| Édition du mercredi 3 décembre 2025 |
Élections
Élections municipales : le « Mémento » toujours pas publié, les candidats dans le flou
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Alors que les élections municipales ont lieu dans un peu plus de trois mois, et qu'elles seront marquées par des changements majeurs sur le mode de scrutin pour plus de 20 000 communes, les candidats ne disposent toujours pas des documents d'information essentiels du ministère de l'Intérieur. Un retard qui commence à devenir problématique.Â
« À l’automne. » C’est la seule information que le ministère de l’Intérieur, lors d’un point presse organisé il y a quelques semaines, avait donnée sur le délai de publication du Mémento à l’usage des candidats aux élections municipales. Certes, l’automne se termine le 20 décembre et le ministère est donc toujours dans le calendrier prévu, mais le temps presse : sans ces documents, non seulement les candidats mais même les services des préfectures sont dans le flou sur un bon nombre de sujets.
Un retard de deux mois
Maire info le soulignait hier : nombre de candidats sont déjà en difficulté face aux incertitudes sur l’évolution démographique de leur commune, ignorant à cette heure si celle-ci a franchi, à la hausse ou à la baisse, un seuil qui change les règles. Sur ce sujet, au moins, la réponse devrait arriver rapidement, puisque l’Insee s’est engagé à communiquer aux communes les chiffres authentifiés de population dans la première quinzaine de décembre.
On est en revanche toujours dans l’ignorance de la date de publication de l’indispensable Mémento à l’usage des candidats, publié par le ministère de l’Intérieur avant chaque élection et donnant dans les moindres détails les règles en matière de candidature notamment.
Pour les élections municipales de 2014 et 2020, ce guide avait été publié en octobre, ce qui donne un délai raisonnable pour se préparer. Ce 3 décembre, toujours pas de trace du mémento – les préfectures se contentant d’indiquer qu’elles le mettraient en ligne « dès sa parution ». Pourtant, les délais se resserrent : si le scrutin aura lieu le 15 mars, c’est bien avant que les candidatures devront être enregistrées en préfecture – le début de la période de dépôt des candidatures devrait se situer aux alentours du 10 février. Soit dans deux mois. Certaines préfectures ont d’ailleurs déjà publié l’arrêté fixant la date d’ouverture de cette période de dépôt, au lundi 9 février.
Pourquoi ce retard dans la publication ? C’est en partie la riche actualité législative de l’année 2025, au sujet des élections municipales, qui l’explique. Mais il se dit aussi, dans les préfectures, que la crainte d’une dissolution imminente qui plane depuis le mois de septembre a retardé les choses, les services du ministère ne sachant pas si le calendrier électoral risquait d’être une nouvelle fois bouleversé.
De nouvelles règles… quasiment introuvables dans les Codes
Les candidats ne disposent donc pas, à ce jour, d’un document synthétisant toutes les procédures, alors que la plupart d’entre eux sont activement en train de constituer leur liste. Et cette année, la situation est encore aggravée par une difficulté supplémentaire, que les candidats doivent absolument comprendre : des changements majeurs vont intervenir dans l’organisation du scrutin, dans les communes de moins de 1 000 habitants… mais celles-ci ne figurent ni dans le Code électoral ni dans le Code général des collectivités territoriales (CGCT) en version papier. Elles sont également quasiment introuvables sur Légifrance, sauf à maîtriser sur le bout des doigts les arcanes du site et la possibilité d’accéder aux versions actualisées, ce que la plupart des utilisateurs ne feront pas.
La loi du 21 mai 2025 qui instaure le scrutin de liste paritaire dans les communes de moins de 1 000 habitants a créé de nombreux articles nouveaux destinés à figurer dans le Code électoral et dans le CGCT: modification du mode de scrutin, parité, souplesse accordée dans les communes de moins de 1 000 habitants permettant de constituer des listes comportant jusqu’à deux candidats de moins que l’effectif légal du conseil municipal… Sauf qu’aujourd’hui, aucune de ces mesures nouvelles ne figurent dans les Codes, lorsqu’on les consulte sur Légifrance sans passer par une recherche avancée. Le candidat qui voudrait comprendre les règles et irait aujourd’hui, en toute bonne foi, consulter le Code électoral, trouvera par exemple à l’article L252 : « Les membres des conseils municipaux des communes de moins de 1000 habitants sont élus au scrutin majoritaire. »
L’explication est simple : les règles fixées par la loi du 21 mai 2025 ne sont pas encore en vigueur, puisqu’elles ne s’appliqueront qu’à compter du prochain renouvellement général des conseils municipaux, soit en mars prochain. Il n’est donc pas possible de les intégrer dans le Code électoral, puisque si une élection municipale devait avoir lieu d’ici au mois de mars 2026, dans une commune, elle se ferait selon les « anciennes » règles.
La situation est donc normale, du point de vue légistique, mais elle est susceptible de créer une extrême confusion chez les candidats, qui rend plus urgente encore la parution du Mémento.
Formulaires Cerfa
Un autre retard est dommageable pour les candidats : celui de la publication des formulaires Cerfa d’enregistrement des candidatures. En effet, il n’est pas possible d’utiliser l’ancienne édition du formulaire Cerfa n°14997. Si certaines préfectures ont pu, ces dernières semaines, affirmer le contraire, le site service-public est clair : « Les formulaires Cerfa édités pour les élections municipales de 2020 ne seront pas acceptés lors de votre dépôt de candidature en préfecture. » C’est évident pour les communes de moins de 1 000 habitants, dans lesquelles le mode de scrutin aura changé en mars prochain, mais cela concerne aussi les communes de plus de 1 000 habitants : le ministère de l’Intérieur a annoncé, il y a plusieurs semaines, que le formulaire ne serait pas le même, notamment parce qu’il devrait intégrer une nouvelle demande de déclaration sur l’honneur que le candidat n’est pas sous le coup d’une peine d’inéligibilité (lire Maire info du 7 novembre).
Certes, la publication des nouveaux formulaires Cerfa peut sembler moins urgente que celle des Mémentos, dans la mesure où le dépôt des dossiers de candidature ne se fera qu’en février. Mais dans les plus grandes communes en particulier, où il faut plusieurs dizaines de candidats sur les listes, la constitution des dossiers est une procédure longue, que les candidats ont souvent déjà engagée. Et plus les formulaires seront diffusés tôt, moins les candidats auront à constituer leur dossier dans l’urgence, multipliant ainsi les risques d’erreurs… et de rejet de leur dossier.
Il faut donc espérer que le ministère va publier très vite le Mémento – ou plutôt les Mémentos, puisqu’il y en aura au moins deux (plus et moins de 1 000 habitants). Sans oublier les trois formulaires Cerfa – pour les communes de plus et moins de 1 000 habitants et pour Paris, Lyon et Marseille.
Lors du congrès de l’AMF, le ministère de l’Intérieur a indiqué que les Mémentos étaient à l’étape « de la validation ». Espérons que celle-ci sera très rapide.
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Fiscalité locale
Impôts locaux : le Conseil constitutionnel ouvre la voie aux remboursements de trop-versés par les contribuables
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La juridiction suprême a jugé contraire à la Constitution un dispositif visant à rendre soutenable la révision des valeurs locatives des locaux professionnels. Conséquence, les contribuables lésés peuvent réclamer le remboursement de la CFE et des taxes foncières des dernières années. Ce qui devrait entraîner des conséquences financières pour l'État et les collectivités.
Nouvelle déconvenue pour Bercy. Le Conseil constitutionnel vient de censurer une disposition de la loi de finances pour 2025 qui devait permettait d’atténuer les effets de la réforme des valeurs locatives cadastrales des locaux professionnels.
Une décision importante qui donne la possibilité aux contribuables concernés de contester leur imposition concernant la cotisation foncière des entreprises (CFE) et la taxe foncière afin d’obtenir le remboursement du trop-versé.
Un calcul erroné
Applicable à toutes les affaires non jugées définitivement à cette date, cette décision entraînera ainsi des conséquences sur la CFE des années 2022 à 2025 ainsi que pour la taxe foncière des années 2023, 2024 et 2025.
Pour comprendre cette affaire, il faut revenir une décennie en arrière et à la révision des valeurs locatives (qui permettent de calculer la CFE et la taxe foncière) des locaux professionnels instaurée en 2017. À partir de cette année, les valeurs ont été déterminées sur la base du marché locatif réel, ce qui a conduit à des hausses et des baisses d’imposition, potentiellement importantes, selon les contribuables.
Afin de rendre cette réforme soutenable pour chaque local professionnel et éviter des variations trop importantes, un mécanisme temporaire de « planchonnement » avait été instauré. Il permettait de les modérer en diminuant de moitié l’écart entre l’ancienne valeur locative et la nouvelle.
Le problème est que l’administration fiscale a considéré que ce « planchonnement » devait être celui fixé en 2017 et ainsi rester figé les années suivantes. Ce que le Conseil d’État a rejeté, en 2023, en estimant que la valeur locative révisée doit bien être recalculée chaque année, et non figée au niveau de 2017.
Augmentation pour 2,9 millions de locaux
Craignant le déclenchement de nombreux contentieux, le gouvernement a donc décidé d’intégrer une disposition dans la loi de finances pour 2025 validant les impositions dues au titre des années 2023 et 2024 (et établies dans des conditions jugées illégales par le Conseil d’État) et rendant légal le calcul du « planchonnement » figé en 2017. C’est cette mesure qui a été censurée par le Conseil constitutionnel.
C’est ce que confirme ce dernier en expliquant dans sa décision que, en adoptant la mesure inscrite dans la loi de finances pour 2025, « le législateur a entendu éviter le développement d’un important contentieux susceptible, d’une part, de perturber l’activité de l’administration fiscale et, d’autre part, d’engendrer des risques financiers pour l’État et les collectivités territoriales », notamment du fait de la modification des bases d'imposition.
L’an passé, l’administration fiscale anticipait déjà « un accroissement significatif du nombre de procédures contentieuses » et « des risques budgétaires importants », comme l’expliquait aussi, en octobre 2024, la commission des finances dans son rapport sur le projet de budget pour 2025, en citant l’évaluation préalable de la DGFiP sur la disposition retoquée par les Sages.
En effet, sur les « environ 3,1 millions de locaux » faisant l’objet d’un « planchonnement » communal, ce ne sont pas moins de « 2,9 millions » d’entre eux qui « sont affectés par une augmentation de leur valeur locative ». Autant de propriétaires ou exploitants lésés qui auront donc « intérêt à agir […] pour former une réclamation », constatait le rapporteur du budget de l’époque.
« Instabilité » des ressources des collectivités
Celui-ci estimait ainsi le montant total de la centaine d’affaires contentieuses en cours à ce moment-là à « 38,5 millions d’euros ». En juin 2024, les affaires en cours portaient sur une somme similaire de « 37 millions d’euros au titre des impositions des années 2020 à 2023 », l'AMF soulignant le fait que « ce chiffre est un chiffre a minima » étant donné qu’il ne prend « pas en compte la taxe foncière et la CFE de 2024 et de 2025 » ni les futures réclamations. Ce montant risque donc d’être largement dépassé.
L’an passé, l’administration fiscale n’était, toutefois, « pas encore en mesure de prévoir le montant prévisionnel des dégrèvements correspondant à ces contentieux » qui seraient « à la charge de l’État », indiquait le rapporteur du budget de l’époque, qui estimait que ceux-ci « pourraient représenter une somme très importante ». En outre, ce dernier prévenait que cela pourrait « placer également les collectivités dans une situation d’instabilité quant à la prévisibilité de leurs ressources fiscales ».
Peu importe pour les Sages qui ont estimé qu’« il n’est pas établi que […] le nombre de contestations des impositions assises sur la valeur locative des locaux professionnels emporte un risque de contentieux d’une ampleur telle qu’elle soit susceptible de perturber l’activité de l’administration fiscale ».
De la même manière, « l’existence d’un risque financier important pour les personnes publiques concernées n’est pas établie », assure la juridiction suprême. Dans ce contexte, « aucun motif impérieux d’intérêt général » ne justifiait de déroger à la décision du Conseil d’Etat.
Consulter la décision du Conseil constitutionnel.
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Démographie
La Cour des comptes s'inquiète des conséquences de la baisse de la natalité sur les finances publiques
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La Cour des comptes a publié hier un rapport sur les conséquences des évolutions démographiques sur les finances publiques. Selon les magistrats, faute de mesures forcément impopulaires, le vieillissement de la population devrait brutalement aggraver le déficit public dans les années à venir.
En mai 2025, pour la première fois, il a été constaté que le nombre de décès sur les douze derniers mois a été plus important que le nombre de naissances : la population française, hors immigration, a donc diminué, deux ans plus tôt que les projections l’envisageaient.
Le vieillissement de la population et la diminution de la natalité sont bien documents depuis plusieurs années – même si cette dernière accélère notablement ces dernières années, en particulier parce que le dérèglement climatique et les menaces de guerre dissuadent un nombre croissant de jeunes couples à faire des enfants. Mais c’est sous l’angle spécifique des conséquences de cette situation sur les finances publiques que s’est penchée la Cour des comptes, dans ce rapport rendu public hier.
Effets délétères
Les magistrats financiers font ce constat : le seuil de fécondité, aujourd’hui à 1,62 enfant par femme, plaçant la France « sous le seuil de renouvellement des générations ». Par ailleurs l’arrivée à l’âge de la retraite des « baby-boomers » et l’allongement de l’espérance de vie font grimper de façon mécanique la part des séniors dans la population. Les plus de 65 ans représentent déjà 21,8 % de la population aujourd’hui (contre 16 % en 2005), et elle pourrait grimper à 30 % en 2070 – sur la base des taux de fécondité actuels.
Cette situation a – et aura – de multiples conséquences économiques, avec un poids accru de la part de non-actifs dans la société. Le premier impact, explique la Cour, se fera sentir sur la croissance : diminution de l’offre de travail, baisse de la productivité du fait du vieillissement de la main-d’œuvre, et baisse de la consommation, parce que les séniors épargnent davantage que les plus jeunes.
Le deuxième impact concerne les finances publiques : une moindre population active implique moins de rentrées de cotisations sociales. Les recettes fiscales seront également touchées : en effet, « les différentes tranches d’âge ne contribuent pas de manière identique aux financements publics » et contribuent de façon différenciée aux comptes publics. Les plus jeunes financent « principalement la protection sociale », via le paiement des cotisations salariales, tandis que les retraités « contribuent davantage aux recettes de l’État (impôt sur le revenu) et des collectivités territoriales (taxe foncière) ».
La Cour ne croit pas que l’immigration va constituer un réel « facteur d’ajustement » face à cette « érosion attendue des finances publiques », car la contribution de l’immigration aux finances publiques est, au mieux, « neutre », du fait d’une « intégration incomplète sur le marché du travail ».
Par ailleurs, le pays se dirige vers une « déformation de la structure des dépenses publiques », avec une explosion des dépenses liées à la santé et à la dépendance, tandis que – baisse de la natalité oblige – les dépenses d’éducation et de politique familiale devraient décroître.
Mais tous ces facteurs cumulés risquent d’aboutir à un profond « décalage entre recettes et dépenses » : selon les projections de la Cour des comptes, le ratio « normal » des dépenses publiques pourrait atteindre, en 2070, 60,8 % du PIB, soit ce qu’il était au pire moment de la crise du covid-19.
Des « leviers » impopulaires
Seul point encourageant, selon la Cour des comptes : ces évolutions seront relativement lentes, ce qui laisse le temps à une « adaptation ». À condition, selon les magistrats financiers, que les pouvoirs publics prennent conscience du problème, ce qui semble ne pas être le cas aujourd’hui, estime la Cour, qui déplore « une faible appropriation » de ces enjeux du côté des gouvernements et du législateur.
Le problème est que les solutions (les « leviers ») évoquées par la Cour des comptes ne risquent pas de rencontrer la popularité – ce qui peut expliquer pourquoi les gouvernements ne sont pas trop pressés de s’en saisir. Pêle-mêle, les magistrats évoquent, pour « amortir » les effets du vieillissement et ses conséquences délétères, « la fluidification du marché du travail, l’augmentation du taux d’emploi des personnes âgées, l’amélioration de la productivité, la hausse du temps de travail… ». La Cour évoque même, en filigrane, la possibilité de repousser l’âge de la retraite à 70 ans. Elle juge que la période d’après 60 ans devra, de plus en plus, être reconnue « comme un temps d’activité et de contribution économique ».
En conclusion, les magistrats financiers pointent un certain nombre de lacunes dans le traitement actuel de ces questions par les pouvoirs publics, qui « ne sont pas organisés pour traiter de façon globale la question démographique » et « ne disposent pas d’outils d’observation et de mesure à la hauteur des défis ». La Cour juge nécessaire « un investissement accru dans la statistique publique et la prospective ».
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Aménagement urbain
Un rapport invite à reconsidérer la place du périurbain dans le débat public
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Alors qu'il représente environ 30 % de la population française, le périurbain est « un impensé politique et social ». C'est ce que pointe un rapport rédigé par l'urbaniste Jean-Marc Offner pour le groupe de réflexion Terra Nova. Il invite les élus à mettre en place des « politiques adaptées à ces territoires souvent invisibles mais décisifs ».
Un « entre-deux », « ni ville ni campagne », « un territoire pluriel » « souvent caricaturé comme la "France moche" » : le périurbain fait rarement l’objet de rapports ou d’études et apparaît comme un angle mort de l'aménagement du territoire.
Ces territoires ne se réduisent pas « aux lotissements pavillonnaires, aux ronds-points et aux hypermarchés. On y croise des vaches, aux près ; des camions, entrant et sortant de leur plate-forme logistique ; des commerces dans d’anciennes stations-services ; des parcs à thème ; des jardins partagés ; des sentiers de randonnée ; des zones d’activité en transformation ; le centre sporadiquement animé d’un bourg ; une base de loisirs près d’un lac de carrière ; un village touristique avec son restaurant étoilé… », résume Jean-Marc Offner dans un rapport publié ce jour par Terra Nova. Près d’un tiers des Français vivent d’ailleurs dans ces zones périurbaines.
Pourtant le périurbain « reste largement négligé » alors qu’il peut être appréhendé comme « un levier transversal » pour toutes les politiques publiques locales.
Un espace largement ignoré…
Le périurbain « ne figure dans aucune grande stratégie nationale, n’a pas de reconnaissances juridique ou statistique claires et reste marginal dans les politiques d’équipement ou de transition ». D’un autre côté, l’auteur du rapport observe que c’est cet espace précisément qui a connu « la plus forte croissance démographique au cours des dernières décennies (+ 63 % entre 1968 et 2011) et celui où les aspirations résidentielles (espace, accès à la propriété, nature, autonomie) s’expriment avec le plus de constance ».
L’auteur du rapport dénonce des politiques inadaptées en la matière. Après la crise des gilets jaunes par exemple, la réponse du gouvernement a été « peu en phase avec les problématiques périurbaines contemporaines » : « Un agenda rural chargé de répondre au "sentiment d’abandon ressenti dans les zones les plus éloignées des services publics", surtout destiné à des centres-bourgs et des villages en quête de revitalisation ».
De même, le périurbain souffre d’un manque « de porte-paroles ». « Les maires s’y présentent en tant qu’élus de la ruralité, comme les conseillers départementaux. Du reste, les habitants aussi déclarent habiter la campagne. L’Ile-de-France fait exception, « édiles et administrés acceptant plus souvent le qualificatif de périurbain ».
Enfin, le désamour du périurbain est lié au fait que son modèle d’aménagement est « critiqué pour son impact écologique » car « il concentre des problématiques bien identifiées (dépendance à la voiture, habitat énergivore, éloignement des services) ».
… mais pourtant stratégique
Cependant, et c’est là tout l’enjeu du rapport, le périurbain peut offrir « des leviers puissants de transition ». En effet, le rapport insiste sur la nécessité de faire du périurbain un laboratoire de transformation, en misant sur la densification douce, les mobilités alternatives, la requalification des zones d’activités, la relocalisation des services et la sobriété foncière...
Cette idée rejoint celle déjà mise en avant dans un rapport de 2015 intitulé Requalifier les campagnes urbaines de France : une stratégie pour la gestion des franges et des territoires périurbains et qui avait été remis au gouvernement de Manuel Valls à l’époque. « La requalification des espaces périurbains est une cause d’intérêt national qui s’inscrit nécessairement dans la construction des villes et territoires durables », concluaient ses auteurs.
Ainsi, ces « campagnes périurbaines » sont propices à l’expérimentation (organisation de la mobilité, maîtrise de l’énergie, économie circulaire...) « pour réussir les transitions écologique, sociale et territoriale », soutient Jean-Marc Offner.
Concrètement, le rapport de Terra Nova formule des leviers d’action « répartis par niveau de responsabilité ». L’État par exemple devrait « soutenir la montée en compétence des acteurs locaux » avec une « meilleure structuration des données, une reconnaissance politique et un encouragement à l’expérimentation ». Les départements peuvent de leurs côtés mobiliser leurs CAUE pour accompagner les évolutions – même si, rappelons-le, ils sont pour le moment menacés de disparation (lire Maire info du 13 octobre).
Le rapport indique aussi qu’ « à travers les SCoT, les intercommunalités disposent du document de planification le plus adapté au périurbain » et qu’il faudrait « le renouveler par des outils inédits comme les agendas périurbains et les schémas de mutation des espaces ouverts. Ces démarches doivent être accompagnées par l’Ademe, le Cerema, les fédérations de SCoT et les agences d’urbanisme pour faire émerger une lecture fonctionnelle du territoire (réseaux, temps, usages) plutôt qu’un découpage figé ».
Enfin, pour ce qui concerne le bloc communal, il est clair que « les communes restent des acteurs légitimes, notamment en matière d’urbanisme et de délivrance de permis » et qu’elles « doivent pouvoir peser dans les décisions structurantes (ZAN, EnR, planification foncière) et bénéficier d’un accompagnement renforcé pour transformer leur territoire à l’échelle pertinente ».
Rappelons qu'une loi de simplification du droit de l'urbanisme et du logement a été publiée au Journal officiel du 27 novembre et consacre un droit dérogatoire au service des maires et des porteurs de projet (lire Maire info du 1er décembre).
Consulter le rapport.
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Petite enfance
Un syndicat alerte sur la « pénibilité invisible » des métiers de la petite enfance
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Cinq mille tonnes soulevées, 144 000 changements de couches ou vêtements réalisés et un million d'accroupissements effectués en une carrière : un syndicat alerte mercredi sur la « pénibilité invisible » des métiers de la petite enfance et appelle à reconnaître cette « usure professionnelle ».
« Porter, s'accroupir, se pencher, bercer, ranger, nettoyer : ces gestes répétés des milliers de fois, ne sont pas considérés comme des expositions professionnelles, mais comme une ‘’posture maternelle’’, ce qui contribue à leur banalisation », estime le Syndicat national des professionnels de la petite enfance (SNPPE).
Or « le poids, la fréquence et l’intensité" de ces gestes « usent les corps, fatiguent l’esprit et brisent trop souvent des carrières avant 55 ans », ajoute le syndicat dans un communiqué publié à deux jours de la tenue d'une conférence sur le travail et les retraites à Paris.
Au-delà des 5 000 tonnes soulevées et des 144 000 changes réalisés, le SNPPE fait état de 56 000 heures de travail dans un environnement bruyant ou encore de 300 tonnes de matériel (chaises, tables...) manipulées au cours d'une carrière.
L’exposition répétée à certains de ces gestes « augmente significativement les risques de TMS (troubles musculo-squelettiques, ndlr), de lombalgies, de tendinopathies et d’atteintes articulaires », relève le SNPPE. « Pourtant, cette réalité, documentée par les ergonomes et confirmée par les observations de terrain, n'apparaît dans aucun dispositif officiel de pénibilité. »
Reconnaissance de la pénibilité
Pour le syndicat, ces dispositifs, notamment le C2P - un compte professionnel de prévention qui permet à des salariés exposés à certains facteurs de pénibilité de partir plus tôt à la retraite - ont été conçus pour « des métiers masculinisés (industrie, BTP, logistique) » et "ne prennent en compte que « des charges unitaires lourdes, des postures extrêmes, ou des environnements techniques spécifiques ».
« Les gestes fragmentés et répétés à hauteur d’enfant ne rentrent dans aucun critère du C2P. La pénibilité réelle du secteur — cumulative, continue et fortement féminisée — n'est donc ni mesurée, ni reconnue, ni indemnisée », déplore-t-il.
Face à ce constat, le SNPPE appelle à reconnaître la petite enfance comme « métier à pénibilité élevée », à intégrer les métiers du secteur dans le C2P, à financer des aménagements ergonomiques dans toutes les structures et à déployer un plan de prévention des troubles musculo-squelettiques et des accidents du travail et des maladies professionnelles.
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