Édition du vendredi 24 novembre 2023 |
Congrès des Maires de France
Élisabeth Borne clôture le congrès de l'AMF et répond à certaines attentes des maires
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La Première ministre a clôturé, hier, le 105e congrès de l'AMF, avec quelques annonces, bien modestes par rapport aux demandes exprimées par André Laignel et David Lisnard.
Après la lecture par André Laignel de la résolution finale du 105e congrès (lire article ci-contre), le président de l’AMF, David Lisnard, a pris la parole pour son discours de clôture. Le maire de Cannes s’est livré à un vibrant plaidoyer pour les communes, « creuset de notre histoire et de notre culture », lieu de « la France du bon sens », « dernière institution solide qui produit des services de proximité et du sentiment d’appartenance ».
« République en danger »
David Lisnard est revenu sur beaucoup des grands thèmes abordés tout au long du congrès, tout particulièrement sur les violences contre les élus et les démissions (il y en a « 40 par mois », rythme qui a été multiplié par deux en 10 ans). Mais au-delà des agressions et atteintes contre les élus, c’est « une crise de la démocratie » que constate le président de l’AMF, rappelant les « 168 écoles » attaquées pendant les émeutes de l’été dernier – une situation « jamais vue dans l’histoire » selon lui –. « Le mérite est menacé, l’ordre est bafoué, la justice dénigrée… La République est en danger », a répété une fois encore David Lisnard.
Dans ce contexte, l’AMF se veut à même de proposer des solutions de fond. Saluant la présence de 11 000 élus au congrès, ce qui constitue un record, David Lisnard a rappelé : « Nous ne sommes ni un syndicat ni une officine partisane ».
S’adressant à la Première ministre, il a salué les avancées intervenues pendant l’année écoulée – sur le FCTVA, les secrétaires de mairie, les communes nouvelles ou le statut de l’élu. Mais en pointant les situations « catastrophiques » qui se profilent pour bon nombre de communes : la fin du filet de sécurité, la crise du logement (« véritable bombe à retardement humaine et sociale »), le « Léviathan bureaucratique » que constitue le ZAN, l’explosion des franchises et des primes d’assurances pour les communes (« le maire de Montargis a vu passer sa franchise de 7 500 à 2 millions d’euros ! »).
Puis le maire de Cannes s’est livré à une longue prétérition (« Je ne vous parlerai pas de la fiscalité locale… ») pour énumérer tous les sujets qui réduisent le « pouvoir d’action » des maires, et appelé à remplacer partout « la bureaucratie par la démocratie locale ».
« Libérez-nous ! »
« Imaginez ce que nous pourrions faire si l’État nous faisait confiance », a lancé le maire de Cannes à la Première ministre, dénonçant la tendance de plus en plus prégnante de l’État d’empêcher les maires d’agir plutôt que de contrôler leur action a posteriori. « Je vous propose d’oser la liberté. Nous vous proposons de vous libérer ! Transférez le pouvoir réglementaire aux collectivités locales, vous libérerez des milliers de fonctionnaires de l’État qui vous pourrez remettre sur le terrain, dans nos préfectures. Libérez les fonctionnaires de la Dreal ! », a proposé David Lisnard sous les applaudissements nourris de la salle. « Libérez-nous des autorisations préalables, de la bureaucratie qui fait perdre de l’argent et perdre les nerfs. Libérez-nous des appels à projets et des Cerfa ! Laissez-nous retrouver l’autonomie fiscale ! ».
Le président de l’AMF a conclu son discours en revenant sur l’idée qu’il avait développée lors de son introduction du congrès, mardi : l’AMF demande que les lois soient plus simples et moins normatives, qu’elles soient « d’objectif général », laissant une liberté d’application plus grande aux élus. « Les maires ne veulent pas ‘’déroger’’ : ils veulent agir librement dans le cadre de la loi. »
David Lisnard s’est dit pleinement ouvert à une nouvelle étape de la décentralisation, comme le souhaite le chef de l’État, mais si et seulement si celle-ci a pour « boussole » la démocratie locale et qu’elle s’s’oriente autour de trois axes : « Pouvoir normatif effectif pour les collectivités, autonomie fiscale et liberté de coopération ».
Des annonces partielles
La Première ministre a ensuite pris la parole, mais avec des réponses qui ne répondent qu’en partie aux ambitions exprimées par l’AMF.
Elle a rendu hommage aux élus, dont chacun représente « une parcelle de notre nation, une facette de notre pays, ceux qui changent le quotidien, innovent, osent et expérimentent, sans cesse en première ligne ». Mais ces paroles aimables n’ont guère été suivies d’annonces à la hauteur – et comme souvent, la Première ministre a plus distribué de mots d’amour aux maires que de preuves d’amour.
Elle a certes reconnu que le ZAN « provoque des incompréhensions », que les maires manquent de visibilité sur les dotations, que la crise du logement est là, que les outre-mer comme les territoires ruraux se sentent abandonnés notamment sur la question de la présence des services publics. Mais pour ce qui concerne les solutions, celles qu’a évoquées la Première ministre sont assez générales et peu concrètes : « Il faut rendre le dialogue permanent, (…) miser sur le couple maire-préfet qui peut soulever des montagnes. Je veux renforcer le rôle du préfet, car l’État ne peut avoir plusieurs visages dans un même département. »
Élisabeth Borne n’est toutefois pas venue les mains complètement vides, et a fait quelques annonces concrètes, au premier rang desquelles une nouvelle rallonge de « 100 millions d’euros supplémentaires sur la DGF » ce qui, selon elle, correspondra à une « indexation sur l’inflation », comme le demande l’AMF – ce qui paraît plus que discutable, si l’on tient compte du taux réel de l’inflation. Elle a par ailleurs confirmé, comme l’avait annoncé Emmanuel Macron la veille, que le gouvernement confie au Comité des finances locales la mission de « refondre la DGF », devenue « de plus en plus illisible ».
Petite hausse de la dotation élu local
Dès l’année prochaine, a par ailleurs annoncé la Première ministre, la DPEL (dotation particulière élu local) sera augmentée de 15 millions d’euros, afin de « mieux indemniser les élus des petites communes rurales ». À première vue, cela paraît dérisoire, quand on se rappelle que la DPEL profite à quelque 21 000 communes. Si c’est là le seul geste qu’entend faire le gouvernement pour revaloriser les indemnités dans son projet de loi prévu l’année prochaine, il y a peu de chance que cette mesure change la donne.
Autre annonce : le nouveau zonage des ZRR, qui vont prendre le nom de France ruralité revitalisation, va être retravaillé, « pour laisser rentrer 4 000 communes de plus dans le zonage ». Élisabeth Borne a par ailleurs affirmé que « aucune entreprise ne perdra les droits acquis à ces exonérations fiscales, sur toute la période prévue initialement ».
Dernières annonces d’importance : « Le gouvernement continuera à aider les collectivités face aux coûts de l’énergie : l’amortisseur du prix de l’électricité sera maintenu en 2024. » Enfin, la Première ministre a annoncé que le ministre du Logement, Patrice Vergriete, « commencera les concertations dès la semaine prochaine » sur le futur projet de loi de décentralisation des politiques de l’habitat. Mais avec quels moyens ? Il faudra répondre à l’inquiétude des maires de se voir transférer des responsabilités nouvelles sans avoir les moyens de les assumer, ce qui les rendrait à terme responsables aux yeux de la population d’une carence de logements dont ils ne sont pas responsables, comme l’expliquait hier Thierry Repentin au micro de Maire info.
La Première ministre a conclu son discours en affirmant que le gouvernement « répondra toujours présent » pour « accompagner et aider les maires, répondre à (leurs) difficultés et aux préoccupations de nos concitoyens ». Il faut maintenant attendre les orientations qui seront prises dans la future loi de décentralisation promises par Emmanuel Macron pour voir si ces promesses se traduiront en actes.
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Congrès des Maires de France
Résolution du 105e Congrès de l'AMF: un message d'alerte !
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La résolution générale du 105e Congrès des maires et des présidents d'intercommunalité, adoptée à l'unanimité par le bureau de l'AMF, élu le matin même, a appelé à un nouvel acte de décentralisation, au respect de l'autonomie financière et fiscale des collectivités, à des relations de confiance avec l'État. Le contexte s'est aggravé. Les maires ont lancé un véritable avertissement.
Comme l’a dit Churchill, « prenons le changement par la main, avant qu’il ne nous prenne par la gorge. » Ces mots de conclusion de la résolution générale de l’Association des maires de France et des présidents d’intercommunalités pour son 105e Congrès sonnent comme un avertissement.
« Quand les communes sont attaquées c’est toute la République qui est menacée, nous avons conscience que l’alerte est grave », a ainsi lancé André Laignel, premier vice-président délégué de l’AMF, maire d’Issoudun (36), lecteur de la résolution.
Les communes sont la solution !
Mais face à ce « tableau » sombre, les maires et présidents d’intercommunalité ont refusé de se résigner. « Nous restons résolument optimistes car nous faisons l’expérience chaque jour (…) que le travail de proximité des 35 000 maires, des 500 000 élus du bloc communal, des 1,5 millions agents territoriaux, est un levier puissant pour remettre notre pays sur de bons rails. Notre message d’espoir : les communes ne sont pas un problème, elles sont souvent la solution ! »
Or les « recentralisations multiples et étouffantes » que les maires dénoncent depuis longtemps entravent leur action : multiplication des plans eau, vélo, chaleur, transferts rampants sans véritables compensations (digues…), ZAN, fausses contractualisations (CRTE), la rigidité de la construction intercommunale, les mesures imposées et non concertées (priorité donnée au Dasen pour la rénovation des bâtiments scolaires, hausse du point d’indice la fonction publique…), poids des normes et enfin « l’étouffement financier » (nationalisation des impôts locaux, refus d’indexation sur l’inflation, fléchages des dotations toujours plus dirigistes, et demain suppression de l’octroi en Outre-mer.
Certes, il y a quelques avancées que les maires ont tenu à saluer sur la revalorisation du métier de secrétaires de mairies et la possibilité pour les associations d’élus de se constituer parties civiles dans les affaires d’agressions et de violences contres l’un des leurs.
Nécessaire relance de la décentralisation
Mais ce qu’attendent avant tout les maires, c’est « la nécessaire relance de la décentralisation ». L’AMF a formulé des propositions en ce sens. Celles-ci « concernent tous les leviers de l’action publique, allant de la révision constitutionnelle au changement de culture administrative, en passant par des changements de la loi », rappelant au passage que « trop de temps a été perdu et qu’il est désormais temps d’enclencher le mouvement et c’est pour cela que nous mettons à disposition une véritable boite à outils anti-procrastination ».
Autonomie financière et fiscale
A nouveau, l’AMF a appelé, lors de son 105e Congrès, « au rétablissement d’une véritable autonomie financière et fiscale ». Les maires demandent à revenir à l’esprit de la lettre constitutionnelle et réfléchissent d’ailleurs au moyen, pour les collectivités, de saisir directement le Conseil constitutionnel. Ils veulent aussi « réécrire » le principe de compensation et la définition des ressources propres, en introduisant « des clauses d’indexation » et des « clauses de revoyure ». Ils redemandent une nouvelle fois « l’instauration d’une contribution territoriale universelle » pour plus de justice entre les citoyens devant l’impôt, « un pacte financier sur la durée de la législature » et « un débat dédié au parlement chaque année ».
« L’engagement d’une réforme structurelle des dotations, tant en investissement qu’en fonctionnement » s’avère plus qu’indispensable. « Il faut redonner de la lisibilité à un système à bout de souffle, […] garantir le principe de liberté d’affectation des recettes », partager la fiscalité écologique en créant « une dotation climat », car « l’adaptation au changement climatique impose une refonte du modèle financier des collectivités », estiment les maires.
Revalorisation de la commune
L’AMF appelle également à une revalorisation de la commune avec notamment une amélioration des conditions d’exercice du mandat, la pleine reconnaissance de la diversité des communes, de la ruralité d’Outre-mer. Et l’instauration d’un véritable « pouvoir réglementaire d’application des lois », ainsi qu’un « recours à l’avis conforme des maires sur les décisions essentielles qui concernent leurs communes » (par exemple pour les fermetures de classe ou d’école, de service hospitalier, les projets d’implantation d’énergie renouvelable, les ventes de logements locatifs sociaux). Les relations avec l’intercommunalité et l’organisation des EPCI doivent « retrouver de la souplesse ».
Une relation de confiance entre l’État et les communes doit être rétablie. Tout comme « une vraie déconcentration, corollaire indispensable à la décentralisation, par le renforcement des services départementaux d’accompagnement de projets sous la responsabilité du préfet de département ».
Pour l’AMF, « ce qui manque, c’est une véritable vision et surtout, sa concrétisation dans la loi autant que dans le fonctionnement de l’Etat. La commune du XXI° siècle, moderne, résistante est plus nécessaire que jamais dans notre société fragmentée et notre démocratie fragilisée. […] Nous exigeons le respect du principe constitutionnel de libre administration ».
Le texte de la résolution de l'AMF pour son 105e Congrès.
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Finances locales
Finances locales : l'inquiétude des maires pour maintenir les services publics
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A l'occasion du débat sur les finances, les élus ont fait part de leurs difficultés du fait de la suppression progressive des marges de manœuvre fiscale et de l'absence de revalorisation de la DGF à la hauteur de leurs besoins. La petite enfance et le périscolaire préoccupent particulièrement les maires.
Face aux pressions financières, les maires s’inquiètent des menaces toujours plus grandes qui pèsent sur les services publics locaux. Ils ont ainsi mis en garde, hier, le ministre des Comptes publics, Thomas Cazenave, à l’occasion du débat sur les finances : « La suppression progressive des marges de manœuvre fiscale, l’absence de revalorisation de la DGF à la hauteur des besoins et le fléchage renforcé des ressources locales sur des priorités définies par l’État restreignent la capacité à répondre aux besoins de la population ».
« Toutes les communes ne vont pas bien »
L’ancien député de la Gironde a beau s’être félicité de la situation financière des collectivités qui « résistent bien », alors que « certains annonçaient l’an passé un effondrement », certains élus présents ont tordu le cou à ce constat global qui invisibilise les situations particulières et les niveaux de communes plus fins.
« Toutes les communes de France ne vont pas bien, certaines communes rurales sont en grande difficulté budgétaire », a tonné Dominique Amiard, le maire de Cures (Sarthe), « 499 habitants DGF », qui se retrouve « dans l'incapacité de couvrir [ses] frais de fonctionnement » et n’essaie même plus de « dégager de l'autofinancement ». Celui-ci évoque même une « misère territoriale », une « violence terrible » et l’absence d’un quelconque « espoir d’amélioration ».
« Moi, je me félicite d’être encore debout dans un contexte aussi compliqué », a fait valoir le maire de Boisseuil (Haute-Vienne), Philippe Janicot, qui déplore le manque de visibilité sur son budget et la « mise sous perfusion » des communes pour faire « aboutir chaque projet ». « Si l’Etat ne donne pas un minimum de moyens pour bien fonctionner, c’est une bombe à retardement » qui nous attend, selon lui, étant donné que « 70 % des investissements de l’économie locale sont appuyés par les collectivités ».
Outre les piscines fermées du fait des coûts de l’énergie trop importants, les problèmes de financement du périscolaire ou encore de la petite enfance, ce sont les politiques publiques en général qui sont touchées, notamment par l’inflation. « Nous sommes à un point de rupture », a ainsi constaté la maire de Vincennes, Charlotte Libert-Albanel.
« Nous voyons bien que, face aux difficultés financières que nous affrontons aujourd’hui, nous allons devoir faire des choix. Et des choix qui ne nous plaisent pas. Devons-nous faire comme nous le souhaiterions, au risque d’endetter fortement nos collectivités, ou diminuons-nous la voilure en termes de services publics locaux ? », s’est-elle interrogée.
Petite enfance, périscolaire, piscines…
« On ne veut d’ailleurs pas forcément créer de nouveaux services publics, mais maintenir ceux existants », a bien tenu à préciser le maire de Percy-en-Normandie et président de l’Association des maires du département de la Manche, Charly Varin.
Le cas du service public de la petite enfance, « sujet extrêmement coûteux », est particulièrement représentatif. Sur les crèches, « nous ne sommes pas dans une logique d’augmenter le nombre de places, car nous ne le pouvons pas. On est juste à un peu point où il nous faut juste garder l’existant », a assuré la maire de Vincennes.
Outre les difficultés liées au recrutement des auxiliaires de puériculture qui a conduit la ville a fermé « 88 berceaux » sur 660 berceaux, les contraintes financières sont un problème majeur, la commune ayant par ailleurs dû réduire le nombre de ses agents. « Les coûts de fonctionnement explosent : dans les crèches, celui d’une place devrait prendre 20 % dans les prochaines années, les couches ont augmenté de 11 % et la restauration a progressé de 15 % en un an », a souligné Charlotte Libert-Albanel. Et Catherine Bastoni, adjointe aux Finances de Montigny-le-Bretonneux (Yvelines), de rappeler que le coût d’un berceau est aujourd'hui de « 18 000 euros par an ».
A Boisseuil, c’est le coût du périscolaire qui atteint les « 14 000 euros » à l’année. Alors que la suppression du fonds de soutien aux activités périscolaires (FDSAP) a été envisagée par l’exécutif, son arrêt entraînerait un nouveau coût « qu’on devra autofinancer ».
« A l’école, le choix national est d’avoir 4,5 jours, a rappelé Jany Claude Solis, maire de Saint-Jouvent (Haute-Vienne). Et les communes qui résistent [pour ne pas passer à 4 jours], c’est parce qu’elles pensent que 4,5 jours c’est bien et que la découverte d’activités périscolaires est un vrai service aux familles et aux enfants qui ne peuvent pas se financer une séance d’équitation, de conservatoire de musique ou de peinture. Des activités très élitistes… »
« Demandez-vous, monsieur le ministre, s’il est logique de frapper de plein fouet sur ce sujet alors que l’on dit que l’enfance et la petite enfance sont des priorités ? », a questionné l’édile, en réclamant le « maintien de ce service au-delà de l’année 2024 ».
Malgré l’urgence sociale, « notre demande de services publics ne peut pas croître plus vite que notre croissance et notre capacité à générer des recettes. Quand vous avez 1 % de croissance et que vous devez équilibrer le budget, vous ne faites pas tout ce que vous voulez », a répondu Thomas Cazenave, en confirmant le maintien du FDSAP l’an prochain, tout comme « l’amortisseur électricité » pour « les collectivités qui ont signé des contrats » au plus mauvais moment et qui « sont coincées avec des prix exorbitants ». « On ira même jusqu’à 75 % », a assuré le ministre, alors que le premier vice-président délégué de l’AMF, André Laignel, a fortement incité, durant le débat, cette pérennisation.
Des « moyens » pour réformer la DGF
Reste que, malgré le contexte, le ministre des Comptes publics a estimé que les ressources des communes sont « très dynamiques », se félicitant du fait que le camp présidentiel n’ait d'ailleurs « pas plafonné l’évolution de la taxe foncière » afin de garantir ce dynamisme, comme cela était pourtant souhaité par certaines oppositions. En 2024, ces bases seront ainsi revalorisées à hauteur de 4,5 %, a-t-il annoncé.
Pas de quoi satisfaire André Laignel, qui a assuré que « la loi de finances 2024 est probablement la plus mauvaise des 40 dernières années ». « Les transferts financiers de l’Etat vers les collectivités - qui représentent les 108 milliards d’euros - sont en baisse d’un peu plus de 500 millions d’euros cette année. Seulement, si l’on prend en compte le panier du maire qui augmente de 6 %, cela représente au final un déficit constant de 7 milliards d’euros. Donc, on ne peut pas dire que c’est une bonne année. C’est une année plus difficile que les années précédentes », a affirmé le maire d’Issoudun.
Et la rallonge de 100 millions d’euros de DGF accordée, hier, par la Premier ministre ne devrait là aussi pas suffire puisque l’AMF estime, dans son étude présentée mardi, que « sur la base de l’inflation prévisionnelle pour 2024 (+2,6 %), le maintien de la DGF [aurait] nécessité une revalorisation d’environ (...) 265 millions d’euros supplémentaires par rapport aux 220 millions d'euros d'abondement déjà prévus ».
« C’est le pire des budgets des dernières années ? Je ne peux pas entendre ce type de critique, a rétorqué Thomas Cazenave, particulièrement agacé. On ne pourra pas faire mieux, si l’on fait son miel d’une confrontation entre l’Etat et les collectivités... Les chiffres, ce n’est pas ça ! Est-ce que la DGF augmente? Oui. La dotation biodiversité? Oui. La dotation titres sécurisés? Oui. La dotation pour les aménités rurales? Oui. Et est-ce que vous êtes face à des besoins auxquels vous ne pouvez pas répondre ? Je dis oui aussi ».
Alors que le président de la République a annoncé vouloir confier au Comité des finances locales (CFL) la refonte de la DGF et que de nombreux élus ont fait part de leur incompréhension face au fonctionnement de cette dotation, André Laignel, également président du CFL, a réclamé des « moyens supplémentaires ». Car, sans cela, ce sera « quasi infaisable ».
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Santé publique
Baromètre santé social : la situation s'aggrave
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Trois ans après le premier baromètre santé social, l'AMF et la Mutualité Française ont livré une évolution préoccupante de la situation concernant l'accès aux soins, la petite enfance ou encore l'hébergement des personnes en perte d'autonomie.
Sur tous les indicateurs mesurés en 2020, aucun ne s’est amélioré (1). Pire, ils se sont dégradés, en particulier sur l’offre de soins.
Les déserts médicaux continuent d’avancer et touche une très large frange de la population : près de 87 %. La baisse du nombre de généralistes est manifeste dans 78 départements, ce qui fait craindre pour l'avenir « car nous ne sommes qu’au début du phénomène démographique » de départ en retraite d’une partie des médecins en activité, souligne le président de l’AMF, David Lisnard, lors de la présentation de ce baromètre, au congrès des Maires de France, mercredi. Il est même « probable que cette tendance s’infléchisse encore dans le prochain baromètre car les premiers effets de la suppression du numérus clausus ne se produiront pas avant cinq ans encore » enchérit le président de la Mutualité française, Éric Chénut, partenaire de l’étude.
L’offre de soins reste « inégalement répartie », retient également David Lisnard, avec des zones rurales proportionnellement davantage touchées, puisque seules « 18 % des zones rurales sont suffisamment dotées », soit près de deux fois moins que de zones urbaines (31 %).
La permanence des soins (« la capacité de trouver une offre de soins de ville le soir ou week-end pour éviter le recours aux urgences ») se dégrade, elle, à une allure vertigineuse. Puisque « en dix ans, depuis 2012, de 73% de professionnels s’inscrivant dans la permanence de soins la proportion a chuté à à 38% », illustre Éric Chenut, président de la Fédération nationale de la Mutualité française.
Les résultats ne sont pas meilleurs dans la petite enfance. Entre 2017 et 2020, le nombre de places d’accueil des plus petits a diminué de 4 %. Là encore, avec de grandes variations suivant les territoires : « une variation de 1 à 7 entre la Guyane (11 %) et la Mayenne (84 %) ».
Aussi, le niveau moyen du nombre d’établissements pour personnes âgées a diminué « de 124 à 115 pour 1000 personnes entre 2018 et fin 2021 ». De surcroît, le nombre d’Ehpad est aujourd’hui « dans le rouge » pour reprendre un constat largement repris dans un autre forum du congrès mercredi consacré au bien vieillir.
Des constats aux solutions
« Il faut donc absolument faire émerger de nouvelles solutions », reprend le président de la Mutualité française. Le parti pris du baromètre est aussi de mettre quelques solutions en exergue en pointant notamment « l’alliance public-privé solidaire » pour les faire vivre. Mais cette action locale ne peut s’épanouir sans davantage de « subsidiarité », « de telle sorte que les initiatives ne soient pas engoncées », empêchées ou entravées, précise David Lisnard. La « coordination des professionnels », ou la « plus grande territorialisation des politiques de santé » sont d’autres conditions nécessaires.
Éric Chenut appelle les maires à ne pas oublier que « 80% des déterminants de santé ne dépendent pas du système de santé, mais de politiques publiques ! », comme les politiques éducatives, économiques et sociales, portant sur les infrastructures, les transports, etc. « Qui mieux que les maires pour enclencher et accompagner le virage préventif dont on a besoin à l’échelle du pays ? ». La prévention de la perte d’autonomie, passe aussi « par des aménagements urbains, politiques, de transport, le logement ».
David Lisnard pointe lui certaines limites de l’action communale. Par exemple, sur la petite enfance, le manque de 10 000 emplois pour répondre aux besoins ou les « taux d’absentéisme anormalement élevés dans les communes » sont des freins à prendre en compte. « Cela révèle peut être des problèmes d’attractivité et de management mais cela doit susciter un électrochoc avec les partenaires sociaux, syndicats et employeurs ! ».
(1) Le baromètre s’appuie sur un ensemble de données récupérées auprès des différentes sources de référence : CNAF, ARS, Ordre des médecins, INSEE, etc.
Consulter les résultats du baromètre.
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Numérique
Numérique : lancement d'un baromètre pour mieux outiller les collectivités
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Inclusion numérique, cybersécurité, communication avec les administrés… Il est difficile d'évaluer aujourd'hui le niveau des collectivités territoriales sur le développement des services numériques. C'est pourquoi la direction interministérielle du numérique (DINUM) lance un baromètre pour mieux connaître leurs usages numériques.
À l’occasion du Congrès des maires, un baromètre « Collectivités et numérique » a été lancé dans le cadre du programme Transformation numérique des territoires (TNT) de la direction interministérielle du numérique (DINUM) en partenariat avec le réseau Déclic, fédérateur national des Opérateurs publics de services numériques (OPSN).
Ce nouvel outil va permettre d’enrichir les données sur les connaissances et pratiques au niveau local des collectivités en matière de numérique. Actuellement, « il existe peu de données solides, partagées et exhaustives sur le développement des services numériques au sein des collectivités » alors qu’elles sont « indispensables à un pilotage, et à un accompagnement efficace de la transformation numérique des territoires ».
Plusieurs questionnaires sur des thématiques variées seront adressés chaque trimestre aux collectivités jusqu’en août 2024. Les résultats seront couplés aux données existantes au sein des administrations centrales et des opérateurs de l’État (ministères, agences, etc.) afin de « fournir une vision globale et détaillée des avancées numériques dans les territoires ».
9 thématiques
Trois questionnaires par trimestre seront ouverts aux collectivités. Les premiers portent sur l’inclusion numérique, la cybersécurité et la communication avec les administrés. Chaque questionnaire prend moins de 10 minutes à remplir.
Les autres thématiques qui vont être abordées jusqu’en août sont tout aussi importantes. On retrouve la question de l’accès au Très haut débit au sein des bâtiments publics et le déploiement d’infrastructures numériques ; celle de l’équipement numérique de la collectivité (parc informatique) et les pratiques numériques des élus et agents ou encore la question de l’usage des données des collectivités.
La dernière phase de ce baromètre s’intéressera enfin à la mise en œuvre des démarches de dématérialisation, aux services en ligne disponibles pour les habitants et usagers et à la mise en place d’une stratégie numérique territoriale. Rappelons sur ce point que la loi REEN du 15 novembre 2021 impose aux collectivités territoriales de plus de 50 000 habitants d’élaborer une stratégie numérique responsable d’ici au 1er janvier 2025.
Les résultats feront l’objet d’une synthèse annuelle en décembre « et d’un outil en ligne permettant de visualiser et comparer les données récoltées par territoire et par thématique ».
Accéder au baromètre.
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Journal Officiel du vendredi 24 novembre 2023
Ministère de l'Intérieur et des Outre-mer
Ministère des Sports et des Jeux olympiques et paralympiques
Première ministre
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