Édition du jeudi 16 mars 2023

Réforme des retraites
Réforme des retraites : la journée décisive
C'est aujourd'hui que le gouvernement joue le tout pour le tout : après l'adoption, hier, d'un texte de compromis entre l'Assemblée nationale et le Sénat, la réforme des retraites va se jouer cet après-midi au Palais-Bourbon, en même temps que l'avenir du gouvernement Borne. Les dispositions concernant les élus ont été maintenues dans le texte final. 

La commission mixte paritaire (CMP) s’est conclue, hier vers 18 heures, par un accord : les sept députés et sept sénateurs ont adopté un texte de compromis reprenant, pour l’essentiel, le texte du gouvernement, mais en conservant certains ajouts du Sénat et certaines dispositions supplémentaires demandées par le groupe Les Républicains. Pendant la CMP, dont un compte rendu partiel est disponible ce matin, le président du groupe LR de l’Assemblée nationale, Olivier Marleix, s’en est félicité : « Les quelques exigences que nous avions fixées ont été entendues. »

Les dispositions pour les élus maintenues

Les élus retiendront de ce texte final que les deux principaux apports du Sénat les concernant ont été maintenus. D’une part, dans l’annexe au projet de loi, la phrase indiquant que le gouvernement s’engage à compenser dès cette année la hausse d’un point des cotisations employeurs à la CNRACL. Et, d’autre part, les dispositions concernant la retraite des élus locaux : tous les élus, s’ils le souhaitent, pourraient être « assujettis aux cotisations de Sécurité sociale de base sur les indemnités de fonction qu’ils perçoivent ». Jusqu’à présent, rappelons que les élus qui touchent moins de 1 833 euros d’indemnités et conservent un emploi par ailleurs ne cotisent, sur leurs indemnités, qu’à l’Ircantec. 

Autre disposition importante conservée : le dispositif des rachats de trimestres serait étendu « aux périodes pendant lesquelles l’assuré a été membre de l’organe délibérant d’une collectivité territoriale ». 

Ces dispositions, a déclaré en CMP la centriste Sylvie Vermeillet, « mettront un terme à l’injustice qui caractérise la retraite des élus locaux ». Pas entièrement tout de même, puisque les parlementaires ont déclarée irrecevable la proposition de l’AMF de faire en sorte que le régime « Ircantec élus » ne puisse plus interférer avec les autres régimes – ce qui génère, précisément, de graves « injustices ». 

Les options sur la table

Et maintenant ? Sans surprise, le texte de la CMP a été adopté ce matin par les sénateurs, par 193 voix contre 114. Mais c’est à l’Assemblée nationale que le gouvernement doit trouver une majorité pour voter son projet de loi et, à l’heure où nous écrivons, nul n’est capable de savoir s’il y parviendra. 

Plusieurs options sont sur la table. La première est celle du passage en force : si l’exécutif estime que les risques sont trop grands de ne pas obtenir la majorité – au dernier pointage, les choses pourraient se jouer à moins de cinq voix – il peut choisir de faire jouer l’article 49.3 de la Constitution. Avec un double risque. Risque politique, d’abord, parce que le passage d’un texte aussi crucial et aussi contesté via le 49.3 ne pourra être interprété autrement que comme un geste autoritaire. Risque pour la survie même du gouvernement, ensuite, parce que le 49.3 s’accompagne d’un vote de confiance, et que personne ne peut jurer, ce matin, que le gouvernement est certain d’obtenir la confiance du Parlement. Rappelons que si la confiance n’est pas voté, le gouvernement doit démissionner, ce qui se traduirait dans la foulée, a toujours assuré Emmanuel Macron, par une dissolution de l’Assemblée. 

La deuxième option pour le gouvernement est de faire voter le texte. Là encore, c’est quitte ou double : si le texte recueille une majorité, aussi ténue soit-elle, il sera définitivement adopté. Ce qui ne signifie pas, d’ailleurs, que le mouvement social en cours s’arrêtera automatiquement – certains syndicats ayant déjà exprimé leur volonté de poursuivre la contestation même en cas d’adoption du texte. Si le texte est rejeté, en revanche, cela ne signe pas son arrêt de mort, puisque cela donnerait le départ à une nouvelle navette parlementaire. Mais ce serait un tel échec pour le gouvernement que le chef de l’État envisagerait, dans ces circonstances et selon des sources proches de l'Élysée, de dissoudre directement l’Assemblée nationale. 

D’autres possibilités existent encore. Par exemple, le dépôt d’une motion préalable de rejet, avant le vote du texte. Si une telle motion était adoptée, cela mettrait fin aux débats. Le député centriste Charles de Courson envisageait, hier, de faire appel à ce procédé, en, sachant que sa position de centriste pourrait lui permettre de recueillir les suffrages aussi bien de la Nupes que du Rassemblement national. 

Enfin, le gouvernement garde une ultime carte dans sa manche, bien que celle-ci ne soit plus évoquée depuis plusieurs jours : celle d’aller jusqu’au bout des dispositions de l’article 47-1 de la Constitution, qu’il a invoqué dès le début du processus parlementaire : cet alinéa de la Constitution dispose que si un projet de loi de financement de la Sécurité sociale n’est pas adopté par le Parlement 50 jours après son dépôt, le gouvernement peut le mettre en œuvre par ordonnance, c’est-à-dire sans débat. L’inconvénient majeur de cette stratégie – outre qu’elle apparaîtrait là encore comme un passage en force – est qu’elle revient à reculer pour mieux sauter : car tôt ou tard, une ordonnance doit être ratifiée par le Parlement, ce qui voudrait dire, dans quelques mois, la relance d’un débat qui aura déjà fait beaucoup de dégâts politiques pour le gouvernement. 

Le pays, ce soir, aura probablement soit une réforme des retraites accouchée dans la douleur, soit plus de gouvernement. À moins que, si le texte est rejeté, celui-ci décide de repartir dans une nouvelle navette parlementaire, tout aussi incertaine.




Élus locaux
Le gouvernement va créer « une cellule d'analyse et de lutte » consacrée aux violences contre les élus
Le ministère chargé des Collectivités territoriales a diffusé hier les chiffres pour 2022 des atteintes contre les élus. Ils sont encore plus inquiétants que ceux qu'avaient estimés l'AMF. Le gouvernement envisage plusieurs mesures pour tenter d'endiguer le phénomène. 

C’est, de façon inhabituelle, dans Paris Match que la ministre chargée des Collectivités territoriales, Dominique Faure, a dévoilé ses chiffres, avant que ceux-ci soient précisés par son entourage. 

Alors que l’AMF estimait récemment que les atteintes contre les élus avaient augmenté de 22 % en 2022, le chiffre avancé par la ministre est encore plus préoccupant : il serait de + 32 %. Les faits recensés en 2022 sont au nombre de 2 265, contre 1 720 un an plus tôt. La différence s’explique en partie par le fait que l’AMF ne recense que les atteintes contre les élus locaux, alors que le gouvernement inclut les parlementaires. Mais surtout parce que l'AMF n'est prévenue, par les élus, que des faits les plus graves, alors que le ministère de l'Intérieur inclut la totalité des faits dans son recensement. 

Toutes les « atteintes » recensées

Le gouvernement explique en effet que les services du ministère de l’Intérieur ne s’appuient pas seulement sur les plaintes déposées, car cela aurait pour effet de « sous-évaluer la situation », dans la mesure où un certain nombre de faits ne sont pas assortis d’un dépôt de plainte. 

Le ministère a recensé tous types de faits : atteintes physiques, prises à partie et agressions verbales contre les élus eux-mêmes ; atteintes contre les locaux publics et privés (permanences, mairies, domicile personnel…), pouvant aller du tag à l’incendie ; et enfin les « menaces, injures et outrages écrits ou verbaux », y compris sur les réseaux sociaux. 

C’est en additionnant ces faits que le gouvernement obtient le chiffre de 2 235, dont « 7 sur 10 sont des menaces, injures ou outrages ». Les faits de violence physique restent « largement minoritaires » (160 cas en 2022) et stables par rapport à l’année précédente, mais « dans plus de la moitié des cas, ils concernent les maires et leurs adjoints, très souvent lorsqu’ils cherchent à assurer la sécurité publique ». 

Sur l’année 2022, note le ministère, les faits ont été plus nombreux lors du premier semestre, dans le double contexte de la contestation contre le pass sanitaire et des campagnes présidentielle et législatives. « Les atteintes n’ont pas d’étiquette, note enfin le ministère, et touchent les élus de tout bord. L’élu n’est pas agressé pour ce qu’il pense (…) mais pour ce qu’il est. »

Renforcement des sanctions

Quelle réponse le gouvernement va-t-il donner à cette montée en puissance des agressions contre les élus ? Dominique Faure donne de premiers éléments de réponse dans son interview à Paris Match

Le premier axe est de « renforcer les sanctions », déclare la ministre, qui se dit « en colère » face à cette situation et qui y voit « le signe d’une démocratie qui recule ». Si les textes législatifs ont déjà évolué récemment (lire Maire info du 16 novembre 2022), la ministre souhaite aller plus loin : « Je vais travailler en lien étroit avec le ministre de la Justice Éric Dupond-Moretti pour que nous réfléchissions à aligner les peines encourues pour les violences contre élus sur celles des personnels en uniforme. » C’est un changement de pied de la part du gouvernement, qui s ‘était opposé à cette mesure lorsqu’elle avait été proposée lors de l’examen du projet de loi d’orientation du ministère de l’Intérieur (Lopmi), en 2022. La ministre annonce que cette évolution se fera par une loi, « avant l’été ». 

Par ailleurs, le ministère de l’Intérieur va « créer, dans les prochains jours, une cellule d’analyse et de lutte spécifiquement dédiée à la lutte contre les atteintes aux élus ». Cette cellule « sera chargée de recenser ces phénomènes, d'analyser chaque fait, pour les prévenir et y répondre en complète coordination avec les préfectures, la police, la gendarmerie et les parquets ». 

On n’en sait pas plus, à cette heure, sur les modalités de fonctionnement de cette future « cellule », et en particulier de son articulation avec les associations d’élus.




Jeunesse
Généralisation du SNU pour les jeunes : l'empressement du gouvernement inquiète au Sénat
Promesse de campagne d'Emmanuel Macron en 2017, le Service national universel (SNU) va être généralisé à l'horizon 2024. Un rapport sénatorial démontre que ce projet de généralisation ne devrait pas se faire si rapidement, dans un contexte où les secteurs de l'hébergement et du recrutement sont en crise.

Sa généralisation était prévue pour 2026, puis le gouvernement a décidé d’accélérer le processus. En 2020, Gabriel Attal, alors secrétaire d’État chargé de la Jeunesse, avait annoncé que ce Service national universel (SNU) allait être généralisé – et donc devenir obligatoire – pour les jeunes de 16 ans dès 2024.

Après ces changements de calendrier, le public visé semble aussi avoir évolué. Selon nos confrères de Politis, le gouvernement envisagerait désormais de « généraliser le service national universel (SNU) avec une obligation en temps scolaire pour tous les jeunes en classe de seconde et en première CAP. »

Concomitamment à cette révélation, un texte présenté la semaine dernière en Commission des finances du Sénat par le sénateur de la Creuse Éric Jeansannetas suggère de reporter la généralisation du SNU et de modifier ses modalités.

Pour rappel, le SNU propose aux jeunes – pour l’instant volontaires – un séjour de cohésion d’un mois, au maximum, suivi d’une mission d’intérêt général. L’objectif selon le gouvernement : « transmettre un socle républicain, renforcer la cohésion nationale, développer une culture de l’engagement et accompagner l’insertion sociale et professionnelle. »

Même si les « retours sur la qualité du séjour de cohésion sont positifs » avec 9 jeunes sur 10 satisfaits, la mise en place du SNU, qui n’en est pour l’instant qu’au stade de l'expérimentation, a déjà « révélé des obstacles majeurs » qui vont, selon le sénateur, se dresser « devant le projet de généralisation du service national universel. »

Généralisation sur le temps scolaire 

Si rien n’est encore acté, la généralisation du SNU se ferait plutôt sur le temps scolaire. Ce scénario, qui a été présenté au sénateur par les services de la secrétaire d'État chargée de la Jeunesse et du Service national universel, est « plus réaliste » qu’une généralisation hors temps scolaire mais « suppose une articulation entre l’administration du SNU et l’Éducation nationale qui reste à construire. »

Concrètement, le SNU comporte deux phases obligatoires avec le « séjour de cohésion » (deux semaines en centre d’hébergement en dehors du département de résidence du jeune) et une mission d’intérêt général de 84 heures. Une phase facultative est aussi proposée pour 3 mois auprès d’une association ou d’une institution publique.

Éric Jeansannetas pointe cependant que le SNU risque de ne pas pouvoir « se ''fondre'' entièrement dans l’obligation scolaire. En l’état actuel du droit, dès lors qu’un voyage scolaire prévoit une nuitée, il n’est pas obligatoire d’y participer, et étendre l’obligation pourrait constituer une atteinte aux libertés individuelles. Ainsi, il est probable que la généralisation de deux semaines de séjour de cohésion en hébergement collectif, même sur le temps scolaire, suppose au moins d’adopter une loi. »

Encadrement et hébergement 

Dans son rapport, le sénateur met en avant deux difficultés majeures à la généralisation du SNU. La première :  le besoin en encadrants serait de 15 000 à 50 000 selon le scénario de généralisation choisi. La généralisation du SNU sur le temps scolaire supposerait donc « de recruter et de former des encadrants longtemps à l’avance. Une "filière" du service national universel nécessiterait ainsi plusieurs années pour être opérationnelle, et son coût serait important. Par ailleurs, les membres de l’Éducation nationale et des corps en uniforme, qui représentent pendant l’expérimentation environ 50 % des chefs de centre, ne seraient plus disponibles dans le scénario d’une généralisation sur le temps scolaire. » La mise en place d’une filière de l’’encadrement du séjour de cohésion nécessiterait plusieurs années et son coût serait important.

Deuxième difficulté : le nombre de centres d’hébergement n’est pas suffisant pour accueillir l’ensemble des jeunes et cette généralisation impliquerait une hausse substantielle des moyens dédiés à ces centres. « Alors que l’objectif est de 200 jeunes par centre, les centres capables d’héberger des mineurs disposent de 96 places en moyenne », peut-on lire dans le rapport.

Ainsi, et c’est tout l’objet de ce rapport, le rapporteur préconise le report du projet de généralisation du SNU, sans préciser de délai. Surtout que, selon le rapport, « le coût par an du SNU généralisé serait vraisemblablement supérieur à 2 milliards d’euros » en l’état actuel des choses. 

Bémol sur la mission d’intérêt général 

Sur le contenu du dispositif, le sénateur propose aussi la suppression de la phase 2 du SNU qu’est « la mission d’intérêt général ». 

Sur l’ensemble des jeunes ayant effectué le séjour de cohésion entre 2019 et 2021, on compte 11 200 jeunes ayant validé cette phase 2, « ce qui représente 53,7 % des volontaires. » « Les structures d’accueil peuvent être réticentes à accueillir des jeunes pour des durées inférieures à plusieurs mois » et « il peut être difficile pour des jeunes de trouver une mission d’intérêt général proche de chez eux, en particulier pour ceux qui vivent dans des zones rurales. »

Le sénateur défend aussi qu’un « engagement "obligatoire" est paradoxal ». Le rapporteur veut privilégier la phase 3 du SNU qui est l’engagement volontaire sur plusieurs mois. « Devenir volontaire dans une association ou accomplir un service civique pendant plusieurs mois représente toutefois un investissement en temps conséquent pour les jeunes, qui ont déjà un emploi du temps chargé dans l’enseignement secondaire. Il serait donc nécessaire de valoriser davantage l’accomplissement de la phase d’engagement volontaire sur le temps long via Parcoursup ». 
 




Culture
Festivals : la Cour des comptes critique leur gouvernance et veut conditionner les aides de l'État
La Cour des comptes recommande de réformer la gouvernance des structures organisatrices et de cibler les aides de l'Etat afin de favoriser une démocratisation culturelle qui est « en panne » dans certains événements majeurs. Plus de 7 000 festivals ont été recensés en France, essentiellement soutenus par les collectivités.

Alors que le nombre de festivals n’a cessé de croître depuis une quarantaine d’années, la Cour des comptes pointe les insuffisances de leur gouvernance et l’échec de leur « démocratisation » dans un chapitre dédié au sujet, intégré au sein de son dernier rapport annuel. Celle-ci souligne d'ailleurs que « la pandémie de la covid-19 a révélé et amplifié une certaine fragilité structurelle des festivals ».

Si l’on recense autour de 2 000 festivals en Italie, un millier en Allemagne et autant au Royaume-Uni, la France a, elle, su développer ce que la Cour appelle « un fait culturel » sans commune mesure avec ses pays voisins puisque l’Hexagone comptabilise près de 7 300 festivals sur son territoire. « Soit près de quatre fois plus que 20 ans auparavant », a calculé la Cour.

Un essor porté d’abord par les communes

Et bien que l’État ait réinvesti dans ce secteur, ces dernières années, à cause de la crise sanitaire, son soutien financier reste « mineur » par rapport à celui apporté les collectivités territoriales, à l’origine du développement des festivals. 

Estimé à 50 millions d’euros, l’effort budgétaire de l’État reste donc considéré comme « limité » puisqu'il portait sur 593 festivals en 2021, soit 8 % de l’ensemble des événements. D’autant que les aides qu’il consent sont très concentrées, les festivals d’Aix-en-Provence et Avignon ayant, à eux seuls, bénéficié de « plus du quart du financement du ministère de la Culture », notent les magistrats financiers.

À l’inverse, le soutien des collectivités territoriales est « prépondérant » et est estimé à plus de 300 millions d’euros. En se basant sur d’anciens travaux, l’institution de la rue Cambon a pu estimer que l’écart est ainsi « de 1 à 10 entre les recettes apportées par l’État et celles qui proviennent des collectivités territoriales ». Dans le détail, il serait même « de 1 à 10 s’agissant des musiques actuelles, [de] 1 à 20 pour la musique classique et [de] 1 à 9 pour le spectacle vivant ».

Qu’il soit sous forme de subventions ou de contributions en nature (mise à disposition de locaux et de lieux de représentation), ce soutien « conditionne parfois l’existence même des festivals qui en bénéficient ». 

Les premiers financeurs étant les communes, devant les régions. Un effort des communes d’ailleurs « sous-estimé » du fait de « l’absence de prise en compte des dépenses en nature, en particulier s’agissant de mises à disposition de locaux, de moyens techniques et de ressources humaines au bénéfice d’associations qui sont souvent animées par des bénévoles ».

Dans ce cadre, les magistrats financiers demandent au ministère de la Culture de « poursuivre la connaissance des moyens, financiers et en nature, du fait festivalier afin d’appréhender le réel effort des collectivités territoriales et leurs retombées économiques ». Ces dernières demeurant encore « insuffisamment mesurées pour en apprécier l’importance » sur chaque territoire.

Les auteurs du rapport reconnaissent, toutefois, que « l’important appui des collectivités territoriales aux festivals, qui a conduit l’État à intervenir de façon plus sélective pour soutenir les festivals à rayonnement national et international, a permis de rééquilibrer l’accès à l’offre culturelle sur le territoire national ». Ils rappellent ainsi que « c’est au dynamisme persistant dont ont fait preuve les collectivités locales depuis les années 1980 que le fait festivalier doit de s’être fortement diffusé » puisque « 62 % des festivals existants ont été créés après 2000, 33 % après 2011 ».

La gouvernance partagée, un « enjeu clef »

Reste que la Cour estime qu’il est nécessaire de moderniser et « réformer la gouvernance des structures organisatrices », l’objectif étant de la rendre « plus exigeante en matière de démocratisation des publics » et « mieux concertée entre les services de l’État et les collectivités territoriales concernées ».

Car, selon la Cour, le principe de compétence partagée qui régit la politique culturelle – et qui est un « enjeu clef » pour les magistrats financiers – « ne trouve pas toujours à s’appliquer de façon harmonieuse dans la constitution et le fonctionnement de leurs structures de gouvernance ». « Les statuts qui régissent certains festivals, les modalités d’exercice partagé de la gouvernance ne semblent pas toujours clairement arbitrées », observe-t-elle.

Un grief qui se fonde, toutefois, sur l’étude de seulement huit festivals, dont la représentativité doit permettre de « prendre la mesure de problématiques structurantes auxquelles leur secteur d’activité est aujourd’hui confronté », mais dont les budgets ne descendent pas en dessous des 580 000 euros (pour Les Furies de Châlons-en-Champagne) et montent jusqu’à 13 millions d’euros (festival d’Avignon), voire 22 millions d’euros (festival international d’art lyrique d’Aix-en-Provence). 

La Cour pointe également « la multiplicité d’objectifs stratégiques insuffisamment formalisés » et préconise au ministère de la Culture et aux collectivités de « mieux formaliser les objectifs attendus de chaque festival bénéficiant de concours publics, en particulier à travers les outils de pilotage et de contractualisation pluriannuelle ».

Elle recommande ainsi de recourir de « manière systématique » aux lettres de mission, conventions pluriannuelles et contrats de performance devant « prévoir de justes contreparties aux soutiens publics », « sans aller jusqu’à une clause de conditionnalité liant rigoureusement les financements à l’atteinte des cibles retenues ».

Démocratisation culturelle « en panne »

Afin également de pallier le « suivi insuffisant des objectifs poursuivis » comme c’est le cas avec la « démocratisation des publics » qui reste « en panne », les magistrats financiers invitent le ministère de la Culture et les collectivités à « mesurer les effets des mesures prises par les festivals en matière de démocratisation des publics ».

Car les festivals qui mettent en place un dispositif permettant de suivre l’évolution de leurs publics dans la durée restent « rares » et « la plupart se trouvent dans l’incapacité de vérifier s’ils contribuent par leurs activités à la démocratisation de l’accès à la culture ».

Seule exception : le festival d’Avignon, qui démontre que le profil sociologique de ses spectateurs est resté très stable depuis 2013 malgré « une politique volontaire pour rajeunir et diversifier son public ». « Les festivaliers appartiennent ainsi à des catégories sociales élevées et fortement diplômées (73 % sont au-dessus de bac + 3 et 38 % au-dessus de bac + 4) », les ouvriers ne représentant que 2,4 % des festivaliers et les employés 7 %. La part des moins de 35 ans y a même diminué de moitié entre 2014 et 2021 (passant de 32 % à 16 %).

Dans ce contexte, la Cour demande au ministère de la Culture de « s’employer à focaliser ses aides sur les festivals contribuant fortement » aux « objectifs de création artistique et de démocratisation culturelle » ou qui « s’engagent à développer des initiatives allant dans ce sens ».

Télécharger le chapitre dédié aux festivals.
 




Collectivités locales
Permis de conduire : le recours aux agents territoriaux comme examinateurs bientôt renforcé ?
Les députés de la majorité viennent de faire adopter, en commission, un texte visant à réduire les délais nécessaires à l'obtention du permis de conduire. Parmi les mesures phares de ce texte, la création d'une plateforme d'information ouverte aux collectivités et le renforcement de la possibilité d'en appeler à des agents publics pour faire passer l'examen du permis.

Dans le tumulte du débat sur la réforme des retraites, c’est une proposition de loi qui est passée plutôt inaperçue. Pourtant, hier, en commission des lois, les députés ont adopté la proposition de loi du groupe Renaissance, portée par Sacha Houlié (Vienne), « visant à faciliter le passage et l’obtention de l’examen du permis de conduire ». 

Plateforme nationale

Le député part du constat que dans certains départements, et notamment dans les territoires ruraux, la voiture individuelle « reste la seule option de mobilité ». « Pour les jeunes y résidant, l’obtention du permis de conduire automobile est le sésame vers l’émancipation et l’autonomie tant il conditionne toutes les autres possibilités. » Mais l’obtention d’un permis de conduire est devenu extrêmement chère (aujourd’hui autour de « 2 000 euros »), et soumise à des délais de plus en plus longs, du fait de la carence d’IPCSR (inspecteurs du permis de conduire et de la sécurité routière), dont Sacha Houlié définit l’indisponibilité comme « systémique ». 

L’objectif de la proposition de loi est, d’une part, de mieux faire connaitre les différents dispositifs d’aides financières, et, d’autre part, de davantage recourir aux agents publics – y compris territoriaux – pour faire passer l’examen du permis de conduire et pallier la carence d’IPCSR. 

Sur le premier sujet, Sacha Houlié propose de créer une « plateforme numérique spécifique au niveau national qui permette de recenser l’ensemble des aides financières existantes à la préparation aux examens du code de la route et du permis de conduire ». Outre les aides dispensées par l’État (permis à un euro par jour, aides pour les jeunes inscrits à Pôle emploi…), et celles des associations comme l’Agefiph pour les personnes handicapées, de nombreuses collectivités locales offrent, elles aussi, des aides financières. Mais le député de la Vienne note que « aucune obligation » n’est faite aux collectivités de publier leurs dispositifs d’aide. 

Le texte dispose donc, à l’article premier, que « l’État, les collectivités territoriales et leurs groupements rendent publics, sur une plateforme numérique nationale créée et gérée par l’État, les dispositifs de financement de la formation à la conduite qu’ils proposent aux particuliers ». En commission des lois, hier, il a été ajouté que cette plateforme devrait permettre en outre de s’inscrire à l’examen du permis de conduire.

Extension d’un dispositif existant

Reste la question des examinateurs. Face au manque d’inspecteurs, le législateur a déjà décidé – en 2015 – que des agents publics ou des contractuels peuvent être désignés par « l’autorité administrative » pour faire passer les épreuves de conduite (article L221-5 du Code de la route). Mais avec une limitation de taille : cette possibilité ne peut s’exercer que dans les départements « où le délai médian entre deux présentations d'un même candidat à l'épreuve pratique du permis de conduire (…) est supérieur à quarante-cinq jours ». 

Un décret du 29 octobre 2015 est venu compléter ces dispositions, pour fixer les règles : les agents publics ou contractuels en question doivent être âgés d’au moins 23 ans, être habilités par le ministre chargé de la sécurité routière, et surtout doivent avoir reçu « une formation initiale obligatoire » – la même que celle des IPCSR. Dans la majeure partie des cas, ces agents sont membres de la fonction publique de l’État. 

Ces dispositions, juge Sacha Houlié, sont insuffisantes. Il insiste, dans l’exposé des motifs de son texte, sur le fait que ces agents ne doivent pas seulement être recrutés dans le vivier de la fonction publique de l’État mais « potentiellement ouverte aux agents territoriaux ». Par ailleurs, il propose de faire sauter la limitation aux seuls départements où les délais sont excessifs, pour la « généraliser ». L’article 3 vise donc « à étendre de manière générale l’utilisation des agents publics ou contractuels en lieu et place des IPCSR, permettant ici le recrutement d’agents en nombre suffisant pour pallier l’actuelle carence de places disponibles ». 

Cette disposition est passée sans modification en commission. 

Le texte sera débattu rapidement en séance publique, puisqu’il est inscrit à l’ordre du jour de la séance du 27 mars. Il faudra alors vérifier si la question des éventuels surcoûts, directs ou indirects, pour les collectivités, sera mise à l’ordre du jour. 






Journal Officiel du jeudi 16 mars 2023

Ministère de l'Économie, des Finances et de la souveraineté industrielle et numérique
Arrêté du 20 février 2023 relatif au tarif réduit de taxe générale sur les activités polluantes applicable à la réception par certaines installations de valorisation énergétique des résidus à haut pouvoir calorifiques issus d'opérations de tri performantes
Ministère de la Transition énergétique
Arrêté du 18 février 2023 modifiant l'arrêté du 22 décembre 2014 définissant les opérations standardisées d'économies d'énergie

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