Édition du jeudi 31 octobre 2024

État civil
Dès janvier, il serait possible de demander une nouvelle carte d'identité en mairie avant la date d'expiration de l'ancienne
La directrice de l'agence France titres a annoncé, dans une interview sur France culture, une évolution importante en matière de délivrance des titres d'identité : à partir de janvier, les usagers pourront demander l'établissement d'une carte d'identité au nouveau format même si leur ancien titre n'est pas arrivé à expiration. 

C’est une nouvelle étape pour aller vers le déploiement massif de l’identité numérique : l’obtention d’une carte d’identité au format « carte de crédit » va être largement facilitée et ce, dès le mois de janvier prochain.

Cette annonce, qui n’est pas sans importance pour les services des communes concernées, n’a pour l’instant fait l’objet d’aucun texte réglementaire – décret ou circulaire. C’est la directrice de l’agence France titres, la préfète Anne-Gaëlle Baudouin, qui a lâché cette information dans une interview à France culture, dans l’émission Soft power (à écouter partir de 1 h 03  dans ce podcast). 

Carte d’identité format « carte de crédit » et identité numérique

Mais quel rapport entre carte d’identité et l'identité numérique ? Rappelons que depuis le 14 février dernier, le ministère de l’Intérieur a lancé l’application France identité à l’issue d’une phase d’expérimentation. Cette application permet d’avoir une version numérique de sa carte d’identité dans son smartphone, qui peut désormais être utilisée, par exemple, lors d’un contrôle. L’application permet également de générer des justificatifs d’identité à usage unique. 

Une deuxième étape est également possible : la certification de son identité numérique. Pour des usages sensibles – par exemple l’établissement entièrement dématérialisé d’une procuration – il est nécessaire de faire certifier, une fois, son identité numérique, étape qui doit être réalisée en mairie équipée à cet effet (pour les détails de ce dispositif, lire Maire info du 4 mars 2024). 

Toutes ces démarches sont relativement simples à réaliser, pour peu que l’on maîtrise tout de même les outils numériques – mais elles ont un préalable impératif : elles ne sont possibles que si l’utilisateur possède une carte d’identité au format carte de crédit. Sans cette carte d’identité, pas d’identité numérique possible. Pourquoi ? Parce que seules celles-ci, dotées d’une puce NFC, sont capables de « communiquer » avec les smartphones. Au moment de la création de son identité numérique, il faut poser sa carte d’identité contre le smartphone pour que celle-ci « communique » à l’appareil les informations qu’elle contient. 

« Nouveau motif »

La carte d’identité format carte de crédit, lancée en 2021, a rencontré un grand succès, puisque « 25 millions de personnes », selon Anne-Gaëlle Baudoin, en ont obtenu une depuis. Mais il reste donc au moins autant de citoyens majeurs qui ne l’ont pas, ce qui leur interdit de constituer leur identité numérique. Or pour changer de carte d’identité et obtenir la nouvelle, à ce jour, il n’y a que quatre possibilités : atteindre la date d’expiration de sa CNI, l’avoir perdue, se l’être fait voler, ou changer d’état-civil (mariage, divorce, changement de nom…). Un usager qui, aujourd’hui, souhaite simplement changer de carte d’identité pour pouvoir obtenir une identité numérique voit sa demande refusée en mairie. 

C’est justement cela qui va changer à partir de l’année prochaine, a annoncé la préfète. « On va créer un nouveau motif [de remplacement de la CNI]. À partir du début de l’année prochaine, on pourra dire ‘’je veux établir une identité numérique’’, et ce sera un motif valable pour obtenir une nouvelle carte d’identité ». Cette décision a été prise, explique Anne-Gaëlle Baudoin, pour accélérer le déploiement de l’identité numérique. 

Si cette information se confirme, il faut s’attendre, à partir de janvier, à un afflux de demandes dans les mairies équipées. Néanmoins, les services de l’État ne veulent pas risquer « d’engorger » à nouveau les services municipaux et les préfectures : « La crise des CNI/passeports [engorgement massif des services d’état civil après le covid-19 – ndlr] est derrière nous », se réjouit la préfète qui évoque un délai moyen d’obtention d’un rendez-vous tombé à « 5 jours ». « Nous ne voulons pas revenir là-dessus », assure-t-elle. Il va donc y avoir une restriction à la nouvelle possibilité d’obtention d’une CNI : elle ne sera offerte qu’aux personnes dont l’ancienne carte d’identité a été délivrée à partir de 2016. En effet, pour les titres délivrés à partir de cette année-là, « toutes les données d’identité, y compris les empreintes digitales, dont déjà dans les fichiers ». Tout sera donc fait de façon « automatique, ce qui allègera la charge des mairies et des préfectures ». 

Activation « directe »

Anne-Gaëlle Baudoin a donné, en passant et s’en s’y attarder, une autre information, encore peu claire. « Une (…) évolution prévue dans quelques semaines permettra, quand vous avez une nouvelle carte d’identité, quand vous allez en mairie la remettre, (…) vous pourrez à ce moment activer votre identité numérique directement. » Doit-on comprendre que l’activation de l’identité numérique se fera en mairie, sur présentation de la nouvelle carte ? Ou que la préfète parle en réalité de la certification, qui serait automatique et non sur demande de l'usager ? Dans tous le cas, ce point nécessite d’être éclairci. 




Budget de l'état
Budget 2025 : la commission s'oppose au « fonds de précaution », cette ponction de 3 milliards d'euros sur les collectivités
Considérée comme « injustifiée », la mise en place de ce dispositif fait peser « un risque réel sur l'investissement des collectivités », selon les députés qui ont, par ailleurs, décidé d'exclure près de 200 intercommunalités et certaines communes urbaines du bénéfice de la DETR. Mais rien ne garantit que ces décisions soient conservées dans le budget final.

Le « fonds de précaution » voulu par le gouvernement ne passe décidément pas. Pas plus du côté des collectivités, qu’auprès des députés. Réunis en commission pour examiner le projet de loi de finances (PLF) pour 2025, ils ont rejeté, hier, cette future ponction de 3 milliards d'euros sur les recettes des quelque 450 plus importantes collectivités que l’exécutif prévoit d’imposer aux élus locaux l’an prochain.

Rappelons que cette décision des députés reste pour l’heure – et comme depuis le début des débats budgétaires – purement symbolique puisqu’ils devront réexaminer, en séance, la version initiale du texte et donc revoter à nouveau tous les amendements passés en commission. Absolument rien ne garantit donc qu’ils seront conservés dans le texte final.

Un prélèvement « mal conçu » et « injuste »

Fustigée par les élus locaux, l’instauration de ce mécanisme d’auto-assurance – qui constitue le premier étage du plan d’économies de 5 milliards d’euros (complété par un gel de la TVA et l’amputation du FCTVA) demandées aux collectivités – a donc bien été balayée en commission grâce à l’adoption d’une demi-douzaine d’amendements portés par le Nouveau front populaire (NFP) et le groupe Liot.

Un prélèvement considéré comme « totalement injustifié » par le député du Morbihan, Paul Molac (Liot), dans l’exposé des motifs de son amendement.  

« Mal conçu » et contenant « encore trop d’inconnues » , cette ponction – qui représente « 5 % des dépenses d’équipement de l’ensemble des collectivités locales » – serait même « délétère économiquement » et ferait peser « un risque réel sur l'investissement des collectivités », a dénoncé, de son côté, le député communiste du Cher, Nicolas Sansu. 

« Le dérapage budgétaire actuel et notre dette publique sont avant tout le résultat des mauvais choix de l’État, les collectivités n’ont pas à payer l’addition de cette mauvaise gestion », a également estimé l’élu breton, soulignant que ce dispositif est « particulièrement injuste » puisqu’il cible les collectivités « sur un simple critère de taille sans prendre le temps de regarder les difficultés éventuelles de ces collectivités » ou « les efforts budgétaires déjà menés localement ».

Jugé « brutal » de l’aveu même du camp gouvernemental, ce prélèvement concernerait, en effet, les seules collectivités dont les dépenses de fonctionnement sont supérieures à 40 millions d’euros. Bien que certains départements en soient déjà exemptés au regard de la fragilité de leur situation financière.

Près de 200 EPCI exclus de la DETR

La commission a également décidé d’exclure près de 200 intercommunalités et certaines communes urbaines du bénéfice de la dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR). Des restrictions qui ont été défendues par la députée socialiste du Puy-de-Dôme, Christine Pirès Beaune, à travers une série d’amendements.

Afin de « recentrer la DETR sur les territoires ruraux », le premier vise donc à exclure de son bénéfice les communes urbaines membres d’une métropole, alors que plusieurs autres abaisseraient les seuils d’éligibilité des EPCI, que ce soit au niveau de la population, de la densité ou du potentiel fiscal

L’application cumulée de ces trois nouveaux critères aboutirait à rendre inéligibles à la DETR près de 200 intercommunalités, dont au moins « 149 communautés de communes ».

Les députés ont, par ailleurs, décidé que la commission des élus relative a la DETR – constituée dans chaque département – serait désormais saisie pour avis pour les subventions d’un montant supérieur à 50 000 euros, et non plus a 100 000 euros comme c’est le cas actuellement. 

La Dsil à la main des préfets de département

La commission a également adopté des amendements « insoumis » visant à ce que la dotation de soutien à l’investissement local (Dsil) soit attribuée par le préfet de département (et non plus « confisquée entre les mains du préfet de région »), à supprimer le dispositif permettant l'unification de la DGF des communes à l'échelle intercommunale et à renforcer les garanties de sortie pour les communes qui dépassent le seuil de 10 000 habitants (afin d’éviter « une diminution importante » de leur DGF). 

En parallèle, le député RN du Var, Philippe Lottiaux, a convaincu les députés de « rendre pluriannuelles » les délibérations de répartition dérogatoire des prélèvements et attributions effectués au titre du Fpic, ces derniers ayant également décidé de reconduire les critères 2024 du fonds de sauvegarde des départements.

Les crédits du SNU réaffectés au sport amateur

Sur un tout autre sujet, les élus du Nouveau Front populaire ont fait adopter un amendement réaffectant au secteur du sport amateur la totalité des 128 millions d'euros fléchés vers le Service national universel (SNU) en 2025.

À défaut de pouvoir réaffecter ces fonds « à la vie associative et à l’éducation populaire », ils les ont donc transférés au dispositif du Pass sport afin qu'ils « bénéficient à la promotion du sport pour le plus grand nombre, aux petits clubs dans les territoires, etc. »

Souhaitant marquer leur « opposition ferme au dispositif SNU, dont le développement s’est effectué au détriment du budget dédié au soutien des structures d'éducation populaire, à la vie associative et au développement du service civique », les députés ont plaidé pour l’abandon de ce « gadget présidentiel » qui « ne marche pas » et estimé que cette « hérésie budgétaire » avait « raté sa cible ».

Le ministre des Sports et de la Jeunesse Gil Avérous avait déjà reconnu, lui-même, lundi, sur Sud Radio, qu'il n'avait « pas les moyens pour une généralisation » de ce dispositif souhaité par Emmanuel Macron, mais largement critiqué pour son coût. (Lire article ci-contre.)

Consulter le dossier législatif du PLF 2025.
 




Sports
Sport et jeunesse : des moyens diminués, une gouvernance à ajuster
Réforme de l'Agence nationale du sport (ANS), perte de vitesse du SNU, baisse des crédits dédiés au Sport… À l'occasion d'une audition menée par la commission des affaires culturelles du Sénat, le ministre des Sports et de la Jeunesse Gil Avérous a présenté les contours de la politique qu'il souhaite mener dans les prochaines années.

C’est hier que Gil Avérous, ministre des Sports, de la Jeunesse et de la Vie associative, a été auditionné au Sénat sur le projet de loi de finances pour 2025. S’il a largement été interrogé sur la diminution annoncée des crédits sports dans le cadre du Plan de loi de finances 2025, le ministre a aussi esquissé ses ambitions politiques qui, si elles ne diffèrent pas énormément de celles de sa prédécesseure, ont le mérite de prendre en compte quelques dysfonctionnements dénoncés notamment par les collectivités.

Budget : moins 268 millions pour le sport

Concernant la baisse des crédits sports annoncée dans le cadre du PLF 2025, le ministre indique que malgré cette diminution, il estime « avoir les moyens nécessaires pour préserver les politiques publiques du ministère et préserver les objectifs ambitieux qui ont été ceux » de ces dernières années. 

Le budget alloué au sport est en effet amputé de 268 millions d'euros par rapport à 2024. Le ministre l’explique par « trois éléments » : « l’extinction des dépenses spécifiquement liées à l’organisation des Jeux olympiques et paralympiques », « ajustements des prévisions de décaissements pour le Plan génération 2024 qui finance les équipements sportifs » et baisse des crédits consacrés au Pass’Sport justifiée par une sous-consommation en 2024. Sur cette question du Pass’Sport le ministre précise que « c’est un pari » et que s’il y a plus de demandes pour le Pass’Sport que prévu, « il faudrait recentrer les bénéficiaires puisque si on ne réabonde pas les crédits et qu’on est sur le même volume que 2024 on ne pourra pas répondre à la demande supplémentaire ». Certains publics seraient donc amenés à être exclus du dispositif ? C’est une question qu’il faudra suivre de près. Le dispositif visant à augmenter de deux heures la pratique du sport au collège est également réduit de 4 millions d’euros. 

Pour les collectivités, la diminution est loin d'être faciale. La « baisse de 25 % des crédits sports, corrélée à la mise à contribution significative des collectivités locales à la réduction du déficit public, font craindre des répercussions sur le fonctionnement et l’investissement pour le sport », comme le résume France urbaine. L’AMF, qui alertait depuis 2022, a exprimé son regret que l’élan apporté par les Jeux Olympiques et paralympiques n’ait pas été accompagné d’une forte ambition en termes d’héritage avec notamment un plan d’équipements structurants.

Équipements sportifs 

Gil Avérous a aussi indiqué que le ministère n’a utilisé, via l’Agence nationale du sport, que 4 millions d’euros sur les 100 millions prévus en 2024 pour le deuxième plan de développement des équipements sportifs de proximité, le Plan génération 2024. « Bercy nous réinscrit 100 millions d’autorisations d’engagement et donc on pourra en 2025 réaccompagner les collectivités à la même hauteur qu’en 2024 mais les crédits de paiement ne sont pas abondés puisqu’on aura 96 millions de reports, s’expliquant par le temps qu’il faut pour monter les dossiers, consulter les entreprises, lancer les chantiers et pour les collectivités de demander des acomptes. Cela ne va pas mettre en difficulté l’ANS qui a une trésorerie relativement conséquente et qui pourra faire face aux demandes de paiement des collectivités ». 

Ces propos ont fait réagir les parlementaires, notamment Michel Savin, sénateur de l'Isère. Il rappelle que « l’ANS a répondu favorablement à l’ensemble des demandes des collectivités sur le budget qui lui était alloué. » Cependant, « le gouvernement précédent a pris la décision de geler les crédits pendant une partie de l’année ce qui fait que l’agence n’a pas débloqué les crédits ». En effet, en juillet dernier, 50 % des crédits dédiés aux équipements structurants locaux (gymnases, piscines, terrains synthétiques…) ont été gelés. L’enveloppe initiale de 50 millions d’euros est tombée à 25 millions d’euros. 

« Les collectivités qui ont reçu une notification comme quoi elles étaient éligibles à une subvention sont dans l’attente de ces crédits et on risque de mettre l’ANS en difficulté si on fait sauter une année sur le financement des équipements structurants, alerte Michel Savin. Sur le terrain, beaucoup de communes sont dans l’attente du financement de l’ANS. On fera tout pour abonder la ligne sur les équipements structurants. »

Le ministre a également évoqué la situation compliquée des piscines. Selon les chiffres du ministère, on compte en France 6 348 bassins de pratique aquatique avec une ancienneté moyenne de 35 ans et non rénovés depuis plus de 15 ans en moyenne. « Beaucoup de collectivités ne peuvent cependant plus rénover leurs piscines » notamment à cause de l’inflation sur le bâtiment et des devis qui ont augmenté de plus de 40 % en une année. Le gouvernement devrait être attentif à cette question dans les années à venir. 

Outre la question du soutien en direction des équipements structurants, les maires regrettent des taux de subvention effectifs largement en dessous des taux annoncés par l’Agence. Le gel des crédits devrait accentuer ce phénomène et augmenter le reste à charge pour les communes.

Réforme de l’Agence nationale du sport 

Le ministre a surtout annoncé que le système de gouvernance actuel avait besoin d’être retravaillé.« Nous allons travailler avec les associations d’élus, notamment l’Andes, pour lancer une réforme du modèle de subvention en faveur des équipements sportifs afin de simplifier les procédures pour les porteurs de projet pour créer une plus grande cohérence avec les projets territoriaux et fédéraux et une meilleure articulation avec les autres crédits d’État que sont le Fonds vert, la DETR ou la DSIL ». 

Cette réforme devrait permettre à l’ANS « d’être déchargée de cette partie instruction des subventions en confiant les enveloppes nécessaires à l’échelon départemental pour que les préfets et sous-préfets puissent eux même choisir la meilleure répartition sur nos territoires pour éviter la déception que connaissent aujourd’hui nos collectivités et la multiplication des dossiers à monter qui sont un frein dans la relation entre les collectivités et l’État ».

Le ministre a ajouté qu’une inspection générale de l’agence était en cours et que, « peut-être », la conférence régionale des financeurs du sport n’était finalement « pas utile ». La nouvelle gouvernance du sport sur les territoires n’aura finalement pas bien duré longtemps. 

SNU 

Un autre dispositif est menacé : le Service national universel. Hier – et c’est bien loin d’être le seul – Yan Chantrel sénateur représentant les Français établis hors de France s’est interrogé sur la pertinence « du maintien de ce dispositif très coûteux » qui, selon la Cour des comptes, n’atteint pas ses objectifs en termes de mixité sociale par exemple. 

Le ministre a reconnu qu’il convient « de s’interroger sur le format de ce dispositif, son contour et son coût. La généralisation qui était annoncée demande un engagement financier qui est aujourd’hui inatteignable. » Le gouvernement n’envisage pas pour autant de le supprimer. Le SNU semble donc être condamné à stagner voire à perdre de l’ampleur : en 2025 les crédits alloués au SNU sont les mêmes que pour 2024 et visent à soutenir 66 000 séjours de jeunes. Le dispositif concernait 80 000 volontaires en 2024. 




Catastrophes
Une catastrophe d'une ampleur inédite en Espagne, des dizaines de communes ravagées
La tempête qui a dévasté mardi la région de Valence, dans l'ouest de l'Espagne, a fait au moins cent morts et des dégâts inimaginables, rasant des dizaines de communes. La solidarité s'organise dans toute l'Europe.

« L’antichambre de l’enfer ». Ce titre du quotidien espagnol ABC, ce matin, dit à lui seul l’ampleur de la catastrophe. Les images qui circulent depuis hier sur les réseaux sociaux sont proprement hallucinantes : plus qu’une simple tempête, c’est bien une forme de tsunami qui a ravagé mardi la région de Valence. Sonnée, l’Espagne s’est réveillée hier en regardant les images de centaines de voitures amoncelées en tas sur les autoroutes, de zones industrielles rasées, de torrents dans les rues balayant des poids lourds et pliant des lampadaires comme des fétus de paille, de voitures emportées avec leurs passagers terrorisés sous les yeux des habitants réfugiés dans les étages des immeubles, impuissants. 

Au moins 96 personnes sont mortes dans cette catastrophe, mais le gouvernement espagnol prévient que le bilan sera bien plus lourd, de nombreux disparus étant signalés. Ce matin, sur X, d’innombrables avis de recherche sont diffusés par des particuliers qui diffusent la photo d’un mari, d’une fille, d’un frère, en demandant si quelqu’un l’a revu. 

115 000 foyers sont encore privés d’électricité ce matin, et les ponts effondrés, les routes coupées ou affaissées rendent la circulation impossible dans plusieurs zones. Certains villages de l’arrière-pays sont totalement coupés du monde. 

Les témoignages que l’on trouve dans la presse espagnole donnent une idée de la folle violence de l’événement. Ainsi, à Utiel, à une centaine de kilomètres de Valence, un habitant montre un trou béant dans le mur de sa maison : il a été causé par sa propre voiture, après que le torrent d’eau eut défoncé la porte de son garage et propulsé le véhicule comme un bélier contre la façade. 

Urbanisation chaotique et alertes tardives

Il est tombé mardi, sur la région de Valence, l’équivalent d’un an de pluie en 8 heures. Les inondations qui se sont produites sont le résultat d’une conjonction de plusieurs causes. L’agglomération de Valence est située dans une plaine au bord de la Méditerranée, ceinturée de montagne et traversée de très nombreux cours d’eau, très urbanisée. Mardi, un orage stationnaire d’une extrême violence s’est déclenché, au point de rencontre de vents froids venus des montagnes et d’une masse d’air humide venue de la Méditerranée – l’équivalent de ce que l’on appelle en France un épisode cévenol. La température encore anormalement élevée de la Méditerranée est l’une des causes de la violence du phénomène, rendant les quantités d’humidité dans l’air particulièrement importantes. 

Les énormes cumuls de pluie (parfois plus de 400 mm en quelques heures) ont fait déborder d’un coup tous les cours d’eau en même temps, ce qui a provoqué ce qui ressemble à un tsunami, non venu de la mer mais de l’intérieur des terres : une vague qui submerge tout sur son passage en quelques minutes. 

Et le bilan aurait pu être encore plus dramatique, si les autorités locales n’avaient pas décidé, il y a plusieurs dizaines d’années, de détourner le fleuve Turia qui traversait l’hypercentre de Valence. Le 13 octobre 1957, un phénomène similaire avait frappé la ville, causant la mort de 80 personnes. C’est à la suite de ces inondations que les élus locaux ont pris la décision de détourner le fleuve et de lui faire contourner la ville par le sud, asséchant l’ancien lit du fleuve et le transformant en parc. Cette initiative a probablement empêché que, mardi, tout le centre-ville de Valence soit noyé sous les eaux. 

Reste que, comme le souligne la presse espagnole ce matin, la question de l’urbanisme et des habitations en zone inondable est un problème de fond dans cette région. Selon El Diario, 280 000 logements seraient construits en zone inondable dans la seule province de Valence, soit un quart de tous ceux qui sont dans ce cas en Espagne. À Murcie, ce sont 17 % des logements qui sont construits en zone inondable. De très nombreuses habitations et zones d’activités sont également dans ce cas au sud de la ville de Valence, comme dans la commune de Paiporta, à 5 km au sud-ouest de la ville centre, qui compte 40 des 96 morts décomptés à cette heure. 

Par ailleurs, une polémique est en train de grandir à propos du système d’alerte, jugé par beaucoup trop tardif et insuffisant. Pourtant, c’est dès dimanche que Aemet – l’équivalent de Météo France en Espagne – a émis de premières alertes pour la région de Valence. Lundi à 15 h, l’alerte est passée en « orange », puis en « rouge » mardi à 10 h, Aemet diffusant un communiqué sans ambigüité : « Alerte rouge ! Le danger est extrême. Ne vous approchez pas des lits des rivières. » La Generalitat (le gouvernement local) a décrété l’état d’urgence dès le mardi matin. Pourquoi, dans ces conditions, y a-t-il polémique ? Parce que le système général d’alerte qui envoie des messages sur les téléphones des habitants, équivalent de FR-Alert en France, n’a lui été déclenché que très tardivement, entre 20 h et 20 h 30 le mardi. Des victimes racontent qu’elles ont reçu ce message les avertissant qu’elles ne devaient en aucun cas sortir de chez elles … alors qu’elles étaient déjà grimpées dans des arbres pour tenter d’échapper à la furie de la crue. 

Solidarité

Depuis que l’ampleur de la catastrophe est connue, la solidarité s’organise hors des frontières de l’Espagne. Huit pays ont déjà proposé leur aide (la France, le Maroc, l'Italie, la Grèce, le Portugal, la Turquie, la République tchèque et la Slovénie) et pourraient notamment dépêcher des effectifs de la sécurité civile. La communauté européenne va également débloquer des aides, et l’Europe a activé le système satellitaire Copernicus « pour aider à coordonner les équipes de secours ». 

En France, les associations d’aide humanitaire ont d’ores et déjà lancé des appels aux dons pour aider les dizaines de milliers d’habitants de la région qui ont tout perdu. Pour ce qui concerne les éventuels dons des communes, il leur sera possible de faire un don (sous réserve expresse d'une délibération) à un organisme française (type Croix rouge ou Protection civile). Il est aussi possible qu'un dispositif soit activé par le ministère des Affaires étrangères, permettant dans ce cas une aide directe. Pour l'instant, aucun fonds n'a été activé : il est nécessaire, au préalable, que le pays concerné accepte officiellement l'aide internationale, ce qui logiquement ne devrait pas tarder. 

Tous les experts l’affirment formellement : cette catastrophe sans précédent en Espagne est une conséquence directe du réchauffement climatique. Et c’est, au moins, toute la façade méditerranéenne qui est exposée, et ce de façon de plus en plus fréquente, à des phénomènes météorologiques de grande ampleur. Après les intempéries et les inondations particulièrement violentes qui ont touché la France pendant le mois d’octobre, cette nouvelle catastrophe, d’une ampleur inédite, montre plus que jamais l’urgence de lutter contre le réchauffement climatique, et d’y consacrer des moyens à la hauteur de l’enjeu. 




Petite enfance
Une réforme du mode de financement des crèches « d'ici 2028 », promet le gouvernement
La ministre chargée de la Petite enfance, Agnès Canayer, évoque, dans une interview publiée jeudi, la mise en oeuvre d'une réforme « d'ici 2028 » du mode de financement des crèches, jugé kafkaïen et auquel sont imputées de récentes dérives.  

« Je vais engager, notamment en lien avec la Cnaf (Caisse nationale des allocations familiales) un groupe de travail de réflexion pour définir des pistes permettant de clarifier et faire évoluer ces modes de financement », déclare la ministre dans un entretien aux journaux du groupe Ebra.

« Un des objectifs sera qu’ils donnent aux élus locaux des leviers pour créer des places de crèche, tout en étant équilibré entre l’ensemble des modes d’accueil », ajoute-t-elle, précisant espérer « avoir d’ici fin 2025 des pistes concertées, et d’ici 2028 une mise en œuvre concrète.»

L'accueil en crèche repose sur un système « socio-fiscal complexe », selon les termes du Conseil économique social et environnemental (Cese). Deux subventions publiques existent. D'un côté, la prestation de service unique (PSU), versée par la caisse d’allocations familiales (Caf) et qui concerne l'ensemble des crèches. De l'autre, la prestation d'accueil du jeune enfant (Paje) qui ne concerne que les micro-crèches.  

Épinglé depuis plusieurs années pour sa complexité, ce mode de financement est décrié par une partie du secteur et des observateurs qui pointent ses « effets pervers ».

Le système de tarification horaire concentre notamment une bonne partie des critiques et aurait, selon ses détracteurs, incité certains acteurs du privé à profiter de certaines failles et à falsifier par exemple les heures de présence des bébés. 

Des dérives et une course au remplissage qui ont pu être à l'origine de cas de maltraitances, de burn-out des professionnelles engagées sur le terrain ou encore de non-respect du taux d'encadrement. 

Reste à savoir quels seraient les contours de cette réforme, et de quelle manière le gouvernement entend concerter avec les communes pour l'élaborer. Sans compter qu'en ces temps tellement incertains en matière politique, une annonce à si longue échéance (quatre ans), semble relativement peu réaliste, connaissant les incertitudes sur la durée de vie du gouvernement. 







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