Édition du vendredi 21 mars 2025

Sécurité
Le gouvernement mis en échec sur plusieurs mesures de la proposition de loi contre le narcotrafic
L'examen à l'Assemblée nationale de la proposition de loi du Sénat visant à renforcer la lutte contre le narcotrafic a débuté ce lundi dans une atmosphère agitée. Plusieurs mesures phares du texte ont été rejetées par les députés.

Le vote solennel sur cette proposition de loi visant à renforcer la lutte contre le narcotrafic est prévu pour mardi prochain. Pour l’heure, les débats sont houleux à l’Assemblée nationale et plusieurs mesures du texte ont provoqué de vifs débats.

Pour mémoire, face à « l'explosion incontrôlée » des crimes et délits liés au trafic de drogue, les ministres de l'Intérieur et de la Justice, Bruno Retailleau et Gérald Darmanin, avaient présenté en novembre dernier une série de mesures et l'ébauche d'un projet de loi, prévu pour le début de l'année 2025 (lire Maire info du 12 novembre). Finalement, le gouvernement a repris à son compte la proposition de loi des sénateurs Jérôme Durain et Etienne Blanc.

Ce texte n’est pas sans importance pour les maires, loin de là. Dans une tribune publiée il y a deux jours dans Le Point, 250 maires demandent son adoption par les députés : « Le trafic de stupéfiants n'est plus l'apanage de quelques grandes métropoles, il touche nos villes et nos territoires. Il s'étend partout, s'adapte, recrute nos jeunes, intimide nos habitants et met en péril la paix publique. » Les maires demandent aussi que cette loi puisse leur donner les outils pour agir contre ce phénomène inquiétant. 

Les discussions qui se tiennent en ce moment sur cette proposition de loi sont denses et près de 1 000 amendements ont été déposés par les députés. 

Quartiers de haute sécurité 

D’abord, la création d’un parquet national anti-criminalité organisée (Pnaco) a été largement adoptée. Ce dernier, similaire aux parquets financier (PNF) ou antiterroriste (Pnat), serait chargé du « haut du spectre » des crimes en la matière et constituerait une « incarnation » de la lutte contre le narcotrafic, avec un rôle de coordination des parquets locaux.

Concernant le durcissement du régime de détention, l'extension de la visioconférence pour la comparution des narcotrafiquants les plus dangereux a été approuvée par les députés hier. Cette mesure vise avant tout à prévenir les risques d’évasion. De plus, l’Assemblée nationale a approuvé la création d’un nouveau régime carcéral d’isolement pour les trafiquants les plus importants. Cette disposition a été introduite par un amendement du gouvernement. 

Cependant, sur avis du Conseil d’État, les députés ont adopté un amendement pour mieux cibler les personnes susceptibles d’être affectées dans les quartiers de haute sécurité prévus par cette proposition de loi. « Entre 600 et 900 personnes » détenues pourraient être concernées, selon le garde des Sceaux, Gérald Darmanin. Alors que le Sénat prévoyait une durée d’affectation dans ces quartiers de quatre ans, elle a été ramenée, par amendements, à deux ans renouvelables – encore sur avis du Conseil d’État. 

Malgré les vives oppositions de nombreux députés à gauche sur ce dispositif que même Gérald Darmanin qualifie de « difficile », d’autres mesures particulièrement strictes ont été adoptées comme l’interdiction des unités de vie familiale, la limitation des appels téléphoniques à deux heures deux fois par semaine et l’autorisation des fouilles à nu systématiques après chaque visite.

L’accès aux messageries cryptées finalement rejeté

Au cours des débats, beaucoup ont fustigé un texte portant atteinte aux libertés publiques et aux droits fondamentaux. Deux mesures mises au vote cette semaine ont été présentées comme particulièrement problématiques sur ce plan : l’article proposant la mise en place d'un « dossier coffre » et celui permettant d’autoriser un accès aux correspondances issues des messageries chiffrées. 

Finalement, ces deux mesures ont été supprimées du texte. Fortement contesté par les avocats, l’article 16 instaurant un dossier coffre devait permettre de stocker des informations recueillies via des techniques spéciales d'enquête sans que les avocats des narcotrafiquants puissent y accéder lors de la procédure judiciaire. Cette mesure a finalement été rejetée par les députés, au grand regret de son principal défenseur Bruno Retailleau. Elle risque fort, cependant, d’être réintroduite.

Hier, le gouvernement a essuyé une autre défaite sur le sujet des messageries chiffrées. Après qu’une panne a touché les machines de vote hier soir, les députés ont rejeté par 119 voix contre 24 l’amendement du gouvernement qui visait à rétablir l’article 8 ter qui permettait de contraindre les plateformes de messagerie chiffrée comme Signal ou WhatsApp à permettre l'accès aux services de renseignement aux correspondances des trafiquants pour les services de renseignement. 

Quels outils pour les maires ? 

La proposition de loi porte aussi des mesures pour permettre aux maires d’agir localement contre les trafiquants. Comme le rappellent les maires dans leur tribune du Point, les « centres-villes sont de plus en plus menacés par la présence des commerces de façade, qui n'ont d'autre but que celui de blanchir l'argent de la drogue. Nous voulons maintenant, comme le permettrait cette proposition de loi, avoir les moyens d'agir rapidement et efficacement pour faire cesser leurs activités. Les maires doivent avoir plus de moyens d'action en leur permettant notamment de valider l'installation de certains magasins en centre-ville qui aujourd'hui ne sont soumis à aucune autorisation. »

En effet, l’article 3 – qui n’a pas encore fait été discuté à l’heure où nous écrivons – prévoit des dispositifs qui devraient avoir un impact dans les communes touchées par le narcotrafic. Le texte crée notamment une mesure de fermeture administrative des commerces en lien avec le narcotrafic : « Tout établissement à l'égard duquel il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu'il s'y commet de façon régulière une ou plusieurs infractions » pourrait, sur proposition du maire de la commune, faire l'objet d'un arrêté de fermeture administrative. 

Plusieurs amendements ont été déposés sur le sujet. Les députés du groupe LFI-NFP ont par exemple déposé un amendement supprimant cette disposition : « Confier au maire la responsabilité de la lutte contre le narcotrafic dénature son rôle et l’expose à des risques inutiles », peut-on lire dans la notice de l’amendement. D’autres amendements vont dans le sens inverse et proposent d’étendre la capacité du maire à pouvoir agir, à l’instar d’un amendement déposé par le RN qui vise à ce que « le maire soit systématiquement informé par les forces de l'ordre des infractions relatives aux trafics de drogues commises sur le territoire de la commune, et d'autre part qu'il soit informé par le procureur de la République des classements sans suite, des mesures alternatives aux poursuites, des poursuites engagées, des jugements devenus définitifs ou des appels interjetés relatifs à ces infractions. »

Maire info reviendra dans une prochaine édition sur les débats autour de cet article 3, particulièrement important pour les maires. 

Retrouvez notre interview sur le sujet pendant le Congrès des maires : 

 




Fonction publique
Le salaire net des agents publics inférieur de 3,7 % à celui des salariés du privé
Selon l'Insee, en 2021, le salaire net moyen des agents de la fonction publique a décroché « à volume annuel de travail égal » en comparaison avec le secteur privé. Les caractéristiques de l'emploi public (âge, diplômes, métiers…) et les revalorisations régulières des rémunérations dans les entreprises expliquent notamment les écarts observés.

Au moment où le nouveau ministre de l'Action publique, de la Fonction publique et de la Simplification Laurent Marcangeli peaufine l’agenda social 2025 qui doit programmer les prochaines discussions – notamment salariales – entre gouvernement, organisations syndicales et employeurs publics, une étude de l’Insee tombe à point nommé pour nourrir le débat entre les partenaires sociaux. Publiée le 20 mars, cette étude analyse ainsi les décalages de rémunérations entre les salariés du secteur privé (20,6 millions de personnes) et ceux de la sphère publique (5,9 millions d’agents, fonctionnaires ou pas).

29 450 euros annuel dans le public

Ce document montre tout d’abord qu’en 2021 – dernière année complète prise en compte par les statisticiens – le revenu salarial moyen dans la fonction publique était supérieur de 9,3 % à celui du secteur privé. En clair, alors que le revenu salarial moyen atteignait 24 070 euros en 2021 pour un agent travaillant principalement dans la fonction publique, il s’établissait à 22 040 euros pour un salarié du secteur privé.

Un écart que les auteurs de l’étude expliquent par le fait que les salariés de la fonction publique ont un volume de travail annuel plus élevé en moyenne que leurs homologues du privé. En effet, même s’ils travaillent plus souvent à temps partiel, les agents publics subissent beaucoup moins d’interruptions de travail au cours de l’année, à l’inverse des salariés du privé qui peuvent plus fréquemment connaitre des périodes de « non-emploi », entre deux contrats de travail par exemple, ainsi que cela peut être le cas pour les salariés en CDD ou en intérim, les saisonniers ou les demandeurs d’emploi…

Mais l’Insee donne également une lecture radicalement différente des distorsions salariales public-privé. En modifiant sa focale pour comparer les rémunérations « à volume annuel de travail égal », l’organisme souligne que le salaire net moyen annuel de la fonction publique s’élève à 29 450 euros et qu’il est inférieur de 3,7 % à celui des salariés du secteur privé. Un décalage en défaveur des acteurs publics d’autant plus marquant que ces derniers affichent un âge et un niveau de diplôme en moyenne plus élevés. En fait, l’Insee explique que cet écart était favorable aux agents publics jusqu’en 1995, mais que le salaire net moyen du secteur privé a ensuite progressé plus vite que celui de la fonction publique. Le croisement des courbes s’est produit en 2013, année qui a vu le salaire net moyen du privé dépasser celui de la fonction publique. Dans le détail, l’Insee observe que les salaires dans le secteur privé « sont plus dispersés que dans le public, avec à la fois plus de bas salaires et plus de très hauts salaires ». 

Des salariés plus âgés dans les carrières publiques

Parmi les paramètres mis en exergue pour expliquer les décalages salariaux public-privé, l’âge des salariés semble jouer un rôle important. L’étude observe notamment que les agents de la fonction publique sont en moyenne plus âgés que ceux du secteur privé (43,6 ans contre 40,9 ans). Un phénomène qui s’explique par une entrée professionnelle plus tardive dans les carrières publiques, en raison notamment des niveaux de diplôme exigés pour occuper de nombreux emplois. « De ce fait, note l’Insee, le volume annuel de travail moyen des salariés de la fonction publique est inférieur à celui des salariés du secteur privé pour les moins de 25 ans (de 5,3 %), mais il lui est supérieur dans toutes les autres catégories d’âge ».

Autre distinguo mis en évidence : la typologie des métiers qui pèse dans les écarts de salaires constatés chez les salariés du privé et parmi les agents publics. 

« L’écart de volume annuel de travail entre salariés de la fonction publique et du secteur privé est plus élevé parmi les employés (21,0 %) et les ouvriers (24,5 %) », constate l’Insee qui ajoute que « le revenu salarial des ouvriers de la fonction publique (ouvriers de l’armée ou éboueurs par exemple) est ainsi supérieur de 27,4 % à celui de leurs homologues du secteur privé ». Un écart de revenu salarial qui peut même atteindre 30,6 % parmi les employés, « pour lesquels se cumulent une forte différence de volume annuel de travail mais aussi de salaire à temps de travail comparable ». Dans le même temps, il apparait que le revenu salarial moyen des cadres de la fonction publique est inférieur de 16,9 % à celui du secteur privé ; une différence que l’étude explique par le fait que le salaire net des cadres en équivalent temps plein (EQTP) est en moyenne inférieur de 19,7 % à celui du privé.

Enfin, le document compare les écarts de salaires entre les femmes et les hommes dans les deux univers professionnels. « À caractéristiques observables identiques, ces écarts sont d’une ampleur comparable dans la fonction publique et dans le secteur privé ». Des inégalités entre salariés et salariées qui pourraient, parmi d’autres sujets, être évoquées lors des prochaines réunions prévues à l’agenda social sous l’égide du ministre de l’Action publique.
 




Logement
Bâtiments anciens : les sénateurs souhaitent adapter et faciliter la rénovation énergétique
Afin de combler les lacunes de la législation actuelle, le Sénat a notamment décidé d'adapter les critères d'évaluation et les modalités de calcul du diagnostic de performance énergétique (DPE) aux « spécificités » de ce type de bâti. 

Le Sénat a adopté hier, en première lecture et à l’unanimité, une proposition de loi visant à « adapter les enjeux de la rénovation énergétique aux spécificités du bâti ancien ». Un texte qui doit permettre de combler les lacunes de la législation actuelle qui favorise les matériaux récents, pas forcément adaptés lors des réhabilitations de ces bâtiments.

Pointant « le caractère complémentaire des objectifs de lutte contre la précarité énergétique, de limitation de l'artificialisation et de préservation du patrimoine », ce texte doit désormais être examiné par l’Assemblée.

Réglementation inadaptée

Les 11 millions de bâtiments anciens du pays représentent plus d'un tiers du parc existant en France. Parmi eux, 70 % sont considérés comme des passoires énergétiques où « vivent les plus fragiles de nos concitoyens », a rappelé le sénateur socialiste de la Moselle Michaël Weber, à l’origine cette initiative.

Celui-ci déplore ainsi que la réglementation actuelle en matière de rénovation thermique (découlant de la loi « Climat et Résilience » de 2021) repose « exclusivement sur des critères d'évaluation et des modèles de calculs conçus pour des bâtiments neufs ». Un état de fait qui incite les propriétaires à utiliser des techniques d'isolation et de matériaux contemporains dont « la compatibilité n'est pas assurée avec un bâti ancien ».

Or « des travaux de rénovation inadaptés peuvent causer la perte des qualités intrinsèques aux modes constructifs anciens, à commencer par leurs qualités (...) de régulation naturelle de la température et du taux d'humidité. Elle peut être la cause de l'apparition de pathologies, réduisant potentiellement l'espérance de vie du bâtiment et portant atteinte au confort et à la santé des occupants », explique l’élu mosellan dans l’exposé des motifs de son texte.

Résultat, la rénovation énergétique dans le bâti ancien est « un investissement qui peut s'avérer contreproductif s'il ne respecte pas ses modes de fonctionnement, distincts de ceux du bâti moderne ». Critiquant « les pratiques actuelles reposant majoritairement sur des solutions standardisées et des matériaux à haute empreinte carbone », Michaël Weber estime que « la constitution d'une filière de rénovation du patrimoine bâti, reposant sur des matériaux bio et géo sourcés à faible impact environnemental, est une nécessité ».

DPE et spécificités du bâti ancien

Afin d’améliorer la performance énergétique des bâtiments anciens tout en préservant leurs qualités intrinsèques et leur valeur patrimoniale, la proposition de loi prévoit donc d’adapter la législation « aux spécificités du bâti ancien ».

En premier lieu, elle permettrait d’intégrer dans le Code de la construction et de l'habitation une définition de ce terme. Serait donc désormais considéré comme ancien, tout bâtiment « construit avant 1948 selon des techniques et des matériaux traditionnels ». Le texte introduit aussi « une réglementation thermique multicritère », qui prendrait en compte non seulement « la performance énergétique » mais également « d'autres aspects essentiels comme le confort d'été, la qualité de l'air intérieur, l'impact environnemental des matériaux et la préservation du patrimoine architectural ».

Point le plus important, les sénateurs ont décidé d’adapter les critères d'évaluation et les modalités de calcul du diagnostic de performance énergétique (DPE) aux « spécificités des bâtiments anciens » afin de tenir compte « des atouts bioclimatiques de ce type de bâti, souvent négligés par les méthodes standards ». Les recommandations de travaux seraient ainsi « adaptées aux contraintes techniques, architecturales et patrimoniales pesant sur le bâtiment ainsi qu’aux caractéristiques hygrothermiques des matériaux le composant ». 

Le texte prévoit, en outre, de s’assurer de « compétences spécifiques » pour « tous les auditeurs réalisant les audits énergétiques, lorsque le bâtiment présente un intérêt patrimonial ».

Inscrite à l'origine dans le texte, une mesure intégrant certaines particularités des bâtiments anciens (sensibilité à l'humidité, ventilation naturelle assurée par la non-étanchéité des fenêtres, équilibre hygrothermique à ne pas perturber) dans les objectifs généraux de qualité sanitaire des bâtiments a été finalement rejetée. Elle aurait permis d’engager la responsabilité du maître d’œuvre en cas de « rénovation inadaptée entraînant la détérioration du bâtiment ancien ».

Accès facilité à MaPrimeRénov’

Reste que plusieurs parlementaires ont regretté que le texte n'intègre pas de volet financier pour soutenir ces rénovations.

La ministre en charge du Logement, Valérie Létard, a toutefois annoncé la parution d’un décret visant à faciliter l'accès à MaPrimeRénov' aux propriétaires ayant contracté un prêt à taux zéro dans l'ancien. Il relèverait également de 80 % à 90 % du coût des travaux le plafond des aides publiques et privées en matière de rénovation énergétique. « Un accompagnement significatif pour aller reconquérir et acquérir du logement ancien », s'est-elle réjouie. 

Elle a par ailleurs rendu public un guide de « bonnes pratiques » à l'attention des professionnels, diagnostiqueurs ou auditeurs énergétiques, spécifiquement dédié au bâti ancien.

Plus globalement, la ministre du Logement a annoncé une série de dix mesures pour mieux encadrer les diagnostiqueurs afin de rendre le DPE « irréprochable ». Les contrôles de diagnostiqueurs vont ainsi être multipliés par quatre, avec une inspection par an pour chacun et les sanctions seront plus sévères. Jusqu'à deux ans d'interdiction d'exercer en cas de fraude, contre six mois actuellement.

Consulter le texte adopté.




Climat
Météo France livre un tableau concret des conséquences du réchauffement climatique à l'échelle de chaque commune
Météo France a publié hier une étude tentant de rendre concrètes les conséquences du réchauffement climatique à court, moyen long terme. Parce qu'il est indispensable, explique l'agence, que les territoires anticipent et s'adaptent à des changements qui vont être profonds. 

En 2100, l’année 2022 qui constitue à ce jour un record en matière de chaleur apparaîtra « exceptionnellement fraîche ». Cette affirmation donne le ton du rapport Le climat futur en France, à quoi s’adapter rendu public hier par Météo France, en s’appuyant sur les données de la Tracc (Trajectoire de réchauffement de référence pour l'adaptation au changement climatique).

Sombres prévisions

Il est aujourd’hui admis que le réchauffement climatique est encore plus grave en Europe qu’ailleurs : « L’Europe se réchauffe plus vite que la moyenne planétaire. » Par rapport à la période préindustrielle, le réchauffement est déjà de 1,7 °C en France, et ses effets sont déjà tangibles. Mais ce n’est qu’un début : d’après les experts, le réchauffement atteindra 2 °C en 2030, 2,7 °C en 2050 et 4 °C en 2100. 

Au-delà des chiffres, il faut mesurer quelles seront les conséquences concrètes de cette évolution sur les modes de vie, l’agriculture et la vie économique, la santé, la biodiversité, l’urbanisme, le tourisme… Pour les élus, il est aujourd’hui impensable de projeter un projet de ville à l’horizon de plusieurs décennies sans tenir compte de ces changements. Il suffit, pour s’en convaincre, de réaliser qu’en 2100, d’après Météo France, Paris aura le climat actuel de Montpellier, et l’Occitanie celui de l’Andalousie (extrême sud de l’Espagne).

Si Météo France explique qu’il est très difficile de faire des modèles à très long terme sur les précipitations, les données concernant la chaleur semblent en revanche acquises : « les étés seront de plus en plus caniculaires », et dès 2050, la France connaîtra des températures à 45 °C. En 2100, des pointes à 50 °C se produiront localement. « Il faut s’attendre à 10 fois plus de vagues de jours de chaleur en 2100 », prévient Météo France, avec, dans le pourtour méditerranéen en particulier, des nuits à plus de 20 °C qui deviendront « la norme ». Exemple à Marseille : dans la période 1976-2005, le nombre de nuits à plus de 20 °C s’est établi en moyenne à 20 par an. En 2050, il devrait osciller autour de 67, et de 88 en 2010. À Paris, ce nombre pourrait atteindre 43 en 2100 (contre 8 aujourd’hui). 

Le nombre de jours de gel devrait se réduire à « une quinzaine » en moyenne sur la France. 

Même si elle reste prudente sur l’évolution des précipitations, l’agence avance un chiffre de 15 à 20 % d’augmentation des « pluies intenses », aggravant fortement les risques d’inondations. Mais dans la mesure où le phénomène d’évapotranspiration (évaporation des eaux de surface et transpiration de la végétation) devrait augmenter dans les mêmes proportions, ces pluies n’empêcheront pas les sécheresses de s’aggraver avec, à la clé, une forte diminution de la ressource en eau. 

Selon Météo France, en 2100, la France « connaîtra un mois supplémentaire de sol sec dans la moitié nord et jusqu’à deux mois dans la moitié sud », avec des périodes de sécheresse qui « se poursuivront souvent en automne », voire qui « pourraient même s’étaler sur plusieurs années consécutives ». 

Conséquence : le risque de feux de forêt se généralisera à tout le territoire. Le Bassin parisien pourrait par exemple connaître un risque de feu similaire à celui de l’arrière-pays méditerranéen aujourd’hui. 

Enfin, Météo France estime que le nombre de jours de neige au sol va « se réduire drastiquement sur tous les massifs » et qu’en moyenne montagne, « la saison d’enneigement continu deviendra inférieure à deux mois ». 

Un outil particulièrement intéressant pour les maires : Climadiag Commune

Rappelons que depuis l’an dernier, Météo France a mis à disposition du public un outil particulièrement intéressant, dénommé Climadiag Commune. Comme l’explique l’agence, « pour rendre les territoires résilients et agir en conséquence, les élus locaux doivent connaître les évolutions climatiques potentielles au plus près de leur territoire ». Ce service permet d’obtenir des indicateurs précis pour chaque commune de métropole et de Corse, ou chaque EPCI. 

Il suffit de renseigner le nom de la commune ou de l’EPCI sur le site Climadiag Commune,  et de télécharger le résultat, en choisissant l’horizon 2030, 2050 ou 2100. 

On obtient alors une note de synthèse très claire, fournissant des indicateurs organisés en cinq catégories (climat, risques naturels, santé, agriculture et tourisme), permettant de visualiser ce à quoi il faut s’attendre en matière de températures, nuit chaudes, gel, pluies intenses, sécheresse, risque de feu de forêt, enneigement, etc. Pour chaque item, il est présenté un graphique permettant de visualiser la situation actuelle et l’évolution prévue, avec une fourchette de valeurs (basse, haute et médiane). 

Cet outil, gratuit, paraît d’une grande utilité pour tenter de comprendre ce à quoi chaque territoire doit s’attendre dans les années et les décennies à venir, et mieux envisager les adaptations nécessaires. À l’approche des élections municipales, il pourrait s’avérer un outil indispensable pour penser son programme. 




Élections
Le Sénat adopte en première lecture une réforme des modalités de vote des personnes détenues
Une proposition de loi modifiant les modalités du droit de vote des personnes détenues a été adoptée hier par le Sénat, avec l'objectif de la faire adopter définitivement avant les élections municipales de mars 2026. Elle permettrait de répondre à des difficultés concrètes rencontrées dans certaines communes. Explications.

Depuis 1994, les détenus ne sont aujourd’hui plus systématiquement déchus de leurs droits civiques : sauf s’ils ont été expressément privés de ce droit par le juge, ils ont donc le droit de voter. Mais pendant longtemps, ce droit a été extrêmement peu exercé par les détenus : à l’élection présidentielle de 2017, seuls 2 % des personnes détenues ont participé au vote. Les modalités du vote, jusqu’en 2019, expliquaient cette faible participation : les détenus ne pouvaient voter que grâce à une permission de sortir – en pratique très peu accordée – ou par procuration – peu utilisée en raison notamment de l’isolement de nombreux détenus.

Vote par correspondance

Pour tenter de remédier à cette situation, la loi Lecornu du 27 décembre 2019 a instauré une nouvelle possibilité : le vote par correspondance. Avec une contrainte particulière, d’ordre logistique : il n’a pas semblé possible au législateur d’acheminer le bulletin de vote de chaque détenu dans sa commune d’inscription (rappelons qu’il y a aujourd’hui 57 000 détenus jouissant de leurs droits civiques, qui peuvent donc par hypothèse être inscrits dans la totalité des communes de France). Une solution a donc été trouvée : les détenus sont, par défaut, inscrits sur la liste électorale de la commune chef-lieu du département ou de la collectivité d’implantation dans lesquels se trouve l’établissement pénitentiaire. Ainsi, tous les détenus de la prison de Fleury-Mérogis (Essonne), par exemple, sont inscrits dans un bureau de la commune d’Évry-Courcouronnes, chef-lieu du département. Les détenus votent dans la prison, et leurs bulletins sont ensuite tous acheminés dans le bureau de vote de la commune chef-lieu, sauf pour l’élection présidentielle pour lesquelles les bulletins sont acheminés dans un bureau centralisé au ministère de la Justice.

Cette réforme a eu des effets bénéfiques sur l’exercice du droit de vote par les personnes détenues : d’à peine 2 %  en 2017, le taux de participation est passé à 19 % aux élections européennes de 2024 et 22 % aux élections législatives de la même année. 

Mais à l’inverse, cette réforme peut avoir des effets de bord assez problématiques – qui ont conduit la sénatrice LR de l’Essonne, Laure Darcos, à élaborer la proposition de loi dont il est question ici.

Le fait d’inscrire des centaines de détenus sur une seule commune, fût-elle chef-lieu de département, alors qu’ils n’ont en réalité aucun lien avec cette commune, pose une difficulté qui n’a pas été anticipée par le législateur au moment du vote de la loi Lecornu. Exemple le plus frappant : celui d’Évry-Courcouronnes. Les détenus de la prison de Fleury-Mérogis susceptibles de voter sont au nombre de 1 300, ce qui représente… 9 % des votants de la commune Évry-Courcouronnes aux législatives de 2024, par exemple. Ces votes sont donc susceptibles de faire basculer le résultat d’une élection locale, alors qu’il s’agit d’électeurs sans lien avec la commune. 

Le Conseil d’État a relevé que ce problème se pose particulièrement dans six communes chefs-lieux de département, où le nombre d’électeurs détenus dépasse les 5 % des inscrits : Tulle, Bar-le-Duc, Arras, Melun, Évry-Courcouronnes et Basse-Terre. 

Le problème est plus visible encore lorsque l’élection est serrée. Le ministre auprès du ministre de l’Intérieur, François-Noël Buffet, a évoqué le cas de Lille, où l’élection municipale de 2020 « s’est jouée à 227 voix ». Lors des prochaines élections municipales, près de « 400 détenus » pourraient participer à l’élection et seraient en mesure de faire basculer l’élection… sans avoir de lien avec la ville de Lille.

Le texte initial

Pour remédier à ce problème, Laure Darcos a donc déposé une proposition de loi supprimant « la faculté pour la personne détenue de s'inscrire dans la commune chef-lieu de département ou dans la commune d'implantation de l'établissement pénitentiaire ». À la place, le texte initial proposait que la personne détenue vote par correspondance « sur la liste électorale de la commune où elle a élu domicile avant son incarcération ou sur la liste électorale de la commune de résidence d'un ascendant ou d'un descendant », dans la mesure où elle s’y est inscrite. La possibilité de s’inscrire dans la commune où réside un « descendant » est, il faut le noter, une nouveauté instaurée par ce texte.

Mais lors de l’examen en commission des lois, des difficultés logistiques ont été soulevées, « regrettées » par les sénateurs mais bien réelles. Comme l’a expliqué le rapporteur Louis Vogel, « l'envoi et, surtout, la réception en temps utile des enveloppes du vote par correspondance », dans des milliers de communes, restent « problématiques ». Les auditions menées par la commission des lois auprès du ministère de l’Intérieur ont fait apparaître que ces contraintes sont impossibles à gérer. 

Consultée par la commission des lois, l’AMF a également émis un certain nombre de réserves sur ce dispositif : les modifications apportées sur le vote par correspondance « se traduiraient par une charge de travail accrue pour les communes concernées ». Par ailleurs, comme la commission, l’AMF a relevé que les difficultés logistiques « ne seraient pas levées » par ce nouveau dispositif, qui compliquerait globalement « l’organisation des opérations pré-électorales » pour les maires. 

Système hybride

La commission a trouvé une solution qui semble répondre en partie à ces difficultés, en proposant de distinguer les élections locales et nationales et d’instaurer deux systèmes différents.

En effet, pour les élections à circonscription unique (élection présidentielle, élections européennes et référendums), le problème soulevé plus haut ne se pose pas, puisque les voix sont comptabilisées à l’échelle nationale. Dans ce cas, le fait de centraliser les votes des détenus dans la commune chef-lieu du département où ils sont écroués ne pose pas de problème.

Pour les élections locales, en revanche, la commission des lois a admis l’idée de supprimer ce système, ce qui ne laissera plus aux détenus que le choix de l’autorisation de sortie ou du vote par procuration. 

En séance publique, hier, cette solution « hybride » a rencontré l’assentiment d’une majorité de sénateurs – mais pas de tous. Plusieurs parlementaires ont regretté « un recul » avec le retour à la seule procuration ou aux autorisations de sortie pour les élections locales, qui risquent de faire à nouveau chuter la participation. Ils ont prôné une autre solution, qui existe dans certains pays européens : l’installation d’un véritable bureau de vote au sein de chaque établissement pénitentiaire. Mais cette solution n’a pas convaincu les sénateurs. 

Le texte adopté propose donc l’instauration du système hybride : procuration ou autorisation de sortie pour les élections locales, et vote par correspondance dans la commune chef-lieu du département pour les élections nationales. 

Le ministre François-Noël Buffet, à la fin des débats, a promis « d’essayer d’inscrire rapidement ce texte à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale ».  






Journal Officiel du vendredi 21 mars 2025

Ministère des Outre-mer
Décret n° 2025-251 du 20 mars 2025 portant renouvellement de la déclaration de l'état de calamité naturelle exceptionnelle à Mayotte
Ministère de l'Aménagement du territoire et de la Décentralisation
Arrêté du 9 janvier 2025 relatif à l'identification des cycles
Ministère du Travail, de la Santé, des Solidarités et des Familles
Décret n° 2025-253 du 20 mars 2025 relatif au schéma pluriannuel de maintien et de développement de l'offre d'accueil du jeune enfant prévus à l'article L. 214-1-3 du code de l'action sociale et des familles

Copyright 2020 AMF - www.maire-info.com - Tous droits réservés