Édition du jeudi 21 mars 2024

Budget
Économies budgétaires : l'exécutif vise de plus en plus ouvertement les collectivités locales
Le chef de l'État a réuni autour de lui, cette nuit, les ténors de sa majorité pour discuter économies budgétaires. Les prévisions en matière de déficit public sont, en effet, de plus en plus sombres, ce qui semble provoquer un début de panique au sein de l'exécutif. Il paraît de plus en plus clair qu'un effort va être demandé aux collectivités locales. Mais lequel ?

C’est une petite musique qui est jouée de plus en plus fort à Bercy et ailleurs. La semaine dernière, il était annoncé que la Cour des comptes a été chargée de rédiger, d’ici le mois de juin, un rapport sur les possibilités de contribution des collectivités à la réduction du déficit public. Ce matin, ce sont plusieurs voix de la majorité qui s’élèvent pour pointer des dépenses « trop importantes » des collectivités et la nécessité pour celles-ci de « participer à l’effort » général. 

Réflexion sur de nouvelles économies

Il est désormais certain que les chiffres à venir, en matière de déficit public, vont être encore plus mauvais que le gouvernement le redoutait. L’Insee va publier, mardi prochain, le chiffre officiel du déficit budgétaire pour l’année 2023. Alors que le gouvernement tablait sur 4,9 % du PIB, Bruno Le Maire a avoué il y a 15 jours qu’il serait « significativement » au-dessus de 5 %, et tout porte à croire que le chiffre qui sera révélé par l’Insee, mardi prochain, sera de 5,6 %. C’est une très mauvaise nouvelle pour le gouvernement, qui rend quasiment impossible l’atteinte de l’objectif fixé pour cette année 2024, à savoir un déficit ramené à 4,4 % du PIB. 

Le chef de l’État a donc réuni hier, d’abord, plusieurs ministres, pour discuter avec eux des pistes d’économies budgétaires. L’identité de ces ministres laisse peu de place au doute sur les pistes envisagées : il s’agit de Catherine Vautrin (chargée du travail et de la sphère santé/social)… et de Christophe Béchu, ministre de tutelle des collectivités territoriales. 

Plus tard dans la soirée, Emmanuel Macron a convié les ténors de la majorité pour un « dîner de travail » qui s’est achevé après minuit, là encore avec l’objectif de réfléchir à des annonces sur de nouvelles économies, puisque l’exécutif reste, pour l’instant, ferme sur sa décision de ne pas augmenter les impôts.

Car pour réduire le déficit, il n’y a que deux solutions : augmenter les recettes ou réduire les dépenses. Côté recettes, le gouvernement excluant d’augmenter les impôts, le seul motif d’espoir passe par « la lutte contre la fraude sociale et fiscale » engagée par le gouvernement, qui consiste à essayer de faire en sorte que « tous ceux qui doivent payer des taxes et des impôts les payent réellement ». 

Mais tout porte à croire que la solution qui va être privilégiée – comme le gouvernement l’a déjà entamé avec une première coupe de 10 milliards d’euros dans les dépenses de l’État en février – sera une réduction drastique des dépenses, et des annonces « désagréables ». Les dépenses sociales sont notamment dans le viseur et le chef de l’État dit n’avoir « aucun tabou ». Le gouvernement réfléchit donc à une nouvelle réforme de l’assurance-chômage, voire à la suppression de certaines prestations sociales. 

Une « note » très opportune

Reste la question des collectivités territoriales. Très opportunément, quelques heures avant ce dîner de travail, le député Renaissance Jean-René Cazeneuve a diffusé une note vantant la bonne santé des finances locales (lire article ci-contre) – note dont l’AMF ne partage aucune des conclusions. Sur l’air de « tout va très bien, madame la Marquise », le député du Gers estime que les collectivités sont en bonne santé financière, ce qui est le prélude tout trouvé pour proposer qu’elles « contribuent » à l’effort de réduction du déficit. 

Selon les informations glanées par Le Parisien au sortir de ce dîner, les « hauts cadres » de la majorité s’en sont donnés à cœur joie sur ce sujet : « Toutes les études montrent que les collectivités territoriales sont celles qui ont été les plus dépensières ces dernières années. C’est donc qu’il y a de la marge », aurait par exemple expliqué l’un d’eux. « Tant qu’on leur rapporte des recettes, elles le dépenseront », aurait même affirmé un autre, qui semble donc clairement estimer qu’il faut réduire ces « recettes », c’est-à-dire les dotations. 

« Comment allez-vous ralentir les dépenses ? »

Interrogé ce matin sur France info, le ministre chargé des Comptes publics, Thomas Cazenave, a souhaité calmer le jeu en affirmant qu’aucune décision n’a été prise à cette heure. Il a expliqué que sa méthode ne consiste pas à « élaborer un budget tout seul dans (son) bureau », mais à demander à « tous ceux qui contribuent à la dépense publique » de « prendre conscience de la nouvelle donne et de faire des propositions ». 

Mais sur le fond, la mélodie est la même. « L’État a fait sa part », avec l’annonce des 10 milliards d’économies, a expliqué le ministre – comme si ces économies n’affectaient pas directement les autres acteurs, dont les collectivités. Il faut donc maintenant que « les autres », c’est-à-dire les partenaires sociaux, d’une part, et les collectivités, d’autre part, fassent la leur. « C’est un fait, a asséné Thomas Cazenave : les dépenses des collectivités progressent beaucoup. Bruno Le Maire et moi, nous allons recevoir toutes les associations d’élus en leur disant (…) : comment allez-vous ralentir les dépenses ? ». 

Le ton est plus conciliant que les échos rapportés par Le Parisien sur la réunion de l’Élysée, mais une fois de plus, il n’est tenu aucun compte du fait que les collectivités ne sont pour rien dans le creusement du déficit public puisque, faut-il le rappeler une fois de plus, elles sont légalement dans l’obligation de présenter des budgets où recettes et dépenses sont à l’équilibre. Et le gouvernement fait aussi mine d'oublier que « l’effort » du bloc communal a commencé depuis 2010 avec le gel puis la baisse des dotations, qui ont généré 71 milliards d'euros  d’économies pour l’État. Sans compter les compensations partielles de la fiscalité locale supprimée, qui ont permis à l'exécutif de réaliser des économies sur ces réformes. 

Et comme d'habitude, cette façon de présenter les choses (« comment allez-vous ralentir les dépenses ? ») est destinée à marteler que les « dépenses » des collectivités sont forcément de la « mauvaise dépense », une forme de gâchis d'argent public. En cherchant à faire oublier que les dépenses des collectivités, en investissement comme en fonctionnement, permettent de faire vivre le service public local et créent, de surcroît, une quantité considérable d'activité économique. À l'heure où le gouvernement redoute une diminution de la croissance, est-il raisonnable de demander aux collectivités de ralentir leurs investissements ?

Que prépare le gouvernement ? Va-t-on aller vers une nouvelle période de baisse des dotations, ou vers un nouveau type de « contrats de Cahors » pour obliger les collectivités à réduire leurs dépenses ? Ou alors, la solution trouvée par le gouvernement sera-t-elle, comme le prône le ministre de l’Économie, de « rationnaliser l’organisation territoriale » en supprimant une strate de collectivités ? Toutes ces questions semblent clairement sur la table, et aucune d’entre elles ne constitue une perspective réjouissante pour les collectivités. 




Finances locales
Finances locales : le rapporteur du budget juge l'année 2023 « positive »... malgré une baisse de l'épargne brute
Dans une note publiée hier, le député Renaissance du Gers Jean-René Cazeneuve assure que les capacités d'autofinancement du bloc communal ont atteint « des niveaux records », contrairement aux départements et aux régions. L'AMF critique la méthode.

« L’État prend ses responsabilités, mais les collectivités locales devront aussi prendre les leurs. » C’est ce qu’a laissé entrevoir, hier soir, le président de la République, lors d’un dîner avec plusieurs cadres du gouvernement et de la majorité afin d’évoquer notamment la situation financière délicate du pays et d’échanger sur les différentes pistes d'économies (lire article ci-contre). 

Une réunion de crise qui intervient quelques jours après les alertes de la Cour des comptes sur le dérapage des comptes publics, mais surtout au lendemain de la publication par le rapporteur du budget à l’Assemblée, Jean-René Cazeneuve (RE), d’une note sur l’état des comptes des collectivités locales pour l’année 2023 – fondée sur les dernières données de la Direction générale des finances publiques (DGFIP).

Autofinancement en recul de plus de 8 %

Et à en croire le député Renaissance du Gers, les finances locales ont connu une dernière année « plutôt positive »… bien qu’elle ait été « en retrait par rapport à 2022 ». 

En effet, l’indicateur habituel de la bonne santé des collectivités a bien plongé dans le rouge l’année dernière : l’épargne brute des collectivités territoriales a ainsi chuté de 8,3 % du fait d’une hausse des dépenses supérieure à celle des recettes de fonctionnement, tout comme la trésorerie d’ailleurs. 

Mais, nuance Jean-René Cazeneuve, cette capacité d'autofinancement reste « plus haute qu'en 2017 », avec une progression de 18,9 % depuis l’élection du chef de l’Etat. « Il en va de même pour leur trésorerie », se félicite encore l’élu de la majorité, qui note sa « franche progression » (+ 26,5 %) par rapport à 2017.

Sans surprise, cette analyse n’a guère convaincu l’AMF qui considère que « l’année 2017 ne peut constituer un point de comparaison car le mandat 2014-2020 est un mandat inédit, marqué par la baisse des dotations ». 

La dégradation des capacités d’autofinancement des collectivités ne les aurait, en revanche, pas entravées dans leurs dépenses d’investissement puisque celles-ci ont atteint un « niveau record » en 2023, à 80,5 milliards d’euros. « Tiré par la hausse des dépenses d’équipement » (+ 9,6 %), l’investissement a ainsi connu une progression de 5,4 % par rapport à l’exercice 2022, se félicite Jean-René Cazeneuve qui rappelle toutefois que « l’augmentation de l’investissement en valeur doit être relativisée puisque le coût unitaire des travaux a lui aussi augmenté ».

Dans sa note, Jean-René Cazeneuve compare les investissements de 2023 à ceux de 2017, et note une hausse de 29 %. L'AMF remarque, à ce sujet, que cette comparaison est biaisée, dans la mesure où 2017 était une année exceptionnellement basse en la matière du fait de la baisse des dotations. Il paraîtrait à l'association plus pertinent de comparer à une année équivalente dans le cycle électoral, comme 2011 (quatrième année du cycle). Une telle comparaison fait apparaître, au lieu d'une hausse de 29 %, une « stagnation ». 

« Forte hétérogénéité »

Dans le détail, cet exercice 2023 est marqué par « une très forte hétérogénéité » de la situation financière des trois strates de collectivités territoriales. Si la capacité d’autofinancement du bloc communal a fortement augmenté, celle des départements et des régions a ainsi baissé. 

Résultat, l’épargne brute du bloc communal a atteint « des niveaux records, dépassant largement (son) montant de 2022 » (+ 9,8 %), constate Jean-René Cazeneuve. Une « situation favorable » qui résulte d’une progression des recettes de fonctionnement (+ 5,9 %) plus rapide que celle des dépenses (+ 5,1 %) – dont celles d’énergie qui ont augmenté de 21 %. 

« La hausse de l’épargne brute est visible partout, mais avec des différences notables selon la taille des communes », explique-t-il. Elle est ainsi « surtout portée par les EPCI et les communes de plus de 100 000 habitants », dont l’épargne brute a progressé de près de 12 %. Dans le même temps, celle des communes de moins de 3 500 habitants a augmenté moins vite, à hauteur de 3,7 % 

Une analyse par strate qui est « largement incomplète » et qui « ne met en exergue que les strates ayant enregistré une hausse de leur épargne », regrette l’AMF qui remarque, en outre, que la note ne mentionne pas « l’impact des difficultés des départements sur l’investissement du bloc communal ».

« Prudence pour 2024 »

Victimes de la chute importante des DMTO (- 22,1 %), due au retournement du marché de l’immobilier, les départements accusent en effet une baisse « très significative » de leur épargne brute de près de 40 %, quand les régions, elles, voient leurs capacités d’autofinancement fléchir de 4,6 %.

« L’exercice 2023 a mis en lumière l’existence des fragilités financières de certaines collectivités », reconnaît l’élu Renaissance, qui invite « à la plus grande prudence pour les projections en 2024 » du fait « du contexte économique et des tensions internationales ».

Alors que l’inflation devrait « s’établir à un niveau plus faible en 2024 (+ 2,6 % contre + 4,9 % en 2023) » et que plusieurs indicateurs devraient « jouer favorablement tant sur les recettes que sur les dépenses des collectivités » (l’augmentation des bases locatives, la croissance de la TVA...), le député du Gers préfère « tempérer ces perspectives favorables » et veut « rester prudent » au regard des « incertitudes » qui pèsent encore sur les finances locales en 2024 (DMTO, ralentissement de l’activité économique…)




Biodiversité
Des modifications dans l'architecture budgétaire du Fonds vert
Le ministère de la Transition écologique a rendu publique hier une circulaire sur le Fonds vert et plus particulièrement sur les crédits dédiés aux actions en faveur de la biodiversité, qui seront désormais financées avec des fonds à part. Explications. 

Est-ce une réponse aux inquiétudes qui se font jour depuis les annonces de la diminution importante des crédits alloués au Fonds vert ? Christophe Béchu explique, dans une circulaire aux préfets diffusée hier, que certaines actions seront financées par d’autres programmes budgétaires que le Fonds vert, mais doivent tout de même continuer à être désignées sous ce nom. 

La biodiversité « sortie » du Fonds vert

Pour rappel, le Fonds vert est une ligne budgétaire spécifique de la loi de finances, dont le nom officiel est « Fonds d'accélération de la transition écologique dans les territoires », et correspond, dans la nomenclature budgétaire, au programme 380. 

Ce programme, dans la loi de finances pour 2024, était doté de 2,5 milliards d’euros, conformément aux engagements du gouvernement. Mais le fameux décret du 22 février (lire Maire info de ce jour), actant les 10 premiers milliards d’euros d’économies budgétaires décidées en catastrophe par le gouvernement, a passé un sérieux coup de rabot sur ce programme, en l’amputant de quelque 500 millions d’euros. Quelques jours plus tard, le gouvernement laissait entendre que 450 millions supplémentaires risquaient d’être retirés au Fonds vert (lire Maire info du 14 mars). Ces différentes annonces ont provoqué une grande inquiétude chez les élus et chez les professionnels des travaux publics, qui craignent qu’elles aient de lourdes répercussions sur les investissements. 

Mais le ministre Christophe Béchu, sans répondre directement à ces inquiétudes, explique dans la circulaire publiée hier que certaines actions du Fonds vert vont désormais être financées sur d’autres lignes budgétaires. Ce sera le cas pour les actions entrant dans la mesure « Accompagner la stratégie nationale pour la biodiversité 2030 », financées jusqu’à l’an dernier par le Fonds vert. Ces actions, à partir de cette année, seront financées par une autre ligne budgétaire : Paysage, eau et biodiversité (programme 113), qui était dotée, dans la loi de finances pour 2024, d’environ 578 millions d’euros. 

Ce changement de ligne budgétaire, précise le ministre, sera « neutre pour les porteurs de projet » : « Pour préserver la dynamique de mobilisation des porteurs de projet, et notamment des collectivités, initiée par le Fonds vert, l’attribution de ces crédits se fera ainsi toujours sous une même bannière : celle du Fonds vert. » En clair : des projets qui ne seront plus financés par le Fonds vert devront tout de même être désignés comme des projets financés par le Fonds vert, et affichés comme tels, puisque les préfets devront « faire installer sur les lieux de réalisation des projets des panneaux d’information indiquant le financement reçu via le Fonds vert ». 

« Transparence »

Quels sont les projets  qui sont concernés par cette réforme de l’architecture du Fonds vert ? Ils sont au nombre de trois : premièrement, le déploiement des « Atlas de la biodiversité (inter)communale ». « L’objectif porte sur une couverture systématique dès lors qu’une révision des documents locaux d’urbanisme est envisagée », explique le ministre. « À l’issue de la réalisation de l’Atlas de biodiversité (inter)communale, ces documents pourront nourrir les réflexions des territoires dans la révision des documents d’urbanisme et permettre d’identifier les actions prioritaires. » 

Deuxième type de projets : « Protéger et restaurer les espaces naturels ». Il s’agit du soutien aux projets qui « permettront d’augmenter le nombre et la surface des aires protégées sous protection forte, et contribuer à la restauration des écosystèmes terrestres et marins dégradés ». 

Enfin, ce programme 113 permettra de financer, sous « bannière » du Fonds vert, une série d’actions visant à « réduire les pressions sur la biodiversité » : maintien ou rétablissement de certaines espèces de faune et de flore menacées, « augmentation du linéaire de dépendances vertes » pour favoriser le développement des insectes pollinisateurs, résorption des « points noirs de trame verte », lutte contre les espèces exotiques envahissantes. 

Toutes ces mesures sont détaillées dans les annexes fournies avec la circulaire.

Répétons-le, ce changement ne devrait pas avoir d’impact sur les porteurs de projets, puisque les demandes de subventions se feront de la même manière : « Le porteur de projet dépose son projet sous Démarches simplifiées/Fonds vert sur la même page que celle du Fonds vert (https://aides-territoires.beta.gouv.fr/programmes/fonds-vert/) », insiste le ministre. L’architecture interne est, pour le reste, de la « cuisine » qui relève des services préfectoraux et devrait être transparente pour les collectivités. 

Reste néanmoins que ce transfert d’une partie des actions du Fonds verts vers une autre ligne budgétaire ne résoud pas la question des restrictions budgétaires : tout simplement parce que le programme 113 lui-même, dédié à la biodiversité et aux paysages, a lui aussi subi un coup de rabot de 56 millions d’euros… 




Sécurité
En 2023, 15 000 infractions à caractère raciste ont été enregistrées en France
Le Service statistique ministériel de la sécurité intérieure (SSMSI) vient de publier une étude sur les atteintes « à caractère raciste » pour l'année 2023. Les crimes ou délits à caractère raciste, xénophobe ou antireligieux ont augmenté de 32 % par rapport à 2022.

Les services de police et de gendarmerie nationales ont enregistré près de 15 000 infractions à caractère raciste, xénophobe ou antireligieux sur l’ensemble du territoire français en 2023, dont 8 500 crimes ou délits et 6 400 contraventions.

Le ministère de l’Intérieur, et plus particulièrement le service statistique en charge de la sécurité intérieure, a dévoilé un rapport mercredi faisant le bilan statistique annuel des atteintes à caractère raciste, xénophobe ou antireligieux. « Les services de sécurité ont enregistré 8 800 victimes de crimes ou délits "à caractère raciste" en 2023 et 4 200 personnes mises en cause. À ces crimes et délits enregistrés en 2023, s’ajoutent 6 400 contraventions. »

4 % des victimes portent plainte 

Les auteurs de l’étude indiquent d’abord que « la majorité de ces crimes et délits comme de ces contraventions, enregistrés par les forces de sécurité, sont des injures, provocations ou diffamations (61 % des délits et la quasi-totalité des contraventions) », ce qui ne change pas des années précédentes. 

Ils notent cependant que si les contraventions « à caractère raciste » n’ont augmenté que de 4 % entre 2022 et 2023, la progression des crimes et délits est, elle, « beaucoup plus forte (+ 32 %), avec une nette accélération en fin d’année ».

Les principales cibles de ces actes racistes recensés sont les hommes âgés de 25 à 54 ans et ressortissants d’un pays d’Afrique : « Les personnes étrangères ressortissantes d’un pays d’Afrique sont les plus concernées : elles représentent à elles seules 11 % des victimes de crimes ou délits à caractère raciste contre 4 % de l’ensemble de la population ». Il est également intéressant de noter que la majorité des mis en cause « pour crime ou délit commis en raison de l’ethnie, de la nation, d’une prétendue race ou de la religion » sont à 89 % de nationalité française. 

Cette progression des contraventions qui peut paraître faible s’explique notamment par le fait que seules 4 % des personnes victimes d’atteintes « à caractère raciste » portent plainte. « D’après l’enquête de victimation Vécu et ressenti en matière de sécurité (VRS), près de 800 000 personnes de 18 ans et plus vivant en France métropolitaine déclarent avoir été victimes d’une atteinte « à caractère raciste » en 2021, soit 1,6 % de l’ensemble de la population majeure »

Les auteurs de l’étude ajoutent que l’évolution du nombre d’atteintes « à caractère raciste » enregistrées par la police et la gendarmerie nationales « reflète à la fois l’évolution du phénomène en lui-même mais également celle de la propension de la population à déclarer ces actes et l’amélioration de leur prise en compte par les services de sécurité ».

« Des disparités territoriales modérées »

Entre 2021 et 2023, les services de sécurité ont ainsi recensé en moyenne un crime ou délit à caractère raciste pour 10 000 habitants sur l’ensemble du territoire français. C’est donc sans grande surprise que Paris enregistre un taux de crimes ou délits à caractère raciste près de 3 fois supérieur à la moyenne nationale. Plus globalement, en région Île-de-France, le taux de crimes ou délits à caractère raciste enregistrées pour 10 000 habitants s’établit à 1,7.

Sans prendre en compte Paris, les « disparités territoriales sont relativement modérées avec un coefficient de variation des taux départementaux de 35 %. Deux départements se détachent avec des taux supérieurs à 1,6 fois le taux moyen sur l’ensemble de la France, soit le Bas-Rhin et les Alpes-Maritimes ».



Le département de la Lozère, le Morbihan et Mayotte (ce qui, pour ce dernier département, relève manifestement d'un biais statistique, eu égard aux tensions actuelles sur l'île à l'égard des réfugiés comoriens ou africains) ont les taux les plus faibles au regard des statistiques étudiés. Notons que « le nombre de crimes et délits à caractère raciste par habitant augmente en fonction de la taille des communes, variant ainsi de 0,4 victime pour 10 000 habitants dans les communes rurales à 1,6 pour les unités urbaines de plus de 200 000 habitants, hors Paris ».

Consulter l'étude dans son intégralité. 




Agriculture
Le Sénat en désaccord avec le gouvernement sur le mode de calcul de la retraite des agriculteurs
Déposée en janvier dernier, une proposition de loi visant à garantir un mode de calcul juste et équitable des pensions de retraite de base des agriculteurs a été adoptée à l'unanimité en première lecture au Sénat mardi.

Dans le cadre de la réforme du mode de calcul des retraites des agriculteurs, le gouvernement avait remis au Parlement (« avec huit mois de retard ») un rapport de préfiguration de la réforme. Ce dernier recommandait particulièrement un scénario : celui de « liquider la partie de la carrière antérieure à 2016 sur la base des modalités de calcul actuelles et la partie postérieure à 2015 dans le cadre d’un système par annuités ne retenant, jusqu’à ce que 25 années se soient écoulées depuis 2016 (soit en 2041), qu’un nombre de meilleures années calculé au prorata de la durée de cette partie de la carrière par rapport à la durée totale de la carrière ».

La commission des affaires sociales du Sénat « ne se satisfait pas du projet du gouvernement, qui lui paraît contraire à l’intention du législateur » et qui ferait des perdants par rapport au système actuel, visant « principalement les assurés à carrière courte et/ou à bas revenus ne bénéficiant pas d’une pension à taux plein et dont les pertes ne seraient pas couvertes, par conséquent, par les minima de pension ». Selon Pascale Gruny, rapporteure de la commission des affaires sociales, « le scénario envisagé par le gouvernement ferait 30 % de perdants pour seulement 20 % de gagnants »

Ainsi, c’est dans ce contexte qu’une proposition de loi visant à garantir un mode de calcul juste et équitable des pensions de retraite de base des travailleurs non salariés des professions agricoles a été déposée par le sénateur Philippe Mouiller (LR) en janvier dernier. Le texte a été adopté à l’unanimité le 19 mars en première lecture au Sénat. 

Bras de fer avec le gouvernement 

« En déposant ce texte, nous avons voulu aider le gouvernement à honorer ses engagements : une entrée en vigueur dès 2026 et l’absence de perdants. Il lui appartient désormais de tenir parole, à défaut de quoi je ne doute pas que nos collègues députés sauront s’emparer du dispositif que nous leur proposons ». Le ton est donné. Déjà, à plusieurs reprises, le retard du gouvernement pour rendre son rapport a été pointé du doigt par les sénateurs mardi, notamment par Philippe Mouiller qui a évoqué un « manque de considération inacceptable ». 

En effet, la proposition de loi qu’il a déposée s’inscrit dans la continuité de la loi du 13 février 2023 relative au calcul de la retraite des non-salariés agricoles en fonction des 25 années d’assurance les plus avantageuses. Un rapport devait être remis au Parlement trois mois après la publication de la loi ; il l’a été finalement huit mois après. 

Le fond du rapport a aussi fait l’objet de critiques acerbes. Les scénarios prévus par le gouvernement sont « d’une extrême complexité technique mêlant points et annuités pour le calcul des pensions des assurés », a fustigé Pascale Gruny et le scénario de réforme privilégié par le gouvernement est « une véritable usine à gaz  technocratique (…) incompréhensible pour la quasi-totalité des assurés », comme l’a indiqué Philippe Mouiller. 

L’article 1er de la proposition de loi propose donc « d’abroger les dispositions issues de la loi « Dive » et d’inscrire directement dans la loi les modalités de calcul des pensions qui seront applicables aux pensions agricoles liquidées à compter du 1er janvier 2026 ». Ainsi, il serait accordé aux assurés, pour chaque année de leur carrière, « un nombre de points égal au nombre annuel moyen de points acquis pendant leurs 25 années d’assurance les plus avantageuses. Le montant de la pension de retraite correspondrait alors au produit du nombre total de points attribués selon ces modalités par la valeur de service du point. Par ailleurs, dans une logique de simplification, la pension forfaitaire et la pension proportionnelle seraient unifiées au sein d’une même pension. »

Côté gouvernement, le ministre de l’Agriculture Marc Fesneau a émis un avis défavorable sur le texte. La majorité présidentielle s’est d’ailleurs abstenue lors du vote au Sénat mardi. Pour rappel, le gouvernement est favorable à une convergence du mode de calcul des pensions de retraite agricoles vers celui applicable aux régimes alignés. « Cette convergence est ardemment souhaitée par certaines organisations professionnelles et me semble justifiée dans un contexte où une immense majorité des agriculteurs exercent de moins en moins ce métier pendant toute leur carrière », a déclaré le ministre.

Avec 305 votes en faveur de la proposition de loi, cette dernière devra être examinée à l’Assemblée nationale où la majorité présidentielle risque de faire bloc contre elle.


 







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