Édition du vendredi 16 février 2024

Investissements
Le Sénat vote un abaissement à 5 % de la « participation minimale » des communes rurales aux investissements
Les sénateurs ont adopté hier en première lecture une proposition de loi permettant d'abaisser à 5 % le seuil d'autofinancement pour les investissements des petites communes rurales. Le gouvernement, néanmoins, ne semble guère favorable à cette disposition. 

Comment aider les petites communes à investir ? C’est pour donner une réponse à cette question que plusieurs sénateurs du centre-droit ont déposé une proposition de loi en octobre dernier, visant à l’origine à exonérer toutes les communes de moins de 2 000 habitants de l’obligation de participation minimale à un investissement dont elles ont la maitrise d’ouvrage.

Des dérogations trop peu connues et trop complexes

Rappelons l’état du droit. Le Code général des collectivités territoriales fixe la règle : toute collectivité ou groupement de collectivités maître d’ouvrage d’une opération d’investissement, en métropole, « assure une participation minimale au financement de ce projet » (article L 1111-10 du CGCT). En règle générale, cette participation minimale est fixée à 20 %. Autrement dit, une collectivité ou un EPCI ne peut pas recevoir plus de 80 % de subventions, d’où qu’elles viennent, pour financer un investissement. 

La loi prévoit un certain nombre de dérogations (le minimum est par exemple porté à 10 % dans certains cas, et les collectivités ultramarines bénéficient d’une exonération totale). Des dérogations peuvent également être décidées ponctuellement par l’État, comme cela a été le cas après les émeutes de l’été dernier, après lesquelles le gouvernement avait décidé de supprimer totalement la participation minimale pour les travaux de réparation des dégâts de ces émeutes. 

Enfin, depuis la loi Engagement et proximité de 2019 et l’introduction d’un amendement de la sénatrice Françoise Gatel, un dispositif de dérogation est prévu, décidé cas par cas par les préfets : cette dérogation (article 82 de la loi du 27 décembre 2019) est possible pour les investissements concernant « les ponts et ouvrages d'art, ceux en matière de défense extérieure contre l'incendie et ceux concourant à la construction, à la reconstruction, à l'extension et aux réparations des centres de santé ». Le préfet peut accorder une telle dérogation s’il estime que l’importance de l’investissement est « disproportionnée par rapport à la capacité financière du maître d'ouvrage ». 

Mais les sénateurs rappellent que cette possibilité est, d’une part, trop peu connue des maires et, d’autre part, que le montage du dossier de demande de dérogation s’avère particulièrement complexe. Par ailleurs, les préfets accordent ces dérogations de manière « aléatoire ». Résultat : en 2022, seulement « une centaine » de dérogations auraient été accordées sur un total de quelque 22 000 projets d’investissement.

Les critères resserrés 

Les sénateurs entendaient donc régler la question en introduisant dans le CGCT une dérogation permanente pour toutes les communes rurales (1) qui, selon la proposition de loi, auraient donc été totalement exonérées de toute obligation de participation minimale. 

En commission, le texte a été modifié : seules les communes de moins de 2 000 habitants seraient concernées, et l’exonération totale a été remplacée par une participation minimale abaissée à 5 %. 

C’est sous cette forme que le texte est arrivé en séance, avant-hier. Les sénateurs de tous les groupes ont, globalement, soutenu cette initiative, mais sous réserve d’apporter encore quelques restrictions. 

Deux amendements ont été proposés – et adoptés. Le premier vise à écarter de cette dérogation les petites communes les plus riches, qui n’en ont « pas vraiment besoin ». Un critère de potentiel financier a donc été retenu : la dérogation serait accordée aux communes de moins de 2 000 habitants « dont le potentiel financier par habitant est inférieur à deux fois le potentiel financier moyen par habitant des communes de moins de 2 000 habitants ». 

Par ailleurs, après avoir pris l’avis des associations d’élus qui les ont mis en garde contre le risque « d’effets de seuil », les sénateurs ont décidé de restreindre le périmètre des dépenses éligibles : la dérogation ne serait accordée que pour les investissements en matière « de rénovation du patrimoine protégé ou non protégé, de rénovation énergétique des bâtiments, d'eau potable et d'assainissement, de protection contre les incendies, de voirie communale ainsi que ceux concernant les ponts et ouvrages d'art ». 

Le rapporteur du texte, Hussein Bourgi, a expliqué qu’il ne serait pas normal de « subventionner à hauteur de 95 % un clubhouse ou un skatepark dans une commune de moins de 2 000 habitants, alors qu'une commune de 2 100 habitants ne pourra bénéficier que de 80 % pour un équipement autrement plus structurant ». 

Le texte a été adopté sous cette forme.

Le gouvernement peu enthousiaste

Le débat en séance publique au Sénat a également permis de connaître l’avis du gouvernement, représenté par Dominique Faure, récemment revenue au poste de ministre chargée des Collectivités territoriales et de la Ruralité. 

Sans s’opposer frontalement à la proposition des sénateurs, la ministre a émis un certain nombre de réserves. Si elle a reconnu que « la participation minimale de 20 % peut être un frein », elle a estimé que réduire à ce point l’autofinancement risque de « déresponsabiliser les communes ». « Ne risque-t-on pas de mettre en danger nos communes en les poussant à des investissements trop lourds, dont elles ne pourraient pas assumer les charges de fonctionnement ? », s’est interrogée la ministre. C’est la raison pour laquelle est a émis un avis défavorable au texte, préférant promettre de faire en sorte que les dérogations préfectorales prévues par la loi Engagement et proximité soient davantage utilisées et s’engageant à « encourager les préfets à s’en saisir ». 

Vu la position du gouvernement, il n’est pas sûr que cette proposition de loi aboutisse lorsqu’elle arrivera à l’Assemblée nationale. Si elle devait y être rejetée, Dominique Faure s’est engagée à « travailler sur ce sujet », car le problème « a du sens ». 

Le texte adopté a été transmis à l’Assemblée nationale. 

(1)    Soit les communes de moins de 2 000 habitants ou les communes de 2 000 à 5 000 habitants n’appartenant pas à une unité urbaine et appartenant à une unité urbaine de moins de 5 000 habitants.




Numérique
Inclusion numérique, cybersécurité, déploiement de la fibre : les élus sur tous les fronts en 2024
Mercredi dernier, la Commission numérique de l'AMF s'est réunie pour faire le point sur plusieurs sujets d'actualité notamment la cybersécurité, le déploiement de la fibre mais aussi l'avenir des conseillers numériques. Les retours du terrain sur ces politiques permettent de pointer, bien souvent, un décalage entre la théorie et la pratique.

Co-présidée par Patrick Molinoz, maire de Venarey-les-Laumes (Côte-d'Or), et Michel Sauvade, maire de Marsac-en-Livradois (Puy-de-Dôme), la Commission numérique de l’AMF s’est réunie mercredi matin afin de faire un point d’actualité sur les grandes échéances à venir dans le calendrier des maires de France. 

L'année 2024 va être marquée par l'accélération de la fermeture des réseaux cuivre dans de nombreuses communes, par le déploiement de la feuille de route France Numérique Ensemble, ou encore par la transposition d’une nouvelle directive européenne sur la cybersécurité qui concernera les collectivités. Un programme chargé, pour lequel les maires ont pointé quelques inquiétudes et interrogations. 

Feuilles de route territoriales 

En septembre dernier, la feuille de route France Numérique Ensemble élaborée dans le cadre du Conseil national de la refondation numérique a été publiée. Concrètement, quatre grands objectifs ont été fixés à l’échéance 2027 : accompagner huit millions de personnes éloignées du numérique ; former 20 000 aidants numériques ; rendre 2 millions d’ordinateurs reconditionnés accessibles aux ménages modestes et créer 25 000 lieux de médiation numérique (lire Maire info du 13 septembre). 

La déclinaison territoriale de cette feuille de route a été détaillée dans une circulaire ministérielle datée du 28 juillet 2023 qui indique que les collectivités locales ou leurs groupements doivent « présenter aux préfets de région/département leur volonté de porter ou de continuer à porter une gouvernance locale pour l’inclusion numérique à l’échelle qu’ils jugeront la plus pertinente et définir et mettre en œuvre leur feuille de route associant l’ensemble des acteurs de leur territoire ».

Ainsi, depuis janvier 2024, 76 départements sont engagés dans le processus avec au moins une collectivité co-porteuse identifiée, 15 départements dont les discussions sont en cours et 10 départements sans collectivité co-porteuse. 

Sur ce sujet, l’AMF estime que le calendrier proposé par le gouvernement est « trop serré », notamment parce que l’élaboration des feuilles de route départementales est attendue pour le 30 juin 2024. Les retours du terrain sont hétérogènes : certains vont pouvoir sans problème rendre leur copie en juin mais d’autres auront plus de difficultés. Plusieurs élus ont regretté la mauvaise articulation au sein des différents services de l’État, qui ne facilite pas la tâche : « Là où le bât blesse, c’est qu’il n’y a pas d’échange entre l’ANCT et les préfets », a indiqué Noël Pereira Da Cunha, maire de Pierrefitte-Nestalas (Hautes-Pyrénées). Kevin Guellaff, chef de projet départemental des Vosges, constate au contraire que « ça ne se passe pas trop mal » grâce à une « bonne articulation à l’échelon communal et intercommunal ». 

Autre sujet épineux qui a été mis sur la table : « Lors du comité de suivi national, les associations d’élus ont aussi fait part de leur retour sur le manque de compréhension entre la gouvernance départementale et le recrutement des coordinateurs des conseillers numériques », a indiqué Patrick Molinoz à ses collègues élus. Pour le moment, selon les chiffres du gouvernement,  environ 100 postes de coordinateurs ont été attribués.

Cybersécurité

Entre janvier 2022 et juin 2023, l'Agence de sécurité des systèmes d'information (Anssi) a enregistré et traité 187 cyberattaques visant les collectivités territoriales. Depuis plusieurs années, toutes les collectivités, même les petites communes plus vulnérables, sont particulièrement touchées par des cyberattaques. « Une collectivité sur 10 déclare avoir déjà été victime d’une ou plusieurs attaques au cours des 12 derniers mois, notamment d’hameçonnage à 46 % », selon Cybermalveillance.gouv.fr.

C’est dans ce contexte que la directive du 14 décembre 2022 dite « NIS 2 » « concernant des mesures destinées à assurer un niveau élevé commun de cybersécurité dans l’ensemble de l’Union, doit être transposée en France avant le 17 octobre 2024 », comme le rappelle Patrick Molinoz. 

Ainsi, certaines mesures seront applicables aux collectivités. Mais pour le moment, les informations sur le cadrage, afin de « voir ce que ce nouveau référentiel impose comme nouvelles pratiques » et surtout de « connaître le périmètre d’application », ne sont pas encore fixées. L'AMF est en lien avec l'Anssi pour définir le type de collectivités qui seront visées par la directive.  

Le but est de trouver un équilibre entre « deux injonctions contradictoires » soulignées par Patrick Molinoz :  suivre l'ambition légitime d'une meilleure cybersécurité des communes mais prendre en compte les moyens financiers et humains disponibles pour le faire. Comme l’ont souligné plusieurs élus, la maturité numérique au sein des équipes est inégale d’une commune à l’autre et les recrutements sont particulièrement difficiles dans un contexte de crise de la filière. Tous ces paramètres seront à prendre en compte lorsqu’une première étude d’impact sera communiqué par l’Anssi. 

Du cuivre à la fibre 

Autre sujet incontournable de ce siècle pour les élus du numérique : la transition du cuivre vers la fibre. De ce côté, Michel Sauvade a rappelé que le 10 janvier dernier la fermeture commerciale du lot 3 a débuté. Ce dernier compte 2 145 communes et 2,5 millions de locaux et concerne 92 départements. « On est désormais dans la phase active de ce plan de fermeture du réseau cuivre », résume le co-président. 

Les associations d’élus demandent depuis plus d’un an la mise en place d’une instance tripartite neutre, État, associations de collectivités locales et opérateurs pour accompagner les usagers et les élus dans cette bascule du cuivre vers la fibre (site internet, numéro vert…). « Ce système n’a pas été réalisé », regrette Michel Sauvade qui déplore par conséquent que la question de la communication aux administrés « reste entière ». Il alerte : « le maire n’a pas à prendre à sa charge la communication des opérateurs ». 

En effet, les particuliers ne vont pas tous migrer vers la fibre de manière spontanée et le risque de déconnexion, notamment pour les personnes âgées, inquiète les élus. Christian Quatre, maire de Léojac-Bellegarde (Tarn-et-Garonne), regrette le peu de temps laissé aux élus par l’opérateur Orange pour obtenir des informations sur les clients qui ont migré ou pas au sein de la commune. « Ces informations ne seront délivrées que 3 mois avant la fermeture définitive en janvier 2026 », explique le maire. « Cela laisse peu de temps pour savoir quoi faire pour ces clients qui n’ont pas migré… » Pour lui, « il y a un manque de coordination de l’information » qui laisse le maire seul face aux interrogations des administrés. 

Effectivement, « la mairie risque de faire pompier au dernier moment », comme le remarque Michel Sauvade qui rappelle enfin que le ralentissement des déploiements de la fibre dans les grandes villes (zone très dense) et les zones AMII (zone moyennement dense – 3 000 communes) inquiète de plus en plus à mesure que le temps passe et amplifie l’agacement de certains citoyens pas encore fibrés. La question des raccordements complexes dans les zones rurales devra aussi être suivie de près. Sur ce point, « la Caisse des Dépôts et les opérateurs vont apporter une solution mutualisée pour assurer le portage financier des investissements nécessaires aux raccordements les plus complexes (absence de génie civil, fourreau bouché…). Le dispositif devrait être opérationnel au début de l’année 2024 ».
 




Santé publique
Au Sénat, le débat est lancé sur l'instauration d'un arrêt de travail pour les femmes souffrant de règles douloureuses
Le Sénat a débattu hier d'une proposition de loi visant à instaurer, comme plusieurs collectivités le font déjà, un arrêt de travail facilité et sans jour de carence pour les femmes souffrant de règles douloureuses et « incapacitantes ». Le texte n'a pas été adopté. 

« Désinvisibiliser » les souffrances des femmes au travail. C’est l’objectif de la proposition de loi de la sénatrice socialiste Hélène Conway-Mouret, qui a été débattu hier au Sénat. Dans l’exposé des motifs de son texte, la sénatrice rappelle quelques chiffres, issus d’une enquête réalisée par l’Ifop en 2021 : une femme sur deux dit souffrir de dysménorrhée (règles douloureuses). 68 % des femmes jugent que les règles sont « un sujet tabou en entreprise », 65 % des femmes salariées « ont déjà été confrontées à des difficultés liées à leurs règles au travail » et 35 % jugent que leurs douleurs « impactent négativement leur travail ». 

Et pourtant, « le sujet reste tabou » en France – alors que dans plusieurs pays, il a été pris à bras le corps depuis bien longtemps : c’est en 1947 et 1948 que le Japon et l’Indonésie ont accordé un arrêt de travail aux travailleuses subissant des règles douloureuses. La Corée du Sud et Taïwan l’on fait dans les années 2010. Et tout récemment, en Europe, l’Espagne a été le premier pays à adopter « un congé menstruel intégralement financé par l’État ». 

En France, plusieurs collectivités territoriales ont décidé d’agir. C’est notamment le cas de Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis), qui a annoncé le 8 mars 2023 mettre en place à titre expérimental des aménagements d’horaires voire des ASA en cas de règles invalidantes. Plusieurs communes et communautés (Bagnolet, Plaine Commune, la métropole de Strasbourg et celle de Lyon) ont suivi. Ces collectivités, ont rappelé plusieurs sénatrices au Sénat, « demandent au Parlement de légiférer », parce qu’elles agissent, pour l’instant, hors de tout cadre juridique. 

Arrêt sans jour de carence

Rapporteure de cette proposition de loi, la sénatrice Laurence Rossignol l’a ardemment défendue en commission et en séance, pour que soit « enfin dépassée cette recette que les femmes se transmettent de génération en génération : ‘’Prends tes médicaments et serre les dents’’. » Et pour qu’une autre solution existe que la seule alternative existant aujourd’hui : « S'arrêter et perdre jusqu'à 10 % de leur salaire, parfois chaque mois ; ou souffrir au travail. » 

La proposition de loi comprenait quatre articles. Il visait à instaurer « un arrêt pour douleurs menstruelles à destination des femmes souffrant de dysménorrhée, dont l'endométriose, sans jour de carence et pour lequel l'indemnité journalière serait fixée à 100 % du salaire journalier de base ». Cet arrêt serait délivré sur présentation d’un certificat médical valable un an et renouvelable. L’article 4 permettait de recourir, quand c’est possible, au télétravail, « une femme pouvant parfaitement se retrouver gênée par des douleurs menstruelles l'empêchant de se rendre sur son lieu de travail, sans pour autant être handicapée au point de ne pas travailler ». 

En commission, la rapporteure Laurence Rossignol a proposé de retirer l’indemnité journalière à 100 %, et de les fixer à 50 % comme c’est le cas pour les arrêts de travail de droit commun, « dans un souci d’équité ». « Il ne me semble pas justifié d'instaurer des différences de traitement entre les différentes pathologies dans le niveau de prise en charge par la solidarité nationale », a plaidé la sénatrice du Val-de-Marne. 

« Rupture d’égalité »

Mais ni en commission ni en séance, ce texte n’a pu aboutir. En commission, tous les articles du texte ont été rejetés par la majorité sénatoriale de droite. Idem en séance, où le rejet des quatre articles du texte a conduit au rejet de l’ensemble, le gouvernement lui-même estimant que la proposition de loi était à retravailler. 

Tous les sénateurs opposés au texte ont dit leur préoccupation vis-à-vis de ce problème, « salué l’initiative » et estimé que le sujet mérite que des solutions soient trouvées, mais ont développé de nombreux arguments pour s’opposer au dispositif tel qu'il était présenté. Parmi ces arguments : une telle mesure découragerait les employeurs d’embaucher des femmes, et, partant, pourrait nuire « à l’employabilité des femmes ».  Le dispositif « contreviendrait au secret médical », puisque les femmes seraient obligées de donner les raisons de leur absence, et « un arrêt reconductible sur un an dévoilerait l’intimité » . Le droit au télétravail prévu par le texte « constituerait une rupture d’égalité ». Cette proposition de loi « créerait des inégalités entre professions », puisque les professions libérales et les entrepreneuses n’en bénéficieraient pas . 

Globalement, plusieurs sénateurs opposés au texte ont dit préférer qu’une réflexion ait lieu sur l’intégration des douleurs de règles incapacitantes dans le champ des ALD (affections de longue durée). C’est également l’avis du ministre chargé de la Santé, Frédéric Valletoux, qui a jugé, en conclusion des débats, qu'« avoir porté ce débat est déjà une victoire », mais que « l’avancée n’aurait pas été si progressiste que cela, compte tenu des obstacles et des incertitudes ». Il a néanmoins promis de « faire avancer le dossier » et de faire en sorte que cette question « ne reste pas lettre morte ».

Sur ce sujet, qui émerge enfin grâce notamment aux initiatives de plusieurs collectivités locales, mais qui s'avère complexe à résoudre sur le plan réglementaire, plusieurs sénateurs ont dit espérer l'élaboration d'un projet de loi, porté par le gouvernement et juridiquement solide. Le ministre Valletoux n'a pas entièrement fermé la porte à cette perspective. 




Politiques publiques
La Cour des comptes pointe une implication « très variable » de l'ANCT dans les territoires
L'implication « inégale » des préfets d'un département à l'autre induirait « des différences de traitement entre les territoires », déplorent les magistrats financiers. En cause, le manque de moyens qui leur a été accordé pour accomplir leurs missions.

Un manque de moyens, une implication territoriale « très variable », mais des dispositifs plutôt « satisfaisants bien qu'inégaux ». Dans un rapport publié mercredi, la Cour des comptes fait un premier bilan du fonctionnement de l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT), créée en 2020 afin d’aider les collectivités à mener à bien leurs projets.

Alors que sa présence sur l’ensemble du territoire est assurée par les préfets de départements, la Cour estime que « l’État doit s’engager à stabiliser son organisation et son fonctionnement et à renforcer ses relais locaux, dont la portée et l’efficacité devraient être réévalués à terme ».

« Adhésion des collectivités » 

Placée sous la tutelle des ministres chargés de l’aménagement du territoire, des collectivités territoriales et de la politique de la ville, cet établissement public doit notamment faciliter l’accès des petites collectivités à l’ingénierie et déployer différents programmes de cohésion des territoires, tels que « Action cœur de ville », « Petites villes de demain » ou encore les « Maisons France service ».

Très larges, ses politiques recouvrent « le pilotage de la politique de la ville, les dispositifs de l’État en faveur des villes, de la ruralité et de la montagne, le déploiement du très haut débit, l’accès au numérique, les politiques d’accès aux services publics et le soutien à la création de tiers lieux », tout en étant « autorité de coordination pour la gestion des fonds européens » et en exerçant « des missions d’observation et de connaissance des territoires », rappelle la Cour.

« Malgré la brièveté de la période de mise en œuvre et les difficultés auxquelles l’ANCT a été confrontée » (son déploiement a notamment été perturbé par la crise sanitaire, survenue moins de trois mois après sa création), celle-ci a rencontré « l’adhésion des collectivités territoriales, même si de nombreuses améliorations restent à concrétiser », reconnaissent les magistrats financiers. 

Des préfets sans « aucun moyen » supplémentaire

Parmi elles, le rôle des préfets en tant que délégués territoriaux de l'Agence est pointé du doigt. Ces derniers ont une implication dans leurs missions qui restent « très variable » d’un département à l’autre. Une situation qui « peut induire des différences de traitement entre les territoires », constatent-ils.

Bien que ceux-ci sont tenus de réunir au moins deux fois par an un comité local de cohésion territoriale (CLCT) composé de représentants des collectivités, des acteurs de l’ingénierie locale et de l’État, trois départements n’ont, par exemple, à ce jour, pas encore créé de CLCT : la Seine-Saint-Denis, le Val-de-Marne et de Mayotte.

Pointant la faible déconcentration de l’ANCT, la Cour estime que « les politiques qu’elle anime requièrent un accompagnement actif des collectivités, qui ne peut être réalisé par ses seuls services, aux effectifs majoritairement situés à Paris ». Un constat qui vient contrarier « la réalisation de l’objectif de proximité », pourtant présenté comme l’une des priorités de l’ANCT, avec « le risque à terme de devenir une agence des territoires éloignée voire absente des territoires du terrain ».

En cause, selon les magistrats, « aucun moyen spécifique » n’a été accordé aux préfets pour les « épauler » dans leur tâche, hormis l'apport de huit chargés de missions territoriaux. « Même s’il est prévu d’en doubler le nombre, ils ne pourront suffire à garantir seuls, le déploiement du soutien en ingénierie "sur mesure" promis lors de la création de l’ANCT », déplore la Cour.

Pourtant « les fonctions confiées au délégué territorial et à son équipe sont lourdes lorsqu’elles sont pleinement exercées » puisqu’un guichet unique suppose « d’orienter les élus et les porteurs de projet vers les opérateurs idoines, de suivre la progression du dossier mais également de faire le lien avec les chargés de mission territoriaux et les directions » de l’Agence.

Sans compter que « de nouvelles missions sont régulièrement confiées à l’Agence, sans que les moyens correspondants, budgétaires comme humains, soient systématiquement prévus ». Dans ce contexte, l’institution de la rue Cambon recommande que soit « précisé le cadre d’intervention du préfet de département […] et les moyens qu’il peut mobiliser pour assurer sa mission ». 

De premiers résultats « satisfaisants »

Si les dispositifs tels que « Petites villes de demain », « Action cœur de ville » ou bien les « Maisons France service » fournissent de premiers résultats plutôt « satisfaisants bien qu'inégaux », la Cour note, toutefois, que l’offre nouvelle de solutions d’ingénierie « sur mesure » (pour répondre aux demandes des élus) qui avait été « fortement mise en avant dans la communication » de l’ANCT est moins importante que ce qu’il paraissait.

L’enveloppe spécifique portée à 20 millions d’euros, en 2021, recouvre, en réalité, « l’ensemble des dépenses d’ingénierie de l’agence, parmi lesquelles sa participation aux chefs de projet du programme « Petites villes de demain » et des dépenses d’accompagnement des autres dispositifs nationaux ». Résultat, « la part spécifiquement "sur mesure" s’élève à seulement environ 6 millions d’euros par an », déplorent les magistrats qui regrettent que cette offre soit « encore mal connue des élus ». « Le recours qui y est fait repose très largement sur l’implication des services déconcentrés de l’État dans le dispositif », soulignent-ils.

Sur le plan budgétaire, les magistrats font état d'une « faible lisibilité », avec des montants des dispositifs nationaux qui s'élèvent à « plusieurs milliards d'euros », tandis que le budget spécifique de l'ANCT est de « 117 millions d'euros de crédits de paiement exécutés en 2022 ». Selon eux, « l’ANCT dispose d’une faible marge de manœuvre structurelle, qui confirme la nécessité de disposer d’une analyse de sa situation financière plus précise qu’actuellement ».

In fine, la Cour affirme que l'Agence doit désormais « accentuer ses efforts sur la consolidation de son fonctionnement interne et de la gestion des moyens qui lui sont alloués, ainsi que sur l'approfondissement de son lien avec les territoires dans lesquels elle intervient ». 

« La question semble moins aujourd’hui celle de la notoriété de l’ANCT représentée par le préfet délégué territorial ou celle de la "viabilité" de son projet, que de lui donner les moyens d’une normalisation de son organisation et de son fonctionnement pour lui permettre de contribuer effectivement à la territorialisation des politiques publiques », estime l’institution de la rue Cambon, qui conclut : « Pour l’avenir, la question n’est pas celle de l’utilité des missions […], mais plutôt celle de la plus-value de l’ANCT par rapport à la situation antérieure ».

Consulter le rapport.




Transition énergétique
Rénovation énergétique : le gouvernement veut simplifier le recours à l'aide MaPrimeRénov'
Le gouvernement s'est engagé à réduire les « lourdeurs administratives » accompagnant les dossiers MaPrimeRénov' d'aide à la rénovation énergétique, a annoncé jeudi le ministère de la Transition écologique.

Les ministres Christophe Béchu (Transition écologique) et Guillaume Kasbarian (Logement) ont rencontré jeudi matin les présidents des deux principales organisations professionnelles du bâtiment, Olivier Salleron, président de la Fédération française du bâtiment (FFB) et Jean-Christophe Repon, à la tête de la Confédération de l'artisanat et des petites entreprises du bâtiment (Capeb).

Les participants à cette réunion « ont unanimement alerté sur un processus de rénovation énergétique comportant désormais trop de lourdeurs administratives », affirme le ministère dans un communiqué.

Ils se sont mis d'accord sur trois évolutions: limiter « aux subventions les plus élevées » les « obligations de recourir à un accompagnateur agréé », « simplifier le label reconnu garant de l'environnement (RGE, que les professionnels doivent obtenir pour intervenir sur des chantiers financés par MaPrimeRénov', NDLR), notamment pour les petites et moyennes entreprises », et « lever les restrictions de financement concernant les gestes de rénovation simples et efficaces ».

3 axes

Le premier axe vise à « fluidifier les dossiers » et à permettre aux Accompagnateurs Rénov « de s'installer en nombre, alors qu'aujourd'hui ils ne sont pas capables de répondre à la demande », a expliqué à l'AFP Olivier Salleron. Le deuxième doit permettre à davantage d'entreprises de s'impliquer dans les travaux de rénovation. Le troisième vise à « s'assurer que le parcours de rénovation soit incitatif à des rénovations d'ampleur », mais « qu'il puisse continuer quand il y a des gestes simples et efficaces », a-t-on précisé dans l'entourage du ministre.

Il concerne notamment les changements de mode de chauffage, tels que le remplacement d'une chaudière à fioul ou à gaz par un poêle à granulés ou une pompe à chaleur, plus efficaces et moins émetteurs de gaz à effet de serre. Il pourra en outre éviter d'imposer de changer des chaudières remplacées récemment, a espéré Olivier Salleron. Cela permettra également aux propriétaires de logements à étiquette énergétique G, qui ne pourront plus être mis en location à partir du 1er janvier 2025, de commencer à améliorer la performance de leur bien, a-t-on précisé au ministère.

En 2024, le gouvernement a souhaité recentrer MaPrimeRénov' sur les rénovations « d'ampleur », plus lourdes et coûteuses mais beaucoup plus efficaces, au détriment de la rénovation « par gestes », plus partielle. Ces annonces seront précisées « début mars », indique le ministère.






Journal Officiel du vendredi 16 février 2024

Premier ministre
Décret n° 2024-110 du 15 février 2024 relatif à l'entrée en vigueur immédiate d'un arrêté
Ministère du Travail, de la Santé et des Solidarités
Arrêté du 9 février 2024 modifiant la liste des spécialités pharmaceutiques agréées à l'usage des collectivités et divers services publics

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