Édition du vendredi 27 juin 2025 |
État civil
Fin de parcours pour la proposition de loi sur le mariage des personnes en situation irrégulière
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La proposition de loi Demilly, visant à interdire le mariage aux couples dont l'un des époux est en situation irrégulière et à donner de nouveaux outils aux maires pour lutter contre les mariages arrangés, n'a pas été adoptée, hier, à l'Assemblée nationale. Récit.Â
« Vous n’avez pas bien géré votre journée parlementaire. » Bien que cruelle, cette pique du ministre de la Justice, Gérald Darmanin, au président du groupe UDR Éric Ciotti, n’est pas imméritée. Alors qu’un compromis paraissait envisageable sur certaines mesures de la proposition de loi Demilly, examinée hier dans le cadre de la « niche » parlementaire du groupe ciottiste, le choix de la faire examiner en dernier a empêché que les débats puissent aller à leur terme.
Évolution du texte
Revenons un peu en arrière. Le sénateur centriste de la Somme Christian Demilly avait, à l’origine, déposé un texte censé répondre à la situation du maire d'Haumont, Stéphane Wilmotte, puis celle du maire de Béziers, Robert Ménard, convoqué par la justice pour avoir refusé de marier un couple dont l’époux était en OQTF. La proposition de loi initiale disposait que « le mariage ne peut être contracté par une personne séjournant de manière irrégulière sur le territoire national. »
Il s’est immédiatement posé la question de l’inconstitutionnalité de cette disposition, dans la mesure où la Constitution garantit la liberté du mariage et que la jurisprudence des Sages est constante sur ce point : la liberté de se marier « n’est pas conditionnée à la régularité du séjour ».
En séance publique au Sénat, le texte a été largement récrit. L’article sur l’interdiction du mariage aux personnes en situation irrégulière a été conservé, mais d’autres articles ont été ajoutés, dans l’objectif de « protéger les maires », en leur donnant un certain nombre d’outils supplémentaires pour tenter de repérer des mariages arrangés : le Code civil permet, en effet, de ne pas procéder à un mariage s’il y a suspicion de « non-consentement ».
Le texte adopté par le Sénat prévoit donc que les futurs époux « fournissent à l’officier d’état civil (…) tout élément lui permettant d’apprécier leur situation au regard du séjour ». Ce qui ne résout pas tous les problèmes, du fait que si ces pièces ne peuvent être fournies, cela ne signifie pas automatiquement que le mariage est « arrangé ». Le texte prévoyait également de faire passer à deux moins renouvelables le délai laissé au procureur pour se prononcer, à la demande du maire, sur le fait de procéder au mariage ou pas ; et d’appliquer en la matière la règle du « silence vaut désaccord ».
La logique des sénateurs était claire : diviser le texte en deux parties, en laissant la possibilité au Conseil constitutionnel de censurer la phrase sur l’interdiction du mariage pour les personnes sans papiers, mais de maintenir les autres dispositions nouvelles. Ce qui aurait permis d’apporter, au moins en partie, la « solution juridique » demandée notamment par l’AMF.
En commission des lois de l’Assemblée nationale, le texte a été adopté conforme, c’est-à-dire sans modifications.
Fin de débat tronquée
C’est donc hier, lors de la niche parlementaire du groupe ciottiste UDR, que le texte a été présenté en séance publique. Il fallait s’attendre, sur ce texte très clivant, à ce que la gauche joue au maximum ses cartes pour retarder les débats, en sachant que, lors d’une niche parlementaire, les débats doivent obligatoirement et sans rémission s’interrompre à minuit, et qu’un texte dont l’examen n’est pas achevé à cette heure est abandonné.
Dans ce contexte, il paraissait bien imprudent de la part du groupe UDR de ne présenter la proposition de loi Demilly qu’en troisième position, avec un examen qui a démarré en milieu d’après-midi – d’où la petite pique adressée par Gérald Darmanin.
Le ministre de la Justice, tout comme le président de la commission des lois, Florent Boudié (Renaissance), ont adopté au début des débats une position équilibrée, assez conforme à celle du Sénat. Ce dernier a expliqué que les dispositions initiales de la proposition de loi étaient « frontalement contraires à la jurisprudence du Conseil constitutionnel ». Cet article n’était « pas conforme au droit français », Florent Boudié a demandé qu’il soit supprimé et « que l’on s’en tienne » aux autres dispositions qui, elles, « feraient droit à la demande légitime et forte des maires ».
Gérald Darmanin a jugé ces propos « excellents ». Il a fait part lui aussi de ses « réserves » sur l’article risquant d’être inconstitutionnel, mais a estimé que les autres mesures étaient « intéressantes » et « méritaient d’être adoptées à l’unanimité par le Parlement ».
Mais la gauche ne l’a pas souhaité. Les débats ont trainé en longueur – près de 300 amendements avaient été déposés – et chaque orateur a pris tout son temps pour s’exprimer.
Éric Ciotti, furieux, a demandé au représentant du gouvernement d’intervenir pour faire cesser cette « obstruction », exigeant que le gouvernement fasse appliquer l’article 44-2 de la Constitution, qui lui permet de limiter le nombre d’amendements examinés. Chose rarissime – et quelque peu douteuse sur le terrain de la séparation des pouvoirs –, Éric Ciotti a même annoncé en séance avoir « appelé le Premier ministre » et attendre sa réponse. Éric Ciotti a fustigé un « sabotage parlementaire » dont se seraient rendus complice Les Républicains – quasiment tous absents – et le gouvernement puisque, à 23 heures, Gérald Darmanin a annoncé qu’il ne ferait pas jouer l’article 44-2.
Dès lors, les choses étaient jouées : le groupe UDR a constaté qu’il ne restait plus assez de temps pour espérer pouvoir aller au bout du débat, et a quitté l’hémicycle, conduisant le président à mettre fin à la séance.
Les scrutins ayant eu lieu sur quelques amendements avaient montré qu’une majorité se dessinait pourtant pour adopter la solution prônée par le président de la commission des lois – rejeter l’interdiction du mariage pour les sans-papiers, mais conserver les « outils » pour les maires. Finalement, c’est tout le texte qui restera dans les cartons.
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Budget
Déficit public : le gouvernement annonce un nouveau gel de crédits de 5 milliards d'eurosÂ
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L'objectif du gouvernement est d'éviter un nouveau dérapage budgétaire. Bien qu'elles semblent épargnées à première vue, les collectivités pourraient être indirectement affectées par cette mesure, comme lors des précédentes coupes. D'autant que l'exécutif a ciblé les dépenses des communes qui progressent « plus vite » que prévu.
Le scénario se répète. Un « effort supplémentaire de cinq milliards d'euros sur la dépense » publique sera encore nécessaire cette année pour contenir le déficit du pays en 2025 et ainsi « rétablir durablement » les comptes publics. C’est ce qu’a annoncé, hier, le gouvernement devant le comité d'alerte des finances publiques.
Après deux années de dérives importantes, l’objectif est d’éviter un nouveau dérapage budgétaire et de tenir les objectifs de déficit public (5,4 % de PIB) cette année. Pour 2026, le gouvernement espère encore le réduire à 4,6 % et cherche déjà à économiser quelque 40 milliards d'euros dans le prochain budget.
En 2025, déjà 10 milliards d’euros gelés
Outre les 1,7 milliard d'euros d'économies sur les dépenses de santé dévoilés, dès mercredi, par la ministre du Travail et de la Santé, Catherine Vautrin, ce sont donc 3 milliards d'euros de crédits supplémentaires prévus pour l'État qui ne seront finalement « pas engagés cette année ». À cela s’ajoutera « une mise en réserve complémentaire [qui] sera notifiée dans les prochaines semaines », a indiqué le gouvernement, dans son communiqué, au sortir de la deuxième réunion du comité d’alerte sur le budget.
Bien qu’elles semblent épargnées à première vue (ne serait-ce que parce que toute décision à leur égard demanderait une loi de finances rectificative, ce que le gouvenrement n'a pas du tout envie d'engager), les collectivités pourraient tout de même être affectées par cette mesure si elle venait à frapper les crédits des politiques qu’elles mènent.
Créé en début d’année, cet exercice de « transparence » – qui réunit notamment les délégations parlementaires aux collectivités locales et les associations d’élus – vise à « améliorer le pilotage des finances publiques » et à présenter les éventuels ajustements à réaliser pour tenir les engagements budgétaires de l'année. Mais il reste, toutefois, très critiqué.
Le serrage de ceinture pour l'État, la Sécu et les collectivités locales est donc porté à 10 milliards d’euros puisque Bercy avait déjà annoncé, en avril, un effort budgétaire de 5 milliards d'euros pour l’année 2025. Un gel des crédits qui a, une nouvelle fois, rogné les budgets de la mission dédiée aux collectivités et le Fonds vert. Entre autres.
Sans compter que la ministre des Comptes publics a prévu qu'« un tiers des agences et des opérateurs » de l'État allaient être « fusionnés ou supprimés » d'ici la fin de l'année. Une mesure qui pourrait là aussi affecter indirectement les collectivités.
Le scénario commence à ressembler à celui de 2024, où quelque 15 milliards d’euros de coupes claires avaient, in fine, été décidé par rapport au budget initial. Le gouvernement de Gabriel Attal avait, en effet, gelé, de la même manière, 16,5 milliards d’euros durant l’été dernier, avant qu’une grande partie de ces crédits ne soient tout simplement annulés en fin d’année. Cette « réserve de précaution » avait intégré les coupes claires décidées tout au long de l’année 2024 avec des ponctions qui avaient notamment affecté le Fonds vert, l'Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT), mais aussi directement les crédits alloués aux collectivités.
Des indicateurs « ni fiables ni précis »
« Cet ajustement est indispensable pour garantir la soutenabilité de notre trajectoire de réduction des déficits et préparer avec sincérité le budget 2026 », a ainsi justifié l’exécutif, désormais sous la menace d’une motion de censure déposée hier par les socialistes. Car « si les recettes sont pour le moment globalement conformes aux prévisions de la loi de finances initiale, des tensions apparaissent sur les dépenses », a-t-il affirmé.
Concrètement, le gouvernement explique le nouvel effort sur les dépenses de l’État cette année par « des risques de dépassement qui demeurent pour certains ministères ». En ce qui concerne celui sur la Sécurité sociale, c’est « la dynamique des indemnités journalières » d'arrêts maladie et les « dépenses des établissements publics de santé », notamment.
Du côté des collectivités locales, l’exécutif point les dépenses de fonctionnement qui « progressent légèrement plus vite que la prévision ». « Notamment dans le bloc communal. » Sans plus de précisions.
Une analyse aussitôt balayée par Intercommunalités de France, qui a fustigé les indicateurs utilisés qui ne seraient « ni fiables ni précis ». « Ce sont ces mêmes indicateurs […] qui ont servi à Bruno Le Maire, alors ministre de l’Économie, pour annoncer en septembre 2024 qu’à elles seules, les collectivités pourraien"« dégrader les comptes 2024 de 16 milliards d’euros", avec une estimation de la hausse des dépenses locales de 8 %, qui s’est finalement avérée être de 4,5 %, soit près de la moitié », a dénoncé l’association d’élu, dans un communiqué.
« Les mêmes causes produisant les mêmes effets, le gouvernement fait état d’une hausse des dépenses des collectivités qui s’établirait à hauteur de 2,3 % », relate Intercommunalités de France. Or, selon ses propres estimations basées sur les budgets d’un panel de 80 EPCI, l’augmentation de leurs dépenses de fonctionnement « atteindrait 1,2 % seulement en 2025 ». Elle serait ainsi « en-dessous des prévisions de la loi de finances (2 %) et en-dessous de l’inflation prévue pour 2025 (1,8 % également) », selon elle.
« Si aucune mesure n’a été annoncée à ce stade pour contraindre les budgets des collectivités, déjà bridés par des mesures de contraintes inédites sur leurs budgets 2025 à hauteur de plus de 8 milliards d’euros », Intercommunalités de France a dit souhaiter que « les discussions en cours dans le cadre des conférences financières des territoires se fassent à l’appui d’un diagnostic non seulement partagé, mais aussi fiable ».
En amont de ce deuxième comité d’alerte, l’AMF avait indiqué ne se faire aucune « illusion » sur ce qu’elle considérait comme un « nouvel exercice de communication de Matignon et non comme une véritable réunion de travail ». L'association avait, toutefois, fait part d’un « point de vigilance majeur » : que « le gouvernement n’impose pas de charges supplémentaires aux communes et le maintien de la capacité d’investissement des collectivités territoriales ». Pendant le comité d'alerte, le représentant de l'AMF, Joël Balandraud, a alerté le gouvernement sur la baisse des recettes de la TVA, du fait du ralentissement de la croissance, et qui affecte directement les collectivités locales. Il a d'autant plus enjoint le gouvernement, dans ce contexte, à ne pas brider la dynanmique de l'investissement en contraignant les collectivités à réduire leurs dépenses, l'investissement des collectivités étant l'un des moteurs de la croissance.
Notons enfin que l'Insee, dans sa dernière livraison statistique parue hier, constate un nouvel emballement de la dette de l'État au premier trimestre, tandis que la dette des collectivités, sur la même période, est en baisse.
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Sports
Financement du sport : des signaux inquiétants pour les collectivités
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Dans un contexte budgétaire tendu, le Plan 5000 Équipements - Génération 2024, géré par l'Agence nationale du sport, a subi une coupe de 23 millions d'euros.  « Un mauvais signal » pour les associations d'élus qui demandent une continuité et une garantie des financements de l'État.Â
La ferveur des Jeux olympiques et paralympiques 2024 a vite laissé place aux désillusions. Alors que le gouvernement cherche à réaliser 40 milliards d'économies, « les coupes claires dans l’exécution du budget sport 2025 ainsi que la proposition de budget rectificatif de l’Agence nationale du Sport soulèvent de vives inquiétudes chez les acteurs du sport », a déclaré David Lazarus, vice-président de l'Agence Nationale du Sport et coprésident de la commission Sport de l’AMF, à l’occasion du Conseil d’administration de l’Agence nationale du Sport qui s’est tenu mardi.
Et les principales victimes de ces coupes budgétaires sont… les collectivités. Elles sont en effet les premiers financeurs du sport, notamment le bloc communal qui couvre à lui seul plus de 90 % des dépenses sportives des collectivités. Cependant, les collectivités ne peuvent pas « affronter seules le mur d’investissements nécessaires au développement de la pratique partout, et pour toutes et tous » a expliqué le maire de Chambly.
De « mauvais signaux »
Pour répondre aux enjeux budgétaires, le Plan 5000 Équipements - Génération 2024 a été révisé de 98 à 75 millions d’euros avec une réduction de 13 millions sur les équipements structurants et 10 millions sur les équipements de proximité.
« Pour les collectivités c’est un mauvais signal », confie à Maire info David Lazarus. Ce mauvais signal l’est d’autant plus dans cette période « d’après Jeux » et où « l’héritage de ces Jeux était un engagement fort », rappelle le coprésident de la commission Sport de l’AMF. « L’Agence nationale du sport a pour mission de s’assurer de faire vivre cet héritage, mais malheureusement elle se retrouve en partie démunie pour pouvoir remplir cette fonction ».
Cette semaine a aussi été marquée par l’annonce d’une mauvaise nouvelle : pour la saison 2025-2026, le Pass’Sport bénéficiera à moins de jeunes que les années précédentes, même si son montant a timidement été révisé (lire Maire info du 25 juin). Là encore, c’est la déception du côté des élus : « On rate une grande cible, on passe à côté de jeunes enfants qui en avait besoin pour pouvoir pratiquer davantage de sport », regrette David Lazarus qui fustige une « décision insatisfaisante ».
« C’est une série de mesures négatives que Bercy impose au ministère des Sports, observe-t-il. Bercy ne tient pas compte de la situation post olympique et c’est un signe particulièrement négatif. »
L’avenir est tout aussi inquiétant pour le financement du sport : « Il y a une inquiétude forte pour le budget 2026 de l’ANS car on se doute que Bercy va baisser les financements et nous risquons fort un effet ciseaux et une trésorerie insuffisante pour pouvoir faire face aux obligations de paiements », explique David Lazarus.
Taxes et pluriannualité des crédits
C’est un serpent de mer en matière de financement du sport : le déplafonnement des taxes affectées au financement de l’Agence nationale du Sport. Les collectivités sont favorables, et ce depuis des années, à ce que « le sport puisse financer le sport », comme le résume David Lazarus. Pour rappel, chaque année, les paris sportifs rapportent plus de 200 millions d’euros de taxes à l’État mais un plafond a été mis en place pour l’attribution des revenus au sport, le reste étant reversé au budget général.
Au total, deux taxes sont affectées au financement du sport : la taxe dite « Buffet » de « contribution sur la cession à un service de télévision des droits de diffusion de manifestations ou de compétitions sportives » et les taxes sur les paris sportifs (en ligne et physiques). « Si on est dans une période difficile concernant la taxe Buffet, les paris sportifs n’ont jamais été aussi importants qu’en 2024 », observe David Lazarus qui perçoit dans cette proposition une véritable opportunité pour faire vivre le sport dans les territoires.
Enfin, les associations d’élus plaident pour une pluriannualité des crédits budgétaires de l’État octroyés à l’Agence nationale du Sport. « L’Agence a besoin de connaître la stabilité de ces financements d’une année sur l’autre notamment pour sécuriser les investissements des collectivités qui se lancent dans un projet de rénovation d’équipement structurant par exemple », ajoute David Lazarus.
L’ANS remise en cause
Au-delà de ces irritants financiers, l’Agence nationale du sport (ANS) est remise en cause depuis la fin des Jeux. Lors des discussions autour du projet de loi de finances pour 2025, il avait largement été question de redéfinir le cadre d’intervention de l’ANS en lui retirant notamment la gestion des financements accordés aux collectivités territoriales, pour la recentrer sur le sport de haut niveau.
« L’ANS a plusieurs chasseurs qui l’ont dans leur viseur, résume David Lazarus. Je pense que l’Agence doit conserver sa spécificité : elle est le lieu de rencontre de l’ensemble de l’écosystème autour du sport, un lieu d’échange de débats et de remontée d’informations. Elle permet de prendre des décisions collégiales, plus proches de la réalité du terrain. Elle doit conserver les moyens de pratiquer le développement de la pratique sportive. Venir rogner ou supprimer ce deuxième pilier serait mortel pour l’Agence. »
En mai dernier, le Premier ministre a chargé le député de la Saône-et-Loire Benjamin Dirx d'une « mission temporaire ayant pour objet l'évaluation et l'optimisation des moyens alloués à la politique publique du sport ». Les conclusions de ce rapport devraient être présentée à la fin du mois de juillet. De même, l’Agence fait en ce moment l’objet d’une mission de contrôle et d’évaluation confiée à l’IGF, l’IGA et l'IGESR. En tant que représentant des collectivités, David Lazarus rappellera à cette occasion qu’il est essentiel que l’action de l’ANS en direction des collectivités soit pérennisée.
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Vie publique
Ni drapeau israélien ni drapeau palestinien au fronton des mairies, tranche la justice
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Entre avant-hier et hier, les maires de Nice et de Besançon ont été tous les deux contraints par une décision de justice de retirer les drapeaux israélien et palestinien qu'ils avaient placés au fronton de l'hôtel de ville. Les services publics doivent strictement respecter le principe de neutralité, ont rappelé les juges.
À Nice, c’est avec dépit que le maire, Christian Estrosi, a twitté hier qu’il était « contraint par décision de justice de retirer les drapeaux israéliens du fronton de la mairie », annonçant qu’il allait, à partir d’aujourd’hui, afficher à la place « les visages des otages israéliens encore retenus par le Hamas ».
Nice : « Revendication d’une opinion politique »
Cette initiative est logique, dans la mesure où le maire de Nice a toujours plaidé que l’apposition du drapeau israélien sur sa mairie n’était pas un signe de soutien à Israël mais aux otages détenus par le Hamas. Sauf que cet argument n’a pas convaincu le juge du tribunal administratif de Nice.
Ce n’est pas le préfet qui a attaqué la présence de ces drapeaux sur l’hôtel de ville de Nice, mais des particuliers, qui ont demandé au juge des référés de les faire retirer – arguant que cette décision du maire méconnaît le principe de neutralité des services publics et constitue « une revendication politique » non conforme « aux engagements internationaux de la France ». En réponse, l’avocat de la commune a plaidé que ces drapeaux ne sont là que pour soutenir les otages, ce qui ne contrevient pas aux engagements de la France et qu’il n’y a aucun risque de trouble à l’ordre public.
Ces arguments n’ont pas convaincu le juge, qui a estimé au contraire que « ce pavoisement, eu égard à sa persistance dans le temps, à l’ampleur prise par le conflit au Moyen-Orient et aux tensions mondiales existantes, ne peut être regardé comme un unique symbole de soutien aux otages mais doit également être regardé comme un soutien à l’État israélien ». L’apposition de ces drapeaux « doit donc être considérée comme la revendication d’une opinion politique ».
Comme c’est en général le cas dans ce type d’affaires, le juge a estimé que la décision du maire contrevenait à l’article L2121-29 du Code général des collectivités territoriales (CGCT), qui dispose que le conseil municipal « règle les affaires de la commune » et ne doit gérer que « les objets d’intérêt local ».
Il a donc donné cinq jours au maire pour retirer les drapeaux litigieux, et condamné la commune de Nice aux dépens.
Pas de drapeau palestinien à Besançon
Dans le Doubs, c’est en revanche le préfet qui a demandé à la maire, Anne Vignot, de retirer le drapeau palestinien qu’elle a fait apposer au fronton de la mairie le 23 juin. Dans un courrier que lui a adressé la maire en réponse, celle-ci lui a demandé de « reconsidérer sa position », avec un argument qui semblait entendable : alors que le préfet estime que de pavoisement est en contradiction avec les engagements de la France, la maire a rappelé que le président de la République, le 30 mai dernier, a déclaré que « la reconnaissance de l’État palestinien n’est pas seulement un devoir moral mais une exigence politique ».
Cela n’a pas suffi à convaincre le préfet, qui a porté l’affaire devant le juge des référés du tribunal administratif de Besançon. Le préfet a plaidé devant le tribunal que le pavoisement porte « une grave atteinte au principe de neutralité des services publics » en cela qu’il « symbolise un soutien politique à la cause palestinienne » ; et que la maire ne peut se prévaloir de la volonté de l’État français de reconnaître un État palestinien, dans la mesure où « aucune décision en ce sens n’a été prise » – une déclaration du président de la République n’équivaut pas à une décision de l’État.
Notons que le préfet, pour demander au tribunal de prendre une décision de suspension très rapide – sous 48 heures – s’est appuyé sur la récente loi « confortant le respect des principes de la République », qui étend le déféré-suspension aux cas où la décision contestée est de nature à « porter gravement atteinte aux principes de laïcité et de neutralité des services publics ».
Quant à la commune, elle a défendu sa position devant le juge, en rappelant qu’il y a déjà un drapeau ukrainien sur le fronton de la mairie sans que cela pose de problème et que le retrait du drapeau palestinien pourrait, lui, causer des troubles à l’ordre public en « mettant en émoi la population bisontine ».
Le juge de Besançon n’a pas davantage été sensible à ces arguments que celui de Nice. Il a rappelé que la neutralité du service public, garantie par la Constitution et la loi de 1905, ne doit pas s’entendre uniquement d’un point de vue religieux « mais encore philosophique et politique ».
Le juge estime donc que l’apposition du drapeau palestinien est bien une « revendication d’une opinion politique » et a exigé que le drapeau soit retiré immédiatement.
Une part de « subjectivité »
Ces deux décisions, à Nice et Besançon, vont dans le même sens et paraissent relativement cohérentes… même si, comme le note l’avocat spécialiste du droit des collectivités Éric Landot sur son blog, l’appréciation du juge sur le fait de savoir si un pavoisement est ou non conforme aux positions diplomatiques de la France contient « une part de subjectivité ».
Rappelons que le tribunal administratif de Versailles, en décembre dernier, a validé l’apposition du drapeau ukrainien au fronton de la mairie de Saint-Germain-en-Laye, jugeant qu’il ne s’agissait pas d’une « prise de position politique » mais « d’une marque de solidarité envers une nation victime d’une agression militaire ».
À partir de quand la « solidarité » devient-elle une « prise de position politique » ? C’est bien là, en effet, que prend place une certaine dose de « subjectivité » de la part du juge. Il faut dire que ces différents jugements, parfois contradictoires, sont tous issus de juridictions de première instance. Il ne serait pas inutile, pour donner de la clarté au débat, que le Conseil d’État prenne à son tour position sur ce sujet.
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Commerce
La réforme des titres-restaurants suscite la colère des restaurateurs
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À peine présentée et déjà critiquée: la réforme des titres-restaurants portée par la ministre du Commerce et des PME Véronique Louwagie, qui pérennise leur utilisation totale pour faire les courses alimentaires, a provoqué jeudi la colère des restaurateurs.
« C'est un séisme pour la restauration et une trahison du gouvernement », s'est indigné auprès de l'AFP Franck Chaumes, responsable de la branche restauration de l'Umih, première organisation patronale du secteur. En cause: l'abandon dans la réforme de la piste d'un double plafond d'utilisation des titres-restaurants, qui aurait été plus élevé dans les restaurants que dans la grande distribution.
« Cette réforme vise à simplifier, moderniser et protéger, sécuriser le titre-restaurant. Le titre-restaurant concerne plus de 5,5 millions de salariés. Cela correspond à 10 milliards d'euros émis chaque année et c'est un élément important de pouvoir d'achat des salariés », a rappelé Véronique Louwagie lors d'une présentation jeudi.
La possibilité de faire toutes ses courses alimentaires avec ces titres (sauf l'alcool, les confiseries, les produits infantiles et les aliments animaliers), dispositif temporaire lancé en 2022 et prorogé chaque année depuis, sera pérennisée à partir de 2027.
Le gouvernement fait valoir la popularité de cette possibilité auprès des salariés ainsi qu'un changement des modes de consommation, entre télétravail et repas préparés à la maison puis apportés sur le lieu de travail.
« On est très en colère. Ça fait deux ans qu'on essaie de trouver un consensus, de trouver un usage qui convienne à tout le monde. C'est inacceptable d'abandonner le double plafond qui est pour nous une condition sine qua non. Nous ne soutiendrons pas ce projet de loi », a indiqué à l'AFP Franck Trouet, délégué général du GHR, autre organisation de la restauration.
Si le véhicule (projet ou proposition de loi) n'est pas encore arrêté, la ministre mise sur un calendrier « à l'automne 2025 ou au printemps 2026 ».
Commissions
Les restaurateurs de l'Umih et du GHR, qui évaluent à 1,5 milliard d'euros leur manque à gagner depuis l'extension du dispositif pour faire toutes les courses, ont annoncé à l'AFP leur intention de boycotter les assises de la restauration prévues à l'automne par la ministre.
Véronique Louwagie fait valoir que la dématérialisation des titres-restaurants prévue pour 2027, autre point de la réforme, « va simplifier la vie des restaurateurs ». L'utilisation le dimanche, la transparence demandée aux émetteurs de titres-restaurants sur les commissions avec la fin des remises de fin d'année, sont également selon elle des points favorables aux restaurateurs.
« Les salariés financent leurs titres, ils doivent pouvoir les utiliser librement », a réagi Layla Rahhou, déléguée générale de la Fédération du commerce et de la distribution, saluant une réforme « de bon sens ».
« La dématérialisation, on l'attendait pour 2026 et les commissions, ça ne représente rien : les adhérents de l'Umih payent en moyenne 3,5 %, si elles baissent d'un point, ça fait entre 1 000 et 1 100 euros par an par établissement, ce n'est pas ça qui va sauver la restauration », s'emporte Franck Chaumès.
La réforme ne prévoit pas de plafonnement des commissions versées par les commerçants, même si la ministre prévoit « une vigilance très active » pour que les différents acteurs se mettent autour de la table pour faire baisser ces coûts.
Un point qui a bénéficié à Edenred, maison mère du Ticket Restaurant dont l'action a gagné plus de 6 % à la Bourse de Paris jeudi à la clôture. Le groupe estime que la réforme permettra à davantage de salariés de bénéficier des titres-restaurants, qui sont proposés aujourd'hui à 27 % d'entre eux.
Mais « nous regrettons que le gouvernement n'ait pas retenu l'idée du double plafond. Cela aurait été une mesure de justice et d'équité vis-à-vis de la restauration, reconnaissant que le montant d'un repas n'est pas le même dans un restaurant et au supermarché », a souligné auprès de l'AFP Ilan Ouanounou, directeur général d'Edenred France.
Même point de vue chez Pluxee (ex-Sodexo), autre émetteur de titres-restaurants qui soutient « l'instauration d'un double plafond de dépense ». « Toutes les mesures ne nous conviennent pas mais elles sont l'objet d'un compromis et certaines vont clairement dans le bon sens », a jugé de son côté Youssef Achour, PDG de Upcoop (UpDéjeuner).
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Journal Officiel du vendredi 27 juin 2025
Ministère de l'Économie, des Finances et de la souveraineté industrielle et numérique
Ministère de l'Intérieur
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