Édition du lundi 7 octobre 2024 |
Services publics
Présence postale : le gouvernement décidé à rétablir les 50 millions d'euros de crédits supprimés
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L'entourage du Premier ministre a informĂ© l'AMF, vendredi, que Michel Barnier a demandĂ© Ă Bercy de revoir sa copie sur la suppression de 50 millions d'euros de crĂ©dits du contrat de prĂ©sence postale territoriale.Â
La nouvelle avait consterné les élus de l’AMRF réunis en congrès, vendredi 27 septembre : le patron de La Poste, Philippe Wahl, leur avait annoncé que Bercy allait amputer de 50 millions d’euros – soit presque un tiers – les crédits consacrés au contrat de présence postale territoriale, dès cette année (lire Maire info de lundi dernier). Cette annonce avait aussitôt été dénoncée par David Lisnard, président de l’AMF, comme « un coup très grave (porté) à un service de proximité indispensable, notamment bancaire et social, en zones rurales et dans nos quartiers ». « Cela conduira à renforcer la charge financière des communes pour garantir le fonctionnement d’un service qui ne relève pas de leurs compétences », ajoutait le maire de Cannes, qui fustigeait « la différence entre les discours de l’État et la réalité sur les services de proximité, la ruralité, les finances communales. »
Un recul par amendement ?
Le profond mécontentement des maires à ce sujet a semble-t-il été entendu à Matignon, dont le locataire Michel Barnier semble vouloir à tout prix éviter de se fâcher avec les associations d’élus, à la veille d’un débat budgétaire qui va être particulièrement compliqué. Le cabinet du Premier ministre a indiqué au président de l'AMF, le 4 octobre, que les crédits seraient finalement maintenus, non seulement cette année mais jusqu’à la fin de ce contrat de présence postale (2025). « Le Premier ministre a effectivement dit qu’il était sensible à la présence des services publics au plus près des citoyens, a indiqué l’entourage de Michel Barnier au quotidien Le Monde. La continuité de la mission d’aménagement des territoires de La Poste sera donc assurée et le nécessaire sera fait dans le projet de loi de finances à l’occasion de la discussion parlementaire. »
« Le nécessaire sera fait » signifie que ce recul ne sera effectué que par amendement. En effet, à la veille de la présentation du projet de loi de finances (PLF) devant le comité des finances locales, il n’est plus possible de modifier le texte, désormais bouclé. On trouvera donc dans le PLF la mention de cette suppression de crédits, mais le gouvernement déposera un amendement pour supprimer la suppression. Le groupe La Poste, de son côté, a confirmé avoir « été informé » du dépôt de cet amendement.
Et maintenant ?
Si ce recul se confirme, il est rassurant à court terme, mais n’épuise pas le sujet. Ne serait-ce que parce que, comme l’AMF l’a rappelé au moment de l’annonce de la semaine dernière, depuis que le contrat de présence postale existe, l’État n’a jamais versé l’intégralité des sommes promises annuellement (174 millions d’euros). Même si la ponction n’a jamais atteint le niveau de celle qui était prévue cette année, cela reste un problème que l’AMF souhaite travailler avec le gouvernement.
Restera ensuite la question de l’avenir. Le présent contrat de présence postale (le 6e) court jusqu’en 2025. Et après ? En cette période de disette budgétaire, l’État acceptera-t-il de continuer à assurer des moyens financiers pérennes pour permettre la présence de points de contact de La Poste dans les petites communes, ou les moyens seront-ils drastiquement revus à la baisse au nom du « redressement des finances publiques » ?
Sans même se projeter jusque-là, les maires seront déjà attentifs à voir si le gouvernement dépose bien son amendement actant le rétablissement des 50 millions d’euros ponctionnés… et si celui-ci est adopté.
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Polices municipales
Bruno Retailleau « très favorable à une extension des pouvoirs des policiers municipaux »
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Le ministre de l'IntĂ©rieur, Bruno Retailleau, a Ă©tĂ© longuement auditionnĂ© la semaine dernière par la commission des lois de l'AssemblĂ©e nationale. Parmi bien d'autres sujets, il s'est dit très favorable Ă une Ă©volution des pouvoirs des polices municipales, et disposĂ© Ă aller « très rĂ©solument dans ce sens », tout en disant ne pas vouloir aller contre l'avis de l'AMF.Â
En plus de deux heures et demie d’audition et plus de trente questions des membres de la commission des lois, Bruno Retailleau a pu détailler ses positions sur à peu près tous les points intéressant son ministère, de l’immigration au trafic de drogue en passant par le scrutin proportionnel, les sapeurs-pompiers ou la lutte contre les violences sexistes et sexuelles. Plusieurs députés l’ont également interrogé à propos de ses déclarations très polémiques sur l’État de droit (« l’État de droit, ça n’est ni intangible ni sacré ») qui lui ont valu, ce qui paraît un comble, d’être recadré par Marine Le Pen elle-même hier. La chef de file du Rassemblement national, en meeting à Lille, a évoqué sur ce sujet une « divergence majeure » avec le ministre de l’Intérieur, se voulant la « garante » de l’État de droit, « immense conquête de la civilisation européenne ».
Bruno Retailleau, devant les députés, s’est longuement expliqué sur ses propos, expliquant qu’il a voulu dire que lorsque qu’une loi « ne protège pas les Français », il faut la changer, et prenant l’exemple d’Édouard Balladur qui, après une censure du Conseil constitutionnel sur une loi relative à l’immigration, a modifié la Constitution par référendum. « Je ne crois pas qu’Édouard Balladur était illibéral », a martelé Bruno Retailleau, qui a ironisé sur le fait qu’il ne pensait pas « débuter une carrière d’autocrate à 60 ans passés ».
Partenariat avec l’AMF
Parmi les nombreuses questions posées au ministre de l’Intérieur, l’une l’a été par Éric Pauget (LR), qui a tout récemment déposé une proposition de loi sur la « judiciarisation » des pouvoirs de la police municipale (lire Maire info du 20 septembre). Pour rappel, ce texte propose « d’élargir les compétences judiciaires des polices municipales », sous forme d’une expérimentation de cinq ans. Avec l’accord du maire ou du président d’EPCI et après délibération en ce sens du conseil municipal ou communautaire, les directeurs ou chefs de police municipale pourraient être habilités en tant qu’officiers de police judiciaire (OPJ), ce qui conduirait de facto à ce que les agents placés sous leur autorité soient en partie sous le contrôle d’une autorité judiciaire et non plus sous celle, exclusive, du maire. Munies de cette nouvelle autorité, les polices municipales pourraient constater toute une série de délits et d’infractions qu’elles ne peuvent traiter aujourd’hui.
Le député a demandé au ministre de l’Intérieur quelles étaient ses dispositions vis-à-vis de ce texte. Celui-ci a répondu qu’il était « très favorable à une extension du rôle des policiers municipaux », tout comme son ministre délégué chargé de la Sécurité du quotidien, Nicolas Daragon, « passionné » par la question. « Devant le niveau de délinquance, a poursuivi Bruno Retailleau, le continuum de sécurité nécessite que l’on soit tous au coude à coude et que l’on puisse donner à nos policiers municipaux un certain nombre de nouveaux outils. »
Il a néanmoins tout de suite posé le problème de fond : « Attention : dès lors que vous irez sur le champ de la police judiciaire, le maire perdra le contrôle de ses policiers. Ils seront sous le contrôle du procureur. » Et d’ajouter à l’attention de ceux qui l’avaient vivement attaqué un peu avant : « C’est l’État de droit ! ».
Bruno Retailleau s’est dit prêt à aller « résolument dans ce sens », tout en prévenant : « Nous ne ferons rien sans l’avis de l’AMF, sans un partenariat avec les maires de France. » L'AMF a, sur ce point, posé un certain nombre de conditions. D'abord, elle souhaite que soit précisément défini le périmètre de cette extension, c'est-à-dire les les compétences précises de police judiciaire qui pourraient être données aux polices municipales. Et, deuxièmement, que la prise de ces compétences ne soit qu'un droit d'option, c'est-à-dire qu'il revienne exclusivement au maire et au conseil municipal de s'en emparer ou non. Ce seraient donc, dans ce cas, les maires qui auraient la faculté de décider ou non de placer les policiers municipaux sous l'autorité du procureur pour l'exercice de ces compétences judiciaires.
Ce qui implquerait que pour l'exercice de ses missions habituelles, en revanche, la police municipale reste sous le contrôle du maire. « La police municipale doit rester sous l’autorité du maire. Elle dispose d’une légitimité propre, fondée sur la proximité de son action au service de la sécurité, de la sûreté et de la tranquillité publique », écrivaient, en juin dernier, dans une tribune, le président de l’APVF Christophe Bouillon et le vice-président de l’AMF, Philippe Laurent.
Rappelons que ce sujet sera abordé lors du prochain congrès de l’AMF : mercredi 20 novembre à 16 h 15 aura lieu un débat intitulé : « Polices municipales, le juste équilibre des prérogatives à trouver ». Le débat se poursuivra peut-être dans le cadre du Beauvau de la police municipale, démarré au printemps dernier et resté au milieu du gué pour cause de dissolution, si le nouveau gouvernement le décide.
Mayotte : le ministre favorable à la suppression du droit du sol
Parmi les autres sujets abordés lors de cette audition, Bruno Retailleau a dit son soutien à la proposition de loi constitutionnelle d’Estelle Youssouffa sur la suppression du droit du sol à Mayotte (lire Maire info du 30 septembre). « Cela se justifie totalement », a déclaré le ministre de l’Intérieur, ajoutant néanmoins que « le congrès aux trois cinquièmes, ça va être compliqué ». Curieuse erreur de droit venant d’un ministre de l’Intérieur puisque, dans le cas d’une proposition de loi constitutionnelle, il n’y a pas de réunion du congrès ni d’obligation d’adoption aux trois cinquièmes : il faut obligatoirement, une fois le texte adopté par le Parlement, convoquer un référendum.
Bruno Retailleau a également évoqué, plus rapidement, le dispositif des « quartiers de reconquête républicaine », indiquant qu’il en avait, sur son bureau, une évaluation qui apparaît « très mitigée ».
Interrogé sur le lancement par Michel Barnier d’une « réflexion » sur l’introduction de la proportionnelle aux élections législatives, Bruno Retailleau n’a pas fait mystère de son opposition à ce système, qui n’est « pas son truc ». Il en a profité pour rappeler son opposition à la règle du non-cumul des mandats, qui a « déterritorialisé un certain nombre d’élus ». Il a ajouté que la proportionnelle était, à son avis, loin d’être le sujet de préoccupation majeur des Français, tout en se disant, naturellement, « ouvert à toutes les réflexions. »
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Petite enfance
Le système de financement des crèches tenu en partie responsable des dérives
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Le journaliste et auteur de l'enquête « Les Ogres », Victor Castanet, a été auditionné par la commission des affaires sociales au Sénat sur les dysfonctionnements qu'il dénonce dans les crèches privées à but lucratif.
Les crèches privées à but lucratif sont dans la tourmente. Après son livre sur les Ehpad du groupe Orpea, Les Fossoyeurs, le journaliste Victor Castanet publie Les Ogres, qui pointe de graves dysfonctionnements dans les crèches de grands groupes privés comme People & Baby, Les Petits Chaperons rouges, ou encore La Maison Bleue.
Le journaliste dénonce les failles de ce système lucratif à la fois dans les crèches en entreprise (dont le nombre a explosé depuis qu’en 2004, le gouvernement a accordé une forte réduction d’impôt à celles qui en installaient) et les crèches en délégation de service public.
Victor Castanet a tiré des leçons des maltraitances qu’il rapporte dans son livre et les a présentées lors d’une audition jeudi dernier devant la commission des affaires sociales du Sénat. De nombreuses questions ont été posées par les sénateurs sur la responsabilité de chacun, le mode de financement actuel semblant être l'un des nœuds du problème.
Un mode de financement « catastrophique »
« Les opérateurs de secteurs associatifs, municipaux ou privés se plaignent de cette fameuse Prestation de service unique (PSU), pensée depuis 2004, et dont les effets ont été amplifiés depuis la réforme 2014 », explique le journaliste devant les sénateurs.
Depuis 2014, date de la réforme la PSU, c’est un taux de facturation calculé sur un ratio « heures facturées / heures de présence effective » qui sert de base au versement de la PSU. Ce système de financement, « similaire au mode de financement de la T2A [tarifiction à l'activité] à l’hôpital », remarque le journaliste, est d’une « complexité inouïe » et « pousse les opérateurs à maximiser le taux d’occupation des crèches ».
Concrètement, « avant 2014, dans une crèche de 30 enfants, il y avait 30 enfants, désormais dans une crèche de 30 enfants, il y a 60 enfants. Le nombre a doublé. D’un point de vue de la dépense publique, on peut estimer que c’est une bonne chose puisque l’on a doublé le nombre d’enfants sans créer de places nouvelles. Mais les professionnels se retrouvent à gérer les arrivées et les départs en permanence, elles n’ont plus la possibilité de pouvoir suivre un groupe d’enfants stable ».
Le journaliste a aussi largement condamné « la dynamique du low cost instaurée par People & Baby, Les Petits Chaperons Rouges et La Maison Bleue », qui place l’optimisation des coûts en priorité au détriment des conditions de travail et de la qualité d’accueil dans les crèches.
Un débat autour de la responsabilité des maires
Là où certains sénateurs ont été plutôt surpris, voire agacés, c’est lorsque le journaliste a parlé de la « complicité de nombreuses villes, collectivités territoriales et ministères ».
« Vous voulez démontrer qu’il ne s’agit pas uniquement de la responsabilité de certains opérateurs obsédés par la rentabilité, mais qu’il y a aussi une responsabilité des pouvoirs publics. Nous sommes nombreux dans cette salle à avoir été maires de petites communes, qui ont créé et géré des crèches avec pour seule boussole le bien-être des enfants. Ne pensez-vous pas avoir été désobligeant envers ces maires qui se dépensent sans compter pour protéger notre bien le plus précieux, nos enfants ? », a interpellé Christine Bonfanti-Dossat, sénatrice du Lot-et-Garonne.
Mais le journaliste persiste et parle de « co-responsabilité » des maires : Selon lui, certains maires « on a fait le choix du moins cher et du moins disant. » Pour rappel, l’AMF estime que le coût d'un berceau se situe autour de 16 000 euros par an. Selon Victor Castanet, à Marseille cela va même jusqu’à 24 000 euros la place. Pourtant les crèches privées ont « cassé les prix ». « Les maires se sont retrouvés face à une offre à 7 000 euros et une autre deux fois moins chère, explique le journaliste, et très régulièrement – mais pas toujours – les maires ont fait le choix du moins cher ».
Le président de la Commission Philippe Mouiller s’est exprimé sur le sujet pour Public Sénat : « Pour moi, la question n’est pas celle du maire mais plutôt des outils, des procédures qui font que l’on peut avoir des dérives dans lesquelles se sont engagées les collectivités, parfois à bon escient au démarrage. Globalement les maires ont toujours une volonté de mettre en place des services publics de qualité, au plus près des besoins de la population, et en gérant au mieux les deniers publics. Parfois, les outils ne sont pas toujours adaptés pour permettre de trouver cet équilibre ».
Rappelons qu’il y a quelques semaines l’AMF a rappelé l'attachement des maires à la qualité de l'accueil et leur vigilance face aux dérives. David Lisnard, président de l’AMF avait alors déclaré : « Rien n’est pire que la maltraitance de personnes fragiles, que ce soit en Ehpad ou en crèche. Les cas qui peuvent exister doivent être identifiés, analysés, et les personnes sanctionnées. » L’AMF, a-t-il rappelé, a toujours été vigilante à ce que la pénurie de professionnels n’entraîne pas une baisse du niveau de qualification demandé
Philippe Laurent, maire de Sceaux et vice-président de l’association avait rappelé de son côté que « face à des difficultés budgétaires, certaines communes ont été amenées à procéder à des délégations de service public ». Les responsables de l'AMF ont insisté sur le fait que dans ce cas, les maires doivent être particulièrement attentifs à la qualité du cahier des charges,celui-ci pouvant, par exemple prévoir la possibilité pour la commune de conserver la maîtrise de l’attribution des places. Philippe Laurent a également rappelé que « l’immense majorité des crèches sont publiques, gérées en régie directe avec des agents publics, des normes extrêmement précises et contraignantes ». Le « souhait » des maires, c’est « de pouvoir faire vivre un service public de qualité », dans un contexte marqué à la fois par la hausse des prix (repas, énergie) et par la carence de personnel. « C’est un débat qu’il faudra continuer à avoir, notamment sur le plan du statut et de la rémunération des personnels » (lire Maire info du 19 septembre).
Des failles dans les instances de contrôle
Le journaliste, dans son ouvrage, dénonce aussi largement un système de contrôle défaillant. Comment est-ce possible de trouver des délégations de service public à des prix dérisoires (parfois 3 000 euros par place) alors qu’il existe des autorités de contrôle ?
En prenant l’exemple d’une crèche La Maison bleue, il raconte qu’un audit a permis de montrer que l’opérateur a « acté une baisse des prix dans les DSP et que à la suite de la reprise d’une DSP ils préconisent la diminution de 10 % de la masse salariale. C’est une politique assumée alors même que quand vous reprenez une crèche municipale vous ne pouvez pas baisser les effectifs. Il y a une défaillance des autorités de contrôle. »
Pour lui, « les autorités de contrôle n’ont pas fait leur travail ». C’est le cas notamment des inspecteurs de la Protection maternelle et infantile, ou PMI. Il regrette que la « PMI fonctionne en silo selon le département » et note aussi dans son enquête une « diminution des compétences des inspecteurs ». Rappelons que l'AMF, de son côté, plaide de longue date pour « un renforcement des moyens des PMI, références incontournables pour ce qui concerne la qualité de l’accueil ».
Les sénateurs se sont rangés du côté du journaliste sur cette question. Philippe Mouiller a appelé à « regarder de très près nos outils de contrôle ». Par ailleurs, Daniel Chasseing, sénateur de la Corrèze, trouve « étrange » que lorsque les communes mettent en place une crèche de service public, on leur demande « des critères particuliers pour embaucher une directrice de crèche et des auxiliaires de puéricultrice en fonction du nombre d’enfants à la crèche. Donc s’il y a eu des dérives dues à un décret de 2014. Il faut que la Cnaf et les PMI fassent un contrôle et que la ministre mette les pieds dans le plat. »
Une « mission d’information flash » sur ce sujet va être menée par la Commission des affaires sociales du Sénat.
« Silence assourdissant »
En préambule de son intervention, Victor Castanet a dénoncé le « silence assourdissant de l’exécutif ». Alors que les élus, les professionnels de la petite enfance et les syndicats se sont mobilisés rapidement pour réclamer une réforme de ce système, « du côté de l’exécutif et de la majorité présidentielle : rien, pas un mot », rapporte l’enquêteur. « Aucune enquête Igas ou IGF n’a été lancée », ajoute-t-il. Il a cependant indiqué que la Cour des comptes allait se saisir du sujet notamment sur les effets de bord de la PSU.
Le jour même de l’audition, la ministre déléguée chargée de la Famille et de la Petite enfance, Agnès Canayer, a pris la parole pour la première fois sur ce sujet en annonçant la publication prochaine d'un référentiel de la qualité de l'accueil des enfants de moins de trois ans.
L’AMF dénonce depuis plusieurs années les règles de la PSU qui sont défavorables aux gestionnaires et impactent la qualité de l’accueil dans la mesure où ce modèle de co-financement pousse les gestionnaires à une optimisation excessive des places et pèse sur le travail des professionnels. Elle plaide ainsi pour un retour de la tarification au forfait qui éviterait ces effets néfastes.
Rappelons qu’à partir de janvier 2025, les établissements d’accueil du jeune enfant (EAJE) bénéficieront d’une nouvelle méthode de calcul de la PSU. Ces nouvelles modalités adoptées par le conseil d’administration de la Cnaf en juillet 2024 visent à supprimer les effets de seuils dans le financement accordé par les Caf (lire Maire info du 19 juillet). Si cette réforme était attendue depuis longtemps, reste à savoir si elle portera ses fruits dans ce contexte particulièrement inquiétant et qui nécessite une réponse urgemment.
Pour la 106e édition du Congrès des maires et des présidents d’intercommunalité de France, qui se tiendra les 19, 20 et 21 novembre 2024, au Pavillon 5 du parc des expositions de la Porte de Versailles à Paris, un forum intitulé « Les communes, autorités organisatrices de la petite enfance » aura lieu, à quelques mois de l'entrée en vigueur de cette nouvelle compétence. L'occasion de faire le point sur ce sujet de grande importance pour les maires et de présenter notamment les nouveaux outils de contrôle à leur disposition, créés par la loi du 18 décembre 2023.
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Patrimoine
Préservation du patrimoine : comment réduire les « frictions » entre élus locaux et architectes des Bâtiments de France ?
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Application « disparate » des règles patrimoniales, manque de dialogue, coĂ»t des travaux… Afin de pacifier les relations entre Ă©lus locaux et architectes des Bâtiments de France, des sĂ©nateurs font une sĂ©rie de propositions et recommandent le recours mĂ©connu aux mĂ©diateurs.Â
Comment rabibocher élus locaux et architectes des Bâtiments de France (ABF) ? C’est l’objectif que s’est fixé une mission d’information sénatoriale - sur « le périmètre d’intervention et les compétences » de ces ABF - qui vient de présenter ses solutions.
Alors que la préservation du patrimoine bâti fait généralement l’unanimité, les décisions prises par les architectes des Bâtiments de France sont pourtant régulièrement source « d’incompréhension » et de « frustrations » qui entraînent des « frictions importantes » avec les élus locaux.
Près de 1 500 contributions de maires
Afin de tenter de « créer les conditions d’un dialogue renouvelé entre les ABF et les acteurs locaux », la présidente et le rapporteur de la mission sénatoriale, Marie-Pierre Monier et Pierre-Jean Verzelen, viennent donc de formuler 24 propositions qui doivent également permettre « une meilleure conciliation des enjeux patrimoniaux, économiques et environnementaux à l’échelle de chaque territoire ».
Un travail de six mois qui a suscité un « très grand intérêt » aux quatre coins de la France puisque sa consultation en ligne a recueilli, en moins d’un mois, « près de 1 500 contributions » de la part des maires et « 600 témoignages directs ».
« Le succès de cette consultation ainsi que l’analyse des contributions recueillies a confirmé le constat d’une forme d’incompréhension entre les ABF et certains élus locaux et porteurs de projet, qui tend à s’exacerber sous l’effet de la montée en puissance de la rénovation énergétique du bâti ancien patrimonial ou situé en zone protégée », constatent ainsi les auteurs du rapport qui rappellent que cela peut donner lieu à « des frictions importantes sur le terrain ».
Que ce soit la « variabilité et le manque de prévisibilité des avis », les « prescriptions trop coûteuses » ou encore un « certain manque de pédagogie et d’accompagnement » et une « insuffisante prise en compte des enjeux de la transition énergétique », les élus locaux et les porteurs de projets pointent la série de difficultés majeures qu’ils rencontrent et les « crispations récurrentes » qu’elle génèrent.
Ils déplorent ainsi une « application parfois disparate » des règles patrimoniales et un « manque de dialogue » avec les 189 ABF répartis sur l’ensemble du territoire et qui ont sous leur protection près d’un tiers (31,7 %) des logements du pays. Certaines villes sont même presque intégralement incluses dans un périmètre de protection comme c’est le cas avec Paris (94 %), Nancy (89 %) ou Rouen (83 %).
Surcharge administrative
« Loin de ne représenter qu’un hommage au passé », la mission réaffirme le rôle « central et indispensable » des ABF dans la protection du patrimoine paysagère et rappelle que sa préservation participe « très directement de l’attrait touristique de nombreux territoires, de la qualité de vie de ses habitants et du développement économique ».
Seulement, les architectes des Bâtiments de France sont devenus un « rempart fragilisé du patrimoine paysagé » du fait d’une « surcharge administrative ».
La mission pointe « la dégradation les conditions des conditions d’exercice de la profession ». Alors que, depuis 2013, les effectifs des ABF sont en quasi-stagnation, le nombre d’avis rendus a progressé de plus de 60 %.
« La situation peut s’avérer problématique dans les 40 % de départements, souvent ruraux, qui ne disposent que d’un seul ABF », constatent les auteurs du rapport qui expliquent que, « en dépit de renforts techniques, ce dernier peut avoir plus de difficultés à se déplacer et à prendre le temps d’un dialogue avec les porteurs de projets et les élus dans chaque dossier ». Les ABF manquent donc de temps pour exercer cette « mission fondamentale ».
Recours à un médiateur
Concrètement, si les refus des ABF restent « rares » (14 %) pour chaque demande d’urbanisme, les accords avec prescriptions représentent la moitié des avis qu’elle émet, ceux-là même qui peuvent déboucher sur des travaux « significativement plus coûteux que le budget initial ». In fine, seules 36 % des demandes reçoivent un « avis conforme ».
Or, si le refus est « souvent compris », l’ampleur des prescriptions ainsi que leurs coûts sont « les sujets qui posent le plus de difficultés sur le terrain ». D’autant que les recours – qui représentent seulement 0,2 % des avis émis (bien qu’en forte progression ces dix dernières années) – ne peuvent être sollicités que pour les refus et non les accords avec prescriptions.
Pour améliorer la situation, la mission recommande donc de développer l’intervention de médiateur en la faisant mieux connaître auprès des élus, celle-ci étant trop peu connu. « La médiation permet en effet d’ouvrir un espace de dialogue apaisé, et peut désamorcer des situations en apparence compromises », explique la mission qui propose de créer des commissions de médiation au niveau départemental pour faciliter le dialogue entre élus et ABF.
Adaptation aux spécificités locales
A noter également qu’elle recommande de faire passer de sept jours à un mois le délai du recours qui peut être exercé contre une décision de l’ABF. Jugé « largement insuffisant », ce délai entraîne des « difficultés » pour les maires de petites communes pour saisir le préfet de région.
Le rapport propose, en outre, d’encourager le développement de périmètres délimités des abords (PDA) pour adapter la protection patrimoniale aux spécificités locales et de recruter au moins un ABF supplémentaire par département pour renforcer le secteur.
Les auteurs du rapport souhaitent également améliorer la lisibilité et la prévisibilité des avis rendus par les ABF, notamment « en assurant des permanences accessibles à tous les citoyens, en rendant leurs décisions publiques et en développant des guides nationaux de bonnes pratiques en matière patrimoniale ». Ils réclament aussi l’amélioration du niveau d’information général des citoyens et des élus sur les problématiques patrimoniales.
Par ailleurs, le rapport suggère de renforcer la formation continue des ABF afin de faire face aux enjeux patrimoniaux et environnementaux.
Télécharger le rapport.
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Politique de la ville
Après la « disparition » d'un ministère de la Ville, bientôt une disparition des crédits ?
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La bronca des acteurs de la politique de la ville n'aura pas suffi: deux semaines après l'annonce de la composition du gouvernement, pas un ministère ne porte l'intitulé de la « Ville », laissant augurer des coupes claires dans le budget, selon les élus.
La nouvelle ministre du Logement et de la rénovation urbaine Valérie Létard l'assure: c'est bien elle qui reprend le portefeuille de la Ville et ses programmes dans les quartiers défavorisés, en vertu d'un décret d'attribution non encore publié.
Reste que l'intitulé de son ministère n'a pas bougé, quand les secteurs du handicap et des anciens combattants ont eux décroché des ministres délégués. Pour Catherine Arenou, maire DVD de Chanteloup-les-Vignes et vice-présidente de l'association Ville et Banlieue, pas question de faire un procès d'intention à la nouvelle ministre.
Proche de Jean-Louis Borloo, le père du renouvellement urbain, Valérie Létard a beaucoup travaillé sur la politique de la ville en tant qu'élue de Valenciennes. « Avec Catherine Vautrin (ex-présidente de l'Anru, l'Agence nationale pour la rénovation urbaine, ndlr), on a affaire à deux personnalités qui ont un vrai savoir-faire », observe Catherine Arenou.
Lors de son discours de politique générale, le Premier ministre n'a pourtant glissé aucune référence aux 1 580 quartiers dits « prioritaires de la politique de la ville » (QPV) et à leur plus de 5,4 millions d'habitants. Pour couper court aux critiques, la nouvelle ministre se rendra à Lille lundi pour visiter un chantier d'insertion « relevant de la politique de la ville ». « On a toujours imaginé que le jour où disparaîtrait la politique de la ville- et on souhaite qu'elle disparaisse- c'est qu'on n'en aurait plus besoin », observe Driss Ettazaoui, vice-président de Ville et Banlieue.
Sauf qu'aujourd'hui « les fractures n'ont jamais été aussi importantes entre la ruralité et les quartiers, les villages et nos cités », remarque-t-il. « Bien sûr que la qualité des bâtiments est fondamentale », souligne Agnès Bourgeais, maire DVG de Rezé (Loire-Atlantique), en référence à la rénovation urbaine, « mais nos quartiers ne se limitent pas à un problème de béton ».
« Dynamique d’effacement »
« Oublier les habitants de nos quartiers populaires, c’est dire à tous ces jeunes qu’ils n’ont pas complètement leur place dans notre société », abonde Johanna Rolland (PS), présidente de France urbaine.
Pour Thomas Kirszbaum, chercheur associé au Ceraps à Lille, l'intitulé de « rénovation urbaine », traduit « une conception réductrice de la politique de la ville, qui ne marche plus que sur une jambe, celle de la transformation physique des quartiers, en oubliant de répondre aux problématiques sociales des habitants ». « Le pari qui fut celui de Martine Aubry de mobiliser l'Éducation nationale, le ministère de l'Emploi, etc., en supposant qu'on pouvait se passer d'une politique spécifique a fait long feu », analyse-t-il.
« On a structurellement besoin d'une politique spécifique précisément parce que les politiques publiques de droit commun ne font pas leur boulot », poursuit-il, estimant que les quartiers prioritaires « n'ont plus de prioritaire que le nom ». Loin d'être un « loupé », la disparition d'un ministère dédié est « un choix », observe le sociologue Renaud Epstein, rappelant que la ruralité a elle toute sa place, avec une ministre déléguée.
Plus globalement, les élus s'interrogent sur la pérennisation des 624 millions d'euros de crédits alloués en 2024 à la politique de la ville, dans un contexte de disette budgétaire. Selon plusieurs personnes proches de ces dossiers interrogées par l'AFP, les coupes pourraient aller de - 14 % à - 25 %, voire plus. « Les politiques de la ville ont complètement disparu pour Michel Barnier, et elles disparaîtront dans le budget », assure même l'une d'entre elles.
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Journal Officiel du dimanche 6 octobre 2024
Ministère de l'Intérieur
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