Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du lundi 23 mars 2015
Eau et assainissement

Prix de l'eau : des écarts de plus en plus importants entre les villes

Le prix de l'eau dans les grandes villes françaises a augmenté plus vite que l'inflation en quatre ans, selon une étude du magazine 60 millions de consommateurs, qui révèle aussi que les écarts sont très importants et se creusent d'une ville à l'autre.
Dans 85% des 130 villes classées par 60 millions de consommateurs et la fondation France Libertés, les prix ont augmenté en moyenne de 6,3% depuis 2011, pour une inflation de 4%. En moyenne il est passé de 3,34 à 3,55 euros le mètre cube, pour une consommation de 120 mètres cube par an.
Mais ce chiffre révèle des situations très diverses. Evreux cumule la première place des villes où le prix est le plus élevé (5,17 euros le mètre cube) et la plus forte augmentation depuis 2011 (+ 37 %). A l'autre bout du classement, Antibes a enregistré la plus forte baisse (- 56 %) et est la ville où le mètre cube d'eau est le moins cher (1,50 euro), bien en dessous de la moyenne nationale de 3,55 euros pour l'ensemble des 130 grandes villes étudiées.
Les contraintes locales et la stratégie de gestion des communes expliquent ces différences de prix et d'évolution ces dernières années. « Certaines hausses importantes s'expliquent par des rattrapages dans les investissements », notamment dans les canalisations et les systèmes d'assainissement, avance 60 millions de consommateurs.
Dans les régions agricoles ou fortement industrielles, l'eau doit par exemple subir des traitements de dépollution plus complexes. Il faut aussi moderniser des installations parfois anciennes. C'est le cas d'Evreux, qui a réalisé deux investissements importants pour 87 millions d'euros ces dernières années.
Et comme le système français fonctionne sur la règle de « l'eau paye l'eau », toute dépense est directement répercutée sur le prix de l'eau vendue aux consommateurs. Cette répercussion est d'autant plus dure à lisser pour les structures de petites tailles qui comptent peu d'habitants.
En amont de la chaîne, dans certaines régions où les nappes phréatiques sont de moins bonne qualité, l'eau nécessite plus de pré-traitements avant d'être distribuée. Les villes mettent aussi en avant l'augmentation de la TVA sur la partie assainissement, qui est passée de 5,5% à 10% entre 2011 à 2014, explique 60 millions de consommateurs, ou encore les différentes redevances perçues par les agences de l'eau. La part du prix correspondant à ces taxes et redevances a ainsi augmenté de 14,5% entre 2011 et 2014.
Certes, mais cela ne représente qu'un gros tiers de l'augmentation moyenne du prix de l'eau, nuance 60 millions de consommateurs, qui avance d'autres explications. Certaines villes ont pu réduire leur prix en renégociant les contrats passés avec les gestionnaires, notamment dans le cas de délégation de service public. Antibes a ainsi pu obtenir une baisse de 43% simplement en renégociant son contrat avec son délégataire. « Cela prouve qu'il y a encore quelques marges de négociations »  dans ces contrats, souligne le magazine, ajoutant toutefois « qu'il n'y a pas de hausse de prix mauvaise en soi »  et que son combat n'est pas celui « d'une baisse à tout prix ».
Par ailleurs, l'enquête pointe aussi le fait qu'à cause d'une tarification sur la base d'une part fixe (l'abonnement) et une part variable (l'eau effectivement consommée), les petits consommateurs sont parfois très pénalisés, avec un prix du mètre cube qui peut être un euro plus cher.
Face à ces disparités, Emmanuel Poilane, directeur de France Libertés, plaide pour la définition au niveau national « d'un nouveau système du service public de l'eau », regrettant qu'il n'y ait « pas d'ambition pour une péréquation sur le prix de l'eau », comme pour le gaz ou l'électricité, où les tarifs réglementés sont les mêmes pour tous sur l'ensemble du territoire.
Une telle évolution permettrait par ailleurs un meilleur accompagnement des foyers en difficulté, aujourd'hui parfois victimes de coupures d'eau de la part de leur opérateur pour récupérer des impayés. Une pratique pourtant illégale depuis un article de la loi Brottes de 2013, entré en application en 2014. (Afp)

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