Édition du jeudi 27 novembre 2025

Fiscalité locale
Augmentation de la taxe foncière : le gouvernement annonce un report
Le Premier ministre a annoncé hier devant les sénateurs que l'augmentation de la taxe foncière qui devait toucher plus de 7 millions de foyers était reportée à la fin du printemps prochain, et a dit vouloir engager un travail « de long terme » pour réformer le calcul des bases locatives, aujourd'hui totalement « caduques ».  

Un petit tour, et puis s’en va. Dévoilée – par une fuite dans la presse – en plein congrès de l’AMF, la semaine dernière, la nouvelle avait déplu autant aux élus qu’aux contribuables : les bases de calcul de la taxe foncière allaient être recalculées pour plus de 7 millions de foyers, qui devraient, selon les calculs de Bercy, payer quelque 60 euros de taxe foncière supplémentaire par an dès l’an prochain. 

La réforme envisagée

Pour mémoire, plusieurs millions de locaux sont enregistrés par l’administration fiscale comme n’étant pas pourvus des éléments de confort de base – électricité, douche, lavabo, toilettes, etc. Bercy considère, sans doute à juste titre, que, depuis, ces locaux ont été équipés de ces éléments, et « adapte » donc les bases à cette réalité. Chaque « élément de confort »  est traduit en mètres carrés supplémentaires : 4 m² pour le raccordement à l’eau ou la présence d’une douche, 5 m² pour une baignoire, 2 m² pour le raccordement à l’électricité, etc. La superficie du local – et donc sa valeur locative – est ainsi artificiellement augmentée. Conséquence directe : la cotisation de taxe foncière, calculée sur la superficie, s’en trouve augmentée.

Selon les chiffres de Bercy, environ 25 % des maisons et 15 % des appartements auraient été concernés, soit 7,4 millions de locaux, avec une augmentation moyenne de la taxe foncière de 63 euros. Pour les plus petits locaux, l’augmentation aurait pu être bien plus importante : comme l’a calculé le sénateur Mathieu Darnaud, une studio  de 15 m² aurait pu se retrouver « imposé sur 34 m² ». 

466 millions vs 7,6 milliards

Si la nouvelle a particulièrement contrarié les contribuables, elle n’a davantage fait plaisir aux maires, qui savent d’expérience qu’une augmentation de la taxe foncière, même si elle a été à 100 % décidée par l’État, leur est en général reprochée – ce qui n’était pas très heureux à quatre mois des élections municipales. Quant au bénéfice financier pour les communes, il a immédiatement été très relativisé par l’AMF, qui a rappelé que l’arbre ne doit pas cacher la forêt : les recettes supplémentaires attendues étaient, certes, de 466 millions d’euros, mais cette somme représente environ 15 fois moins que les 7,6 milliards d’euros que le gouvernement s’apprête à prendre sur les budgets des collectivités. 

Une approche « commune par commune »

La situation s’est débloquée hier avec la tenue, dans la matinée, d’une réunion entre les associations d’élus et les ministres concernés, lors de laquelle, selon un communiqué publié hier soir par le ministère de l’Aménagement du territoire et de la Décentralisation, les élus ont « rappelé l’importance de poursuivre l’actualisation des valeurs locatives, indispensable pour garantir l’équité fiscale entre les contribuables, (et) ont souhaité mettre en œuvre une approche plus fine, adaptée aux écarts importants entre territoires ». 

Le gouvernement a décidé d’aller dans ce sens et a annoncé un « décalage » du calendrier « au printemps 2026 », afin d’ouvrir « une période de concertation structurée avec les territoires ». 

Interrogé au Sénat hier, lors de la séance de questions au gouvernement, le Premier ministre l’a confirmé : « Il faut changer de méthode à court et à moyen terme. » Pour lui, en la matière, « toute approche nationale est mort-née ». Et de préciser : « Il va falloir revenir à une approche départementale, voire infra-départementale, voire même commune par commune, puisque, quand on regarde la cartographie de cette affaire, on voit bien qu’on est en train de traiter un sujet qui parfois n’a strictement rien à voir d’un département à l’autre – certains départements ne sont presque pas concernés. » 

Le Premier ministre a donc demandé aux ministres concernés de « dilater le calendrier » pour essayer d’aboutir « en mai ou juin ». Ce qui, concrètement, signifie que l’augmentation de la taxe foncière concoctée par Bercy n’entrera pas en vigueur, comme il était initialement prévu, dès 2026.

Bases locatives « caduques »

À plus long terme, le Premier ministre souhaite – il n’est pas le premier – engager une profonde réforme du calcul des bases locatives, élaborées « en 1959 », a-t-il rappelé, et aujourd’hui « caduques ». « Sauf que cela fait 10 ans qu’on dit que c’est caduc et 10 ans qu’on ne réforme pas, parce que c’est épouvantablement technique », a ajouté Sébastien Lecornu. Il propose donc « d’amorcer quelque chose », en veillant à « protéger les élus et leur pouvoir de taux, à la hausse comme à la baisse », au nom de « la liberté locale et de la liberté fiscale ». 

Une déclaration d’intention qui va dans le sens de ce qu’a encore rappelé l’AMF pendant tout son congrès de la semaine dernière, et qui ferait presque oublier que Sébastien Lecornu est membre, depuis 2017, de tous les gouvernements depuis l’accession au pouvoir d’Emmanuel Macron – et qui ont, peut-être encore plus que les précédents, tout fait pour réduire à presque rien la « liberté locale et la liberté de taux » des maires en transformant toujours plus d’impôts locaux en compensations distribuées par l’État. 

Ces déclarations amorcent-elles un vrai changement de cap ? Les discussions qui vont s’ouvrir entre gouvernement et associations d’élus permettront sans doute de le savoir très vite. Mais le fait que le Premier ministre, dans son discours de clôture du congrès de l’AMF, ne soit d’aucune façon revenu sur les ponctions annoncées dans le cadre du projet de loi de finances pour 2026 n’augure rien de bon. 




Aménagement numérique du territoire
Fibre : une proposition de loi pour assurer la péréquation du financement des réseaux
Le traditionnel TRIP de l'Avicca s'est ouvert hier. L'occasion pour le président de l'association, Patrick Chaize, d'annoncer qu'il va déposer une proposition de loi pour créer un fonds de péréquation des réseaux optiques. Le but : favoriser l'égalité entre les collectivités territoriales alors que l'équilibre économique des réseaux d'initiative publique est parfois critique.

Le TRIP d’automne de l’Association des villes et collectivités pour les communications électroniques et l'audiovisuel (Avicca) a réuni hier tous les acteurs du numériques : opérateurs, régulateurs, gouvernement (avec la présence de la ministre Anne le Hénanff) et surtout les collectivités territoriales.

Point d’orgue de ce grand rassemblement : la fragilité du modèle économique de financements des Réseaux d’initiative publique (Rip), portés par les collectivités. Les associations d’élus alertent depuis plusieurs années sur ce sujet sans parvenir pour autant à mettre tous les acteurs autour de la table afin de trouver des solutions à ce problème qui est devenu aujourd’hui pour certains RIP, une urgence vitale.

Selon l’Avicca, ces réseaux couvrent aujourd’hui près de 70 % du territoire et plus de 40 % de la population.

L’alerte avait été aussi lancée en avril dernier dans un rapport de la Cour des comptes. Les magistrats appelaient à renforcer l'appui aux réseaux d'initiative publique sur leur modèle économique (lire Maire info du 7 avril). 

Un financement de l’exploitation qui pénalise certaines collectivités 

« Les collectivités ne peuvent pas être que des pantins utilisés pour répondre aux défaillances du secteur privé, a lancé dans son discours d’ouverture Patrick Chaize, président de l’Avicca. À l’heure des investissements risqués, on a su venir les chercher. Il a fallu investir et s’investir pour réussir ce plan », a-t-il poursuivi. Aujourd’hui, il appelle à ne pas « abandonner (...) les acteurs qui ont assumé leur rôle d’aménageur du territoire ».

En effet, jusqu’ici le déploiement de la fibre était dans une phase de réalisation. « On construisait le numérique », explique le sénateur de l’Ain en conférence de presse. Désormais, « on rentre dans une phase d’exploitation ». C’est ce changement de paradigme qui a mis en lumière les failles d’un système de financement « mal calibré » et qui, de fait, pénalise les réseaux d’initiative publique. Certains Rip sont dans l’incapacité financière d’assurer l’entretien du réseau. 

En cause : « les coûts d’exploitation des réseaux » qui ne sont pas les mêmes d’un territoire à un autre. Concrètement, « les opérateurs commerciaux payent un "péage" pour pouvoir utiliser le réseau et aujourd’hui ils payent le même tarif partout, résume le président de l’Avicca. Mais on se rend compte que ce péage, sur certains territoires, n’est pas suffisant. » Certains réseaux sont en effet plus accidentogènes, par exemple. Les difficultés financières des Rip sont, comme l’a rappelé Laure de la Raudière, présidente de l’Arcep, « de nature diverse » : « Sous-estimation du besoin de subvention, coûts unitaires des travaux plus chers que prévus, souscription aux abonnements fibre plus lente que prévue, coûts d’exploitation plus élevés », etc.

L’enjeu est pourtant partagé par tous : tous les Français doivent pouvoir avoir accès à une connexion au réseau FTTH de qualité et surtout avec un tarif national et non territorial. Il n’est en effet aujourd’hui pas concevable ni souhaitable qu’en fonction des territoires les prix des abonnements varient en fonction des tarifs d’exploitation territoriaux…

Une proposition de loi pour une péréquation  

« Pour que ça fonctionne il faut – comme on sait que le coût d’exploitation est différent sur les territoires – avoir un outil qui récupère la ressource, là où le tarif est trop haut, pour pouvoir venir abonder les territoires où le tarif est trop bas. C’est le principe de la péréquation. C’est de la redistribution », précise Patrick Chaize. 

Ainsi, dès l’ouverture du colloque, il a annoncé qu’il allait déposer « un texte de loi pour garantir, dans un premier temps, la péréquation de l’exploitation de nos réseaux fixes ». La proposition de loi sera débattue au Sénat le 22 janvier prochain lors de la prochaine journée parlementaire du groupe Les Républicains. Patrick Chaize se dit plutôt confiant sur le fait que le gouvernement puisse soutenir ce texte. 

« L’idée de la proposition de loi est de mettre en place "la tringlerie" qui pourra permettre de faire fonctionner demain un fonds de péréquation », explique le sénateur qui s’inspire des systèmes qui existent déjà sur des réseaux péréqués comme l’électricité.

La balle est dans le camp de l’Arcep 

Ce fonds de péréquation ne pourra se constituer sans la détermination d’un tarif moyen de ce coût d’exploitation. Et, justement, le sujet est d’actualité – tous les regards sont tournés vers l’Arcep. Le régulateur a lancé cette année des travaux pour établir les écarts de coûts constatés entre les modèles initiaux et la réalité avant d’envisager d’éventuelles révisions des modèles. L’Avicca demande clairement une révision des lignes directrices tarifaires qui ont été fixées il y a maintenant 10 ans, à l'époque où les coûts réels des Rip étaient très mal connus.

« Notre objectif est toujours – et j’espère que nous y arriverons – de publier d’ici la fin de l’année une modélisation des coûts qui aura vocation à servir de référence dans le cadre des négociations entre les opérateurs et qui renforcera la lisibilité et la prévisibilité du cadre tarifaire », a déclaré Laure de la Raudière. 

Concrètement, cette modélisation doit pouvoir permettre d’arrêter les paramètres qui seront pris en compte pour pouvoir déterminer le coût d’exploitation par territoire… et éventuellement arriver à ce fameux fonds de péréquation proposé par Patrick Chaize. Mais les négociations s’annoncent musclées, notamment avec les opérateurs. 




Santé publique
Budget de la « Sécu » : le texte repart à l'Assemblée, après l'échec des parlementaires à trouver un accord
Députés et sénateurs avaient concocté des copies bien trop différentes du projet de loi pour espérer s'accorder sur un texte commun. Outre le rejet de la suspension de la réforme des retraites, les sénateurs s'opposent à la création d'un réseau France Santé qu'ils considèrent comme une « simple opération d'affichage politique ».

Quelques heures après avoir adopté leur propre version du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2026, les sénateurs n’ont pas réussi, hier soir, à trouver d’accord avec les députés en commission mixte paritaire (CMP). 

L’inverse aurait été surprenant tant les deux chambres du Parlement avaient abouti à des copies totalement opposées de ce texte qui chemine en parallèle du projet de budget de l’État. Notamment sur la suspension de la réforme des retraites, le gel des minima sociaux et des pensions de retraites, mais aussi le potentiel futur réseau France Santé voulu par Sébastien Lecornu. 

Réforme des retraites suspendue, un désaccord majeur

Le projet de budget de la « Sécu » repart donc à l'Assemblée nationale pour une nouvelle lecture, sous la contrainte des délais constitutionnels qui imposent aux deux chambres d’avoir finalisé l’examen du texte d’ici le 12 décembre à minuit. Du côté du projet de budget de l’État (qui a été rejeté par l’Assemblée en première lecture), la date butoir a été fixée au 23 décembre.

La ministre des Comptes publics, Amélie de Montchalin, a dit prendre « acte de l’absence d’accord », jugeant toutefois que « de nombreux points de compromis solides ont été confirmés, offrant une base claire pour avancer lors de la seconde lecture au Parlement ». Dans ces conditions, elle s’est dite « pleinement mobilisée » pour parvenir à « trouver des accords », assurant qu’il « est essentiel qu’un budget aussi crucial pour la vie quotidienne des Français, leur santé, leur protection et nos solidarités puisse être adopté ». 

Pour avoir une chance d’y parvenir, le désaccord portant sur la suspension de la réforme des retraites devra être dénoué rapidement. Alors que les sénateurs s’y sont opposés farouchement pour éviter de « faire peser sur les générations futures le fardeau de l’endettement », cette mesure-clef pour obtenir un budget de la « Sécu » en 2026 est considérée par les députés socialistes comme la condition sine qua non à la non-censure du gouvernement de Sébastien Lecornu. En l’état, elle permettrait notamment aux personnes nées en 1964 de réclamer leur pension, non pas à 63 ans comme prévu, mais à 62 ans et neuf mois.

« Il faut qu'avant le 2 décembre [date du début de l’examen du texte en séance à l’Assemblée] on ait quand même une vision un peu globale de ce que pourrait être le point d'atterrissage », a ainsi arrêté le député PS de l’Essonne Jérôme Guedj, assurant que « c'est l'heure de vérité ».

« Entre le 2 et le 9 décembre, est-ce que l’on a la capacité à avoir une discussion intelligente entre les différents groupes de l’Assemblée nationale ? », s’est-il interrogé en intégrant dans cette discussion la mesure de « suppression de l’année blanche » sur les prestations sociales et les pensions de retraites (à l'exception de celles inférieures à 1 400 euros qui seraient préservées), également retoquée par les sénateurs, ainsi que le « renforcement des moyens pour l’hôpital ». La question de la hausse de la CSG – prélevée spécifiquement sur les revenus du capital et votée à l’Assemblée – pourrait aussi revenir dans le débat.

Le réseau « France Santé » rejeté par le Sénat

On peut également noter que les sénateurs ont très largement rejeté la création d’un réseau « France Santé » chère à Sébastien Lecornu, que l’Assemblée nationale avait pourtant soutenue. 

Un réseau qui reposerait essentiellement sur des structures déjà existantes avec l'objectif de 2 000 maisons France Santé « d'ici l'été 2026 » et 5 000 « d'ici 2027 ». Il serait ainsi constitué de maisons de santé (animées par des médecins libéraux), de centres de santé (où des médecins salariés exercent) voire même de pharmacies qui recevront le label « France Santé », ainsi qu'un forfait d'environ 50 000 euros. Le tout étant évalué à 130 millions d'euros en 2026.

Craignant que ce dispositif « se réduise à une simple opération d’affichage politique », la sénatrice de la Charente-Maritime Corinne Imbert (apparentée LR), à l’origine de l’un des amendements de suppression de cette mesure, a pointé le « coût » de cette disposition qui « ne crée pas de postes de nouveaux médecins », mais rendrait juste « visible des structures ». « Pour quoi et à quoi ça va servir ? », s’est-elle interrogée, estimant que « cela mérite un peu plus de concertation avec l’ensemble des acteurs ».

Sans compter le fait que cette annonce a mis « les acteurs de santé dans un état d’extrême confusion », selon le sénateur de Paris Bernard Jomier (groupe socialistes), qui a jugé plus « sage d’attendre le projet de loi sur la décentralisation » prévu pour l’an prochain. 

Disant « comprendre les critiques », la ministre de la Santé, Stéphanie Rist, a confirmé que « France Santé ne va pas créer de nouveaux médecins comme ça ». Mais, selon elle, il a trois « intérêts » : d’abord, il « va donner de la visibilité » aux maisons, centres ou bus de santé, ensuite les « consolider » via « un financement de 50 000 euros en moyenne » et, enfin, permettre de « créer un début d’accès aux soins […] là où il n’y a rien ». Et cela en « incitant des médecins à venir s’installer » ou en installant « de la téléconsultation » dans une pharmacie par exemple, a-t-elle expliqué.

Appel à la grève des médecins libéraux

Stéphanie Rist a toutefois assuré que le portage de France Santé se ferait « par les départements » et que cet « outil » serait à « disposition des professionnels et des élus ». « On laisse la main aux territoires et aux professionnels », a-t-elle garanti.

Pour rappel, l'obtention du label se ferait sous conditions : présence garantie d'un médecin et d'une infirmière, pas de dépassement, ouverture au moins cinq jours par semaine, etc., avec une promesse de fournir une offre de soins « en 48 heures et à 30 minutes » de chaque Français.

S’il venait à voir le jour, ce réseau pourrait cependant être, à peine créé, l’une des cibles des médecins libéraux. Leurs syndicats représentatifs ont en effet demandé, hier, aux médecins de ne pas « signer les contrats d’engagements France Santé » dans le cadre de leur appel à la grève à partir du 5 janvier, en réaction à plusieurs mesures les visant dans le projet de la « Sécu ».

Les sept syndicats les invitent aussi à « reporter dès aujourd’hui » tous les rendez-vous prévus à partir de cette date.




Violences faites aux femmes
Lutte contre les violences faites aux femmes : un autosatisfecit du gouvernement qui interroge
En Conseil des ministres, hier, le Premier ministre a présenté une communication sur l'action du gouvernement « relative au bilan de l'action du gouvernement s'agissant de la lutte contre les violences faites aux femmes ». S'il reconnaît que « beaucoup reste à faire », le gouvernement semble plutôt satisfait de son action. 

C’était une semaine avant la « communication du gouvernement ». En une seule journée, le 20 novembre, quatre femmes ont été tuées par leur conjoint ou ex-conjoint – à Besançon, Sedan, Libourne et Beaucaire. Le même jour, la Mission interministérielle  pour la protection des femmes (Miprof) annonçait, pour l’année 2024, le chiffre de 107 féminicides – un chiffre en augmentation. 

Des chiffres accablants

Alors que le gouvernement fait état de sa « totale mobilisation » sur ce sujet, et que « l’égalité entre les hommes et les femmes » a été déclarée « Grande cause des deux quinquennats du président de la République », les chiffres sont accablants : qu’il s’agisse des violences physiques, des violences verbales ou des violences sexuelles, les statistiques du ministère de l’Intérieur montrent une augmentation très importante des faits « enregistrés par la police et la gendarmerie » entre 2017 et aujourd’hui. Cela ne signifie pas forcément, toutefois, que le nombre de faits ait augmenté en lui-même – mais que des crimes et délits qui restaient, jusqu’à présent, confinés au cercle familial font désormais, plus fréquemment, l’objet de plaintes. C’est peut-être là le principal progrès réellement quantifiable de ces dernières années : la parole s’est – un peu – libérée. 

Mais les chiffres n’en sont pas moins glaçants : le nombre d’agressions sexuelles ayant fait l’objet d’une plainte a plus que doublé entre 2017 et 2024, passant de 127 000 à 271 800. Tout comme celui des agressions physiques déclarées, passé de 86 000 à 173 000. 

De nouveaux dispositifs ont été mis en œuvre par le gouvernement. Mais ils ne suffisent manifestement pas à endiguer ce phénomène endémique.

190 000 policiers et gendarmes formés

Ce sont ces dispositifs nouveaux qu’ont rappelé, en Conseil des ministres, Sébastien Lecornu et sa ministre chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes et de la Lutte contre les discriminations, Aurore Bergé. 

Le gouvernement a souligné les évolutions législatives intervenues depuis 2017, avec le renforcement des sanctions contre les agresseurs et la modification, toute récente, de la définition pénale du viol. Les services de police et de gendarmerie ont été renforcés sur ces questions avec « la formation de plus de 190 000 policiers et gendarmes à la prise en charge des violences intrafamiliales ». Le nombre de places en hébergement d’urgence a « plus que doublé en moins de 10 ans » et « 30 centres spécialisés » dans la prévention de la récidive ont été ouverts. Par ailleurs, il est désormais possible de déposer une plainte dans certains établissements de santé – « plusieurs milliers » l’ont été en 2025, annonce le gouvernement – et ce dispositif de recueil de plainte sera étendu dans au moins un établissement de santé de chaque département « avant fin 2026 ». 

Des mesures concrètes

D’autres dispositifs, techniques comme financiers, ont été déployés. À ce jour, annonce le gouvernement, « 6 869 téléphones grave danger » et « 650 bracelets antirapprochement » sont actifs. Pour mémoire, le téléphone grave danger est un appareil permettant aux victimes d’alerter les forces de l’ordre par une simple combinaison de touches en cas de danger imminent. Quant au bracelet antirapprochement, il est porté par les auteurs de violence : si ceux-ci s’approchent d’une potentielle victime identifiée, celle-ci est prévenue par le biais d’une alerte sur un boîtier et les forces de l’ordre sont prévenues. Selon le ministère de l’Intérieur, 30 000 déclenchements de bracelets ont été enregistrés en 2024.

Enfin, le gouvernement a rappelé la mise en place de « l’aide universelle d’urgence » (lire Maire info du 27 novembre 2023) , un soutien financier aux femmes contraintes de fuir leur domicile, qui a été versée à « plus de 60 000 personnes » depuis. Et le « Pack nouveau départ », qui vise à « l’accompagnement global des victimes de violence et à enclencher le déblocage rapide de l’ensemble des aides auxquelles elles peuvent prétendre ». 

Plusieurs ministres viennent par ailleurs de signer, mardi 25 novembre, une circulaire visant à faciliter l’hébergement d’urgence des femmes victimes de violence. Maire info reviendra plus en détail sur ce texte dans son édition de demain.

Manque de financements

Si ces nouveaux dispositifs sont salués par les associations de lutte contre les violences faites aux femmes, ils ne constituent pas une panacée et, surtout, ne sont pas toujours accompagnés des moyens humains adéquats. Exemple dramatique : le meurtre d’Inès Mecellem, à Poitiers, en septembre dernier – une jeune femme qui, après une plainte, avait été dotée d’un téléphone grave danger. Elle avait donné l’alerte sur ce téléphone deux jours avant d’être tuée par son ex-mari… mais cette alerte n’avait donné lieu à aucune intervention. 

Quant au bracelet antirapprochement, il a comme principal défaut qu’il ne peut être imposé sans le consentement de l’auteur de violences. Il souffre, par ailleurs, de problèmes techniques – mauvaise connexion au réseau, problèmes de batterie –, ce qui ne paraît pas supportable quand le fonctionnement d’un tel dispositif peut être, au sens propre du terme, une question de vie ou de mort. 

Derrière ces problématiques se cache – comme sur tant d’autres sujets – la question financière. Pour les associations, les moyens financiers déployés par le gouvernement sont très nettement en dessous des besoins, qu’elle chiffrent à plus de 2 milliards d’euros. Un tel budget permettrait de déployer des moyens humains dédiés au traitement des alertes, au suivi des victimes, à la création d’une juridiction dédiée, etc. 

Le budget de la lutte contre les violences faites aux femmes tourne aujourd’hui autour de 200 millions d’euros, soit dix fois moins. 




Catastrophes
Quatre morts, quatre disparus dans un glissement de terrain à Tahiti
Quatre corps ont été extraits des décombres mercredi à Tahiti et quatre personnes sont toujours recherchées après un glissement de terrain qui a enseveli deux maisons, a indiqué à l'AFP la procureure de la République en Polynésie française.

Le glissement de terrain est survenu mercredi 26 novembre à l'aube (mercredi soir à Paris) dans le village d'Afaahiti, dans l'est de l'île de Tahiti, après une semaine de fortes pluies.

« C'est un éboulement de 30 mètres de hauteur. Une première maison a été emportée et elle est allée se caler dans une deuxième maison », a détaillé lors d'un point presse le haut-commissaire de la République en Polynésie française, Alexandre Rochatte. « Vu la configuration du terrain, sa mobilité, rien n'est stable et ça va prendre énormément de temps » pour terminer les opérations de recherche des victimes qui pourraient durer « 48 heures, voire même plus », a-t-il ajouté.

« On a été réveillés, comme par un train juste devant la maison, on est sortis et on a vu qu'une maison était entièrement recouverte par la terre et la boue », a témoigné auprès de l’AFP une habitante du village, Ida Labbeyi.

Deuxième glissement de terrain

Alors que les recherches étaient en cours, elles ont été suspendues plusieurs heures en raison d'un nouveau glissement de terrain qui a failli emporter des membres des secours. Les corps ont été retrouvés après la reprise des opérations de secours, qui vont se poursuivre toute la nuit.

L'éboulement a eu lieu tôt mercredi matin, alors que les habitants dormaient. Les deux maisons touchées, en contrebas d'une colline, ont été totalement ensevelies sous un amas de terre et de roches. « On a deux chantiers et on avance très doucement avec des pelleteuses, des chiens, un radar et une caméra endoscopique, parce qu'à n'importe quel moment, on peut mettre du poids sur de potentielles victimes », a déclaré le Colonel Olivier Lhote, qui commande les opérations de secours. 

Les familles et voisins ont été pris en charge par une cellule psychologique. Vingt-neuf maisons ont été évacuées, selon le haut-commissariat. Quarante pompiers, 30 policiers municipaux, 20 gendarmes et 30 militaires ainsi que le samu et un hélicoptère Dauphin de l'armée sont mobilisés pour des opérations de secours.







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