Édition du mercredi 4 septembre 2024

Interview
Dépenses des collectivités : David Lisnard déplore « une manoeuvre agressive et dilatoire »
Après la publication par les ministres démissionnaires de chiffres incriminant une fois de plus les collectivités locales jugées trop dépensières, le président de l'AMF, David Lisnard, a répondu aux questions de Maire info. Qualifiant de « manoeuvre » les déclarations des ministres démissionnaires, il rappelle que les collectivités sont soumises à des règles d'équilibre budgétaires bien plus contraignantes que l'État.

Dépenses des collectivités, comptes publics, autonomie financière des collectivités, le maire de Cannes livre son éclairage sur la situation économique des collectivités et de l’État, sans oublier la crise politique qu’il juge particulièrement préoccupante. 

Le gouvernement a lancé ces derniers jours une offensive contre les collectivités locales, qu’il accuse d’être responsables de la dégradation du déficit de l’État, estimant que « le dérapage de leurs dépenses » aurait creusé le déficit de « 16 milliards d’euros ». Comment réagissez-vous à ces accusations ?

Je pense que les ministres démissionnaires auraient dû s’abstenir de cette manœuvre agressive et dilatoire. Je parle de manœuvre, d’abord parce que les chiffres annoncés n’ont absolument pas été documentés, qu’ils se fondent sur des modes de calcul qui ne sont pas partagés et qui restent opaques. D’où sortent ces chiffres ? 

Mais surtout, je parle de manœuvre parce que le problème le plus grave des comptes publics est ailleurs, il est dans les comptes de l’État – et qu’il s’agit pour eux d’essayer de faire oublier cette réalité. Évidemment, il y a des collectivités mal gérées, mais quand on regarde la réalité des chiffres, elle est implacable et accablante pour l’État, dont les dépenses courantes augmentent de façon inconsidérée et qui est en déficit de fonctionnement croissant. 

Les collectivités, de leur côté, sont obligées de respecter la règle d'or, c'est à dire d'avoir des budgets à l'équilibre. Elles n'empruntent que pour de l'investissement, et ces emprunts, qui constituent la dette des collectivités, ont légèrement diminué depuis 30 ans à un peu plus de 8 % du PIB. Autrement dit, plus de 90 % de la dette publique totale est du ressort de l'État.

Alors, oui, il est temps que le gouvernement s'intéresse aux comptes publics de façon sérieuse. La dégradation des comptes publics en France depuis 2019 est nettement plus importante que dans le reste des pays européens, qui ont pourtant, eux aussi, connu le covid-19 et la guerre en Ukraine. Pendant cette période, la dette publique en France a augmenté de 15 points de PIB, pendant qu’elle augmentait de 4 points en Italie ou de 3 points en Allemagne. Ce chiffre devrait alimenter le débat politique. La dette de l’État, en France, a augmenté deux fois plus vite que la richesse produite. C’est insoutenable dans la durée. 

Dans ce contexte de dégradation des finances publiques, les gouvernements successifs ont commencé par diminuer de façon brute les dotations aux collectivités, dans les années 2010. Aujourd’hui, les dotations sont stabilisées, mais le gouvernement veut réduire, parfois de façon coercitive, les dépenses des collectivités. Estimez-vous qu’il y a lieu aujourd’hui de demander aux collectivités de diminuer leurs dépenses ?

Les dépenses des collectivités territoriales représentent 19 % de la dépense publique. Je rappelle tout d’abord qu’en moyenne, dans la plupart des pays européens, décentralisés comme fédéraux, ce chiffre tourne autour de 35 %. 

Évidemment, il faut toujours faire des efforts de gestion. Mais cela, c’est aux exécutifs locaux d'en décider, avec les habitants qui les désignent, selon le principe de libre administration. Cela s'appelle la démocratie. Le problème de la France est dans son excès de centralisation, pas dans le pouvoir locaux. 

Là où il y a un vrai problème, à mon sens, c’est dans les dépenses de l’État. Celles-ci augmentent de façon constante, et pourtant, on a des services publics d'État qui sont de plus en plus défaillants, des fonctionnaires qui ne sont pas bien traités – du fait de l’hypercentralisation qui génère des effets de bureaucratie, de déperdition financière. J’estime que c’est à cela que devraient s’atteler les ministres, qu'ils soient démissionnaires ou pas. 

Par ailleurs, je rappelle que depuis quinze ans, les gouvernements successifs ont prélevé 71 milliards d’euros dans les finances publiques communales. Pour quel résultat ? Les comptes de l’État ont continué de se dégrader. Plus l’État prélève sur les collectivités, moins il fait les efforts qu’il demande aux autres. 

Par ailleurs, c’est tout de même un comble de nous reprocher d'avoir engagé des dépenses que l'État nous a imposées ! Un certain nombre de nos dépenses n’ont pas été choisies par les maires, mais par les gouvernements. C’est vrai pour ce qui concerne la masse salariale, avec l’augmentation du point d’indice. C’est vrai également pour la petite enfance, pour le périscolaire, et tant d’autres. Sans même parler des augmentations vers lesquelles l’État nous pousse, par exemple dans le domaine de la sécurité. Regardez : à chaque fois qu’il se commet des actes graves de délinquance dans une commune, le ministre de l’Intérieur enjoint le maire de mettre plus de caméras et plus de policiers municipaux. Or ce n’est pas une compétence décentralisée, on est au cœur du régalien !

Parallèlement à cette hausse contrainte des dépenses, les gouvernements successifs ont  privé les collectivités de nombreuses recettes propres, en supprimant des impôts locaux. Comment, dans ces conditions, assurer l’autonomie financière des collectivités ? 

Oui, c’est une dimension importante de l’équation. Nos dépenses sont de plus en plus contraintes, mais nos recettes aussi. Pourtant, ce n’est pas nous qui avons demandé à être dépendants de l’État en la matière : il y a eu un mouvement de recentralisation financière qui fait que désormais, l'argent local passe par l'État avant d'être redistribué localement, [par exemple sous la forme de part de TVA - ndlr]. Les dernières expressions de cette réalité sont la nationalisation de la taxe d’habitation et la réforme de la CVAE. 

C’est un problème de fond. Pour ma part, c’est aux habitants de ma commune, aux contribuables qui m’incitent à la sobriété fiscale que je préfère rendre des comptes, plutôt qu’à des technocrates hors sol. 

Dans ces conditions, l’autonomie financière sur laquelle vous m’interrogez est de plus en plus un leurre. La véritable autonomie financière, c’est lorsque vous avez une personne responsable, identifiée, qui rend des comptes. Il faut que les présidents des exécutifs locaux, et en particulier les maires, aient un levier fiscal qui permette de rendre des comptes aux contribuables. Ce sont alors les contribuables qui peuvent les inciter à la performance, à la sobriété. Aujourd’hui, au contraire, tout est dilué. Les collectivités territoriales perdent de la liberté et de la responsabilité fiscale… alors que les prélèvements obligatoires ne cessent d’augmenter. 

De façon plus générale, alors que le pays en est à son 51e jour sans gouvernement, quel regard portez-vous, en tant que président de l’AMF, sur la situation politique ?

Elle devient extrêmement problématique, parce que chaque jour qui passe enlève une marge de manœuvre au futur gouvernement pour élaborer et faire voter le budget, dans un contexte budgétaire et financier explosif où il est indispensable de commencer à remettre en ordre les comptes publics. 

Plus généralement, la situation dans laquelle se trouve le pays est une démonstration par l’absurde de ce que nous, l’AMF, disons depuis des années : le pays est bloqué par excès de centralisation. Cette dissolution infondée, absurde, démontre plus que jamais que nous avons raison d'appeler à la subsidiarité et à la décentralisation pour oxygéner le pays, pour le libérer de contraintes inutiles. Une des façons de résoudre la crise, à long terme, sera de libérer les collectivités territoriales de l’excès de centralisation. La liberté locale est une source de solutions pour la nation, pour l’État, qui pourrait alors se recentrer sur ses missions de justice sociale, de sécurité… Je reçois, sans cesse, des messages de maires de toutes typologies de communes et de toutes tendances, qui me disent : « Que l’État, enfin, nous donne un pouvoir réglementaire, et on va régler les problèmes, on va alléger, soulager l’État ! ». 

Aujourd’hui, nous sommes dans une situation grave. On ne s’en rend peut-être pas compte encore, parce que l’on sort de l’été et des JO – qui ont été une incontestable réussite, et bravo à l’État pour cela ! – mais maintenant, il faut un budget, il faut des directives, il faut des lignes directrices, pour pouvoir faire face au contexte géopolitique, aux défis de la compétition mondiale, aux défis écologiques, au combat des libertés qu’il faut mener. Comment gérer ces défis ? Il faut une ligne de conduite, faute de quoi, nous allons vers un échec collectif.  




Gouvernement
Nomination du Premier ministre : une situation bloquée
Presque deux mois après les élections législatives, le gouvernement démissionnaire est toujours en place et le président de la République n'a toujours pas fait son choix sur le nom de son Premier ministre. État des lieux. 

51e jour sans gouvernement de plein exercice pour le pays. Presque deux mois après le deuxième tour des élections législatives anticipées du 7 juillet, Emmanuel Macron continue de « consulter » pour trouver un Premier ministre qui ne serait pas immédiatement censuré par une Assemblée nationale sans majorité. En vain, jusqu'à présent.

Des blocs qui se neutralisent mutuellement

Dès le lendemain de l’élection, le chef de l’État avait fait savoir qu’il ne choisirait pas son Premier ministre dans les rangs du Nouveau Front populaire (NFP), même si cette coalition (LFI, PS, PC et Écologistes) a obtenu, de facto, le plus grand nombre de sièges à l’Assemblée nationale. Le NFP lui-même a mis plusieurs semaines pour désigner le nom d’une candidate Première ministre acceptée par toutes les nuances de la coalition, en la personne de Lucie Castets, haute fonctionnaire, énarque et directrice des finances à la mairie de Paris. Malgré une campagne menée tout l’été par le NFP pour faire mettre en avant sa candidate, le président de la République s’est montré inflexible, et a annoncé par communiqué, le 26 août, que par souci de « la stabilité institutionnelle de notre pays », il ne pouvait être question de « retenir l’option » Lucie Castets : en effet, les partis du bloc central (MoDem, Ensemble pour la République et Horizons), les Républicains et le Rassemblement national avaient prévenu le président qu’ils opposeraient une motion de censure immédiate à un gouvernement « constitué sur la base du seul programme et des seuls partis proposés par (…) le NFP ». Exit donc Lucie Castets. 

Depuis, le chef de l’État se livre à d’intenses négociations, chaque jour offrant son lot de nouveaux noms lancés, de rumeurs, d’hypothèses, de ballons d’essai et de coups de bluff. Les rumeurs allant jusqu’à envisager, la semaine dernière, « un gouvernement composé d’élus locaux », uniquement parce que le chef de l’État avait consulté les associations d’élus. 

Si l’ancien Premier ministre socialiste Bernard Cazeneuve semblait, samedi dernier, tenir la corde – présentant l’insigne avantage, aux yeux du chef de l’État, d’être en rupture de ban avec le Parti socialiste –, le nom du LR Xavier Bertrand, ancien ministre de Nicolas Sarkozy et président de la région Hauts-de-France, lui a aussitôt succédé. Lundi, c’était le nom du président du Conseil économique, social et environnemental, Thierry Baudet, qui sortait soudain du chapeau, avant d’être oublié dès le lendemain avec un retour en force, hier, de l’hypothèse Xavier Bertrand. 

Alors que les porte-parole des Républicains, en juillet, disaient clairement qu’ils ne souhaitaient pas que le Premier ministre soit issu de leurs rangs, il semble que leur position ait évolué ces derniers jours : ils n’excluaient plus, hier, cette possibilité. Se pose donc l’option d’un gouvernement unissant les Républicains (qui en auraient la direction) et les partis favorables à Emmanuel Macron – cette coalition ayant déjà permis, mi-juillet, de faire réélire Yaël Braun-Pivet à la présidence de l’Assemblée nationale. 

Mais cette option pose un double problème : premièrement, elle ne serait guère conforme aux résultats des élections législatives, le bloc macroniste et les LR étant respectivement arrivés troisième et quatrième de ce scrutin. Mais de plus, les mêmes arguments qui ont permis au président de rejeter la candidature de Lucie Castets devraient, logiquement, le conduire à repousser le nom de Xavier Bertrand. En effet, le Nouveau Front populaire et le Rassemblement national ont d’ores et déjà annoncé qu’ils censureraient un gouvernement Xavier Bertrand. Si la consigne est respectée, les 193 députés du NFP et les 126 députés RN (soit 319 sièges) suffiraient largement à obtenir une majorité absolue pour la censure. 

Situation inextricable

La situation apparaît, ce matin, totalement bloquée : le bloc macroniste, la droite et l’extrême droite censureront un gouvernement dirigé par le NFP, le NFP et le RN censureront un gouvernement dirigé par la droite. 

Reste l’hypothèse Cazeneuve. Il n’était pas certain que le Parti socialiste, dont l’ancien Premier ministre est issu, se montre aussi déterminé à rejeter Xavier Bertrand que Bernard Cazeneuve. Mais le Bureau national du parti, qui s’est réuni hier soir, a finalement tranché et opté pour une ligne dure : « Nous ne participerons à aucun gouvernement qui ne sera pas un gouvernement du NFP », écrit la direction du PS dans une résolution, et « nous censurerons toute forme de prolongation d’un macronisme finissant ». Dans ces conditions, un gouvernement Cazeneuve avec des ministres macronistes et LR a bien peu de chances d’échapper, lui, aussi, à une censure immédiate. 

Il ne semble donc rester que peu d’options au chef de l’État en dehors d’un « gouvernement technique », avec à sa tête une personnalité non marquée politiquement, qui aurait l’avantage de ne pas pouvoir être censurée « par principe » – sauf par le NFP qui est toujours décidé à censurer tout gouvernement qui ne serait pas dirigé par Lucie Castets. Mais le NFP n’a pas la majorité à l’Assemblée nationale, et le RN a déclaré, hier, que lui ne censurerait pas a priori un gouvernement technique. 

Nul ne peut dire, aujourd’hui, quand va enfin intervenir la nomination du Premier ministre, qui peut aussi bien avoir lieu demain que dans plusieurs semaines – rappelons que la Constitution ne fixe aucun délai au chef de l’État pour cette nomination, et que celui-ci semble être fermement décidé à prendre tout son temps. Après la nomination du locataire de Matignon, il faudra encore patienter le temps des négociations pour que celui-ci compose son gouvernement.

Autrement dit, il n’est pas exclu que le gouvernement démissionnaire de Gabriel Attal continue de « gérer les affaires courantes » pendant plusieurs semaines encore. Cette situation est bel et bien ubuesque. Déjà, la rentrée des classes a eu lieu avant-hier sans ministre de l’Éducation nationale de plein exercice – c’est-à-dire susceptible de prendre des décisions politiques. Mais c’est la question du budget qui paraît la plus grave : en théorie, le projet de loi de finances pour 2025 aurait déjà dû être transmis au Haut conseil des finances publiques, qui est censé rendre un avis à la mi-septembre. Et le texte définitif doit, selon la loi, être déposé au Parlement au plus tard le mardi 1er octobre. Plus le chef de l’État tarde à désigner son Premier ministre, moins le futur gouvernement aura de temps pour élaborer un texte dont la rédaction, en temps normal, prend plusieurs mois. 

Assemblée ingouvernable, Premier ministre introuvable… la crise politique que traverse le pays à la suite de la dissolution surprise de juin est – quoi qu’en dise le chef de l’État – probablement la plus inextricable qu’ait connue la Ve République. Cette situation a toutes les chances de durer jusqu’à une nouvelle dissolution de l’Assemblée nationale, qui ne peut survenir avant le mois de juin 2025. Sauf si, d’ici là, le président de la République décide de démissionner, ce qui, même dans son propre camp, ne paraît plus une hypothèse à exclure. Témoin, l’ancien Premier ministre Édouard Philippe, qui vient subitement de confirmer sa candidature à l’élection présidentielle, « y compris en cas de présidentielle anticipée ». C’est la première fois que cette option est évoquée dans le camp du chef de l’État, ce qui est tout sauf anodin. 




Finances
Aggravation du déficit public : ciblées par le gouvernement, les collectivités dénoncent un « mensonge populiste »
Le gouvernement démissionnaire estime que le « risque principal » pour les finances publiques en 2024 proviendrait de l'augmentation des dépenses des collectivités. Des « accusations injustes » visant à « masquer la situation désastreuse des comptes de l'État », affirment les associations d'élus.

Fini la trêve olympique. Le gouvernement démissionnaire met directement en cause les collectivités dans le nouveau dérapage budgétaire qui se profile pour cette année 2024 en les accusant de faire dériver les comptes publics de « 16 milliards d’euros ». Des chiffres « complètement fallacieux », a notamment riposté le président du Comité des finances locales (CFL), André Laignel. 

Dans un courrier adressé, lundi soir, aux présidents des commissions des finances de l’Assemblée nationale et du Sénat, les ministres démissionnaires des Finances et des Comptes publics, Bruno Le Maire et Thomas Cazenave, assurent donc que le « risque principal » pour la trajectoire des finances publiques en 2024 serait « lié à une augmentation extrêmement rapide des dépenses des collectivités ». 

16 milliards d’euros

Selon Bercy, les dépenses des collectivités pourraient ainsi contribuer à « dégrader les comptes 2024 de 16 milliards d’euros », alors que la France est déjà mise sous pression par l’Europe qui a lancé une procédure à son encontre pour déficit excessif. 

Les deux ministres mettent donc en garde contre un nouveau dérapage des comptes publics – qui intègrent ceux de l’État, de la Sécurité sociale et des collectivités territoriales – dont le déficit pourrait encore augmenter pour atteindre 5,6 % cette année, loin des 5,1 % envisagés en fin d’année et des 3 % en 2027. 

Outre « la diminution de l ‘épargne brute des collectivités », le président de la commission des finances de l’Assemblée, Éric Coquerel (LFI), relate, via un communiqué publié sur X, « la nouvelle baisse, probable et prévisible, des recettes (impôt sur le revenu, impôt sur les sociétés mais aussi TVA) et les dépenses nouvelles (Nouvelle-Calédonie et élections législatives) ».

« Pour le moment, en plus des 10 milliards d’euros d’annulation de crédits, décidés en février, Bercy a gelé préventivement 16,5 milliards d’euros de crédits », détaille-t-il. Celui-ci dit ainsi « craindre que le futur gouvernement ne cherche à annuler l'entièreté des crédits gelés pour limiter le déficit », annonçant « une conséquence récessive sur l'économie ».

Dans ce contexte, « seuls les budgets dédiés à la défense et la sécurité augmenteront plus vite que l’inflation », constate Éric Coquerel qui note que « tous les autres budgets des ministères diminueront par rapport aux plafonds prévus en 2024 ». « Les politiques les plus touchées devraient être l'aide publique au développement (- 18 % sans tenir compte de l'inflation), le sport (- 11 %), l'agriculture (- 6 %), l’outre-mer (- 4 %), l’écologie (-1 %) et la santé (- 0,8 %). Le travail (+1 %) et l'Éducation nationale (+0,5 %) seront également concernés par une baisse de moyens », si l’on tient compte de l'inflation.

La mission « Relations avec les collectivités territoriales » pourrait, quant à elle, chuter de 5 %, selon le tableau des montants dévoilés par Politico. Des montants que le futur gouvernement pourra faire évoluer dans le peu de temps qui lui restera pour le faire. 

« On est au bord du précipice, les comptes publics sont dans le rouge violet  », a de son côté alerté le rapporteur général de la commission du Sénat Jean-François Husson (ex-LR), qui juge la situation « calamiteuse ».

« Masquer la situation désastreuse » des comptes de l’État 

Face à la mise en cause « grossière » dont elles font l’objet, les collectivités n’ont pas tardé à réagir en déplorant des « accusations injustes » et « un mensonge populiste ». 

Jugeant cette attaque « infondée », l’AMF estime ainsi que les deux ministres démissionnaires s’en prennent aux communes, aux départements et aux régions « pour masquer la situation désastreuse des comptes de l’État qu’ils laissent derrière eux » alors que « les collectivités locales ont participé de longue date à la réduction de la dette publique ».

« Faire endosser la dégradation des comptes publics aux collectivités locales est un mensonge populiste pour masquer l’échec de la politique de Bruno Le Maire et d’Emmanuel Macron » alors que « 92 % de la dette publique est liée au budget de l’État », a également tancé la présidente de Régions de France, Carole Delga, sur X.

Le gouvernement démissionnaire « s’autorise à jeter l’opprobre sur les élus locaux sans aucun sens des proportions » puisque « le besoin de financement des collectivités dont il est question est compris entre - 0,1 et - 0,2 % du PIB, soit une fraction minime du déficit de l’État », a dénoncé pour sa part France urbaine, qui note que celui-ci « semble ignorer ses propres turpitudes ».

Sur ce point, le gouvernement a également été sévèrement tancé par la Cour des comptes, cet été, qui écrivait que, « depuis deux ans, chaque nouvelle trajectoire budgétaire apparaît plus fragile que la précédente »… tout en demandant que l'effort d’assainissement des comptes publics soit « partagé » par les collectivités.

L’AMF a, par ailleurs, rappelé que la dette des collectivités « est stable depuis 30 ans voire même en légère diminution, passant de 9 % du PIB en 1995 à 8,9 % en 2023 » et que le « quasi-doublement du besoin de financement » des collectivités annoncé par Bercy ne peut être regardé que comme une « hypothèse dont on ignore les fondements ». 

Des chiffres jugés « complètement fallacieux », a également réagi auprès de l’AFP le président du CFL, André Laignel, qui ne comprend pas « d'où sortent les 16 milliards » évoqués par les ministres.

Inquiétudes sur le Fonds vert

Et si « les collectivités sont certes confrontées à une hausse de leurs dépenses », expliquent Régions de France, « il s’agit d’abord de transferts de charges de l’État vers les collectivités, des effets de l’inflation ou encore la revalorisation de la rémunération des fonctionnaires territoriaux, décidée par le gouvernement et à la charge des collectivités » mais aussi de « soutenir l’important effort local d’investissement, dans les infrastructures de transport, l’amélioration énergétique des bâtiments publics ou encore le soutien aux entreprises ».

L’Association des petites villes de France (APVF) a, quant à elle, exprimé sa « très vive préoccupation » face à de possibles coupes budgétaires sur la transition écologique. À ses yeux, « la baisse possible du Fonds vert, de 2,5 milliards d’euros à 1 milliard d’euros, en autorisations d’engagement ainsi qu’un coup de rabot sur Ma Prime Rénov’, ou bien encore le Fonds chaleur de l’Ademe, enverraient un signal très négatif ».

« Le parti pris de lettres-plafonds proposant de réduire le Fonds vert de 60 % illustre l’inconséquence d’un gouvernement démissionnaire qui semble avoir perdu sa boussole », s’inquiète également France urbaine.
 




Tourisme
Un bilan touristique de l'été 2024 contrasté et similaire à l'année passée
S'il est encore difficile de mesurer précisément les retombées des Jeux olympiques et paralympiques sur le tourisme français, un bilan présenté hier par le gouvernement pointe une fréquentation similaire à celle de 2023 et souligne des atypismes dans les départs en vacances ainsi qu'un retard persistant dans l'accessibilité des ERP.

Un premier bilan touristique de la période estivale 2024 a été présenté hier à la presse par Olivia Grégoire, ministre démissionnaire déléguée chargée des Entreprises, du Tourisme et de la Consommation. Optimisme et satisfaction étaient au rendez-vous en cette rentrée mais les services du ministère se veulent réalistes sur le fait que tous les territoires n'ont pas bénéficié de la même manière du dynamisme impulsé par les Jeux et que beaucoup reste à faire pour que la France conserve sa place de première destination touristique mondiale – devant notamment l'Espagne et l'Italie.

Des résultats semblables à 2023 

« Après un été 2023 qui a battu tous les records de fréquentation et de dépenses, l’économie touristique amorce une tendance à la stabilisation et à la normalisation », a déclaré en préambule Olivia Grégoire.

La projection du gouvernement est d’atteindre les 100 millions de touristes sur l'année 2024. En 2023, 98 millions de touristes avaient visité la France. Rappelons que le Comité interministériel du tourisme (CIT) espérait en mai dernier que 2024 soit « une année de records pour le tourisme français ». À défaut d’exploser les compteurs, une stabilité de fréquentation est donc observée.

L’été 2024 – tout comme 2023 – est marqué par un retour significatif de la clientèle touristique internationale après quelques années plus compliquées dues à la pandémie de covid-19. Le nombre de touristes étrangers est en hausse de 13 % sur la période olympique. De plus, comme Atout France le prédisait, sur juillet et août les arrivées aériennes sont en hausse pour la Chine (+ 43 %), le Japon (+ 13 %) et les États-Unis (+ 13 %). 

Du côté des recettes touristiques internationales, la France avait atteint 62,5 milliards en 2023. Au premier semestre 2024 elles s’élèvent à 32,5 milliards ce qui laisse espérer « le même résultat qu’en 2023 » voire mieux, puisque les recettes sont en augmentation de 6 % sur ces premiers mois. 

Il y a tout de même eu un « effet JO» notamment à Paris : 1,4 million de touristes domestiques se sont rendus dans la capitale (+ 27 %) pendant les épreuves et dans l’ensemble des territoires hôtes (Ile-de-France et 8 métropoles) et où « les nuitées françaises ont progressé de 12 % et les nuitées européennes et long-courriers de 16 % ».

Une réussite à nuancer 

L’été 2024 a aussi confirmé une évolution des habitudes touristiques. La saison des vacances dépasse maintenant le traditionnel calendrier juillet/août. Il faut désormais observer les départs de mai à octobre, expliquent les services du ministère et les professionnels du tourisme.

« 65 % des Français sont ainsi partis en vacances ou en week-ends sur les mois de juillet et août, en retrait de deux points par rapport à l’an dernier », a détaillé Olivia Grégoire. En cause notamment le contexte particulier avec une « mauvaise météo, une fin tardive de l‘année scolaire, ou encore des départs importants en mai (avec un pont de l’ascension particulièrement exceptionnel en termes de taux de départ des Français) ». La ministre observe une augmentation des courts séjours au détriment des longues vacances d’été d’un mois par exemple. Ce changement d’habitude n’est également pas sans lien avec l’inflation et la crise économique. De plus en plus de Français renoncent à leurs vacances où se tournent vers des séjours moins onéreux et, logiquement, plus courts. 

Les conséquences pour les professionnels du tourisme sont visibles cet été : la fréquentation des hébergements collectifs marchands est en baisse de 5 % pour l’hôtellerie de plein air sur juillet et août par rapport à 2023 et de 0,9 point dans l’hôtellerie « au profit des hébergements individuels, comme le locatif (+ 10 % de nuits réalisées en juillet et + 13 % en août), souvent perçus comme plus avantageux économiquement et plus souple en termes d’organisation des vacances (notamment pour les courts séjours). » Enfin, jusqu’à la troisième semaine d’août, les nuitées issues des clientèles domestiques sont en recul de 6 %. Mais les mois de septembre et octobre laissent espérer « une belle arrière-saison pour une grande partie des territoires », selon Atout France. 

Soulignons aussi que l’été 2024 n’a pas été un bon cru pour tous les territoires et que la fréquentation a été particulièrement inégale : « l’arc atlantique jusqu’à la Manche, du nord au sud a connu un net ralentissement de sa fréquentation » tout comme le tourisme de montagne, le tourisme rural et le tourisme urbain. Par exemple, selon l'Association nationale des maires des stations de montagne, « la saison d’été [en montagne] s’est révélée très contrastée, à l’image de la saison touristique en France, avec un mois d’août bien fréquenté (+ 7,5% de taux d’occupation vs 2023) précédé d’un mois de juillet plus décevant (- 4 % de taux d’occupation vs 2023) ».

Finalement, pas un mot n’a été prononcé hier sur les activités de loisirs si ce n’est que « 27 % des Français déclarent être moins allés au restaurant cette année. » De nombreux professionnels partout en France déplorent pourtant des baisses de chiffres d’affaires et doivent faire face eux aussi à l’inflation pour maintenir leur activité. 

Au passage, la ministre a rappelé que les commerçants identifiés dans le périmètre de protection, dit « SILT », à Paris, pourront prétendre à une indemnisation. « Cette commission d’indemnisation sera effective à partir de 2025 », a-t-elle précisé. Une mise en place qui intervient un peu tard, alors qu'elle est promise depuis plusieurs mois par Gabriel Attal. 

Retard sur l’accessibilité dans les ERP  

« On a encore un peu de travail sur l’accessibilité malgré l’investissement du président de la République lors du comité interministériel sur le handicap où 1,5 milliards d’euros ont été dévolus aux enjeux d’accessibilité, a déploré hier Olivia Grégoire. Sur ces 1,5 milliard d’euros, 350 millions ont été fléchés pour accompagner les établissements recevant du public (ERP) de catégorie 5 au nombre de 800 000 dans notre pays. » Actuellement, ce sont 560 000 ERP, selon les chiffres du ministère, qui ne sont toujours pas accessibles pour les personnes à mobilité réduite. 

Ce fonds territorial d'accessibilité de 350 millions d’euros est ouvert depuis automne 2023. « L’État prend en charge jusqu’à 50 % des frais engagés pour la mise en accessibilité de son commerce, café, bar ou restaurant jusqu’à 20 000 euros », rappelle Olivia Grégoire. À ce jour, un peu plus de 500 dossiers de demandes ont été déposés pour ce fonds. Un chiffre extrêmement faible au regard du nombre d’ERP qui ne sont toujours pas en règle. « Il est important que les acteurs du tourisme se saisissent enfin de ce qu’est la loi depuis 19 ans », rappelle Olivia Grégoire, faisant allusion à la loi « handicap » du 11 février 2005, qui impose à tous les ERP d’être accessibles à tous les types de handicap. « Nous avons encore un mont Blanc à gravir pour être une société inclusive », regrette enfin la ministre démissionnaire, qui espère que ce sujet continuera d’être une priorité pour le prochain gouvernement.  
 




Université
Nouvelle augmentation du coût de la rentrée universitaire, selon le syndicat étudiant Fage
« Véritable signal d'alerte », le coût de la rentrée étudiante s'établit cette année à plus de 3 150 euros après une nouvelle hausse, selon la Fage (Fédération des associations générales étudiantes) qui publie mercredi son indicateur annuel.

« Pour nombre d’étudiants la rentrée universitaire se révèle être une étape presque insurmontable, conditionnée par les aides familiales ou le salariat contraint », insiste la Fage. 

Publié chaque année, son indicateur évalue le coût de la rentrée pour un ou une étudiante type de 20 ans en licence à l’université, non-boursier, n’habitant pas chez ses parents. Le calcul comprend ainsi l’ensemble des frais fixes liés à l’inscription universitaire et à l’emménagement dans un logement, et le montant d’un mois de dépenses courantes. 

Selon la Fage, ce coût s’élève pour cette rentrée 2024 à 3 157 euros. Une hausse de 2,7 % par rapport à l’année précédente, notamment portée par une augmentation des loyers (+ 2,5 %), des complémentaires santé (+ 2,08 %) et du prix du matériel pédagogique (+ 16,69 %). 

Pour certaines filières, le coût du matériel demandé par les universités peut atteindre des montants importants : les étudiants en odontologie (soins dentaires), doivent ainsi dépenser en moyenne 980 euros, précise l’Union nationale des étudiants en chirurgie dentaire, membre de la Fage. 

À l’instar du syndicat étudiant Unef en août, la vice-présidente de la Fage en charge des affaires sociales, Sarah Biche, dénonce également le dégel des frais d’inscriptions universitaires, qui ont augmenté cette année de 3 %.

L’organisation relève dans le même temps une insuffisance des moyens alloués aux étudiants pour faire face à ces augmentations. « Malgré un contexte inflationniste sans précédent ces dernières années, la revalorisation des APL (aides au logement) n’a pas permis de faire baisser efficacement le taux d’effort des locataires », dénonce-t-elle.

La fédération, qui regroupe des associations étudiantes, milite notamment pour un élargissement des critères d’attribution des bourses, la généralisation des repas à 1 euro au sein des restaurants universitaires, ainsi que « la construction massive de logements étudiants par un investissement du gouvernement ».
 






Journal Officiel du mercredi 4 septembre 2024

Ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires
Arrêté du 3 septembre 2024 relatif aux conditions de distribution du prêt avance mutation ne portant pas intérêt destiné au financement de travaux permettant d'améliorer la performance énergétique des logements anciens
Ministère du Travail, de la Santé et des Solidarités
Arrêté du 3 septembre 2024 modifiant la liste des spécialités pharmaceutiques agréées à l'usage des collectivités et divers services publics

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