Édition du mardi 22 octobre 2024

Social
Cotisations CNRACL : employeurs et députés dénoncent une hausse « insoutenable »
Prévue dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale, la hausse brutale de la cotisation employeur à la CNRACL provoque l'incompréhension et la colère des employeurs territoriaux et hospitaliers. À l'Assemblée nationale, plusieurs députés demandent, par amendement, le retrait de cette mesure. 

C’est avec « stupéfaction » que la Coordination des employeurs territoriaux (1) a appris le projet du gouvernement d’augmenter de 4 points la cotisation employeur à la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL), hausse qui devrait être suivie de deux autres en 2026 et 2027. Dans un communiqué publié hier, la CET dénonce « une hausse soudaine et inédite, décidée unilatéralement », qui pourrait coûter jusqu’à 5 milliards de plus par an aux collectivités et aux employeurs hospitaliers en 2027.

La CET « tire la sonnette d’alarme »

La Coordination rappelle que les cotisations à la CNRACL ont déjà augmenté d’un point en 2024. La Première ministre Élisabeth Borne avait alors promis une compensation pérenne… mais celle-ci ne se prolongera pas en 2025, ce qui prouve une fois de plus que les promesses n’engagent que ceux qui y croient. Et voilà donc un nouveau train de hausses dont le premier wagon – 4 points en 2025 – coûtera 1,3 milliard d’euros aux collectivités l’an prochain. Si le projet d’appliquer une hausse similaire les deux années suivantes se concrétise, ce seront bien entre 4,5 et 5 milliards d’euros supplémentaires qu’il faudra dépenser… à l’heure où le gouvernement somme les collectivités de réduire leurs dépenses de fonctionnement. 

Rappelons qu’en 2012, la part employeur de cette cotisation était de 27,3 %. En 2027, si une hausse de 4 points par an était appliquée, elle serait de 43,65 %... soit une hausse de 60 % en une quinzaine d’années !

« Face à cette augmentation massive de cotisations annoncée, écrit la CET, qui s’inscrit dans un cadre budgétaire de plus en plus contraint, la Coordination des employeurs territoriaux tire la sonnette d’alarme sur la mise en péril des finances publiques locales, sur le risque d’insolvabilité de certaines collectivités territoriales. » Sans compter qu’à l’heure où chacun s’accorde à dire qu’il faut augmenter l’attractivité des métiers de la fonction publique territoriale, on voit mal comment les employeurs pourraient faire des efforts sur les rémunérations s’ils doivent assumer ce coup de bambou sur les cotisations. 

En conséquence, la Coordination se dit « indignée de la façon dont sont traitées les collectivités territoriales et du manque de considération porté aux employeurs territoriaux qui, en responsabilité, ont multiplié les alertes et se sont tenus à disposition du gouvernement ». 

Mesure réglementaire

Il faut donc espérer que lors de l’examen du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) au Parlement, qui se déroule parallèlement à celui du projet de loi de finances, le législateur arrivera à faire reculer le gouvernement sur ce point. Mais la chose est assez compliquée, car la hausse des cotisations CNRACL ne relève pas de la loi mais d’une simple mesure réglementaire (décret). C’est la raison pour laquelle cette mesure ne figure pas « en dur » dans le PFLSS : en réalité, elle est inscrite dans un rapport « décrivant les prévisions de recettes et les objectifs de dépenses par branche des régimes obligatoires de base et du régime général » (voir en p. 85 du PLFSS). Dans le projet de loi lui-même figure uniquement, à l’article 14, le fait « d’approuver » ce rapport. Cette approbation donnerait quitus au gouvernement pour recourir à ces hausses de cotisation, par décret. 

Et pas seulement : c’est également dans ce rapport que figurent les objectifs de dépenses de l’assurance maladie (Ondam) ainsi que des mesures diverses comme la hausse du reste à charge après consultation chez le médecin, ou le report de six mois de l’indexation des pensions de retraite sur l’inflation.

Amendements d’appel

À l’Assemblée nationale, un certain nombre de députés ont donc déposé des amendements sur cet article 14 pour contester la hausse des cotisations CNRACL. 

Plusieurs d’entre eux ont choisi de déposer directement un amendement proposé par l’AMF, France urbaine, Intercommunalités de France et la Fédération hospitalière de France. Cet amendement vise à « interpeller le gouvernement sur le caractère unilatéral » de la hausse  – qui n’a fait l’objet d’aucune concertation – et le fait que cette hausse « soudaine et substantielle » soit « insoutenable ». L’amendement, tout comme le communiqué de presse de la CET, ne manque pas de rappeler que la CNRACL, au titre du mécanisme dit de « compensation démographique », a largement contribué à renflouer les autres caisses, puisqu’elle a vu ses recettes amputées de quelque 100 milliards d’euros à ce titre depuis 1974. Cette nouvelle hausse, peut-on lire dans l’amendement, « confère aux employeurs territoriaux et hospitaliers un rôle inacceptable de ‘’payeurs en dernier ressort’’ du solde du système de retraite pris dans sa globalité ». 

Il est également rappelé que, pour les collectivités locales, cette hausse de 5 milliards s’ajoute à toutes les mesures contenues dans le projet de loi finances (ponctions sur le budget des collectivités, non-indexation de la DGF, baisse drastique du Fonds vert…). En additionnant toutes ces mesures, on aboutit à une addition qui est probablement la plus lourde jamais payée par les collectivités, pour « participer » à la réduction d’un déficit dont il faut, une fois de plus, rappeler qu’elles ne sont aucunement responsables. 

Il est intéressant de noter que l’amendement de l’AMF et des autres associations d’élus a été repris par des députés d’obédiences politiques très variées, allant du Parti socialiste (Céline Thiébault-Martinez) aux Républicains (Vincent Rolland) en passant par la députée macroniste Violette Spillebout. Si les choix individuels de ces députés se reflètent, ne serait-ce qu’en partie, dans ceux de leur groupe politique à l’Assemblée, il est tout à fait possible que ces amendements soient votés. Mais il ne s’agit que d’amendement d’appel – autrement dit, même si l’article 14 était rejeté, cela n’empêcherait pas forcément le gouvernement de décider par décret d’augmenter les cotisations employeurs. 

L’AMF et la CET continueront, quoi qu’il en soit, à réclamer une « remise à plat globale et sérieuse » du système de retraite des agents, qui pourrait s’appuyer sur certaines pistes proposées dans un rapport inter-inspections publié fin septembre

(1)    AMF - Départements de France - Régions de France – Intercommunalités de France - France Urbaine - Villes de France - APVF - AMRF - CNFPT - FNCDG -Collège employeurs du CSFPT




Logement
Budget 2025 : Valérie Létard confirme la fin du « Pinel », mais souhaite l'extension du PTZ 
La ministre du Logement a annoncé le non-remplacement du dispositif Pinel, qui doit disparaître en fin d'année, même si des députés de la coalition gouvernementale ont déposé des amendements visant à le prolonger. Elle souhaite, cependant, généraliser le PTZ dans le neuf et « adapter » le calendrier d'interdiction des passoires énergétiques.

Le dispositif Pinel non remplacé à la fin de l’année ; le prêt à taux zéro (PTZ) élargi dans le neuf et l’interdiction de mise en location des logements les plus énergivores légèrement aménagée... En pleine crise du logement, la ministre du Logement et de la Rénovation urbaine Valérie Létard a détaillé, vendredi, une partie de sa feuille de route, dans un entretien au Parisien.

Le non-remplacement du Pinel confirmé

L’extinction à la fin de l’année de la niche fiscale d'aide à l'investissement locatif était redoutée, elle a été confirmée par l’ancienne vice-présidente du Sénat : « Il n'y aura pas de dispositif remplaçant le Pinel », a tranché Valérie Létard, en rappelant que « le dispositif a coûté 25 milliards d’euros à l’État en dix ans ». 

Pour autant, « l’investissement locatif doit être soutenu », a-t-elle assuré. Celle-ci dit ainsi regarder les propositions des parlementaires pour « trouver des pistes de transition », telles qu’une « donation à ses enfants, exonérée d’impôts, jusqu’à 150 000 euros par parent (soit 300 000 euros pour un couple) pour l’achat d’un logement neuf » ou l’exonération « des droits de succession [pour] les acheteurs d’un logement neuf ».

« Ce qui est prévu sur les donations ne permettra pas de pallier la fin du Pinel. Il faut trouver une alternative », a d’ores et déjà répondu le président de la Fédération française du bâtiment (FFB), Olivier Salleron.

Côté promoteurs, le président de la Fédération qui les représente (FPI), Pascal Boulanger, exhortait encore il y a un mois à ne « surtout pas supprimer le Pinel », plaidant même pour « le remettre dans son ancienne version pendant un, deux ou trois ans ». Il se félicitait d’ailleurs d'avoir été entendu par Valérie Létard, au lendemain de sa nomination, celle-ci devait « monter au créneau » pour défendre sa position. Sans succès visiblement… 

Un motif de consolation, toutefois, avec le projet d’exonération de taxe sur les donations qu’il considère comme « le coup de pouce dont les acheteurs ont besoin pour déclencher une vente dans le neuf ».

Des amendements déposés pour le prolonger

Minoritaire dans une Assemblée éclatée, l’exécutif devra, cependant, se plier dans l’hémicycle aux choix des députés de tous bords, qui ont réussi à créer de nombreuses alliances de circonstances lors de la discussion du projet de budget en commission. Et notamment des élus qui composent sa propre coalition.

Sur le Pinel précisément, la ligne gouvernementale ne semble pas être celle de l’ensemble des députés macronistes et LR, confirmant la fragilité du budget présentée par l’exécutif. Une série d’amendements identiques portés par plusieurs élus Les Républicains, Horizons et Renaissance – ainsi que des ciottistes et des Liot – demandent la prorogation d’un an de ce dispositif, « jusqu’au 31 décembre 2025 », « dans les conditions qui prévalaient avant 2022 ».

Les députés LR réclament même sa prolongation pour trois ans, dans son ancienne version. Un rétablissement « indispensable » afin « d’accroitre l’offre de logements locatifs abordables ». 

Selon leur chef de file, Laurent Wauquiez (Haute-Loire), à l'origine de l'amendement, « l’arrêt du dispositif conduirait à aggraver l’effondrement actuel de tous les indicateurs en matière d’accès à des logements neufs » alors que « les mises en ventes de logements neufs tombent à 28 000 au premier semestre 2024 contre 75 000 au premier semestre 2018 ou encore 40 000 au premier semestre 2020, en pleine crise covid ». En cause, « la baisse progressive enclenchée en 2022 de l’avantage fiscal qui rend le dispositif Pinel peu incitatif, non compensée par le Pinel + compte tenu de sa complexité technique », explique l’ancien président de la région Rhône-Alpes.

D’autres élus (PS, PCF, Renaissance) proposent, quant à eux, le prolongement, pour trois ans, du Pinel Outre-mer, tandis que des députés socialistes, LR, Horizons et Liot suggèrent « une mesure transitoire » pour « ne pas mettre en péril des programmes immobiliers actuellement en cours de commercialisation ».  

Le PTZ « partout pour le neuf »

Pour soutenir la construction et l'accession à la propriété, la ministre confirme sa position en faveur de la généralisation du prêt à taux zéro (PTZ) pour les primo-accédants « partout pour le neuf, pour les appartements comme les maisons ». Actuellement, seuls les logements neufs en zone tendue ou les appartements dans l’ancien « avec beaucoup de travaux en zone détendue » sont concernés.

« Ces modifications permettraient de faire sortir de terre environ 15 000 logements supplémentaires en 2025 qui représenteront environ 600 millions d'euros de TVA », indique la ministre dans son entretien au Parisien alors que « 40 000 PTZ devraient être accordés en 2024 pour un montant de 900 millions d’euros étalés sur cinq ans ». De quoi satisfaire les constructeurs qui réclamaient une telle mesure.

On peut noter que, lors de l’examen du projet de budget en commission, les députés Horizons avaient fait adopter un amendement visant à étendre l’éligibilité au PTZ à « toutes les opérations neuves et anciennes sur l’ensemble du territoire, tant pour l’habitat collectif que pour l’habitat individuel ». 

Passoires énergétiques : un « délai supplémentaire » accordé

Valérie Létard a, par ailleurs, apporté quelques précisions sur la révision – déjà évoquée – de la mise en œuvre de l'interdiction à la location des logements les plus énergivores (classés F et G).

Si elle ne « pense pas que le calendrier qui définit les seuils de décence énergétique doive être reporté », elle souhaite plutôt l’« adapter » pour que « toutes les copropriétés qui ont, au minimum, voté les décisions de travaux puissent obtenir un délai supplémentaire ». Une proposition de loi allant dans ce sens va donc être déposée « avant le 1er janvier ».

« Environ 250 000 appartements en copropriété vont être concernés par cette échéance » visant l'interdiction de louer l’ensemble des logements classés G dès le 1er janvier prochain.

Alors que la « priorité est de permettre aux Français de se loger », la ministre souhaite également apporter des « assouplissements » afin de « moins pénaliser les logements chauffés à l’électricité et pour les copropriétés ».
 




Santé publique
Le droit à l'avortement affaibli par des disparités territoriales dans l'accès à l'IVG
La commission des affaires sociales du Sénat souligne dans un rapport l'importance d'assurer un accès effectif à l'IVG pour l'ensemble des patientes et dans tous les territoires. Aujourd'hui, l'accès à l'IVG est très inégal et certains freins locaux ont été identifiés par les rapporteurs.

Depuis mars 2024, la loi inscrit dans la Constitution la liberté garantie des femmes de recourir à l'interruption volontaire de grossesse (IVG). C’est donc désormais un droit fondamental et garanti. Pourtant, la protection de ce droit dans les faits est complexe car l'accès à l'IVG en France est très inégal. 

D’un département à l’autre et d’une commune à l’autre, il peut être plus ou moins compliqué d’avoir recours à un avortement. Malgré de récentes évolutions législatives qui visent à simplifier le parcours de soins des patientes, de fortes disparités territoriales demeurent et mettent à mal l'effectivité du droit. 

Un inégal engagement des professionnels de ville

La mission flash du Sénat constate que « si la part de la ville dans l'offre d'IVG a significativement progressé ces dernières années, elle demeure toutefois très inégale d'un territoire à l'autre et ne repose que sur une faible minorité de professionnels de santé impliqués ».

Les sénateurs indiquent qu’en 2023, moins de 10 % des IVG ont été réalisées hors d'un établissement de santé dans l'Orne, la Creuse, la Sarthe ou la Haute-Vienne, alors que plus de 60 % d'entre elles étaient réalisées en ambulatoire dans les Hautes-Alpes et dans les Alpes-Maritimes, en Guadeloupe et en Guyane.

L’inégale répartition des professionnels de santé libéraux en France ne serait pas responsable de ces écarts problématiques : l'inégal engagement des professionnels de ville dans l'offre d'IVG et l'inégale propension des femmes à y recourir sont en réalité à l’origine de ces disparités. 

L'implication des professionnels de santé dans la réalisation d'IVG en ville est « fortement minoritaire » puisqu’en 2023 seulement 14 % des sage-femmes, 19 % des gynécologues médicaux ou gynécologues-obstétriciens et 1,5 % des médecins généralistes ont pratiqué au moins une IVG dans l'année.

Rappelons que le gouvernement a procédé, le 1er mars 2024, à une revalorisation du tarif associé aux IVG médicamenteuses et a « fait figurer parmi les missions des DSRP celle de soutenir la montée en compétence des professionnels exerçant en cabinet libéral ». Pour aller plus loin, le Sénat propose de « fixer aux ARS des objectifs de croissance du nombre de professionnels de ville contribuant à l'offre d'IVG médicamenteuse, favoriser l'accès des professionnels à une formation de qualité et simplifier les procédures de conventionnement ».

Choix de la méthode et accès aux IVG tardives 

Il faut aussi souligner que le nombre d'établissements de santé ayant réalisé plus d'une IVG a diminué de 23,7 % depuis 2005, alors que le nombre d'IVG réalisées en France augmentait de plus de 8 % sur la même période. Plus grave encore : cet effet de la concentration de l'offre hospitalière sur l'accès à l'IVG va de pair avec le fait que l'ensemble des établissements impliqués ne proposent pas une offre complète. De fait, il y a peu d’offre pour les patientes et peu de choix en ce qui concerne le type d’intervention souhaitée. 

Un quart environ des établissements réalisant des IVG ne proposent un accès qu'à l'une des deux techniques et, le plus souvent, qu'à la technique médicamenteuse. En 2023, seulement 23 % des établissements contributifs proposent les deux techniques : l'IVG médicamenteuse et l'IVG chirurgicale (ou instrumentale). Pourtant, la loi dispose que « toute personne doit être informée sur les méthodes abortives et a le droit d'en choisir librement ».

La mission indique que, selon le ministère, dix ARS font état de zones infrarégionales dans lesquelles une seule méthode d'IVG est proposée. « De la même manière, d'après le "Baromètre IVG" publié par le planning familial, 31 % des femmes ayant avorté avant le début de leur huitième semaine de grossesse affirment ne pas avoir eu le choix de la méthode. »

Plus inquiétant encore, concernant la prise en charge des IVG tardives (au-delà de 12 semaines),  232 établissements peuvent proposer cet intervention, soit environ 44 % des structures contributives. Les rapporteurs insistent sur l’importance de soutenir au niveau régional la formation des sage-femmes et, plus largement, des équipes hospitalières à la technique instrumentale.

Des difficultés durables dans certains territoires 

Six ARS (Auvergne-Rhône-Alpes, Corse, Centre-Val-de-Loire, Grand Est, Guadeloupe, Guyane) estiment que des zones de leur territoire régional sont éloignées de plus d’une heure d’une offre d’IVG. Particularités géographiques, maillage insuffisant de l'offre hospitalière et libérale, difficultés de transport : les outre-mer et zones rurales sont particulièrement concernées.

Les sénateurs demandent donc un renforcement du suivi de l’accès à l’IVG, par la mise en place d’indicateurs supervisés par les ARS notamment comme la distance entre le lieu de réalisation et le domicile de la patiente, le délai de réalisation, le libre choix de la méthode retenue etc… Les rapporteurs préconisent aussi de faciliter la réalisation d'IVG médicamenteuses en téléconsultation dans le cadre d'une prise en charge hospitalière.

L’information à destination des patientes est aussi un axe d’amélioration décisif. Pour améliorer la visibilité de l’offre locale disponible, les sénateurs appellent à « finaliser la mise en place des répertoires régionaux et favoriser leur actualisation en permettant aux ARS de prendre connaissance des conventions conclues entre les établissements de santé et les professionnels exerçant en ville. » 

Consulter l'Essentiel du rapport.




Conseils municipaux
Pourquoi un conseil municipal n'a pas le droit d'appeler à un cessez-le-feu au Moyen-Orient
En ces temps marqués par une escalade militaire et de multiples conflits, des maires peuvent être tentés d'exprimer, par le vote d'un vœu ou d'une motion, leur attachement à la paix, leur soutien à telle ou telle cause voire la demande d'un cessez-le feu. Il faut cependant rappeler que de telles motions sont, en principe, illégales, notamment au nom du principe de neutralité des services publics, et parfois annulées par les tribunaux.

Le 27 août dernier, le tribunal administratif de Toulouse a validé la demande du préfet de Haute-Garonne, qui avait demandé l’annulation d’une délibération d’une commune du département prise le 28 février. Il s’agissait d’une « motion d’appel au cessez-le-feu » dans le cadre de la guerre entre Israël et le Hamas. Cette motion ne prenait pourtant pas partie pour l’un ou l’autre camp : elle dénonçait autant « l’horreur du 7 octobre » que « l’horreur des bombardements de civils » et demandait : « Tout doit être fait pour arrêter les violences inadmissibles du Hamas et du gouvernement et de l’armée israéliens ». 

« Intérêt local ou communal »

Bien que non partisane et à caractère purement pacifiste, cette délibération a été attaquée par le préfet, qui l’a déférée devant le tribunal administratif au motif « qu'elle était entachée d'illégalité, à raison de la méconnaissance des dispositions de l'article L2121-29 du Code général des collectivités territoriales faute de présenter un intérêt local ou communal ». 

Le tribunal a donné raison au préfet, en rappelant les termes de cet article L2121-29 du CGCT : « Le conseil municipal émet des vœux sur tous les objets d'intérêt local. » Ces délibérations, a précisé le tribunal, peuvent porter sur « des objets à caractère politique », mais uniquement s’ils présentent « un intérêt local ou communal ». La délibération de la commune Haut-Garonnaise, poursuivent les juges, « exprime une position politique de la commune (…) dans le cadre d'un conflit d'ordre international opposant le Hamas à l'État d'Israël, sans que la collectivité ne démontre que celle-ci présente un intérêt local ou communal ». Verdict : il existe « un doute sérieux » sur la légalité de cet acte, et le préfet est fondé à en demander l’annulation. 

Vaste jurisprudence

Comme le rappelle l’avocat Éric Landot dans un article de son blog, une telle décision n’a rien d’exceptionnel et une vaste jurisprudence existe sur ce sujet : « Un maire, écrit l’avocat spécialiste du droit des collectivités locales, en tant que citoyen peut manifester des opinions politiques, mais il n’a pas à y embarquer la mairie confiée à ses soins par les électeurs ». 

La question dépasse largement celle d’un appel au cessez-le-feu. Entre la question « de l’intérêt local ou communal » et celle de la neutralité du service public, les tribunaux ont eu à de nombreuses reprises à statuer sur des cas litigieux. Ainsi, plusieurs communes ont vu les tribunaux annuler la nomination d’un « citoyen d’honneur », au motif que celle-ci « constitue une prise de position dans une matière relevant de la politique internationale de la France dont la compétence appartient exclusivement à l’État ». 

Le même type de décision a été pris concernant des dénominations de rue, ou au nom de la neutralité du service public, ou pour le motif d’immixtion dans la politique internationale de la France.

On peut encore citer le cas, un peu différent, d’un maire qui avait choisi de boycotter, dans le service de restauration scolaire de la commune, les fruits originaires des colonies israéliennes dans les Territoires occupés de Cisjordanie. L’affaire est cette fois allée plus loin qu’une simple annulation de la délibération, puisque le maire a été condamné pour « discrimination nationale, raciale ou religieuse ». La Cour européenne des droits de l’homme, saisie par le maire, a confirmé ce jugement, et ajoutant de surcroît que le maire ne pouvait se substituer à l’État « pour décréter le boycott de produits provenant d’une nation étrangère ». 

Il faut enfin rappeler que le principe de neutralité des services publics s’applique aux questions de conflits sociaux : une commune a le droit d’apporter une aide sociale aux familles de grévistes, mais pas à soutenir une grève, pas plus qu’elle ne peut apposer une banderole au fronton de la mairie pour prendre position dans un débat politique national. Le Conseil d’État a rappelé maintes fois que « le principe de neutralité du service public s’oppose à ce que soient apposés sur les édifices publics des signes symbolisant la revendication d’opinions politiques, religieuses ou philosophiques ». Ainsi, tout récemment encore, plusieurs communes (dont, tout de même, Paris et Grenoble !) ont été épinglées pour avoir apposées au fronton de mairies des banderoles s’opposant à la réforme des retraites. 

Il faut cependant noter que la sévérité des préfets, en la matière, peut être variable en fonction des positions politiques et diplomatiques de l’État lui-même. Ainsi, il n’apparaît pas que les innombrables communes qui ont voté, après le 24 février 2022, des motions de soutien à l’Ukraine, aient été épinglées pour cela, bien que ces motions ne présentent pas plus « d’intérêt local ou communal » que celle sur le cessez-le-feu à Gaza. 




Aménagement numérique du territoire
Diffusion du signal horaire : l'ANFR lance une expérimentation à partir d'aujourd'hui
L'Agence nationale des fréquences (ANFR) est chargée depuis 2019 de la gestion de la diffusion du signal horaire, qui fournit l'heure légale française et est utilisé par de nombreuses collectivités. Un test de cadencement de puissance de diffusion du signal horaire débute ce jour.

Le signal horaire du temps légal (signal horaire hertzien) généré par l’émetteur d’Allouis (dans le Cher) est l’un des moyens de mise à disposition du temps légal en France métropolitaine. Auparavant appelé « signal horaire France Inter », cette fréquence transmet un signal inaudible mais qui permet de synchroniser un appareil adapté à l’heure légale française. 

C’est en 2019 que loi Elan a confié à l’ANFR (Agence nationale des fréquences) la responsabilité de la gestion de la diffusion de ce signal horaire. « Ce signal horaire de référence élaboré à partir d’horloges atomiques, avec une précision inférieure à la milliseconde, fournit l’heure légale française par voie hertzienne terrestre, lorsqu’il est capté par un appareil approprié », peut-on lire sur le site de l’ANFR.

L’ANFR a aussi pour mission d’assurer l’optimisation du système technique réalisant cette diffusion. C’est pourquoi elle a déjà réalisé des expérimentations sur le cadencement de puissance du signal. Aujourd’hui, un nouveau test va être lancé avec une puissance différente.

Un changement de 800 kW à 675 kW

L’ANFR souhaite tester une diffusion continue à la puissance de 675 kilowatts (kW) en lieu et place de 800 kW.

Concrètement, à partir de midi ce mardi, la diffusion du signal passera à 675 kW. La semaine prochaine, à partir du mardi 29 octobre 2024, à 12 heures, la diffusion repassera à 800 kW « afin de se prémunir d’éventuels équipements en défaut de synchronisation ». Puis, à partir du mardi 5 novembre 2024 à midi et jusqu’au 3 décembre à 8 heures une diffusion à 675 kW sera effectuée.

Ces tests doivent permettre à l’ANFR de s’assurer que la baisse de la puissance du signal n’a pas de conséquence sur la résilience des équipements qui l’utilisent. 

Rappelons que les collectivités locales ont recours à ce signal pour synchroniser des horloges de lieux publics, des panneaux d’information, des systèmes de commandes de l’éclairage public ou encore la synchronisation des horodateurs. Comme l’expliquait à Maire info Alain Cartier, chargé de mission « diffusion de l’heure légale » à l’ANFR, « le signal horaire permet par exemple aux équipements informatiques de se synchroniser en fonction de l’heure légale française. Autre exemple : les collectivités synchronisent leurs feux tricolores en fonction de ce signal horaire ce qui permet de sécuriser et coordonner le trafic sur une route qui a plusieurs feux. Ce signal peut aussi être utilisé pour la gestion de l’éclairage public d’une commune. »

Un dispositif de supervision 

Il est donc important que les maires soient attentifs à tout changement qui pourrait intervenir et qui pourrait être le résultat de cet ajustement opéré par l’ANFR ce jour.

Un dispositif de supervision renforcé est mis en place par l’ANFR durant toute la durée des tests. Il sera donc possible de signaler toute anomalie constatée ou toute information utile, en envoyant un mail à l’adresse suivante : incident-allouis@anfr.fr. L’ANFR demande de préciser dans le corps du mail le nom de l’organisation, le nom et prénom de la personne déclarant une anomalie ainsi que sa fonction, un numéro de téléphone et enfin une description détaillée de l’anomalie constatée et sa criticité.

« En cas de dysfonctionnement majeur, il pourra être mis un terme à l’expérimentation avec un retour à la puissance nominale (800 kW) de l’émetteur dans un délai maximal de 2 heures », précise-t-on du côté de l’ANFR. 
 







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