Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux
Édition du mercredi 12 février 2020
Accessibilité

Emmanuel Macron appelle les maires et les candidats aux municipales à créer « la commune inclusive »

À l’issue d’une matinée de travail à l’Élysée, hier, à l’occasion de la 5e Conférence nationale du handicap, le président de la République a prononcé un discours pour donner les objectifs de la seconde partie de son quinquennat en matière de handicap. Il a en particulier souhaité que la question de l’accessibilité soit au cœur de la campagne des élections municipales.

Égalité de traitement sur le territoire
Au cours de cette matinée, un accord tripartite a été signé entre l’État, l’Assemblée des départements de France et les associations, un « accord de confiance et de méthode »  sur la qualité des services délivrés en MDPH (Maisons départementales des personnes handicapées). L’objectif de l’Élysée est clair : gommer les différences de traitement des dossiers qui peuvent exister d’un département à l’autre. « Dans certains départements, il faut huit mois pour avoir l'allocation adulte handicapé, deux mois dans d'autres », a déploré Emmanuel Macron. Grâce à cet accord, « on sera en situation pour qu’au 1er janvier prochain, aucune demande d’allocation adulte handicapé ne soit traitée en plus de trois mois dans aucun endroit du territoire ». L’accord est assorti d’une légère augmentation de moyens : 25 millions d’euros (soit en moyenne 250 000 euros par département) seront alloués chaque année en 2021 et 2022 pour traiter le stock et le flux de dossiers.
Le président a aussi voulu lever une ambiguïté : la création du revenu universel d’activité (RUA) ne mettra pas fin à l’existence de l’allocation adulte handicapé (AAH). Il s’agit, en réalité, d’un peu plus que d’une ambiguïté : depuis des mois, les associations représentatives des personnes handicapées, APF et Unapei en tête, alertent sur le fait que « les ministres comme les conseillers de l’Élysée », comme elles l’écrivent dans un communiqué daté de la semaine dernière, avaient bien en tête la dilution de l’AAH dans le futur RUA. Affirmant « refuser d’être les témoins silencieux de la mort d’un droit acquis de longue date », les associations ont claqué la porte des négociations sur le RUA le 4 février. 
Emmanuel Macron a donc accepté de changer de cap : « Cela n’arrivera pas. L’allocation adulte handicapé demeurera », a-t-il clairement déclaré hier. Il a appelé les associations à revenir « autour de la table », car « il faut prendre en compte la situation [des personnes handicapées] quand on définit le revenu universel d’activité ». 

Plus de départs à l’étranger fin 2021
D’autres annonces ont été faites à l’occasion de ce discours : en septembre prochain, le président souhaite qu’il n’y ait plus « aucun enfant sans solution de scolarisation ». Il s’est engagé à ce que des AESH en nombre suffisant soient « recrutés et formés »  (« il y en aura 66 000 à la fin de l’année » ), et qu’ils bénéficient d’emplois « dignes et correctement payés », c’est-à-dire de 35 heures.
Un numéro unique national va être créé, le 360, pour que « toutes les familles sachent à qui s’adresser ». Ce numéro sera dédié « à l’accompagnement et à l’accès aux droits de l’ensemble des personnes en situation de handicap, adultes et enfants ». Il sera mis en place le 1er janvier 2021.
Autre annonce forte : le président de la République ne veut plus « aucun départ contraint de personnes handicapées vers l’étranger ». Ce sont aujourd’hui quelque « 500 personnes chaque année »  qui quittent le territoire, en général vers la Belgique, faute de trouver en France une place dans une structure dédiée. « Ce n’est pas décent pour une nation comme la nôtre », a martelé le président. « Mille place supplémentaires seront créées d’ici deux ans en plus des 2 500 déjà prévues », pour non seulement faire en sorte qu’il n’y ait plus de départs « d’ici la fin de l’année 2021 »  mais qu’il soit en plus possible de « faire progressivement revenir »  ceux qui ont dû partir. 

Appel aux candidats
Enfin, le chef de l’État a abordé la question de l’inclusion, appelant sur ce terrain à une « mobilisation nationale ». Les personnes en situation de handicap doivent pouvoir mener « une vie digne, une vie libre ». Cela a commencé, par exemple, avec le droit de vote rendu aux majeurs protégés. Cela doit se poursuivre avec une amélioration de l’accès à l’emploi. Emmanuel Macron veut aller plus loin que l’actuelle obligation existant dans la loi : « C’est aujourd’hui notre responsabilité collective si le taux de chômage des personnes en situation de handicap reste deux fois supérieur à la moyenne nationale. » Il a notamment appelé les collectivités territoriales à agir sur les « achats », en effectuant « plus d’achats inclusifs »  et contractualisant davantage avec les Esat et les structures adaptées. 
Il a ensuite lancé « un appel très solennel »  sur la question de l’accessibilité – alors qu’hier était célébré le 15e anniversaire de la loi de 2005. « Je veux ici lancer un appel à tous les candidats [aux élections municipales] et les engager à penser, dans leur programme, la commune inclusive sans laquelle il n'y a pas de société inclusive. »  Il a y compris appelé les électeurs à « juger les candidats à leur capacité à apporter des réponses concrètes, tangibles, réalistes »  sur ce sujet. Il a pointé du doigt l’attitude de « certains »  qui ont « complètement abandonné la chose »  et qui disent « ce n’est pas possible et je ne vais pas dépenser l’argent de la commune là-dessus », et jugé cette attitude « inadmissible ». Il a donc appelé les citoyens à « se saisir du sujet de la commune inclusive et à bousculer tous les candidats pour que les choses se fassent ». Il a au passage reconnu que l’État n’était pas exempt de critiques sur ce sujet, car les bâtiments publics de l’État « ne sont pas au rendez-vous de cette inclusivité ».
Il appelle donc à bâtir « un État exemplaire et des collectivités exemplaires ».  Parce que le combat contre les discriminations liées au handicap, a conclu le chef de l’État, c’est un combat « pour l’égalité et la fraternité, un combat républicain. À chaque fois qu’il est perdu, c’est une petite défaite de la République. » 

Franck Lemarc

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