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Édition du vendredi 21 juin 2019
Handicap

Fonds pour l'insertion des personnes handicapées dans la fonction publique : les bonnes et les mauvaises nouvelles

Le FIPHFP (Fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique) a publié hier ses résultats pour 2018. Avec au moins un motif de satisfaction : le taux d’emploi des personnes handicapées dans la fonction publique continue de progresser, et se rapproche lentement du taux légal de 6 %. Mais cette augmentation ne constitue pas seulement une bonne nouvelle : elle impacte gravement les recettes du Fonds. C’est, affirme un récent rapport du Sénat, toute la logique du système qui serait donc à repenser.

Taux d’emploi en hausse constante
Rappelons que le FIPHFP est l’établissement qui, à l’instar de l’Agefiph dans le privé, collecte et redistribue les contributions des employeurs publics de plus de 20 agents qui ne satisfont pas à l’obligation d’emploi de 6 % de travailleurs handicapés. Depuis la semaine dernière, c'est l'ancienne maire de Rosny-sur-Seine et ancienne députée des Yvelines, Françoise Descamps-Crosnier, qui a été élue présidente du comité national du Fonds. 
Entre 2006 – année de création du FIPHFP – et aujourd’hui, le taux d’emploi des personnes handicapées dans la fonction publique a augmenté de façon quasiment continue (hormis entre 2008 et 2009). Il est passé de 3,74 % à 5,61 %. De 2017 à 2018, l’augmentation a été faible (+ 0,12 %) mais bien réelle, avec 10 069 bénéficiaires de l’obligation d’emploi (BOE) de plus.
C’est toujours, et de loin, la fonction publique territoriale qui est la meilleure élève dans ce domaine, avec un taux d’emploi de 6,76 % (106 102 BOE) contre 4,65 % dans la fonction publique de l’État (91 331 BOE) et 5,67 % (53 327 BOE) dans l’hospitalière.
Le taux d’emploi augmente « sur l’ensemble des régions », note le Fonds. Ce sont maintenant 11 régions qui dépassent le taux légal de 6 %. En métropole, seules l’Île-de-France, l'Auvergne-Rhône-Alpes et le Centre-Val-de-Loire sont encore en dessous. Outre-mer, seule la Martinique dépasse le seuil légal. Le taux le plus bas est observé à la Guadeloupe, qui plafonne à 3,06 %.

Diminution des interventions
Les sommes collectées par le Fonds sont utilisées pour financer diverses actions comme l’aménagement des postes de travail et l’accessibilité des locaux professionnels, la formation et l’accompagnement des travailleurs handicapés. 
Parmi les interventions du fonds en augmentation, on trouve notamment celles qui concernent l’accessibilité numérique, dont le montant a doublé en un an. Le Fonds cherche également à mettre l’accent sur l’apprentissage, « véritable tremplin vers l’emploi pérenne ». C'est devenu, en 2018, « le premier poste de dépense du FIPHFP, devant les transports et les aménagements de postes ».
Mais globalement, ces dépenses d’intervention, qui ont crû de façon continue entre 2007 et 2014 – culminant alors à 185 millions d’euros – diminuent régulièrement depuis. Elles sont retombées à 127 millions d’euros en 2018, retrouvant le niveau de 2012.

Des contributions logiquement en baisse
Pour la cinquième année consécutive, le Fonds dépense en intervention plus d’argent qu’il n’en récupère en contributions : l’écart a été en 2018 de 12 millions d’euros (113 millions de contributions reçues, 125 millions de dépenses). C’est à la fois une bonne et une mauvaise nouvelle, et une conséquence mécanique de la logique du système : plus le taux d’emploi augmente, plus le nombre d’employeurs restant sous la barre des 6 % et soumis à la contribution diminue. « L’évolution positive du taux d’emploi impacte durement les recettes du fonds », écrit le FIPHFP.
Cela pose, à terme, la question de l’avenir de la structure. Car si le taux d’emploi augmente et les recettes baissent, les besoins, eux, se font parallèlement de plus en plus importants, puisque plus de travailleurs handicapés nécessitent plus de dépenses d’investissements pour aménager leurs postes ! Cet « effet ciseau »  a conduit, selon le récent rapport établi par les sénateurs Catherine Di Folco et Didier Marie, à l’accumulation entre 2015 et 2018 de quelque 230 millions d’euros de déficit pour l’établissement. Le FIPHFP se voit donc obligé de réduire ses dépenses d’intervention, alors que les besoins sont en hausse.

Une contribution universelle ?
Selon les sénateurs, les récentes mesures prises dans le cadre de la loi Liberté de choisir son avenir professionnel et permettant d’ajuster les recettes du FIPHFP sont « insuffisantes »  et surtout « ne visent qu’à améliorer la situation du Fonds à court terme, sans en modifier le modèle économique ».
Ils proposent donc de repenser entièrement le modèle économique afin d’essayer d’en finir avec l’effet ciseau. Leur proposition s’appuie sur une contribution universelle, versée par tous les employeurs publics indépendamment du taux d’emploi de travailleurs handicapés, et fixée à 0,1 % de la masse salariale. Pour la fonction publique territoriale, cette contribution s’élèverait à 50 millions d’euros. Mais afin de conserver une « logique incitative », les sénateurs proposent un système de bonus-malus : « les employeurs qui ne respectent pas l’obligation d’emploi verraient leur cotisation augmenter », tandis qu’un bonus serait appliqué aux employeurs les plus vertueux en la matière.
Les sénateurs recommandent d’expérimenter ce système, dans un certain nombre de départements volontaires, dès la prochaine loi de finances.
 
Franck Lemarc
Télécharger le rapport d’activité du FIPHFP.
Télécharger le rapport du Sénat.

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