| Édition du lundi 27 octobre 2025 |
Statut de l'élu
Statut de l'élu : ce que les sénateurs ont modifié dans la proposition de loi
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Adopté mercredi 22 octobre par le Sénat en deuxième lecture, la proposition de loi sur le statut de l'élu local va maintenant repartir à l'Assemblée nationale. Le texte a été assez largement modifié par les sénateurs, qui ont adopté une cinquantaine d'amendements. Tour d'horizon des principales modifications.
La discussion de la semaine dernière, au Sénat, a été largement marquée par les débats sur les conflits d’intérêt et la charte de l’élu local – débats qui se sont finalement terminés de façon plutôt positive pour les associations d’élus (lire Maire info du jeudi 23 octobre). Mais au-delà, de nombreux points du texte ont été modifiés, souvent pour revenir à la version initiale proposée par le Sénat en première lecture.
Mandat et vie professionnelle
Le Sénat a d’abord rétabli le passage à 20 jours du congé électif (congé auquel peuvent, de droit, prétendre tous les candidats notamment à une élection locale, législative ou européenne). Il s’agirait d’une harmonisation du droit, puisque ce congé est actuellement de 20 jours uniquement pour les élections législatives et sénatoriales, les autres scrutins ne donnant droit qu’à 10 jours de congé. Rappelons que ces congés sont sans solde, ce qui limite quelque peu la portée de cette mesure – peu de salariés ayant la possibilité de renoncer à 20 jours de salaire.
Les sénateurs ont également rétabli une disposition visant à prendre en compte la période de suspension du contrat de travail d’un élu local pour exercer son mandat dans le calcul du montant de ses indemnités de licenciement et pour la perception d’avantages légaux ou conventionnels : cette période serait assimilée à du temps de travail effectif, dans la limite de deux mandats. Ils ont par ailleurs supprimé l’abattement fiscal décidé à l’Assemblée nationale pour les élus locaux commerçants ou artisans indépendants, estimant cette mesure « inapplicable en droit comme en pratique ».
Ils ont, en revanche, rétabli l’extension des autorisations d’absence « aux missions effectuées par les élus municipaux dans le cadre d’un mandat spécial ».
Une autre disposition a été supprimée : celle visant à faire prendre en charge par une commune les frais de déplacement des élus communautaires en situation de handicap, lorsque la réunion se tient sur son territoire, a été supprimée. Les frais resteront supportés par l’EPCI.
Indemnités
Les sénateurs ont supprimé la disposition votée par les députés qui permettait de majorer les indemnités de fonction des maires de communes de plus de 100 000 habitants au-delà de l’enveloppe indemnitaire globale – ce qui a paru problématique aux sénateurs, « dans un contexte budgétaire difficile ». De même, l’obligation de fixer de droit les indemnités au maximum légal pour tous les adjoints et les vice-présidents d’EPCI à fiscalité propre a été supprimée.
Autre amendement intéressant, par son objet même : les sénateurs ont supprimé une disposition exigeant que le gouvernement élabore d’ici l’été prochain un rapport sur « les coûts pesant sur les communes liés aux attributions exercées par les maires au nom de l’État », afin d’étudier l’opportunité d’une indemnisation par l’État de ces coûts. Les sénateurs n’ont pas supprimé ce rapport parce qu’ils sont contre une telle indemnisation, bien au contraire : ils estiment que l’élaboration de ce rapport ralentirait la mise en œuvre de cette mesure, et souhaitent qu’elle soit intégrée dans le projet de loi de finances pour 2026. Rappelons que cette indemnité a été promise par le Premier ministre, Sébastien Lecornu, dès sa prise de fonction (lire Maire info du 18 septembre).
Formation
Pour ce qui concerne le droit à la formation, les sénateurs ont là encore rétabli les dispositions qu’ils avaient votées en première lecture : fixer le congé de formation dont peuvent bénéficier les élus à 24 jours par mandat (maximum), au lieu de 21, arguant que la complexification de l’action publique suppose « des formations plus longues et plus techniques ».
Frais de garde
Aujourd’hui, le remboursement par l’État des frais de garde et d’assistance engagés par les élus lorsque, par exemple, ils participent à des réunions liées à leur mandat, est limité aux seules communes de moins de 3 500 habitants. Le Sénat a rétabli le passage de ce seuil à 10 000 habitants, comme il l’avait fait en première lecture. Les députés avaient supprimé cette extension, sauf pour les communes ultramarines.
Congés maladie
Autre sujet complexe : la poursuite, ou non, de l’exercice du mandat pendant un congé de maladie. À ce jour, le Code de la Sécurité sociale permet certes à un élu de continuer d’exercer son mandat pendant un congé maladie – et de percevoir les indemnités journalières – mais seulement « sous réserve de l’accord formel de leur praticien » au préalable.
Le Sénat a donc choisi de supprimer cette obligation d’accord formel préalable du médecin, et permet donc aux élus de poursuivre l’exercice du mandat pendant une période d'arrêt maladie. Certes, cette disposition permettrait d’éviter les cas passés d’élus s’étant vu demander par l’Assurance maladie de rembourser des montants parfois très importants d’indemnités journalières, au motif qu’ils n’avaient pas reçu « l’accord formel » de leur médecin. Mais la mesure fait débat, au sein même de l’AMF, où certains jugent que cette disposition ne va pas dans le sens de la protection de la santé des élus qui, eu égard aux exigences de leur mandat, ne sont pas toujours les meilleurs juges pour savoir si leur état de santé leur permet, raisonnablement, de continuer à exercer leurs responsabilités.
Protection fonctionnelle
Les sénateurs ont en grande partie récrit l’article 19 de la proposition de loi, relatif à la protection fonctionnelle. En résumé, les sénateurs souhaitent que la protection fonctionnelle soit accordée, de façon automatique, à l’ensemble des membres élus d’une assemblée locale, qu’ils soient titulaires d’un mandat exécutif ou non, membres de la majorité ou de l’opposition. Cette extension de l'octroi automatique de la protection fonctionnelle « est justifiée au regard du risque croissant d’agressions physiques et verbales auquel sont aujourd’hui confrontés l’ensemble des élus locaux », jugent les sénateurs.
Pour ce qui concerne les modifications concernant la charte de l’élu local et la prise illégale d’intérêt, nos lecteurs les retrouveront dans notre édition du 23 octobre.
Il reste maintenant à savoir comment ces modifications seront reçues à l’Assemblée nationale – on ignore à ce jour à quelle date l’examen de ce texte aura lieu. L’enjeu du délai est de plus en plus important à mesure que l’on se rapproche des élections municipales. Pour espérer une promulgation rapide, il faudrait que les députés votent ce texte conforme, c’est-à-dire sans en changer une virgule. Dans le cas contraire, il faudra encore une commission mixte paritaire (CMP) et, dans le pire des cas, si cette CMP n’était pas conclusive, un nouvel examen du texte avec le dernier mot aux députés. Alors qu’un certain nombre de candidats sont déjà en campagne, un tel retard sur la promulgation de ce texte serait fort dommageable.
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Budget de l'état
Budget 2026 : un accord transpartisan se dessine sur le logement alors que les débats s'enlisent dans l'hémicycle
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Des parlementaires du bloc central et d'une partie de la gauche se seraient mis d'accord pour créer un statut fiscal avantageux pour les bailleurs privés, à la condition de réduire la ponction qui frappe les bailleurs sociaux. Le gouvernement, lui, reste toujours sous la menace de la censure.
La création d’un statut du bailleur privé couplée avec la baisse du prélèvement sur les ressources des bailleurs sociaux. Alors que, dans l'hémicycle, les discussions s’enlisent sur le projet de budget sous la menace d’une censure, en coulisses, les tractations redoublent pour tenter de trouver des accords.
Un compromis entre le bloc central et une partie de la gauche aurait ainsi été trouvé pour tenter d’enrayer la profonde crise du logement qui frappe le pays. Un accord donnant-donnant scellé entre « des parlementaires des partis Horizons, MoDem, Liot, Ensemble pour la République [ex-Renaissance], le Parti socialiste, le Parti communiste et Les Écologistes », selon l’AFP.
Bailleurs HLM : diviser par deux la ponction
L’objectif est de défendre plusieurs amendements au projet de budget pour faire face à la baisse du nombre de logements à louer sur le territoire et à la situation du secteur de la construction. Cet accord concernerait ainsi deux mesures au profit, d’un côté, des particuliers propriétaires bailleurs et, de l’autre, du logement social, selon le député socialiste des Pyrénées-Atlantiques Iñaki Echaniz qui a exhorté, vendredi soir, sur X, « Bercy (de) l’entendre » car il est « urgent d’agir ».
Dans le détail, l’élu plaide pour à la fois « relancer l’investissement privé dans la location longue durée et loyers abordables avec le statut du bailleur » et « redonner des moyens aux bailleurs sociaux pour produire et rénover ». Pour cela, il prône une « baisse de la RLS », la réduction de loyers de solidarité, ce prélèvement sur les recettes des bailleurs sociaux mis en place au début du premier mandat d’Emmanuel Macron et qui doit repartir à la hausse en 2026.
Les députés se seraient donc mis d’accord pour abaisser cette ponction à 700 millions d'euros, au lieu des 1,4 milliard d'euros prévus en 2026 (et 1,1 milliard d’euros en 2025), d’après le calcul de l'Union sociale pour l'habitat (USH) cité par l'AFP. La fédération des organismes HLM a déjà jugé « catastrophique » le projet de budget du gouvernement puisque celui-ci prévoit que les bailleurs sociaux devraient aussi faire face, l’an prochain, à une hausse de leur contribution au Fonds national des aides à la pierre (Fnap) et à la fin des aides à la rénovation.
Une incitation fiscale pour les bailleurs privés
Cette baisse de la RLS est ainsi la condition pour voter une mesure souhaitée par l’exécutif : la création d’un véritable statut fiscal du bailleur privé. Une disposition d’autant plus importante pour ce dernier que c’est le seul amendement qu’il a déposé dans le projet de loi de finances (PLF) pour 2026. Une mesure aussi très attendue par le secteur de la construction depuis la fin du dispositif Pinel en 2024, mais qui a déjà été rejetée par les députés en commission.
Disant s’inspirer des recommandations de deux rapports parlementaires récents – celui réalisé par la députée Annaïg Le Meur (Renaissance) et celui des députés et sénateurs Mickaël Cosson (MoDem) et Marc-Philippe Daubresse (LR) – l’exécutif propose ainsi la mise en place d’un avantage fiscal destiné à inciter les particuliers à investir dans un logement pour le louer via une déduction de 2 % du prix d’acquisition, chaque année, sur les revenus fonciers.
Pas satisfaisant aux yeux des députés à l’origine du compromis. Ceux-ci soutiennent plutôt la proposition de l'ancienne ministre du Logement Valérie Létard, complétée de certaines contreparties pour les locataires énoncées par le député de l’Indre François Jolivet (Horizons), qui a déposé son propre amendement sur le sujet.
Finalement, les parlementaires proposeraient donc un amortissement fiscal forfaitaire de 3,5 % par an circonscrit à 80 % de la valeur du logement, plafonné à 10 000 euros par an et dans la limite de deux logements par foyer. En outre, il ne serait possible qu’à la condition de fixer des plafonds de loyer et de ressources pour le locataire.
Un « plan d’urgence » pour le logement
En parallèle, le ministère de la Ville et du Logement a annoncé, dans un communiqué publié vendredi, qu’il allait lancer « dans les prochaines semaines » un « plan d’urgence pour le logement », visant notamment à « redynamiser le parc de logements partout où les besoins sont criants ». Il prévoit également d’« accélérer la rénovation de l’ancien, notamment dans les territoires ruraux et les quartiers prioritaires de la politique de la ville » et de « simplifier les procédures, fluidifier les parcours résidentiels et rétablir un équilibre juste entre bailleurs et locataires ».
« De nouvelles propositions seront également portées pour lutter contre les impayés de loyer et les squats, ou encore pour faciliter l’accès des ménages au crédit immobilier », indique aussi le ministère, sans plus de précisions.
Alors que les débats, qui ont débuté vendredi à l’Assemblée sur le volet recettes du projet de budget 2026, traînent en longueur, le parti socialiste maintient la pression sur le gouvernement et le bloc central autour de la taxe Zucman notamment.
Réitérant sa menace de censure, le premier secrétaire du PS réclame toujours rapidement des concessions sur la justice fiscale. Sans quoi l’exécutif chutera et il n’y aurait pas de budgets pour l’année 2026. « A la fin de cette semaine, nous saurons si nous allons à la dissolution ou pas », a ainsi mis en garde hier matin Olivier Faure, qui tente de pousser son avantage après avoir obtenu l'inscription de la suspension de la réforme des retraites jusqu’en 2028 au sein du projet de financement de la Sécurité sociale (PLFSS).
Un texte dont l'examen débute cette semaine et s'annonce inflammable au regard des économies importantes qu’il contient, mais aussi du choix du gouvernement de faire contribuer les retraités dans le financement de la mesure de suspension de la réforme des retraites.
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Elections municipales
Publicité politique ciblée : les nouvelles règles résumées par la Cnil
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Depuis le 15 octobre 2025, des obligations concernant la transparence et le ciblage de la publicité à caractère politique sont imposées par un nouveau règlement européen. À l'approche des élections municipales, la Cnil publie des fiches pour comprendre ce nouvel encadrement des campagnes numériques.
Sur son site internet, la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil), chargée de la protection des données personnelles en ligne, indique que lors de chaque élection elle « reçoit des centaines de signalements qui révèlent le mécontentement d’électeurs face à certaines pratiques de prospection politique ».
Alors que les citoyens seront appelés aux urnes les 15 et 22 mars prochains pour les élections municipales, la Cnil fait le point sur un certain nombre de règles, notamment sur celles introduites par le « règlement européen relatif à la transparence et au ciblage de la publicité à caractère politique, qui complète le RGPD ».
De l’urgence de réguler la publicité politique ciblée en ligne
En élaborant un nouveau projet de règlement relatif à la transparence et au ciblage de la publicité à caractère politique, la Commission européenne répond à la nécessité de protéger l’intégrité des élections démocratiques qui ont lieu en Europe. Cette problématique de l’utilisation des données personnelles à des fins politiques a été mise en lumière en 2018 avec l’affaire Cambridge Analytica. Pour rappel, plus de 80 millions de personnes aux Etats-Unis ont vu leurs données personnelles volées par la société Cambridge Analytica, « dans le but d’aider Donald Trump à remporter l’élection présidentielle américaine », résume un article du Clemi (Centre pour l'éducation aux médias et pour l'information).
Des ingérences politiques étrangères sont également aujourd’hui régulièrement constatées dans la sphère numérique. Par exemple, selon un groupe de recherches américain intitulé Insikt, une centaine de faux sites d'informations locales a été créé par un réseau d'influence russe dans la perspective des élections municipales de 2026. Ainsi des sites comme Suddouestdirect.fr ou infosdupays.fr ont été créés par des Intelligences artificielles (IA) dans le but, selon une enquête menée par Franceinfo, d'exacerber la fragmentation politique en France.
Pour mettre de l’ordre dans ce far west virtuel, le législateur européen a adopté en 2024 le règlement 2024/900, pleinement applicable depuis le 15 octobre 2025, et qui « vient compléter le RGPD afin d’encadrer l’usage croissant des outils numériques dans la sphère politique », indique la Cnil. « Ce texte introduit de nouvelles obligations relatives à l’utilisation des techniques de ciblage ou de diffusion d’annonces publicitaires impliquant le traitement de données personnelles, dans le contexte de la communication politique en ligne. »
Soulignons au passage que si ce règlement s’applique à tous les niveaux de scrutin – européen, national, régional ou local – ce sont néanmoins les États membres qui régissent le déroulement des campagnes politiques.
Transparence et consentement
Concrètement, ce règlement sur la transparence de la publicité politique (RPP) prévoit des obligations sur l’utilisation de techniques de ciblage et de diffusion de publicités à caractère politique en ligne reposant sur le traitement de données à caractère personnel.
Désormais, pour utiliser des techniques de ciblage comme pourrait le faire un candidat à une élection qui utiliserait « un logiciel pour réaliser un tri en fonction de la zone géographique afin d’envoyer un courriel à des personnes résidant dans une zone où son parti a réalisé de bons scores » par exemple, le consentement explicite de l’utilisateur est obligatoire. Par ailleurs, il n’est pas possible pour le responsable de traitement des données, « lorsqu’il a recours à ces techniques (ciblage ou diffusion d’annonces en ligne) » de relever les données collectées en mairie car les données doivent directement être relevées auprès de l’utilisateur. Concernant les techniques de diffusion d’annonce à caractère politique, les mêmes règles de consentement explicite et de collecte directe s’appliquent. Un candidat à une élection peut par exemple utiliser « une application basée sur un algorithme capable d’identifier des sympathisants potentiels pour envoyer des messages sur un réseau social » mais il doit respecter les règles du RPP.
Au-delà de l’utilisation d’outils pour faire de la communication politique, d’autres règles s’appliquent concernant les fichiers de communication politique, l’utilisation de listes d’électeurs pour les opérations de prospection politique et l’utilisation circonscrite des données sensibles.
La semaine dernière, et dans la perspective des élections municipales de mars prochain, la Cnil a publié six fiches pour aider les acteurs à se mettre en conformité sur les principaux traitements mis en œuvre dans le cadre de la communication politique. En complément de ces fiches, un tableau récapitulatif a été réalisé, présentant ainsi « les mentions que doivent rendre publiques les responsables de traitement et les éditeurs selon le type de publicité politique, conformément au RGPD et au règlement sur la transparence de la publicité politique. » Une très utile FAQ est aussi accessible sur le site de la CNIL dédiée à la question des élections. Maire info reviendra dans une prochaine édition sur les recommandations de la CNIL dans la perspective des éléctions municipales.
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Élections
Vers un répertoire national des personnes inéligibles ?
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Le Sénat va débattre, le 6 novembre prochain, d'une proposition de loi visant à instaurer un « fichier national des personnes inéligibles ». Objectif : empêcher que des élections doivent être annulées du fait de la présence de candidats inéligibles, quelle qu'en soit la raison. Explications.
30 juin 2024 : quelques semaines après que le président de la République a prononcé la dissolution de l’Assemblée nationale, le premier tour des élections législatives anticipées a lieu, après une campagne express lors de laquelle les partis ont dû, en quelques jours, trouver des centaines de candidats. Dans la 2e circonscription du Jura, la députée Marie-Christine Dalloz (LR), recueille 38,59 % des suffrages. En deuxième position, le candidat du RN, Thierry Mosca, obtient 32,76 % des voix. Arrivée troisième, la candidate du Nouveau Front populaire Évelyne Ternant se désiste au profit de Marie-Christine Dalloz, au nom du « front républicain ». La députée sera finalement élue au second tour.
Problème : le candidat du RN, Thierry Mosca, n’avait absolument pas le droit de se présenter à ce scrutin, ayant été placé sous curatelle renforcée par le juge des tutelles le 23 novembre 2023, pour une durée de deux ans. Or le Code électoral est parfaitement clair : les majeurs sous tutelle ou curatelle sont inéligibles, et ne peuvent se présenter à aucune élection.
Quelques mois plus tard, en février 2025, la candidate du NFP obtient du Conseil constitutionnel l’annulation de cette élection, au motif que « la présence irrégulière de M. Mosca au premier tour de scrutin a, compte tenu du nombre de suffrages qu’il a recueillis, affecté de manière déterminante la répartition des suffrages exprimés par les électeurs », et que « cette irrégularité doit être regardée comme ayant porté atteinte à la sincérité du scrutin ».
Recommandation de la Cour des comptes
C’est pour éviter ce type de situation ubuesque que la sénatrice RDSE Sophie Briante Guillemont et plusieurs de ses collègues ont déposé, en septembre, une proposition de loi visant à « créer un fichier national des personnes inéligibles ». En effet, indépendamment même de la question de savoir si le RN a présenté un candidat inéligible en connaissance de cause, c’est bien au niveau de l’enregistrement de la candidature en préfecture qu’une erreur a été commise – les services de la préfecture n’étant pas au courant de l’inéligibilité du candidat.
La Cour des comptes, qui a rendu il y a un an un rapport sur l’organisation des élections, a constaté le problème : le contrôle de l’inéligibilité par les préfectures est, actuellement, sinon impossible du moins très difficile, notamment lors des scrutins qui mobilisent un très grand nombre de candidats (élections municipales) ou qui se déroulent dans des délais très contraints (cas d’une dissolution). La Cour des comptes constatait que « le casier judiciaire national n’est pas équipé pour assurer une transmission automatisée » des bulletins n° 2 du casier judiciaire, où figurent les peines d’inéligibilité, aux préfectures.
La Cour des comptes a donc recommandé, dans ce rapport, que soit créé un « répertoire national des personnes inéligibles », accessibles aux services préfectoraux.
Un fichier limité au strict nécessaire
Cette recommandation prend forme avec la proposition de loi sénatoriale : il est proposé de créer un fichier national recensant les personnes inéligibles aux élections locales, législatives, européennes et présidentielle. Il ne s’agit pas, explique la sénatrice, de répertorier les inéligibilités dites « fonctionnelles » (par exemple celle d’un agent communal qui ne peut être candidat au conseil municipal de la commune qui l’emploie), mais seulement les trois cas suivants : les personnes condamnées à la perte de leur droit d’éligibilité par un tribunal pénal ou administratif ; celles dont l’inéligibilité a été décidée par le Conseil constitutionnel ; et enfin les personnes inéligibles du fait d’une tutelle ou d’une curatelle (majeurs protégés).
Ce fichier ne serait accessible qu’aux services préfectoraux chargés d’enregistrer les déclarations de candidature, et, si besoin, aux tribunaux et au Conseil Constitutionnel. Le fichier ne contiendrait que les données nécessaires : état civil, motif et durée de l’inéligibilité et mandats électifs concernés.
L’Intérieur plutôt favorable
Côté gouvernement, on se montre tout à fait ouvert à cette proposition : le ministère de l’Intérieur avait, dès le rapport de la Cour des comptes, indiqué qu’il était favorable à cette recommandation et avait déjà entamé « des échanges exploratoires » avec le ministère de la Justice pour étudier la faisabilité de ce répertoire. Côté ministère de la Justice, on s’est montré un peu plus circonspect, indiquant qu’une « étude plus approfondie » était nécessaire avant de se prononcer.
Il n'est donc pas exclu que la proposition de la sénatrice Briante Guillemont trouve un écho favorable du gouvernement, lors des débats qui auront lieu le 6 novembre au Sénat. Pendant les débats, la faisabilité d’un tel fichier devra être interrogée – d’abord en regard de son coût, qui ne sera pas neutre. Ensuite, parce que dans le cas des élections municipales notamment – celles qui brassent le plus grand nombre de candidats –, il n’est pas certain que les services préfectoraux aient le temps matériel de consulter le fichier pour chacun des quelque 950 000 candidats qui se présentent en général. Sauf à imaginer une procédure automatisée, ce qui pourrait poser d’autres problèmes.
Quoi qu’il en soit, alors qu’en 2024 le ministère de l’Intérieur disait à la Cour des comptes espérer que ce système puisse entrer en vigueur avant les élections municipales de 2026, il paraît aujourd’hui peu imaginable que ce soit le cas : il faudra certainement, même si la proposition de loi va au bout de son parcours parlementaire, plusieurs mois, voire plusieurs années, pour en assurer la faisabilité.
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Transports
Transports : la future loi-cadre sera suivie d'une loi de programmation, annonce le ministre Philippe Tabarot
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La future loi-cadre sur les transports, confirmée par le Premier ministre mi-octobre dans son discours de politique générale, sera suivie d'une « loi de programmation » pluriannuelle, devant constituer « le socle de la politique de transports » « pour les décennies à venir », a promis vendredi le ministre Philippe Tabarot.
« Nous préparons l'avenir avec un projet de loi-cadre sur les transports qui interviendra après le PLF, en parallèle du texte sur la décentralisation annoncé par le Premier ministre », a déclaré PhilippeTabarot lors de sa première audition depuis sa renomination au gouvernement devant la commission du Développement durable de l'Assemblée nationale. Il a égréné une feuille de route de projets ambitieux, tout en admettant qu'ils sont tous suspendus à la pérennité du fragile gouvernement de Sébastien Lecornu.
Régénération des lignes et matériels ferroviaires vieillissants, développement du transport urbain du quotidien, déploiement de réseaux de RER régionaux annoncés par Emmanuel Macron, nouveaux modèles de financement et de gouvernance des infrastructures autoroutières: la loi-cadre, attendue par les collectivités comme par les usagers, doit servir à « traduire en dispositions législatives », le « consensus » qui s'est dégagé lors de la conférence « Ambition transports » pilotée par le gouvernement Bayrou, a dit le ministre.
Il a souhaité que le texte de la loi pluriannuelle soit ensuite déposé au Parlement « début 2026 ». Sur les concessions autoroutières, dont la future loi devrait permettre de flécher une partie des revenus vers le financement du rail à partir de 2031, le ministre a souhaité qu'elles soient « plus courtes et avec une participation de l'État au capital ».
Billetique unique
Sur le transport ferroviaire, le ministre a souligné le besoin de développer un système de billettique unifié, pour que les passagers ne fassent pas les frais de l'ouverture à la concurrence.
Au total, « il y a plus de 200 systèmes de billettique », entre transports en commun urbains, interurbains et ferroviaire, ce qui rend l'achat des billets « complexe » pour les usagers « notamment quand il y a des trajets qui impliquent plusieurs opérateurs ».« Cela nuit à l'attractivité du train », a-t-il estimé, jugeant que l'Etat devait « reprendre la main » sur le sujet. « Nous travaillons (...) sur le déploiement d'une plateforme nationale d'inter-opérabilité pour favoriser les échanges des données, la répartition des recettes entre les différents acteurs de la mobilité », a-t-il dit. Concernant le transport de marchandises, Philippe Tabarot a indiqué qu'il rencontrerait la semaine prochaine les parlementaires pour une « proposition » destinée à soutenir « le fret ferroviaire, le fret fluvial ou la décarbonation des flottes de poids lourds ».
Le ministre a enfin jugé insuffisants les crédits alloués à la recherche aéronautique via le Conseil pour la recherche aéronautique civile (Corac). Le soutien financier pluriannuel de l'État à la recherche aéronautique, annoncé fin 2022 dans l'espoir de développer d'ici 2030 le premier avion bas-carbone, a du mal à se maintenir. « Ce programme atteint un point bas dans le PLF 2026 », a admis le ministre, « je me bats pour qu'il soit complété par des crédits (du plan d'investissement) France 2030 ».
On notera enfin que le sujet crucial du financement des routes appartenant aux communes et aux départements n'a, lui, pas été évoqué – bien que ce patrimoine, rappelons-le, représente 65 % du réseau routier du pays. Au printemps dernier, l'AMF avait dénoncé un système de financement « à bout de souffle » et demandé une remise à plat complète du modèle de financement (lire Maire info du 23 avril). Demande qui, apparemment, n'a pour l'instant pas été entendue.
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