Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du mercredi 22 octobre 2008
Culture

Monuments historiques: un rapport du Conseil économique et social et environnemental (CESE) prône une clarification des règles de l'action conjointe de l'État et des collectivités territoriales

Malgré le renforcement, ces dernières décennies, de la volonté de protection du patrimoine monumental, et l’extension de son champ d’intervention, le Conseil économique et social et environnemental (CESE) s’interroge sur «une nouvelle dynamique pour les politiques de conservation du patrimoine monumental». Dans un projet d’avis que doit adopter le CESE ce 22 octobre, l’ancien ministre de la Culture Jean-Jacques Aillagon, rappelle que l’action publique s’est appuyée sur une administration spécialisée et des moyens budgétaires dédiés, complétés par un système d’incitations fiscales. Et, depuis quelques années, «au rythme notamment des lois de décentralisation, les collectivités locales se sont elles aussi impliquées dans la sauvegarde du patrimoine, d’abord d’intérêt local ou régional protégé ou non, puis de monuments historiques classés ou inscrits dont certains appartenaient encore il y a peu à l’État.» Mais, estime le rapporteur, «la pérennité des monuments protégés, inscrits ou classés, n’est pas totalement assurée. Des rapports officiels dénombrent ceux qui sont plus ou moins gravement menacés. Les efforts des pouvoirs publics, en matière de protection comme en termes de moyens financiers affectés, paraissent parfois se relâcher. Il en résulte une perte de confiance des acteurs, renforcée par les craintes de remise en cause des dispositifs fiscaux, et une fragilisation du tissu économique dans le secteur du patrimoine.» Au total, déplore le président de l’établissement public du musée et du domaine national de Versailles, «si l’on considère ces effets négatifs, cumulés à ceux de certaines évolutions caractéristiques de la société française, c’est la culture même du patrimoine qui pourrait bien être menacée.» Le Conseil économique, social et environnemental propose plusieurs axes d’actions. Il s’agit notamment d’«améliorer» l’action des pouvoirs publics en coordonnant mieux les interventions des institutions culturelles, «dont les actions sont foisonnantes mais ne paraissent pas toujours convergentes.» S’il appartient à l’administration centrale du patrimoine et de l’architecture de veiller à cette cohérence ainsi qu’à la mise en valeur des actions conduites, les direction régionales de l’action culturelle (DRAC) doivent «être attentives, dans le même esprit, à celles menées par les collectivités locales, les associations ou les propriétaires privés.» Il propose aussi de «favoriser les synergies», en organisant tous les deux ans des «assises régionales du patrimoine» rassemblant les acteurs publics et privés, dont les régions seraient les organisatrices, et «dont les travaux seraient fédérés tous les cinq ans au sein d’assises nationales.» Le rapporteur se dit aussi «convaincu» que, si l’État joue un rôle historique en matière de patrimoine, «l’avenir de celui-ci relève de la responsabilité conjuguée de tous les degrés d’organisation de la collectivité et, partant, d’une clarification des règles qui président à l’action conjointe de l’État et des collectivités territoriales. La propriété publique des monuments est en effet très hétérogène et mérite d’être revisitée.» Il prend l’exemple de la propriété des cathédrales par l’État, conséquence de la loi de séparation de 1905, et suggère d’élaborer les «critères qui permettraient à l’État de proposer à des collectivités locales de devenir propriétaires de monuments lui appartenant et, inversement, de lui céder la propriété de monuments leur appartenant mais dont la taille et l’importance font qu’ils constituent pour elles une charge disproportionnée.» Il estime que ce double mouvement de transfert permettrait «d’affirmer clairement quel est le cœur du patrimoine à l’égard duquel l’État a des responsabilités fortes et exclusives.» Ce qui nécessiterait une redéfinition du périmètre des monuments appartenant à l’État. Quant au financement, le rapport estime que le rôle moteur des crédits de l’État doit être réaffirmé. «Pour être adapté à l’ampleur des besoins, leur niveau devrait s’établir à environ 400 millions d’euros de crédits de paiement, issus pour partie de la dotation budgétaire et pour partie d’une ressource spéciale renouvelable.» Une contribution d’intérêt général pourrait être instaurée sur les jeux de loterie, fixée par exemple entre 0,5 et 1% du chiffre d’affaires de la Française des Jeux, ce qui pourrait générer entre 45 et 90 millions d’euros. La répartition et l’usage de ces crédits «devraient mieux tenir compte des besoins des collectivités locales, surtout quand le coût des travaux sur leurs monuments dépasse leurs facultés financières.» Le rapport souligne également le besoin de stabilisation de l’outil fiscal existant. Il convient surtout de «veiller à la pérennité du régime de défiscalisation spécifique à ces monuments, dont l’intérêt général est avéré. Le programme dit Malraux devrait être également conservé dans son principe, au moins s’agissant de la stabilité des immeubles, de leur clos et couvert.» Le CESE souhaite pour cela une généralisation du taux de TVA réduit de 5,5% pour les travaux sur les monuments historiques. Enfin, il recommande que soit établie tous les trois ans une liste de cent monuments «d’intérêt national majeur, en mains publiques ou privées.» Les dons consentis en leur faveur par les entreprises bénéficieraient de la réduction d’impôt de 90% accordée actuellement aux achats de «trésors nationaux» pour le compte des collections publiques. Ces dons devraient être affectés exclusivement aux travaux sur les monuments. Pour accéder aux documents du CESE sur le rapport Aillagon, voir lien ci-dessous.

Suivez Maire info sur Twitter : @Maireinfo2