Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux
Édition du mercredi 13 novembre 2019
Intercommunalité

Engagement et proximité : sur l'intercommunalité, l'AMF ferme sur ses positions, le gouvernement prêt à « bouger »

Alors que la commission des lois de l’Assemblée nationale a presque entièrement supprimé les apports du Sénat sur le volet intercommunalité du projet de loi Engagement et proximité, l’AMF et l’AMRF (Association des maires ruraux de France) ont publié hier un communiqué pour exprimer leur déception. Au même moment, lors d’un point presse, le ministre qui porte ce texte, Sébastien Lecornu, se disait prêt à des concessions. 

Marges de liberté
François Baroin le répète depuis plusieurs semaines, il y a deux « points durs »  de ce projet de loi sur lesquels l’AMF n’est pas prête à transiger : la suppression du transfert obligatoire de l’eau et de l’assainissement aux intercommunalités ; et la question des compétences – l’AMF réclame la fin des compétences optionnelles et la diminution des compétences obligatoires pour laisser davantage de « liberté »  aux élus sur les politiques qu’ils veulent assumer. 
Tous ces points avaient été satisfaits par le Sénat, qui avait rétabli le transfert facultatif du transfert de l’eau et de l’assainissement, introduit la notion de transfert de compétences « à la carte »  et supprimé les compétences optionnelles. Or en commission des lois de l’Assemblée nationale, ces trois points ont été balayés (lire Maire info du 8 novembre). 
La réaction de l’AMF et de l’AMRF n’a pas tardé : hier, les deux associations, dans un communiqué commun, ont dénoncé un texte qui « ne correspond plus aux engagements pris devant les élus ». Rappelant la « nécessité de redonner des marges de liberté »  aux élus, les deux associations concluent avec amertume : « Si la seule perspective offerte par le gouvernement et la majorité est surtout de ne rien modifier, les élus pourront considérer que les engagements du président de la République seront restés lettre morte. » 

Ouverture et « lignes rouges » 
Au même moment, le ministre chargé des Collectivités territoriales, Sébastien Lecornu, qui tenait un point presse à son ministère sur l’avancement du projet de loi, a affirmé que le gouvernement était prêt à « bouger »  sur plusieurs points. 
C’est d’abord le directeur de cabinet adjoint du ministre, Martin Guespereau, qui a affirmé que sur la question des compétences « à la carte », la commission des lois n’a supprimé la mesure que « pour la corriger et ressortir en séance une autre rédaction », juridiquement sécurisée. « L’idée de faciliter le découpage des compétences (…) méritait des précisions sur le process, et l’Assemblée est en train de préparer une nouvelle rédaction ». Puis le ministre lui-même est revenu sur la question de la suppression des compétences optionnelles. « Le texte arrive en séance publique épuré de beaucoup de choses. Mais nous bougerons sur les compétences optionnelles. Je ne l’ai jamais dit publiquement, mais je le dis ce matin : la question des compétences optionnelles sera sur la table. »  Pour le ministre, les communautés d’agglomération doivent garder « un niveau d’intégration important », (« sinon il ne fallait pas faire d’agglo » ) ; mais « la question se pose dans les communautés de communes, sujet sur lequel je suis assez ouvert ». Sébastien Lecornu a prévu d’utiliser cette dernière semaine avant l’examen en séance publique pour « écouter les associations d’élus, AMF et AdCF ». 
En revanche, le gouvernement reste inflexible sur l’eau et l’assainissement : « C’est une ligne rouge pour le gouvernement et nous l’assumons », pour des raisons « écologiques ». « Nous sommes dans un pays dans lequel un litre sur quatre d’eau potable part en fuites dans la nature. On a devant nous un mur d’investissements majeur. Il y a des territoires de la République où l’on manquera d’eau potable demain. Nous avons le devoir de garantir un niveau de responsabilité sur cette compétence eau (…) et d’assurer la solidarité entre ceux qui ont de l’eau et ceux qui n’en ont pas. L’intercommunalité est la bonne échelle pour le faire. »  Sébastien Lecornu a défendu le système de « redélégation »  souhaité par le gouvernement, rejetant l’idée qu’il s’agisse d’une « usine à gaz »  et estimant « qu’il faut commencer à imaginer des outils de différentiation ». 

Le nuançage interdit dans les communes de moins de 9000 habitants
Le ministre a profité de ce point presse pour donner quelques informations supplémentaires. Sur le nuançage politique d’office d’abord. Le Sénat avait supprimé cette pratique, mais la commission des lois est revenue sur cette décision. Le cabinet du ministre a été clair hier : cette mesure n’est pas du domaine législatif mais elle est « réglementaire ». Elle fera donc l’objet d’une « instruction du ministre de l’Intérieur », et « dès mars 2020 il n’y aura plus de nuançage d’office dans les communes de moins de 9 000 habitants ». 
Sur la question des indemnités, là aussi le gouvernement et la majorité travaillent « à une mesure de synthèse »  entre la version Sénat et la version commission des lois : « On conservera un barème, mais avec un système de souplesse », a simplement indiqué le ministre. 

Sur la parité enfin, le ministre a confirmé qu'il était favorable à la proposition de la commission des lois d'abaisser à 500 habitants, à partir de 2026, le seuil à partir duquel sont obligatoires les listes paritaires. L'AMF, qui demande depuis longtemps que les seuils soient totalement supprimés, se dit néanmoins ce matin « satisfaite de cette avancée ». . 
Sébastien Lecornu estime qu’il est tout à fait possible que la commission mixte paritaire, qui sera chargée de trouver une synthèse entre les versions Sénat et Assemblée, après le vote du texte au Palais Bourbon, soit conclusive. Il lui paraît « indispensable »  que le texte soit adopté « avant le 1er janvier ».

Franck Lemarc


 

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