tordre le cou à l’idée trop répandue des économies d’échelle permises par l’intercommunalité ». Des propos sévères sur une intercommunalité poussée trop loin, partagés par d’autres intervenants. Le ministre de l’Intérieur, Gérard Collomb, a lui-même reconnu « un mouvement à marche forcée ces dernières années avec beaucoup d’intercommunalités XXL et des maires qui ne se sentent plus toujours écoutés ».
Sur le même registre, André Laignel, premier vice-président délégué de l’AMF, continue de défendre l’application du principe de « subsidiarité ». « Tout ce qui peut être fait au niveau de la commune doit le rester », a expliqué le président de la commission intercommunalité de l’AMF. Dans la même veine, Françoise Gatel, sénatrice d’Ille-et-Vilaine et rapporteure de la même commission, a reconnu que « l’intercommunalité est une nécessité mais à condition qu’il ne s’agisse pas d’une OPA sur les communes ». Et de prévenir du danger de « bruxellisation en créant des gros machins loin des vrais décideurs ». D’accord avec ces constats, Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre de l’Intérieur, a insisté sur l’écoute des associations d’élus, en particulier de l’AMF, par le gouvernement. Et de citer l’annonce du Premier ministre, la veille, sur la compétence eau et assainissement qui pourra finalement rester à la commune si les élus le souhaitent, comme pour le PLU intercommunal, ou sur la Gemapi avec le soutien du gouvernement à la proposition de loi « Fesneau », qui sera examinée à l’Assemblée nationale le 30 novembre prochain.
Comme plusieurs autres intervenants, Françoise Gatel a insisté sur « la nécessité d’inventer une démocratie réelle au sein des intercommunalités. Cela est très important pour les élus municipaux ». Pour sa part, Laurent Civel, maire de la commune nouvelle de Rion-des-Landes et président de la communauté de communes du Pays Tarusate, regrette que « les conseils communautaires deviennent trop une simple chambre d’enregistrement. Les décisions se prennent ailleurs ». Selon lui, il faut « mieux faire remonter l’information et la diffuser largement auprès de tous les élus municipaux ». Toujours sur ce sujet, Gérard Larcher, président du Sénat, a annoncé, en ouverture du débat, le lancement prochain d’une mission de la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales sur la place et le rôle des élus municipaux dans la gouvernance de l’intercommunalité.
Le débat s’est aussi focalisé sur le mode de scrutin des métropoles en 2020. Laurent Hénart, maire de Nancy et vice-président de la métropole, s’est dit, malgré la longue tradition intercommunale de sa ville, « opposé à leur suffrage universel direct car le vrai lien démocratique reste le maire ». « Je partage totalement cette position, a poursuivi André Laignel, car cela signifierait la disparition des communes au sein des métropoles ». Sur ce sujet très sensible du mode de scrutin, le ministre de l’Intérieur a indiqué que le gouvernement n’a pas encore choisi. « Je vais réunir tous les présidents de métropoles pour connaître leur position. Il faudra trouver la bonne solution qui donne toute leur place aux maires ».
Par ailleurs, tous les intervenants se sont retrouvés pour défendre « le principe d’agilité des territoires ». Jacqueline Gourault a ainsi préconisé « le droit à la différenciation », un concept nouveau soumis en ce moment au Conseil d’Etat. Françoise Gatel a insisté quant à elle sur « l’importance d’insuffler plus d’adaptabilité pour pouvoir inventer de bonnes solutions ». « Il faut cesser de tout formater dans notre pays car cela ne marche pas », a-t-elle martelé. Un constat partagé par Gérard Collomb. « Dans une France diverse, la grande révolution sera de ne pas avoir un seul modèle mais de pouvoir créer le sien », a-t-il lancé. « Nous sommes totalement d’accord avec votre message mais la souplesse doit aussi passer par un Etat facilitateur avec des préfets qui ne nous demandent plus d’obtempérer mais nous aident à trouver des solutions », lui a répondu Françoise Gatel. Et le ministre de l’Intérieur de conclure : « C’est exactement la consigne qui a été transmise aux préfets. L’Etat jacobin, c’est fini ! Cette agilité des territoires est nécessaire. Les préfets pourront même déroger à la norme si cela répond mieux aux spécificités du territoire ». En effet, une vraie révolution en perspective !
Philippe Pottiée-Sperry

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