| Édition du mercredi 15 octobre 2025 |
Crise politique
Sébastien Lecornu recule sur les retraites et gagne un probable sursis
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Le Premier ministre, en cédant à la principale revendication du Parti socialiste sur les retraites, va probablement échapper à la censure, ce qui permettrait au débat budgétaire de se dérouler presque dans les temps. Il a à nouveau promis une loi de décentralisation pour décembre.Â
Soucieux de conforter son image « d’humilité », Sébastien Lecornu a commencé son très attendu discours de politique générale en reconnaissant une erreur : celle de n’avoir pas compris, jusqu’à la semaine dernière, qu’il était nécessaire de « tenir le gouvernement le plus éloigné possible des divergences (…) qui s’expriment à travers les partis politiques ». Pour réparer cette erreur, il a donc nommé un gouvernement dont les membres sont « déconnectés » des ambitions électorales. Témoin de cette évolution, Gérald Darmanin, qui a annoncé hier qu’il renonçait à briguer, en mars, le mandat de maire de Tourcoing.
Une fois le gouvernement nommé, il restait au Premier ministre à passer l’étape des premières motions de censure aussitôt déposées contre lui par LFI et le Rassemblement national. Le Parti socialiste avait prévenu : sans une annonce claire sur « la suspension complète et immédiate » de la réforme des retraites (lire Maire info d’hier) il censurerait lui aussi, ce qui aurait eu pour conséquence automatique la chute du gouvernement et une dissolution : le président de la République l’avait d’ores et déjà annoncé, en Conseil des ministres, hier matin, en affirmant que les motions de censure déposées étaient en réalité « des motions de dissolution ».
« Nous débattrons, vous voterez »
Sébastien Lecornu a détaillé les « ruptures » qu’il entend mener. D’abord, en donnant toute sa place au Parlement, et en réitérant sa promesse de ne pas recourir à l’article 49-3. « Le gouvernement proposera, nous débattrons, vous voterez. (…) Sans 49-3, sans majorité absolue, le Parlement aura le dernier mot. (…) En renonçant au 49.3, il n’y a plus de prétexte pour une censure préalable. »
Cet argument n’a pas convaincu tous les députés, dont un certain nombre craignent qu’il s’agisse d’une promesse de Gascon. Si, en effet, les débats s’enlisent et n’aboutissent pas à un vote au bout de 70 jours, la Constitution prévoit, à l’article 47, que le gouvernement fasse passer le projet de budget par ordonnance – et le faire sur la base du texte initial, donc non modifié par les débats parlementaires. Sans que l’on puisse accuser le Premier ministre d’avoir déjà cette idée en tête, cette option reste néanmoins sur la table, celui-ci n’ayant évoqué que l’article 49-3 mais pas l’article 47.
Il s’est toutefois dit ouvert au débat et a admis lui-même que le projet de loi de finances qu’il a présenté est « perfectible ». Mais les grandes lignes sont celles qu’il a tracées dès sa nomination début septembre : « Continuer à dépenser moins (…), lutter contre les fraudes, qu’elles soient fiscales ou sociales ». Le Premier ministre estime que « l’on peut faire beaucoup sur les dépenses de l’État », mais a aussitôt ajouté : « Mais les deux blocs massifs restent les dépenses sociales et des collectivités locales. » D’où l’on comprend finalement que, comme ses prédécesseurs, Sébastien Lecornu va accuser les collectivités d’être trop dépensières. Le projet de budget présenté comprend, d’ailleurs, les mêmes ponctions sur le budget des collectivités que celui de François Bayrou (lire article ci-contre). Quant aux dépenses sociales, le moteur de la baisse sera, comme prévu par François Bayou, une « année blanche », c’est-à-dire un gel des prestations sociales et des pensions.
L’autre axe majeur du projet de loi de finances est un savant dosage de hausses et de baisses d’impôts – avec notamment une baisse de la CVAE, un gel du barème de l’impôt sur le revenu, la reconduction d’un impôt sur les bénéfices des très grandes entreprises. Le Premier ministre a également promis de se montrer ouvert aux propositions concernant « le pouvoir d’achat des travailleurs » (c’était une autre exigence du Parti socialiste). Ces propositions seront débattues et là encore, a-t-il lancé aux députés, « vous voterez ».
Suspension « complète »
Est venu ensuite le point le plus attendu du discours. « Le gouvernement est-il prêt à un nouveau débat sur l’avenir de notre système de retraites ? La réponse est oui. » Bien que Sébastien Lecornu juge que ce débat devra surtout se tenir à l’occasion de l’élection présidentielle, il a reconnu qu’il est « demandé dès maintenant par des forces politiques et syndicales légitimes ». Il va donc « proposer dès cet automne que nous suspendions la réforme de 2023 sur les retraites, jusqu’à l’élection présidentielle ». Le Premier ministre a clairement indiqué que cette suspension serait bien « complète », comme l’exigeait le PS, puisque les deux volets de la réforme seront concernés : « Aucun relèvement de l’âge n’interviendra à partir de maintenant jusqu’à janvier 2028. (Et) la durée d’assurance (…) restera à 170 trimestres jusqu’à janvier 2028. » Applaudissements sur les bancs du PS, qui a obtenu, en menaçant de forcer le chef de l’État à une dissolution, une concession jusque-là considérée comme absolument inimaginable par le camp macroniste.
Précisant que « suspendre pour suspendre » ne sert à rien, et qu’il reste à « améliorer » la réforme de 2023, Sébastien Lecornu propose d’organiser une nouvelle « conférence sur le travail et les retraites » avec les partenaires sociaux. « Si la Conférence conclut, le gouvernement transposera l’accord dans la loi », a ajouté le Premier ministre – ce qui n’est pas si simple, puisque cette « transposition » ne sera pas, in fine, du ressort du gouvernement.
Décentralisation, statut de l’élu, polices municipales
Parmi les autres textes urgents que le Parlement va devoir examiner, le Premier ministre a naturellement évoqué celui sur la Nouvelle-Calédonie – un projet de loi constitutionnelle a été présenté hier en Conseil des ministres (lire article ci-contre). Deux autres textes concernant certaines collectivités sont « prêts » – l’un sur le statut de la Corse et l’autre contre la vie chère dans les Outre-mer –, et « il ne faut pas attendre » pour les adopter, a demandé le Premier ministre.
Il a également confirmé qu’un projet de loi de décentralisation, visant à « renforcer le pouvoir local », sera présenté en décembre. Et de répéter son mantra, qui, en l’occurrence, ne diffère guère de celui des principales associations d’élus : « Il ne faut pas décentraliser des compétences. Il faut décentraliser des responsabilités, avec des moyens budgétaires et fiscaux et des libertés, y compris normatives. » Il espère – ce qui paraît tout de même quelque peu utopique – voir ce texte adopté « avant les municipales ».
Autres « urgences », autres propositions de loi « prêtes » : le statut de l’élu et l’extension des prérogatives des polices municipales. Le premier de ces deux textes n’attend plus que d’être adopté par le Sénat – de préférence conforme, afin d’aboutir très vite à une adoption définitive. Le second n’a pas encore débuté son examen par le Parlement.
Sébastien Lecornu l’assume : ce discours ne trace pas « un programme à long terme ». Son équipe constitue « un gouvernement de mission », dont l’objectif est « de redonner son sens à la politique ». « La vraie démocratie permet à celles et ceux qui ne sont pas d’accord de travailler ensemble », a-t-il conclu. « C’est ce qui se passe (…) dans la majorité des conseils municipaux de France. Osons, il suffit de faire un pas. »
« Frondeurs » ?
À la suite de ce discours, le Parti socialiste a confirmé que « en l’état », il ne censurerait pas le gouvernement – contrairement au RN, à la France insoumise, aux communistes et aux écologistes. Le groupe indépendant Liot a annoncé que « la majorité » de ses membres ne votera pas la censure – tandis que Laurent Wauquiez, chef de file des députés LR, a exigé qu’aucun membre de son groupe ne vote celle-ci.
Est-ce à dire que le gouvernement est sauvé, de façon certaine ? Non. Le risque d’une censure est certes très largement écarté, mais pas complètement impossible. Tout dépendra de savoir s’il se trouvera quelques dizaines de « frondeurs » au sein du Parti socialiste – dont l’aile gauche, ainsi que le mouvement de jeunesse, appellent les députés de leur parti à censurer malgré la consigne. Et au sein des LR, au sein duquel des voix s’élèvent également pour braver la consigne données par Laurent Wauquiez. C’est le cas par exemple de François-Xavier Bellamy – un très proche de Bruno Retailleau – , qui a indiqué hier que s’il était député, il « voterai(t) pour la censure ». Quant à David Lisnard, il a publié hier un communiqué intitulé, sans la moindre ambiguïté : « Il faut censurer ». Fustigeant la décision de reculer sur la réforme des retraites, le président de Nouvelle Énergie estime qu’il serait « inacceptable que Les Républicains valident et entérinent cette lâcheté politique, qui serait une trahison ». Reste à savoir s’il se trouvera des députés pour les suivre.
Réponse demain jeudi, dans la matinée : les motions de censure seront examinées à partir de 9 heures. Dans cette période inédite faite de surprises et de coups de théâtre permanents, il serait imprudent de se livrer à des prévisions trop affirmatives. Mais on peut tout de même dire que la probabilité de survie du gouvernement Lecornu 2 s’est, hier, considérablement renforcée.
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Budget de l'état
Dilico doublé, DGF gelée, Fonds vert raboté... : potion amère pour les collectivités dans le budget 2026
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En compensation du nouvel effort imposé aux collectivités en 2026, l'exécutif annonce « un grand chantier de simplification normative » et le regroupement des dotations d'investissement existantes dans un nouveau fonds. Reste que l'effort risque d'être plus important encore que l'an dernier. Les parlementaires pourraient, toutefois, largement amender ce projet de budget.
Une « épargne forcée » multipliée par deux et étendue, un Fonds vert sabré et un gel de la DGF… Afin de redresser les comptes publics, le projet de loi de finances (PLF) pour 2026 présenté, hier, prévoit, sans grande surprise, de mettre à contribution les collectivités et reprend, pour l’essentiel, les mesures concoctées l’été dernier par François Bayrou.
S’il est qualifié par le gouvernement de « juste », cet effort sembre être bien supérieur aux « 2,2 milliards d'économies » qui leur a été officiellement imposées en 2025. Mais, en contrepartie, l’exécutif promet « une réduction du poids des normes », comme l’avait déjà annoncé l’ancien ministre de l’Aménagement du territoire, François Rebsamen, qui certifiait, en juillet dernier, que « plus [aucune] norme ne sera imposée aux collectivités sans une discussion préalable avec elles ».
Lors de l’audition des ministres de l’Économie et des Comptes publics, hier soir, le président de la commission des Finances de l'Assemblée nationale, Éric Coquerel (LFI), a rapidement critiqué un « plan d’austérité de 5 milliards sur les communes et services locaux », sans expliquer son chiffrage. Et, en juillet dernier, le président du Comité des finances locales (CFL), André Laignel, prévenait déjà que « les coupes claires faites sur les collectivités vont peser sur les investissements et vont impacter très lourdement un certain nombre de branches professionnelles, comme le BTP ». Ce matin, devant le Comité des finances locales, Amélie de Montchalin a évoqué – sans détailler ces chiffres – une ponction de « 4,6 milliards d'euros » pour les collectivités.
Dilico : 1,2 milliard d’euros pris au bloc communal
Reste que c’est à travers la reconduction et la hausse du dispositif de lissage conjoncturel des recettes fiscales des collectivités (Dilico) – instauré l’an passé et prévu initialement pour ne durer qu’une année – que portera en grande partie l’effort des collectivités. L’objectif est connu et consiste à « associer » ces dernières au « rétablissement des comptes publics ».
Mais la copie de Sébastien Lecornu prévoit que ce « nouveau Dilico » soit doublé par rapport à sa version 2025 pour être porté à 2 milliards d’euros. La ponction s’établirait ainsi à 720 millions d’euros pour les communes, 500 millions d’euros pour les EPCI, 280 millions d’euros pour les départements et 500 millions d’euros pour les régions.
Pour répartir cette nouvelle charge, cette « épargne forcée » devrait être étendue à de nouvelles collectivités. Pour rappel, le Dilico ciblait cette année quelque 1 900 communes, 141 EPCI et la moitié des départements – ainsi que les régions – en ponctionnant leurs recettes à hauteur d’un milliard d’euros, avec des prélèvements individuels qui varient de quelques milliers à des millions d'euros et qui frappent jusqu'aux très petites communes. Selon les chiffres donnés par le précédent gouvernement à l'AMF, il semble que l'on s'apprête à changer d'échelle, puisque le nombre de collectivités concernées pourrait doubler et approcher les 4 000.
La ministre des Comptes publics, Amélie de Montchalin, a confirmé hier soir, lors de son audition devant la commission des finances, que les sommes prélevées en 2025 seront bien reversées aux collectivités, par tiers, pendant trois ans à compter de l’an prochain. Sur ce point aussi, le nouveau Dilico diverge de sa version 2025 puisque son reversement serait étalé sur cinq ans. L’objectif est de « faire coïncider la temporalité de la mesure avec celle de la durée des cycles électoraux et d’éviter des reversements trop massifs ».
Le Fonds vert encore raboté
Autre mauvaise nouvelle, la nouvelle amputation du Fonds vert. Après la saignée de 2025, année durant laquelle son montant a été divisé par deux (passant de 2,5 milliards d’euros en 2024 à 1,15 milliards d’euros), ce fonds dédié aux projets d'adaptation au changement climatique des collectivités locales subirait une nouvelle coupe de 500 millions d’euros et se réduirait comme peau de chagrin, à quelque 650 millions en 2026, selon les mesures retenues par le gouvernement dans le projet de budget.
Sans compter que ce « fonds d'accélération de la transition écologique dans les territoires », de son vrai nom, devient de plus un plus une subvention fourre-tout, celui-ci pouvant depuis 2025 financer 19 mesures différentes, dont l’aide aux maires bâtisseurs, le soutien aux PCAET, ou encore les aménagements cyclables.
Cet outil de financement de la transition écologique dans les territoires est pourtant essentiel au moment où plusieurs études affirment qu’il faudrait accélérer les projets verts pour atteindre la neutralité carbone en 2050.
DGF « gelée »
Après trois hausses consécutives, la DGF serait cette fois-ci « gelée » l’an prochain à son montant de 2025, comme l’a confirmé Amélie de Montchalin lors de son audition. Le gel, compte tenu de l'inflation, correspond à une baisse en euros constants. À noter la réintégration du montant de la fraction de TVA affectée aux régions depuis 2018.
« Cela veut dire que pour certains, c’est une baisse continue et ce, depuis des années. Et pas pour les plus riches qui n’ont déjà pas de DGF », a rappelé, hier soir, la députée socialiste du Puy-de-Dôme, Christine Pires Beaune, lors de l'audition devant la commission des finances de l'Assemblée.
En parallèle, la dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale (DSU) et la dotation de solidarité rurale et de cohésion sociale (DSR) progresseraient respectivement de 140 et 150 millions d’euros afin de « renforcer de l’effort de solidarité ». « La hausse de la DSR en 2026 sera répartie au minimum à 60 % sur sa deuxième fraction dite "péréquation", dont la quasi-totalité des communes de moins de 10 000 habitants bénéficie », détaille le projet de budget. Cependant, l’enveloppe totale de la DGF étant gelée, les hausses de la DSU et de la DSR seront intégralement financées à l’intérieur de la DGF, et entraineront des fortes pertes sur les parts forfaitaires de DGF.
On peut, toutefois, noter que les collectivités seront sollicitées via la minoration d'un ensemble de dotations appelées « variables d’ajustement » (notamment la dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle), à hauteur de 527 millions d’euros.
Par ailleurs, les allocations compensatrices relevant des locaux industriels seraient réduites de 25 % et ainsi ramenées à leur « niveau de 2021 ». Critiquant initialement le projet de budget de François Bayrou, Intercommunalités de France assurait récemment que « beaucoup de territoires industriels ou anciennement industriels seront particulièrement touchés » et regrettait que ce type de mesure soit « en contradiction totale avec l’objectif de réindustrialisation du pays ».
FCTVA, le calendrier modifié
Après le gel de la TVA l’an passé, l’exécutif a décidé de poursuivre en 2026 « un encadrement, par une sous-indexation, de la dynamique de cette fiscalité ».
Cependant, il assure que, « au titre de l’exercice 2026, cette mesure serait neutre pour les collectivités locales dans la mesure où la TVA nationale prévisionnelle pour 2025, sur la base de laquelle est désormais calculée leurs fractions, est prévue en baisse par le présent projet de loi de finances ». Or « le dispositif d’écrêtement ne s’applique pas en cas de baisse de la TVA nationale ».
S’agissant du versement du fonds de compensation de la TVA (FCTVA) aux EPCI, son calendrier serait rétabli à « l’année suivant la dépense d’investissement » dans « une logique d’harmonisation et de simplification ».
Le gouvernement a aussi choisi de limiter l’assiette des dépenses éligibles sur « les seules dépenses d’investissement » – ce qui est donc encore une mesure défavorable aux collectivités – tout en l’étendant aux « participations des collectivités versées dans le cadre des concessions d’aménagement, lorsqu’elles financent des équipements publics ». La mise en œuvre du mécanisme d’avance serait, par ailleurs, « simplifiée pour tout bénéficiaire du FCTVA situé dans des communes ayant fait l’objet d’une reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle ».
Normes : un « grand chantier » de simplification
En « contrepartie » des efforts réalisés par les collectivités, l’exécutif annonce « un grand chantier de simplification normative ». Une fois encore, le terme de « contrepartie » pose question. Car le calendrier n'est pas du tout le même : si le budget est adopté en l'état, c'est dès l'année prochaine que les collectivités vont être lourdement ponctionnées, tandis que les éventuels effets d'un « chanter de simplification normative », pour positifs qu'ils puissent être, ne se feront sentir qu'au bout de plusieurs années.
Le gouvernement explique qu'« un regroupement des dotations d’investissement existantes est proposé » avec la création d’un nouveau « fonds d’investissement pour les territoires » (FIT).
Celui-ci regrouperait les dotations d’investissement bénéficiant au bloc communal (DETR, Dsil, DPV) et constituerait « une avancée structurante », selon le gouvernement pour qui « cela doit permettre de simplifier les démarches des élus mais aussi afin de faciliter la coordination avec d’autres cofinancements mobilisables ». Tenant compte du fait que « les dépenses d’investissement local se replieraient modérément », son montant s’élèverait à 1,4 milliard d’euros en 2026, « correspondant à un point bas du cycle » électoral.
Par ailleurs, « le cadre en vigueur en matière de rénovation énergétique des bâtiments tertiaires, caractérisé par une multiplicité d’objectifs, de délais, de normes applicables et de leviers mobilisables, pourrait être simplifié, sans pour autant remettre en cause l’atteinte des objectifs climatiques de la France », annonce l’exécutif
En outre, « les collectivités les plus fragiles seront par ailleurs accompagnées » avec un fonds de sauvegarde des départements porté à 300 millions d’euros, soit « un montant trois fois supérieur par rapport à sa dernière mobilisation ».
« L’accompagnement des collectivités faisant face à des événements climatiques sera également augmenté et simplifié », indique le gouvernement.
La pilule était déjà amère dans le budget 2025. Il semble qu'elle va l'être encore davatange l'année prochaine.
Consulter le PLF pour 2026.
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Cybermalveillance
Cybersécurité et directive NIS 2 : où en est-on ?
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Une journée expert autour de la directive européenne « NIS 2 » a été organisée à Bordeaux hier par Les Interconnectés. L'occasion de faire un point sur un projet de loi qui tarde à être adopté et qui va entraîner des conséquences sur les collectivités concernées.
La journée d’hier représente parfaitement le décalage entre la réalité des collectivités et la crise politique qui se joue actuellement. Alors qu’hier le Premier ministre – le troisième depuis la dissolution en juin 2024 – prononçait son discours de politique générale à l’Assemblée nationale, élus et collectivités ont parlé avenir à l’occasion d’une Journée expert cyber organisée par Les Interconnectés.
En attente principalement d’un budget pour 2026 – finalement présenté hier en Conseil des ministres –, les collectivités sont également dans l’expectative concernant de nouvelles règles de cybersécurité qui devraient s’appliquer sous peu pour de nombreuses collectivités. La journée d’hier a été l’occasion de faire un point sur l’avancement de la transposition de la fameuse directive NIS 2 mais aussi de prendre la température du côté des acteurs concernés. Une chose est certaine : l’effort qui va devoir être mené, notamment pour les plus petites collectivités, sera de taille.
Une menace cyber qui augmente, des réactions qui tardent
« La directive NIS 2 est née du constat que la menace cyber s’est répandue partout, souligne le général François Degez, chef de la division coordination territoriale de l'Anssi. Cette menace stratégique est devenue systémique : plus besoin d’être une cible pour être une victime, il suffit d’avoir une adresse IP. »
Pourtant, la maturité cyber des collectivités aujourd’hui est loin d’être opérationnelle. Le Baromètre de la maturité numérique des territoires (2025), mené auprès des adhérents des Interconnectés montre que d’une part, les collectivités plus petites sont souvent plus en retard et que, d’autre part, même si un progrès est visible, « il y a un attentisme dans la mise en œuvre opérationnelle » de mesures de cyber protection, comme le résume Clément Baylac, conseiller économie attractivité pour Intercommunalités de France.
Pour Olivier Sevegnes, premier adjoint au maire de Cordes-Tolosannes (Tarn-et-Garonne), cette inertie s’explique en partie car les élus prennent conscience de cette menace invisible et intangible « au moment où ça nous tombe dessus ». Pour la communauté de communes Maremne Adour Côte Sud, le déclic a été l’attaque de l’hôpital de Dax en février 2021 – l’une des cyberattaques les plus graves de ces dernières années. Après l’attaque de « son voisin », la communauté de communes a décidé de prendre progressivement les choses en main : « Nous sommes passé d’un technicien informaticien à une direction du système d'information et du développement numérique (DSIN) composée de 15 personnes », raconte Olivier Horgues, responsable cellule infrastructures numériques.
Les conséquences pour une collectivité peuvent être sérieuses à l’échelle du territoire avec notamment la perte de données ou le blocage de services cruciaux (actes de décès, services de paie, etc.) mais elles peuvent aussi bloquer tout le pays, d’où l’intégration de certaines collectivités dans la directive NIS 2. Les cyberhackers, selon l’Anssi, peuvent s’attaquer à la distribution de l’eau potable par exemple puisque les usines de traitement de l'eau la plupart du temps reliées au système informatique de la ville. « Ce type d’attaque sur toute la France peut déstabiliser la vie sociale globale », alerte le général.
Même si le mandat qui vient de s’écouler a confirmé que le numérique est un enjeu politique et non pas uniquement technique, beaucoup constatent qu’il est relayé au second plan, ce qui rend d’autant plus difficile son appropriation par les élus. Les directeurs généraux des services (DGS) comme les élus locaux présents sur place sont en demande de formations. Attention cependant aux effets d’aubaine. Céline Colucci, déléguée générale des Interconnectés alerte sur « la vente de formations [privées] alors que la loi n’est pas promulguée ».
Un texte toujours au Parlement
Rappelons les fondamentaux : la directive NIS2, qui vise à collectivement atteindre une immunité cyber nationale, distingue deux types d’acteurs qui vont être soumis à des obligations différentes : les entités essentielles et celles dites importantes (les essentielles auront davantage d'objectifs à remplir). Parmi les essentielles sont concernées pour le bloc local : les communes de plus de 30 000 habitants, les métropoles, les communautés urbaines et d’agglomération. Toutes les communautés de communes seront des entités importantes. Pour sa part, l’AMF a défendu un périmètre plus restreint pour les communautés de communes et les communautés d’agglomération. Précisons que, dans la mesure où le projet de loi n’a toujours pas été adopté, le périmètre d’application peut encore évoluer.
Concernant le calendrier, le projet de loi de transposition de la directive européenne « NIS 2 » a été adopté en première lecture au Sénat en mars dernier. L’avis de la commission spéciale à l’Assemblée nationale a été rendu au début du mois de septembre. « Alors que la directive aurait dû être transposée avant le 17 octobre 2024, nous ne sommes pas à l’abri de prendre encore un peu plus de temps que prévu », a déclaré Éric Bothorel, rapporteur général du texte en Commission spéciale à l’Assemblée. La date de son adoption est donc toujours inconnue et le texte doit être examiné en première lecture à l’Assemblée nationale avant de repasser par le Sénat… Son adoption en 2025 apparaît à ce jour peu plausible.
La commission a cependant fait des ajouts dans le projet de loi qui concernent spécifiquement les collectivités, comme l’a indiqué hier le député de Haute-Garonne Jacques Oberti et membre de la Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi. La commission propose l’inscription dans le texte de la création d’un fonds de soutien spécifiquement destiné à accompagner les collectivités territoriales et les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre qualifiés d’entités importantes ou essentielles n’ayant pas bénéficié du « parcours de cybersécurité » du plan France relance. Clément Baylac précise que si le fonds n’est pas encore crédité dans le texte, « il faudra le faire après la phase législative ». Selon Jacques Oberti, son évaluation financière serait « de l’ordre de près de 700 millions d’euros pour l’ensemble des investissements ».
Car si les collectivités partagent l’ambition d’un renforcement de la cybersécurité, des inquiétudes subsistent sur leurs capacités à respecter les objectifs portés par NIS 2. « Cela ne pourra pas se faire sans accompagnement dans ce contexte financier et fiscal compliqué où on demande des économies aux collectivités », rappelle Clément Baylac.
D’ailleurs, Jacques Oberti explique que « la commission ne veut pas de sanction pour les collectivités » mais est plutôt favorable à la mise en place de « mesures coercitives de l’ordre de la menace réputationnelle avec un rapport annuel sur les attaques subies par les collectivités ».
Enfin, des doutes ont pu émerger hier sur l’organisation prévue par le texte. Les 15 000 entités concernées par NIS 2 (essentielles et importantes) devront s’enregistrer auprès de l’Anssi et indiquer elles-mêmes leur catégorie d’entité, et ce sous six mois. Certains acteurs, dont l’Anssi, redoutent de devoir aller chercher les derniers les moins informés. De plus, les entités essentielles et les entités importantes auront l’obligation de notifier « sans retard injustifié à l’Anssi tout incident ayant un impact important sur la fourniture de leurs services ». Comme l’explique François Dégez, ce devoir de signalement est nouveau, et va permettre d’analyser la menace pour pouvoir réagir. Cependant, beaucoup d’agents ou d’élus peuvent avoir honte ou ne pas percevoir pas la nécessité de signaler un incident aux autorités compétentes comme l’Anssi ou la police nationale. Cet aspect de la directive NIS 2 est un changement de paradigme qui ne pourra s’opérer qu’avec un « gros travail d’acculturation qui parfois ne passe pas sans mal », raconte Olivier Sevegnes.
La nomination d'Anne Le Hénanff au poste de ministre délégué à l’Intelligence artificielle et au Numérique apparaît cependant comme une bonne nouvelle pour les acteurs de la filière du numérique. Grande spécialiste des sujets cyber, elle a aussi été rapporteure du groupe de travail sur la transposition de la directive NIS 2.
La coopération : condition sine qua non au respect de NIS 2
La journée d’hier a été l’occasion d’échanger de bonnes pratiques. Un atelier consacré aux entités importantes a permis de rappeler que ces dernières devront répondre à 15 objectifs de gouvernance, protection, défense et résilience. Mais comment les atteindre ?
Il a été largement rappelé que l’échelon intercommunal reste le plus compétent en matière de montée en compétences pour le numérique. Éric Ponson, responsable du service informatique pour la Communauté de communes Vallée des Baux-Alpilles fait le lien entre NIS 2 et le RGPD. « L’intercommunalité pour sécuriser les données des dix communes leur propose une compétence cyber (conseils et ingénierie) et à termes l’idée serait d’avoir un service informatique cyber commun à l’ensemble des dix communes qui ne peuvent pas seules porter des projets. »
Autre sujet : pour pouvoir appliquer ce nouveau « code de la route informatique », comme certains l’appellent, il faut « mettre en place des mécanismes de coopération dans les territoires », selon Martin Véron, délégué Anssi en région Nouvelle-Aquitaine. En matière de cybersécurité les acteurs sont multiples entre les collectivités territoriales, l’Anssi, les Campus Cyber, les CSIRT territoriaux, les forces de police et de gendarmerie… « Il faut apprendre à se connaitre et faire une cartographie des acteurs de la cybersécurité », suggère Jean-Noël Olivier, directeur général du numérique et des systèmes d'information de Bordeaux métropole. Certaines collectivités – comme la région Auvergne-Rhône-Alpes – se sont déjà prêté à l’exercice.
Faire connaître les outils est aussi un axe prioritaire. L’Anssi propose par exemple aux collectivités d’effectuer des exercices de simulation pour gérer une crise cyber. Du côté des forces de l’ordre, on rappelle l’existence du site officiel Ma sécurité, qui peut accompagner les particuliers mais aussi les collectivités dans le dépôt d’une plainte pour cyberattaque. Le 17Cyber propose aussi une assistance technique et un accompagnement par un policier ou un gendarme en cas de cyberattaque. Après le prochain congrès des maires et des présidents d’intercommunalité, l’Anssi devrait également dévoiler un nouvel outil de mise en situation.
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Nouvelle-Calédonie
Le gouvernement présente sa réforme constitutionnelle visant à créer un « État de Nouvelle-Calédonie »
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Le gouvernement a présenté hier, en Conseil des ministres, un projet de loi constitutionnel relatif à la Nouvelle-Calédonie, visant à modifier la Constitution pour y transposer les dispositions de l'accord de Bougival du 12 juillet 2025. La proposition de loi visant à reporter les élections provinciales sera, elle, débattue dès aujourd'hui au Sénat.Â
Il y a urgence, comme l’a encore répété le Premier ministre hier devant les députés. À ce jour, sans modification législative, les élections provinciales en Nouvelle-Calédonie, déjà reportées deux fois, doivent se tenir au plus tard le 30 novembre prochain, ce qui supposerait la publication d’un décret de convocation des électeurs d’ici une quinzaine de jours. Bien que les indépendantistes s’opposent absolument à tout nouveau report, le gouvernement, en métropole, est décidé à y procéder et il a le soutien de la plupart des forces politiques.
Report des élections
Ainsi, une proposition de loi visant à reporter les élections provinciales et celles au Congrès de Nouvelle-Calédonie au 28 juin 2026 au plus tard a été déposée au Sénat, et elle est cosignée par six présidents de groupes, allant du PS aux LR. Ce texte proroge également le mandat des élus actuels jusqu’à cette date.
Témoin de l’urgence de voir ce texte adopté, il est le premier inscrit à l’agenda du Sénat et sera examiné en séance publique dès aujourd’hui.
Au vu de la composition du Sénat, il ne fait aucun doute que le texte sera adopté très largement : un seul groupe, celui des sénateurs communistes, qui comprend un membre kanak et indépendantiste, Robert Wienie Xowie, signataire des seuls amendements à ce texte et d’une motion de rejet. Cette motion, même si elle n’a aucune chance d’être adoptée, met toutefois le doigt sur un problème réel : dans l’exposé des motifs de la proposition de loi, il est indiqué que le texte s’appuie sur l’accord de Bougival, qui aurait été « signé par l’ensemble des partenaires politiques calédoniens ». C'est en réalité bien plus compliqué que cela : les indépendantistes, même s'ils ont validé un document à l'issue des négociations de Bougival, ont indiqué ensuite, dans un courrier adressé au Premier ministre, que ce document était pour eux un document de travail et non un accord. Et ils ont rejeté, formellement, l'accord publié par la suite au Journal officiel. On se rappelle d’ailleurs que, fait inédit, l’accord de Bougival a même été publié au Journal officiel, le 6 septembre… en tant que texte provisoire et sans qu’aucune signature, ni même une liste de signataures, n’y figure. En conséquence, estime le sénateur kanak, « fonder un nouveau report électoral sur un document non partagé est politiquement aventureux et juridiquement bancal ».
Quoi qu’il en soit, le texte sera adopté par le Sénat et devrait être transmis très rapidement à l’Assemblée nationale.
« Nationalité calédonienne »
Deuxième étage de la fusée : le projet de loi constitutionnelle présenté hier en Conseil des ministres. On rentre ici « dans le dur », puisqu’il s’agit de modifier la Constitution pour y faire entrer les dispositions issues de l’accord de Bougival, dont la plus spectaculaire – et la plus originale – est la création d’un « État de la Nouvelle-Calédonie » intégré dans l’État français.
Ce texte comporte trois articles. Dans l’exposé des motifs, il est expliqué que le texte s’appuie sur les dispositions de l’accord de Bougival, qui « scelle une volonté partagée de bâtir un cadre institutionnel renouvelé et pérenne ». Contrairement à la proposition de loi évoquée plus haut, l’exposé des motifs reconnaît que les indépendantistes ont « exprimé des réserves » – ce qui est tout de même un sérieux euphémismes lorsque l’on se rappelle que le FLNKS a parlé de texte « colonial ». Mais les autres partenaires, ceux qui ont signé le texte, « s’accordent à reconnaître que cet accord est la condition d’une paix civile durable et d’une stabilité retrouvée ».
L’article 1er du texte prévoit l’approbation de l’accord de Bougival par la population de Nouvelle-Calédonie – c’est-à-dire un référendum. Question cruciale, quand on se souvient que la question du corps électoral est celle qui a mis le fu aux poudres à l’été 2024 : qui pourra participer à ce référendum ? Réponse du gouvernement : les citoyens inscrits sur la « LESC », la liste électorale spéciale à la consultation sur l’accession à la pleine souveraineté. Autrement dit, une liste gelée en 1998, ou éventuellement ouverte aux personnes pouvant « justifier d'une durée de vingt ans de domicile continu en Nouvelle-Calédonie (…) au plus tard au 31 décembre 2014 ».
Le Conseil d’État, s'appuyant sur la jurisprudence du Conseil constitutionnel, a validé cette restriction du corps électoral.
L’article 2 du texte vise à modifier la Constitution, en récrivant ou créant cinq articles (art. 76 à 80).
Le nouvel article 76 constitutionnaliserait l’accord de Bougival, en disposant qu’une loi organique détermine « la répartition des compétences entre l’État et les institutions de Nouvelle-Calédonie », les modalités de transfert, le fonctionnement de ces institutions et les règles fiscales et financières du transfert de compétences.
L’article 77 permettrait la création d’un « État de la Nouvelle-Calédonie », dont l’assemblée délibérante serait susceptible d’adopter, à la majorité des trois cinquièmes, une « loi fondamentale », c’est-à-dire une Constitution, même si le terme n’est pas utilisé puisqu’il ne peut y avoir, en France, qu’une seule Constitution. Cette « loi fondamentale » pourrait déterminer, d’une part, les « signes identitaires » de l’État de la Nouvelle-Calédonie (drapeau, devise…) et un code de la citoyenneté, et, d’autre part, la répartition des compétences entre les différentes institutions et leurs règles d’organisation et de fonctionnement.
L’article 79, aussi extrêmement important, créerait une « nationalité calédonienne », qui ne pourrait être accordée qu’aux citoyens de nationalité française (il s’agirait donc d’une double nationalité) remplissant un certain nombre de conditions précisément listées dans le projet de loi. Seraient notamment autorisés à prendre la nationalité calédonienne les personnes nées dans l’archipel de parents « remplissant les conditions d’acquisition de la nationalité calédonnienne » ou, s’ils ne la remplissent pas, résidant en Nouvelle-Calédonie depuis une durée « fixée par la loi fondamentale ». Les personnes résidant en Nouvelle-Calédonie depuis au moins dix ans à la date de demande de nationalité seraient également incluses.
État dans l’État
Pour mémoire, cet « État dans l’État » que serait l’État de Nouvelle-Calédonie pourrait – comme on peut le lire dans l’accord de Bougival – se voir à terme transférer des compétences régaliennes dans le domaine de la défense, de la monnaie, de la sécurité, de la justice et du contrôle de légalité.
L’accord précise également que les communes de Nouvelle-Calédonie resteraient « des collectivités territoriales de la République », mais deviendraient, en même temps, des « institutions de la Nouvelle-Calédonie », auxquelles le nouvel « État » pourrait transférer des compétences.
L’État de Nouvelle-Calédonie pourra également être reconnu par les autres États et donc entretenir des relations diplomatiques avec eux.
Le texte présenté en Conseil des ministres, et qui sera examiné en premier lieu par le Sénat, prévoit que la nouvelle rédaction de la Constitution qui en résulterait entrerait en vigueur au lendemain de la publication au Journal officiel des résultats du référendum entérinant les accords de Bougival.
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Société
La contrôleure des prisons dénonce la « vétusté préoccupante » des établissements pénitentiaires
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De nombreux établissements pénitentiaires sont d'une « vétusté préoccupante », qui concourt à maintenir un « très grand nombre de personnes détenues dans des conditions indignes, attentatoires à leurs droits fondamentaux », met en garde la contrôleure générale des lieux de privation de liberté (CGLPL), critiquant « l'inertie de l'État ».
Dans un avis datant du 12 mai mais publié mercredi au Journal officiel, Dominique Simonnot observe qu' « à ce jour encore, de nombreuses maisons d'arrêt sont installées dans des bâtiments du XIXe siècle ».« Le fonctionnement continu de ces structures depuis des décennies, associé à de graves insuffisances dans leur maintenance, a inévitablement entraîné leur extrême dégradation », constate-t-elle.
En 2023, une partie des coursives de la maison d'arrêt de Rouen s'est ainsi effondrée, « conséquences du manque d'entretien chronique de bâtiments anciens et des infiltrations d'eau ». L'insalubrité concerne toutefois aussi certains établissements pourtant installés dans des locaux récents, « souvent en raison de malfaçons dans le projet de construction », indique-t-elle encore, évoquant notamment le centre de détention de Fleury-Mérogis (Essonne). Inauguré en septembre 2023, il a fermé un an après, en raison de fuites d'eau importantes, de « l'humidité » et des « moisissures ».
Les établissements pâtissent aussi parfois d'installations électriques défaillantes, comme à Nice, et de la prolifération de cafards, rats ou punaises de lits, énumère l'avis. Or, la vétusté de ces bâtiments est « directement à l'origine d'atteinte aux droits fondamentaux des détenus », à leur sécurité et à leur intimité.
Des réponses inadaptées
Dans un contexte de surpopulation carcérale chronique – la densité carcérale était de près de 135 % au 1er septembre selon le ministère de la Justice – « la moindre fermeture de cellule pour travaux » aggrave « la promiscuité » dans les autres cellules, où sont regroupés les détenus. Ce qui accélère, par voie de conséquence, l'usure des équipements et des infrastructures.
« Malgré des alertes répétées », l'action des autorités est « insuffisante », les réponses apportées par les pouvoirs publics étant « généralement inadaptées » et « pas à la hauteur des enjeux », critique le CGLPL, qui « recommande que chaque établissement pénitentiaire vétuste fasse l’objet d’un diagnostic approfondi, permettant de déterminer sans délai les mesures à prendre quant à son avenir ».
Dans ses observations envoyées fin août en réponse à cet avis, le ministre de la Justice Gérald Darmanin indique que « des diagnostics ont été effectués pour les établissements les plus vétustes afin d'identifier les travaux nécessaires et d'élaborer des propositions de phasage des opérations ». Il rappelle avoir par ailleurs lancé deux appels d'offres pour la construction de 3 000 places de prison modulaires construites en 18 mois.
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