Édition du vendredi 28 mars 2025 |
Finances
Réduction du déficit : vers un retour de la « contractualisation » pour les collectivités ?
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« Conférence des finances publiques », « comité d'alerte », « conférence financière des territoires »… Le gouvernement prévoit plusieurs réunions ces prochaines semaines visant à trouver des solutions pour réduire le déficit avec, peut-être, l'idée de rétablir une fois encore une nouvelle mouture des Contrats de Cahors.
Certes, c’est un peu moins pire que prévu, mais la situation reste très préoccupante : selon l’Insee, le déficit public pour 2024 s’élèverait à 5,8 % du PIB et non 6 % comme le prévoyait le gouvernement. Ce qui reste « bien trop élevé », a reconnu le ministre de l’Économie Éric Lombard, hier, qui affirme que l’objectif de repasser sous la barre des 3 % en 2029 reste pourtant tenable.
« Cauchemar »
La trajectoire sur laquelle continue de parier le gouvernement est d’aboutir à un déficit à 5,4 % du PIB en fin d’année 2025, et 4,7 % fin 2026. Ce qui supposera que « chacun soit mis à contribution », a annoncé mercredi la porte-parole du gouvernement, Sophie Primas, dans le cadre du budget pour 2026 qui sera, n’a-t-elle pas hésité à déclarer, « un cauchemar ».
Mais le gouvernement semble avoir décidé de changer de méthode pour préparer ce budget, en discutant en amont plutôt que d’asséner les mauvaises surprises à la rentrée de septembre. Dans une interview à L’Opinion, ce matin, la ministre chargée des Comptes publics, Amélie de Montchalin, estime qu’il faut en finir avec l’époque où le budget était « présenté à l’automne sans aucune discussion budgétaire avant le mois de juillet ».
D’où la décision de réunir, le 15 avril, une « conférence des finances publiques », au sein de laquelle sera organisé un « comité d’alerte » : « Il sera composé de l’État, des collectivités mais aussi des acteurs de la Sécurité sociale », explique la ministre, afin « d’agir dès maintenant ». L’idée étant de faire preuve de davantage de « transparence sur les chiffres des recettes et des dépenses ».
Par ailleurs, cette fois plus spécifiquement sur les sujets liés aux finances locales, le ministre de l’Aménagement du territoire et de la Décentralisation, François Rebsamen, a annoncé la tenue « début avril » – dans quelques jours donc – d’une « conférence financière des collectivités locales » incluant les associations d’élus et des parlementaires. Devant la délégation aux collectivités de l’Assemblée nationale, l’ancien maire de Dijon a donné le ton : cette conférence devra ouvrir « une nouvelle séquence de contractualisation » pour les collectivités. Autrement dit, le gouvernement souhaite rouvrir le dossier particulièrement sensible des contrats de Cahors, dont l’échec retentissant avait pourtant marqué le premier quinquennat d’Emmanuel Macron.
On ignore évidemment aujourd’hui ce qui ressortira précisément de ces diverses réunions, mais pour l’AMF, une chose est sûre : l’association refusera de se voir imposer des décisions unilatérales et souhaite que les solutions soient co-construites avec l’État. Mercredi dernier, au sortir d’une réunion entre le président de l’AMF, David Lisnard, et le ministre Éric Lombard, l’AMF prévenait, sur X : « La conférence financière État/collectivités annoncée devra être une instance de dialogue et de négociation et ne pas se réduire à une simple présentation des conclusions tirées à l’avance par l’État. »
Encore et toujours la question des dépenses des collectivités
Ces conférences seront-elles, une fois encore, l’occasion d’un procès fait aux collectivités jugées toujours « trop dépensières » par le gouvernement et sommées, sur un ton plus ou moins comminatoire, de réduire leurs dépenses de fonctionnement ?
C’est certainement ce que souhaiterait le député du Gers Jean-René Cazeneuve (Renaissance), qui s’est encore, cette semaine, livré à son exercice favori : expliquer que les collectivités (à l’exception des départements) sont dans une santé financière florissantes et que les élus locaux sont des paniers percés. Une analyse complaisamment relayée par certains médias, manifestement peu au fait des difficultés grandissantes auxquelles doivent faire face les collectivités dans un contexte marqué par des années d’inflation et de restriction des dotations de l’État et de suppression des recettes fiscales. Et qui se souhaitent pas tenir compte, comme l’a pourtant rappelé l’AMF avant-hier, que les dépenses des collectivités ne sont pas de l’argent jeté par les fenêtres mais « des dépenses bénéfiques au soutien de la croissance et à l’offre de services publics ».
Il faut néanmoins reconnaître que les membres du gouvernement, eux, ne jouent – pour l’instant – pas sur le même registre que le député du Gers. Ainsi Amélie de Montchalin salue-t-elle, dans son interview à L’Opinion, « un mouvement de responsabilité notamment de la part des collectivités qui ont modéré leurs dépenses ».
Il ne fait guère de doute, néanmoins, que le gouvernement va demander aux collectivités de se serrer la ceinture et que le projet de budget pour 2026 risque de contenir des mesures d’économies drastiques. D’autant plus que la nécessité de réduire le déficit public se heurte aux récentes annonces sur le réarmement et la volonté affichée par le gouvernement de trouver plusieurs dizaines de milliards supplémentaire pour le budget de la Défense.
Une équation en apparence impossible, qui sera certainement au menu des réunions prévues en avril.
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Énergies renouvelables
Coup de froid sur le solaire photovoltaïque
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Le gouvernement a publié hier l'arrêté actant la forte baisse du soutien de l'État à l'énergie solaire photovoltaïque. Cette baisse touchera essentiellement les petites installations installées par les particuliers mais également, à terme, celles des collectivités.
Certes, la potion est un peu moins amère que prévu. Mais c’est tout de même un coup dur pour la filière photovoltaïque, non seulement pour les consommateurs mais également pour les installateurs de panneaux solaires, dont beaucoup estiment que leur survie même est en danger.
« Recentrer les aides »
C’est en février dernier que le ministère chargé de l’Industrie et de l’Énergie a présenté un premier projet de décret, particulièrement brutal, qui a depuis été quelque peu adouci.
Le texte initial était une véritable douche froide pour le secteur des installations de panneaux solaires sur bâtiment, hangars et ombrières inférieures à 500 kWc. Sur tous les segments de ce secteur, allant des petites installations individuelles aux panneaux installés, par exemple, sur les ombrières de parkings des collectivités ou les hangars agricoles, le tarif d’achat (c’est-à-dire le prix que paye EDF pour racheter l’électricité produite) était brutalement diminué, et de façon rétroactive, de surcroît, puisque la baisse devait entrer en vigueur au 1er février. Pour les plus installations moyennes, le taux de dégressivité du tarif d’achat était fortement augmenté. Et pour les plus puissantes installations (comprises entre 200 et 500 kWc), il était mis fin au tarif d’achat à compter du 1er juillet prochain, remplacé par un système de « complément de rémunération », moins favorable.
Pourquoi ces décisions, alors que les gouvernements successifs, depuis des années, ne cessent de pousser au développement du photovoltaïque au nom de la transition énergétique ? La réponse est simple : parce que cela coûte trop cher à l’État, en période de disette budgétaire. Interrogé en février par plusieurs parlementaires, le gouvernement ne s’en est pas caché. Éric Lombard, ministre de l’Économie, a ainsi reconnu le 13 mars devant les députés que « la précédente programmation pluriannuelle de l'énergie était (…) trop ambitieuse » et représentait « une surcharge financière pour l’État ». Il s’agit donc de « réduire la production d’énergie photovoltaïque ».
Quelques jours plus tôt, le ministre de l’Industrie et de l’Énergie, Marc Ferracci, expliquait également aux députés que le gouvernement avait fait le choix de « recentrer les aides » en privilégiant « les grandes installations », dont « l’efficacité économique est supérieure ». Une décision qui avait provoqué la colère de la députée écologistes de la Loire-Atlantique, Julie Laernoes : « Les projets que vous condamnez sont ceux des collectivités, des agriculteurs, des PME qui investissent pour produire une énergie propre ! ».
Pas de rétroactivité
Après plusieurs semaines de concertation et un intense lobbying des professionnels de la filière, le projet d’arrêté a été un peu adouci… du moins pour les plus grosses installations. Les principales concessions ont été faites sur les installations supérieures à 100 kWc, pour qui le tarif d’achat restera inchangé, mais seulement jusqu’au 1er juillet. À partir de là s’appliqueront des règles de dégressivité.
Pour ces installations supérieures à 100 kWc, un système de caution (« garantie financière ») de 10 000 euros est mis en place. Les installateurs devront, pour chaque projet, déposer cette caution auprès de la Caisse des dépôts ou d’un établissement de crédit. Si le projet arrive à son terme, l’installeur récupérera la caution. Dans le cas contraire, c’est le producteur lésé qui la récupérera.
Le certificat de dépôt de la caution (« attestation de constitution de garantie financière ») devra obligatoirement figurer dans le dossier de demande de raccordement au réseau public du producteur. Sauf si le producteur est une collectivité locale ou un EPCI : dans ce cas, « cette pièce peut être remplacée par la délibération approuvant l'installation ».
Autre amélioration par rapport au projet de décret initial : la rétroactivité est abandonnée. Les nouveaux tarifs n’entrent pas en vigueur au 1er février, mais à partir d’aujourd’hui.
En dehors de cela, c’est la douche froide pour les petites installations (solaire résidentiel) : les tarifs de rachat sont divisés par trois. Le gouvernement souhaite clairement encourager l’autoconsommation plutôt que la revente – même si la prime à l’autoconsommation, elle aussi, diminue. Il ne sera désormais plus possible de revendre la totalité de l’électricité produite.
Baisse de la TVA
Autre problème qui inquiète profondément les installateurs, notamment les plus petits d’entre eux : ces mesures entrent en vigueur plus de six mois avant la diminution annoncée de la TVA sur l’achat de panneaux solaires, qui devrait passer de 20 % à 5,5 % en octobre. Vu la baisse drastique des tarifs de rachat, qui rend l’installation de panneaux solaires moins attractive, il y a un gros risque de voir les consommateurs attendre le mois d’octobre pour installer des panneaux, afin de les payer moins cher. Les installateurs craignent donc un coup d’arrêt de six mois sur les projets, auquel bien des artisans craignent de ne pas survivre.
Ces mesures pourraient donc mettre un coup de frein brutal à une filière en plein essor – l’an dernier, le nombre d’installation photovoltaïques raccordées par Enedis a augmenté de 20 % par rapport à l’année précédente. C’est un mauvais coup pour toute une filière économique, et un mauvais coup pour la transition énergétique, une fois encore victime de la situation budgétaire du pays.
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Social
Au congrès de l'Unccas, les élus en charge du social s'inquiètent pour l'avenir
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Réunis en congrès à Chambéry, en Savoie, jeudi 27 et vendredi 28 mars, les centres communaux (et intercommunaux) d'action sociale se projettent sur la prochaine campagne des municipales dans un an. Au terme d'un mandat difficile et d'un environnement toujours plus complexe avec des moyens de plus en plus contraints.
10,8 % des élus en charge du social ne solliciteront pas de nouveau mandat. Un autre tiers (29 %) sont prêts à se représenter, mais à condition de changer de délégation… Au total, près de quatre élus sur dix veulent donc tourner la page dans un an. Tandis qu’un autre tiers sont encore indécis.
Ces projections sont extraites d’une enquête réalisée par le Cevipof (Sciences Po/CNRS) auprès de 500 élus du social, commandée par l’Union des CCAS et dévoilée lors de son congrès.
« Si les élus estiment leur action utile, ils restent inquiets quant à l’avenir. Lorsqu’ils se projettent sur l’évolution de la cohésion sociale dans les cinq prochaines années, la note moyenne n’atteint que 3,5 sur 10. Un chiffre qui traduit un sentiment de fragilité face aux défis sociaux et économiques », résument les auteurs de l’étude, Martial Foucault et Éric Kerrouche, également sénateur des Landes.
Un sentiment déjà perceptible dans le titre même de ce 94e congrès : « L’urgence sociale, tenir jusqu’à quand ? », tout comme l’intitulé de certaines tables rondes : « les communes ont-elles vocation à faire toujours plus à la place de l’État ? », « services publics demain, vers des services au rabais ? ». « J’étais arrivé avec le moral ce matin, mais vous avez réussi à me faire déprimer ! », finira par confier un congressiste à la fin de l’une d’elles.
Année cinq du mandat municipal…
Ce mandat a démarré en 2020 avec une pandémie d‘ampleur inédite, « une entrée en matière très compliquée » a rappelé la ministre du Travail, de la Santé, des Solidarités et des Familles, Catherine Vautrin. « Il n’y avait pas de manuel mais de la débrouille et nous nous en sommes tous sortis ! ».
La débrouille c’est ce que beaucoup de CCAS ont l’impression de continuer à faire, réussissant à préserver des budgets qui ne suffisent malgré tout pas à répondre à la hausse des besoins sociaux. Comme ils en ont témoigné lors de cette première journée de congrès, évoquant des situations « ubuesques », des choix « douloureux », auxquels ils sont confrontés, fustigeant l’État qui « silencieusement se retire ». « Il y a urgence démocratique », s’inquiète un élu de Loire-Atlantique, « car nous sommes le premier mètre républicain, si nous nous affaissons c’est la République qui baisse les bras ! ». Autre mise en garde, celle de Guillaume Mathelier, maire d’Ambilly, et docteur en sciences politiques, à propos du recours à l’intelligence artificielle dans l’accès aux droits.
Si les élus cherchent du baume au coeur, ils en trouveront - un peu - dans le baromètre de l’action sociale réalisé par l’Ifop pour l’UNCCAS (1). Les avis négatifs sur l’action sociale restent majoritaires. Mais la proportion de Français à considérer que l’action sociale n’est « pas satisfaisante » continue de baisser, frôlant les 50 % cette année, contre 59 % en 2024, et 62% en 2023. Les avis les plus négatifs viennent des personnes sans doute les plus concernées, car disposant de plus faibles revenus (en dessous de 2 000 euros).
La santé reste la « priorité numéro un », pour près de 9 français interrogés sur dix (88 %), devant l’alimentation (70 %) et le logement (69 %). Les Français interrogés soutiennent l’idée de réduire des exonérations ou avantages fiscaux aux entreprises ou certaines dépenses publiques si cela doit permettre d’avoir « davantage d’action sociale », en revanche, ils refusent d’en payer directement les frais si cela devait se traduire par une augmentation d’impôts (locaux ou national).
Ce baromètre met enfin en avant le fait que pour près d’un électeur sur trois (32 %), « l’ambition et l’envergure du projet de solidarité » d’une liste constituera un critère déterminant de vote. « Le maintien des services publics de qualité dans la commune », restant, de loin, le premier critère (63 %).
Le prochain congrès de l’UNCCAS, en 2026, sera celui du centenaire de l’association. Il aura lieu à Paris. Son président Luc Carvounas propose que la santé mentale et la ruralité soient les priorités de l’UNCCAS pour ce prochain mandat.
(1) Echantillon de 1457 personnes, de 18 ans et plus, interrogées entre le 6 et le 7 mars.
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Cybermalveillance
Cybersécurité : l'hameçonnage reste la principale menace rencontrée par les collectivités
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Cybermalveillance.gouv.fr vient de publier son rapport d'activité 2024. En 2024, 3 945 collectivités et administrations sont venues chercher une assistance en ligne et 24 % des demandes faisaient suite à une attaque de la collectivité par hameçonnage.
Cybermalveillance.gouv.fr a présenté hier son rapport annuel sur l'état de la menace en 2024. Les faits de cybercriminalité augmentent et se diversifient. En 2024, encore plus de 3 000 collectivités ont eu recours au service d'assistance de la plateforme.
Hameçonnage et piratage de compte de plus en plus fréquents
Les résultats présentés par le dispositif national Cybermalveillance.gouv.fr permettent de mettre en lumière les cyberattaques les plus fréquentes pour lesquelles les collectivités et administrations ont recherché de l’assistance sur Cybermalveillance.gouv.fr.
« L’hameçonnage demeure la menace prédominante tout public confondu avec 1,9 million de consultations d’articles et 64 000 demandes d’assistance », indique le communiqué de presse. Et les collectivités en sont particulièrement victimes puisque « 24 % (de leurs) demandes, bien qu’en baisse de 17 % en volume » concernent ce mode opératoire.
Pour rappel, « l'hameçonnage ou phishing en anglais est une technique frauduleuse destinée à leurrer l'internaute pour l'inciter à communiquer des données personnelles (comptes d'accès, mots de passe…) et/ou bancaires en se faisant passer pour un tiers de confiance » soit par mail, SMS, messages instantanés soit via des publications sur les réseaux sociaux, des liens sponsorisés sur les moteurs de recherches, des appels téléphoniques ou encore des QR codes frauduleux…
Dans une étude sur la maturité cyber des collectivités dévoilée en novembre dernier, Cybermalveillance.gouv.fr pointait que les conséquences de ces attaques sont préjudiciables pour les collectivités car elles peuvent aller « jusqu’à une interruption d’activité et de service (37 %), mais également entraîner la destruction des données (24 %) ou une perte financière (10 %) ». De même, « une collectivité sur 10 déclare avoir déjà été victime d’une ou plusieurs attaques au cours des 12 derniers mois, notamment d’hameçonnage à 46 % ».
Selon les chiffres de 2024, beaucoup de collectivités ont également formulé des demandes d’assistance à la suite d’attaques par rançongiciels (19 %) et du piratage de compte en ligne (16 %). Cybermalveillance.gouv.fr note aussi que les faux ordres de virement (FOVI) représentent 3,4 % des recherches d’assistance et connaissent une forte augmentation en volume (+ 550 %).
Des collectivités cyberharcelées
Dans le rapport d’activité de Cybermalveillance.gouv.fr, on apprend que le cyberharcèlement augmente malheureusement fortement à l’encontre des particuliers… mais pas uniquement ! « Le cyberharcèlement pour les professionnels a fait une entrée notable dans le classement des principaux motifs de recherches d’assistance sur la plateforme en se positionnant à la 9e place pour les collectivités/administrations et à la 10e pour les entreprises/associations, indiquent les auteurs. Les progressions sont par ailleurs très marquées pour ces deux catégories de publics avec respectivement + 533 % et + 566 %.»
Mais comment ce cyberharcèlement se manifeste contre les collectivités ? Cybermalveillance.gouv.fr constate que la violence que subissent parfois certains élus et agents qui témoignent « d'incivilité et d'agressions verbales, voire physiques, de la part d'administrés ou d'usagers » aurait un équivalent en ligne : « Mécontentement, opposition, agitation, concurrence, activisme… Les entreprises, associations et autres professionnels (libéraux, indépendants, personnalités publiques…) feraient eux aussi face à des propos virulents et répétés sur les sites de partages d'avis d'internautes, à des envois de messages par mail et formulaires de contact ou sur leurs comptes de réseaux sociaux, en privé ou publiquement. Le cyberharcèlement contre les organisations, leurs dirigeants ou leurs collaborateurs peut être le fait d'employés anciens ou en poste, de clients, d'administrés, d'usagers, d'opposants ou encore de concurrents. »
Rappelons que les élus peuvent signaler les cybermenaces dont ils sont l’objet sur la plateforme Pharos, qui permet de dénoncer tous types de contenus : violences, mise en danger des personnes, menace ou apologie du terrorisme, injure ou diffamation, incitation à la haine raciale ou discrimination, atteintes aux mineurs…
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Justice
Justice des mineurs : le Sénat serre la vis en adoptant la proposition de loi de Gabriel Attal
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Le Sénat a adopté mercredi en première lecture la proposition de loi de Gabriel Attal visant à durcir la justice des mineurs. Plusieurs mesures supprimées par les députés ont été réintroduites par les sénateurs.
« Tu casses, tu répares ; tu salis, tu nettoies ; tu défies l’autorité, on t’apprend à la respecter ». Alors Premier ministre, Gabriel Attal avait érigé comme grande priorité la restauration de l’autorité de la justice à l’égard des « mineurs délinquants » et de « leurs parents », en réponse aux émeutes urbaines de juin 2023.
Déposée à l'Assemblée nationale le 15 octobre 2024, la proposition de loi de Gabriel Attal a finalement été adopté en février à l’Assemblée nationale après des débats vifs et clivants, par 125 voix contre 58. Ce texte avait été vidé de sa substance en commission, mais les députés ont, en première lecture, réintroduit des mesures de durcissement. Par exemple, l’article 4 avait été rétabli, permettant de « déroger au délai de 10 jours pour les mineurs de plus de 16 ans déjà connus de la juridiction pour mineurs et pour lesquels le placement en détention provisoire est requis ».
Au Sénat, cette dynamique de réintroduction des mesures phares portées par Gabriel Attal et soutenues par le gouvernement a été poursuivie. Les sénateurs ont ainsi adopté un texte plus dur ce mercredi, par 227 voix pour et 113 contre.
Un texte ressuscité au Sénat
Supprimer pour finalement rétablir : lors des débats, les députés et sénateurs ont été divisés entre ceux qui pensent que réprimander les jeunes et leurs parents va être utile pour lutter contre la montée des violences en France et ceux qui sont pour davantage de prévention et d’éducation.
Au Sénat, les mesures vivement dénoncées et combattues par la gauche ont fait leur grand retour. C’est le cas notamment de la comparution immédiate pour les mineurs récidivistes âgés d’au moins 15 ans – rappelons que le dispositif initial concernait les mineurs de plus de 16 ans. Concrètement, le texte adopté par les sénateurs permettrait un jugement en comparution immédiate des mineurs de 15 à 16 ans pour des délits punis de plus de 5 ans de prison, et des mineurs de plus de 16 ans pour des délits punis de plus de 3 ans de prison.
La fameuse dérogation à l’excuse de minorité a également été conservée dans le texte. Pour rappel, l’article 5 permet de déroger à l’excuse de minorité, mais seulement en cas de crime grave commis en récidive.
Un amendement important a également été adopté en commission au Sénat dans le but d’impliquer davantage les parents dans la réparation d'un dommage causé par leur enfant mineur. L’article 3 prévoit d’étendre « la responsabilité solidaire de plein droit des parents pour les dommages causés par leurs enfants ». La commission des lois a amendé cet article afin de permettre à l'assureur de les faire participer, dans certains cas, à l'indemnisation financière de ce dommage à hauteur d'un montant maximal de 7 500 euros. Un autre amendement introduit en séance publique précise que cette participation à l’indemnisation du dommage sera due par les deux parents du mineur et non par un seul parent, comme prévu initialement.
Courtes peines, couvre-feu et assesseurs
Toujours en séance publique, des mesures qui ne doivent pas passer inaperçues ont été introduites par les sénateurs.
D’abord, un amendement porté par le groupe Les Républicains a été adopté afin de « confier au tribunal pour enfants – et, si nécessaire, à la cour d’assises des mineurs – la possibilité de prononcer des courtes et ultra-courtes peines, par une décision spéciale et motivée, afin de garantir une justice adaptée aux besoins des mineurs et à la gravité des faits commis. » Une mesure que ne soutient pas le gouvernement et que le garde des Sceaux considère comme inapplicable.
Le Sénat a également apporté des modifications concernant la mesure de « couvre-feu » prononcée dans le cadre d'une mesure éducative. Un amendement adopté propose d’élargir « l’obligation de couvre-feu, déjà comprise dans la mesure éducative judiciaire (MEJ) et dans la mesure éducative judiciaire provisoire (MEJP), aux alternatives aux poursuites afin de permettre au procureur de la République de demander au mineur de ne pas aller et venir sur la voie publique entre 22 heures et 6 heures sans être accompagné de l’un de ses représentants légaux. L’objectif de cette modification législative est d’imposer une interdiction protectrice et structurante afin d’éviter le regroupement de mineurs de nuit. » Un amendement introduit par le gouvernement va encore plus loin puisque les limites horaires (de 22 heures à 6 heures) et de temps (prononcé pour une durée de six mois maximum) seraient fixées par le juge des enfants selon la situation.
Enfin, il a été ajouté dans ce texte une mesure proposant une augmentation expérimentale du nombre d'assesseurs pendant 18 mois. L’amendement adopté vise à « modifier, à titre expérimental, la composition du tribunal pour enfants en doublant le nombre d’assesseurs siégeant auprès du juge des enfants lorsque le TPE statue en matière criminelle. L’objectif de cette modification législative est de renforcer l'implication et le rôle de la société dans la prise de décision à l'égard des mineurs, d’associer davantage les citoyens au sein de la justice des mineurs et de renforcer le caractère solennel de l’audience. »
Le texte ainsi adopté et largement durci a été transmis à l’Assemblée nationale pour une deuxième lecture qui s’annonce une fois encore très compliquée.
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Journal Officiel du vendredi 28 mars 2025
Ministère de l'Économie, des Finances et de la souveraineté industrielle et numérique
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