Édition du mardi 14 mars 2023 |
ZAN
Zéro artificialisation nette : le débat (re)commence aujourd'hui au Sénat
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Intégrant les travaux de la mission de contrôle sur l'application des objectifs de « zéro artificialisation nette », la proposition de loi sénatoriale visant à faciliter leur mise en oeuvre est, à partir d'aujourd'hui, examinée en première lecture au Sénat.
Le ZAN passionne et divise – encore. Alors qu’une proposition de loi concurrente des députés Lionel Causse et Bastien Marchive a été déposée au bureau de l’Assemblée nationale le 14 février, la commission spéciale chargée d’examiner la proposition de loi du Sénat a validé, le 8 mars, les grandes orientations du texte et ses principaux dispositifs, « en cohérence avec les grands principes défendus par son rapporteur (Jean-Baptiste Blanc) : concilier la sobriété foncière et le développement des territoires, permettre la différenciation, viser la simplification et assurer le dialogue entre les collectivités ». La promesse du ministre Christophe Béchu d’en faire une priorité par rapport au texte des députés a trouvé une première traduction : le gouvernement a accepté d’engager la procédure accélérée sur le texte sénatorial, qui pourrait ainsi revenir au Sénat « fin juin ou début juillet ».
Calendrier et gouvernance
Tenant compte des multiples auditions organisées par la mission de contrôle, le texte de la commission s’est enrichi au fil des débats. Prévoyant l’allongement d’un an du délai de modification des Sraddet, l’article 1er de la proposition de loi a été précisé par des amendements du rapporteur Jean-Baptiste Blanc. Pour l’évolution des SCoT et des PLU en application du « ZAN », le texte prévoit notamment de mener simultanément la consultation des personnes publiques associées (PPA) et du public.
Répondant à une demande récurrente de l’AMF, le texte permet en outre aux élus locaux de saisir la commission départementale de conciliation en matière d’urbanisme, en cas de difficultés autour de la modification de leurs documents d’urbanisme pour y intégrer le ZAN. Autre mesure très attendue : la proposition de loi prévoit de restaurer un rapport de prise en compte plutôt que de compatibilité, entre les documents régionaux et les documents d’urbanisme locaux – dans l’esprit de la loi Climat, « dévoyé » par ses décrets d’application.
Sur la gouvernance, le texte sénatorial conserve son dispositif de « conférence régionale de gouvernance de la politique de réduction de l’artificialisation des sols », en faisant officiellement du président de l’organe exécutif de la région le président de cette instance.
Grands projets : l’État doit prendre sa part
Quant aux grands projets, sujet très discuté, le texte soumis au débat retient que « l’artificialisation des sols ou la consommation d’Enaf, résultant de projets de construction, d’aménagement, d’infrastructures ou d’équipements d’ampleur nationale ou européenne et qui présentent un intérêt général majeur, n’est pas comptabilisée pour évaluer l’atteinte des objectifs de réduction du rythme de l’artificialisation ou de la consommation d’espaces (…). ». Sont considérés d’ampleur nationale ou européenne les projets « à maîtrise d’ouvrage directe ou déléguée de l’État ; relevant d’une concession de service public de l’État ; d’implantation d’unités industrielles valorisant l’utilisation d’une ressource naturelle renouvelable, concourant à la transition énergétique ou relevant de l’indépendance nationale ; d’agrandissement ou de création d’infrastructures ou d’équipements interrégionaux, nationaux ou européens. ». Le texte retient par ailleurs que l’État doit informer les collectivités sur l’artificialisation résultant des projets d’ampleur nationale ou européenne et d’intérêt général majeur, réalisés au cours de la décennie 2021-2031, mais aussi de la décennie passée 2011-2021. Autre complément important : les projets d’ampleur régionale seront comptabilisés de manière séparée.
Sur la territorialisation des objectifs ZAN, le texte prévoit désormais qu’« il est tenu compte des efforts de réduction de la consommation d’Enaf déjà réalisés par les collectivités compétentes en matière d’urbanisme au cours des vingt dernières années et traduits au sein de leurs documents d’urbanisme. À compter de 2031 et pour chaque tranche de dix années, il est également tenu compte de l’effort de réduction de l’artificialisation constaté au cours de la tranche de dix années précédentes. ». Objectif : mieux prendre en compte, et de manière équivalente, les efforts de réduction de la consommation d’Enaf avant 2031 et les efforts de réduction de l’artificialisation fournis à compter de 2031, dans la déclinaison des objectifs par les SCoT et les Sraddet.
Développement territorial
Autre disposition centrale du texte, l’instauration d’un « droit à l’hectare » en guise de garantie rurale. Cette mesure a suscité « quelques malentendus », selon Jean-Baptiste Blanc, qui s’est lancé, lors de la présentation de son rapport le 8 mars, dans un plaidoyer étayé pour contrer la proposition de loi portée par les députés, prévoyant un droit minimum de 1 % de la surface urbanisée. « Non, ce n’est pas une dérogation au ZAN. (…). Non, il ne s’agit pas de limiter à un ha les droits d’une commune ni d’obliger chaque commune à consommer un ha. Il s’agit d’un plancher qui sera utile seulement aux communes auxquelles aucun droit d’artificialisation n’aurait été accordé (…). Non, cette mesure ne réduit pas de manière drastique l’enveloppe d’artificialisation de la région ou du Scot (…). ».
Le texte prévoit également l’instauration d’une « part réservée au développement territorial » à définir dans le document d’orientation et d’objectifs du Scot, et dans les PLUi. Objectif : « réserver une partie de l’artificialisation ou de la consommation d’Enaf permise (…) à des projets qui revêtent un intérêt supracommunal, dont la réalisation conduirait à dépasser l’artificialisation autorisée pour la commune ou l’EPCI d’implantation (…) ».
Sur la nomenclature des sols, fixée par un décret d’avril 2022 – en cours de réécriture –, la proposition de loi du Sénat prévoit de modifier la qualification des surfaces couvertes par une végétation herbacée pour les considérer comme non artificialisées. Le texte a été précisé pour « exclure les pelouses situées sur les parcelles affectées à une activité secondaire ou tertiaire des surfaces considérées comme non artificialisées », et pour « inclure les surfaces herbacées affectées à des infrastructures de transport ». Autre ajout : le texte considère comme artificialisée « une surface dont l’état de pollution des sols est incompatible en l’état avec un usage résidentiel, récréatif ou agricole ».
Sursis à statuer, « coups partis » et chantiers
Enfin, la commission a ajouté des précisions sur le sursis à statuer spécifique au ZAN. Ce nouvel outil juridique pourra être utilisé « jusqu’à la date limite fixée pour la modification des documents d’urbanisme locaux intégrant les objectifs du ZAN, c’est-à-dire le 22 août 2028 ». Sa durée maximale est étendue à quatre ans – une demande des élus locaux pour couvrir la période de transition.
Enfin, l’article 12 bis du texte traite des projets décidés avant l’instauration du ZAN – les fameux « coups partis ». Il prévoit notamment que l’artificialisation résultant des projets réalisés au sein de ZAC, de GOU, mais aussi d’opérations d’intérêt national (OIN) décidées avant le 22 août 2021 ne soit pas imputée à la période 2021-2031, durant laquelle les projets sortiront effectivement de terre, mais à la période 2011-2021, durant laquelle ils ont été décidés.
Correction de bon sens de la loi Climat, l’article 13 de la PPL « retranche » de la consommation d’Enaf sur la tranche 2021-2031, « les surfaces des espaces urbanisés ayant fait l’objet d’actions de renaturation ». Et tient compte de la question des chantiers : « à compter de 2031, les surfaces non artificialisées utilisées temporairement pour les besoins de travaux ou d’aménagements puis restituées, dans les conditions d’origine, à la même catégorie de surface non artificialisée ne sont pas comptabilisées comme des surfaces artificialisées ».
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Décentralisation
La Cour des comptes demande la relance du mouvement des communes nouvelles
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La Cour des comptes a choisi cette année de consacrer son rapport annuel à « la performance de l'organisation territoriale de notre pays ». Avec, comme on pouvait s'y attendre, l'idée sous-jacente qu'il y aurait trop de communes en France. Analyse.Â
Quarante ans après les lois Deferre, la Cour des comptes estime que le processus de décentralisation reste « inachevé » et qu'il s’est « essoufflé ». Le rapport 2023 de la Cour des comptes fait le récit de quatre décennies de décentralisation, dont les dernières années ont été marquées par la création des super-régions, le renforcement de l’intercommunalité avec la couverture totale du territoire par des EPCI à fiscalité propre, et la loi sur les communes nouvelles de 2015.
Richesse ou « handicap » ?
Les formulations de la Cour sont claires : un chapitre du rapport s’intitule par exemple « la persistance d’un trop grand nombre de petites communes ». Ce qui, pour beaucoup, est vu comme une richesse, est perçu par la Cour comme « un handicap » : il y a 34 955 communes en France, dont la moitié compte moins de 500 habitants. Pour les magistrats financiers, « la taille des petites communes est devenue un handicap lorsque l’acte I de la décentralisation a supprimé la tutelle préfectorale et leur a confié de nouvelles compétences techniques, notamment en matière d’urbanisme ».
Les auteurs du rapport constatent que malgré la loi Pélissard du 16 mars 2015, le mouvement de fusion de communes pour constituer des communes nouvelles n’a pas fondamentalement changé la donne – bien que le nombre de communes ait diminué, depuis, de plus de 1 700. Ils citent le cas de l’Allemagne, où le nombre de communes est passé en 30 ans (entre 1960 et 1990) de 24 000 à 8 500. Ce processus a été le résultat de « fusions forcées », solution « jusqu’à présent écartée » par le législateur en France.
La Cour des comptes est obligée de le reconnaître : c’est « l’attachement des Français à leur commune » qui a empêché l’État de prendre ce type de décision. « De fait, expliquent les magistrats, la commune est le seul échelon de gestion locale qui bénéficie d’un véritable affectio societatis » (intention de s’associer pour faire société, volonté de réaliser un projet commun). « Les Français s’identifient ainsi davantage à leur commune qu’aux échelons supérieurs et connaissent mieux leur maire que le président du conseil régional, départemental ou communautaire », reconnaissent, visiblement à contrecœur, les Sages de la rue Cambon.
« Résistance des communes »
Ils constatent en revanche qu’en matière d’intercommunalité, l’État n’a pas hésité à user de la contrainte, avec l’obligation (loi RCT de 2010) de procéder à l’intercommunalisation de l’ensemble du territoire, puis avec la loi Notre de 2015 qui a fixé la taille minimale des intercommunalités à 15 000 habitants, faisant passer le nombre d’EPCI à fiscalité propre de 2 133 à 1253. Ce mouvement s’est accompagné d’une forte réduction du nombre de syndicats intercommunaux, qui a été divisé par deux entre 1992 et 2021.
Si les compétences des EPCI n’ont cessé d’augmenter, cela ne s’est pas traduit, note la Cour, par une diminution du nombre d’agents dans les communes. Les effectifs cumulés des communes et des EPCI « se sont accrus de 700 000 agents dans les 40 dernières années », semble s’alarmer la Cour des comptes. C’est une présentation quelque peu biaisée : si le chiffre semble considérable, il ne faut pas oublier que pendant ces « 40 dernières années », l’État a transféré aux collectivités un nombre considérable de compétences, et que les agents recrutés l’ont été pour exercer, précisément, ces compétences.
Les rapporteurs relèvent que le mouvement d’intercommunalisation « se heurte parfois à une certaine résistance des communes », notamment dans le monde rural. Sans compter les résultats, parfois délétères, de la création des intercommunalités « XXL », où « le territoire intercommunal paraît trop vaste pour la mise en œuvre de services publics de proximité ». La Cour rappelle comment ces difficultés (ce que l’ancien ministre chargé des Collectivités territoriales, Sébastien Lecornu, appelait « les irritants », on s’en souvient) ont conduit « à la réaffirmation par le législateur du primat de la commune », notamment avec l’instauration de la conférence des maires et le transfert « à la carte » de certaines compétences facultatives.
La Cour juge cette approche « porteuse de risques », notamment dans la mesure où « elle ne contribue pas à améliorer la lisibilité et la légitimité des EPCI ».
Communes-communautés
Le rapport de la Cour des comptes fustige « l’imbrication » des compétences entre les différentes strates de l’organisation territoriale (communes, EPCI, départements et régions), qui nuit « à la lisibilité et à l’efficacité de l’action publique ». Les rapporteurs regrettent que les collectivités ne s’emparent pas suffisamment des « outils de coopération » – notamment de la possibilité de désigner une collectivité chef de file d’une politique publique – et jugent les efforts de mutualisation « insuffisants ».
Mais la Cour n’est pas tendre non plus avec les services de l’État, parlant d’un véritable « délitement » du contrôle de celui-ci avec, d’une part, un profond affaiblissement des services techniques déconcentrés et, d’autre part, une diminution inquiétante des capacités de l’État en matière de contrôle de légalité, due notamment à la réduction drastique des effectifs des préfectures : « Dans 17 préfectures, les agents chargés du contrôle sont censés vérifier chacun plus de 2 000 actes par an, ce qui n’est pas réaliste. »
Dans les « pistes » qu’elle évoque pour « relancer la décentralisation », la Cour appelle clairement à « ne pas renoncer à réduire le nombre des communes ». Mais au moins ne souhaite-t-elle pas le faire de façon autoritaire : elle propose de relancer des « incitations » (financières, peut-on supposer) à la création de communes nouvelles. Elle se dit également très favorable au développement des communes-communautés, créées par la loi Gatel du 1er août 2019 – l’idée avait été inventée par l’AMF –, permettant à une commune nouvelle de ne pas adhérer à un EPCI de plus grande taille, et d’exercer à la fois les compétences communales et intercommunales.
Parmi les autres propositions de la Cour, on retiendra celles, visiblement inspirées des « communes-communautés », de créer des « métropoles-départements », par « absorption par la métropole, sur son territoire, des compétences du département » ; ou encore des « départements-intercommunalités », « transfert au département des compétences et ressources des EPCI ».
La contribution de l’AMF
Dans la contribution qu’elle a adressée à la Cour, l’AMF estime que « plusieurs constats relevés par la Cour des comptes rejoignent » les siens, notamment « sur l’essoufflement du processus de décentralisation et une réorganisation territoriale des services de l’État peu cohérente avec les effets de la décentralisation ». C’est la raison pour laquelle l’association « porte avec détermination le projet d’une nouvelle loi sur les libertés locales », dans le but de « revitaliser » la décentralisation.
Elle ne partage en revanche les constats de la Cour ni sur le trop grand nombre de communes ni sur « une approche rigide et tutélaire » de l’intercommunalité. Elle n’est pas non plus favorable aux « métropoles-départements » et aux « départements-intercommunalités », qui reviendraient à « éloigner les lieux de décision des habitants et écarter les maires et les communes ».
En revanche, l’AMF « constate comme la Cour le besoin d’État dans les territoires ». Plutôt que de remplacer peu à peu les services publics « par des plate-formes numériques », écrit l’AMF, « il faut réinvestir les services de l’État territorial : renforcer le nombre des interlocuteurs des collectivités et accompagner leurs projets (sur le plan technique et financier) ».
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Immigration
Politique d'intégration : le gouvernement veut renforcer le partenariat avec les collectivités locales
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Une instruction portant sur les « Priorités pour 2023 de la politique d'intégration des étrangers primo-arrivants, dont les personnes réfugiées » a été publiée au Journal officiel mercredi dernier. Le gouvernement rappelle que, pour conduire cette politique, « un partenariat fort avec les collectivités locales » est indispensable.
Gérald Darmanin, ministre de l'Intérieur et des Outre-mer, a fait connaître en février dernier les grandes orientations en matière de politique d’intégration des étrangers primo-arrivants, dont les réfugiés, dans la continuité « de la refonte de la politique d’accueil et d’intégration des étrangers dits primo-arrivants engagée depuis le comité interministériel à l’intégration de 2018. »
C’est par le biais d’une instruction, publiée récemment, que le gouvernement demande aux préfets de « favoriser l'ensemble des dispositifs qui visent à garantir la réussite des parcours d'intégration des étrangers en situation régulière sur votre territoire, dont les personnes réfugiées. » Un engagement fort des collectivités locales est attendu.
Le ministre rappelle que « l'année 2022 a été marquée par des évolutions structurantes de la politique d'intégration » avec notamment la rénovation du contrat d'intégration républicaine (CIR), l'entrée en vigueur du programme Agir (Accompagnement global et individualisé des réfugiés, en matière d’emploi et de logement) et d’autres mesures comme la mise en place de guichets uniques. Cette dynamique va être « consolidée » pour l’année 2023.
Pour rappel, « ces orientations se traduisent notamment par la mobilisation des crédits du programme 104 action 12 de manière complémentaire aux actions prévues dans le cadre du contrat d’intégration républicaine, piloté par l’Office français de l’immigration et de l’intégration, en matière de formation linguistique, de formation civique et d’orientation vers le service public de l’emploi. »
Implication des collectivités locales
Les orientations de cette politique d’intégration se traduisent avant tout localement. Ainsi, il est indiqué dans l’instruction que la mise en œuvre du programme Agir – destiné aux bénéficiaires de la protection internationale orientés par l'Office Français de l'Immigration et de l'Intégration (OFII) lors de la signature du CIR – doit continuer dans 26 premiers départements concernés en 2022, et se déployer dans « les 26 nouveaux prévus en 2023. »
Le ministre attire l’attention des préfets sur la nécessaire bonne articulation entre le programme Agir et les dispositifs existants localement, qui doit être « mise en œuvre par la signature de conventions d’articulation entre l’opérateur Agir et les acteurs de l’intégration des réfugiés ». Il est d’ailleurs précisé que « les programmes développant un accompagnement similaire à Agir présents dans le département ont vocation à disparaître ou à redéployer leurs activités vers des programmes spécifiques et complémentaires. »
Il est demandé aux préfets d’amplifier la démarche de contractualisation avec les collectivités territoriales, avec les contrats territoriaux d’accueil et d’intégration (CTAI). Le ministère indique que 45 CTAI ont été conclus ou renouvelés en 2022 avec « des collectivités territoriales de différentes catégories : des métropoles (Lyon, Strasbourg, Rennes, Bordeaux…), des villes de taille intermédiaire (Beauvais, Bourg-en-Bresse, Guingamp, Dax…) ou encore des communes situées dans des zones peu densément peuplées (Thiers dans le Puy-de-Dôme, Hirson dans l’Aisne, la communauté de communes de Saint-Cyr Mère Boitier en Saône-et-Loire…). »
Les collectivités de catégories différentes sont aussi encouragées à « mettre en synergie leurs compétences autour de l’intégration des étrangers. Par exemple, un conseil régional pourra mettre en place des actions de formation professionnelle à destination des femmes auxquelles des solutions de garde d’enfants seront proposées au niveau du bloc communal. »
Intégration par l’emploi et la langue
L’instruction réaffirme la priorité de l’intégration par l’emploi et l’apprentissage de la langue française. Il est d’abord demandé aux préfets de veiller à favoriser « une offre de formation linguistique complémentaire de celle du CIR, en adéquation avec le contexte local et les besoins des publics (adaptation des rythmes de formation, renforcement de certaines compétences linguistiques, garde d'enfants pour éviter l'absentéisme). »
Une part majoritaire des crédits qui sont confiés aux préfectures est destinée à financer des actions d'accompagnement vers l'emploi (notamment en matière de valorisation des expériences professionnelles, de préparation à l'emploi, de français à visée professionnelle, de mentorat), et des actions facilitant la mise en relation des étrangers primo arrivants et des structures qui les accompagnent avec les partenaires économiques d’un territoire.
Le gouvernement encourage aussi largement la mise en place d’actions « spécifiquement dédiées aux femmes étrangères primo arrivantes qui rencontrent des difficultés d'intégration accrues, avec un taux de chômage de 30 % et une participation moindre au monde du travail et à la société d'accueil. »
Enfin, les actions visant à renforcer les interactions entre les étrangers et la société d’accueil seront soutenues, notamment par des programmes de parrainage et de mentorat, par des actions pour faciliter l’accès au sport et à la culture et par le biais du programme Volont’R (programme de Service civique pour l’accueil et l’intégration des jeunes étrangers).
Télécharger l'instruction.
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Institutions
L'Élysée discute de l'avenir des institutions... sans l'AMF
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Le chef de l'État a réuni hier les associations d'élus pour parler de la future réforme institutionnelle. Mais sans l'AMF : son président ne pouvant être présent, l'Élysée a refusé qu'elle soit représentée par son vice-président. Une « décision anormale » et une « posture politicienne », selon David Lisnard.Â
Toutes les associations d’élus étaient réunies à l’Élysée hier pour discuter institutions… sauf celle qui compte le plus d’adhérents, à savoir l’AMF. Cette situation invraisemblable – a expliqué l’AMF dans un communiqué paru vendredi – est due au fait que le président de la République a refusé que l’association « soit représentée par un autre membre que son président ». Sauf que le rendez-vous a été donné tardivement et que David Lisnard, président de l’AMF, était retenu dans sa commune de Cannes « par un engagement antérieur et majeur ». L'Élysée a refusé de modifier la date de la réunion.
L’AMF a donc proposé d’être représentée par l'un de ses vice-présidents, Guy Geoffroy, qui participe au nom de l'AMF aux travaux du CNR. Refus de la présidence de la République. L’AMF, dans la foulée, a « déploré cette décision anormale, qui écarte l’association représentative des communes et intercommunalités de France », et David Lisnard a demandé que « le dialogue régulier avec l’exécutif (…) puisse se poursuivre hors de toute posture politicienne ».
« Passer aux actes »
Cette situation est d’autant plus étonnante que la réunion s’est tenue à la demande de Territoires unis, structure dont l’AMF est l’un des trois membres fondateurs (avec Régions de France et l’ADF).
Il s’agissait d’entendre les associations d’élus sur la réforme des institutions voulue par le chef de l’État, qui devrait prendre la forme d’un projet de loi – peut-être constitutionnel – dont les contours ne sont pas établis à ce jour. On rappellera qu’en octobre dernier, le chef de l’État avait agréablement surpris les associations d’élus en développant, dans son discours de Château-Gontier (lire Maire info du 11 octobre 2022), une vision très proche de celle de Territoires unis sur la décentralisation. Emmanuel Macron avait alors parlé « d’ouvrir le chapitre d’une vraie décentralisation », avec un partage « non seulement des compétences, mais aussi des responsabilités, des financements et des pouvoirs normatifs ». Satisfaite de ces déclarations, l’AMF avait alors déclaré qu’il était « temps de passer aux actes ».
Depuis, les réflexions vont bon train, avec un certain nombre de ballons d’essais lancés ici et là par des membres de la majorité, comme la proposition, faite par un dirigeant du parti présidentiel, de revenir sur le découpage des super-régions.
Le rendez-vous d’hier à l’Élysée entrait donc dans le cadre de ces réflexions.
Les associations demandent de la « visibilité financière »
L’Élysée n’ayant pas communiqué à la suite de cette réunion, on ne sait que ce qui a été dévoilé par les associations d’élus qui ont pu être présentes.
Côté départements, le président de l’ADF, François Sauvadet, a dit hier au moins partager un constat du chef de l’État : « Nous ne pouvons plus nous satisfaire de la situation actuelle, qui nous conduit vers une crise démocratique. » Les départements ne « demandent pas de big bang territorial », et encore moins d’un « conseiller territorial », mais de ne plus « être empêchés d’agir ». Le chef de l’État a apparemment évoqué la question de l’autonomie financière des collectivités. L’ADF souhaite, comme l’AMF, qu’elle s’assortisse d’une « autonomie fiscale ».
Côté régions, Carole Delga se félicite d’un « échange franc » : « Le président de la République a exposé des attentes pour cette réforme : plus de clarté dans les compétences exercées, plus de responsabilités données aux collectivités, c’est-à-dire davantage de moyens juridiques et financiers associés aux compétences transférées, plus de proximité dans l’élaboration des solutions mieux adaptées aux enjeux pour le pays. » La présidente de la région Occitanie abonde dans ce sens, et a demandé au chef de l’État « plus d’audace en confiant aux villes, départements et régions, de nouvelles missions claires sur trois pôles prioritaires pour la vie des Français : l’éducation et l’orientation, afin qu’aucun enfant ne reste sans perspective, le logement pour répondre au besoin urgent d’habitat, décent et durable, et les transports qui nécessitent un vaste investissement pour répondre à l’impératif de mobilité de chacun et à la crise climatique. La santé a également été un point crucial d’échange, afin de résorber les déserts médicaux et le délabrement de nos hôpitaux. »
Pour les communes, Villes de France et France urbaine ont également réagi. Johanna Rolland, présidente de France urbaine, a voulu rappeler que « la décentralisation, c’est d’abord une affaire d’état d’esprit qui ne peut se résumer à un simple mécano institutionnel de transferts de compétences ». Les collectivités ne doivent pas être « des courroies de transmission de décisions prises à Paris », selon la maire de Nantes, qui a également plaidé pour « l’autonomie fiscale » et « une visibilité financière dans la durée ».
Gil Avérous (Villes de France), a lui aussi demandé « un partage plus clair des compétences entre collectivités et État et une visibilité financière pluriannuelle », ainsi qu’un « renforcement du pouvoir des préfets » pour « incarner l’efficacité territoriale dans le couple maire-préfet ».
Sébastien Martin, enfin, au nom d’Intercommunalités de France, a défendu « l’extension du scrutin de liste et du fléchage aux communes de moins de 1000 habitants » – ce à quoi l’AMF est également favorable – et plaidé pour « la décentralisation de la politique de l’habitat ». Intercommunalité de France appelle à « un changement de modèle fondé sur la France des bassins de vie », avec la création de contrats « État-territoires » sur le modèle des Contrats de plan État-régions (CPER).
Deux autres réunions sont prévues d’ici l’été, auxquelles on peut espérer que l’AMF aura cette fois le droit de participer. Aucune date n’est pour l’instant fixée sur la présentation d’un projet de loi.
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Urbanisme
Un décret détaille les conséquences de la réforme des taxes d'urbanisme
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Dans le cadre du transfert de la gestion de la taxe d'aménagement et de taxe d'archéologie préventive à la DGFiP, le gouvernement vient de publier un décret qui liste notamment les constructions et les aménagements exonérés.
Dans un décret publié la semaine passée, le gouvernement poursuit la mise en œuvre du transfert de la gestion de la taxe d'aménagement et de la taxe d'archéologie préventive (l’ancienne composante « logement » de la redevance d'archéologie préventive) du ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires à la direction générale des finances publiques (DGFiP).
Ce texte tire ainsi « les conséquences » au niveau réglementaire de ce transfert, initié en juin dernier via une ordonnance (prise en application de la loi de finances pour 2021) et réalisé dans le cadre de la réorganisation des services territoriaux de l’État et des travaux d’unification de la gestion de l’impôt. Il détaille, notamment, les exonérations applicables aux différentes constructions et aménagements ainsi que les conditions d’instauration de la taxe d’aménagement dans différents cas.
Fonctionnement « plus simple », recouvrement « plus efficace »
Pour rappel, avant cette ordonnance, les services de la DGFiP n’assuraient que le recouvrement de la taxe d'aménagement (TAM) et de la part « logement » de la redevance d'archéologie préventive (RAP), les services déconcentrés du ministre de la Transition écologique se chargeant de leur gestion. Ce qui entraînait « une perte d'efficacité globale » et « un manque de lisibilité pour le redevable », comme l’expliquait la porte-parole du gouvernement de l’époque, Olivia Grégoire.
L’objectif de cette réforme des taxes d’urbanisme doit permettre un fonctionnement « plus simple pour les redevables » et « plus efficace pour l’administration, au service des collectivités territoriales qui en perçoivent le produit », selon les mots de celle qui est dorénavant ministre déléguée chargée des Petites et Moyennes entreprises, du Commerce, de l'Artisanat et du Tourisme. Concrètement, pour les collectivités, l'objectif est d’« améliorer l’efficacité du recouvrement de leurs recettes », leur pouvoir d’assiette et de taux, ainsi que le rythme de reversement de leurs recettes devant être « garantis ».
Le nouveau système doit ainsi « permettre une automatisation visant à accélérer les reversements de la taxe aux collectivités territoriales ». Un nouvel outil de saisie des délibérations, « assurant leur transmission automatique aux services de la DGFiP », a d’ailleurs été mis en place.
Les deux taxes se voient donc désormais appliquer les mêmes procédures que les autres impôts directs locaux, en matière de délais de prescription, de sanctions, de rescrit et de contrôle. De même, les règles relatives aux délibérations des collectivités pour ces deux taxes entrent désormais dans le cadre des délibérations fiscales.
Le transfert s'applique aux demandes d'autorisation d'urbanisme déposées depuis le 1er septembre 2022.
Exonérations
Le décret tire donc « les conséquences au niveau réglementaire » de ce transfert en rééccrivant « les règles relatives aux services compétents, au contrôle, au recouvrement applicables aux taxes d'urbanisme et [en] supprim[ant] les dispositions devenues obsolètes ou caduques dans les codes de l'urbanisme, du patrimoine et le CGI ». Il fixe, par ailleurs, « les dispositions transitoires applicables en matière de gestion du stock d'autorisation d'urbanismes déposées pour la taxe d'aménagement et la taxe d'archéologie préventive ».
Il liste ainsi les constructions et les aménagements exonérés de la taxe d'aménagement, tels que les constructions « édifiées par l'État, les collectivités territoriales et leurs groupements et exonérées de la taxe foncière sur les propriétés bâties » et celles qui le sont « en vertu d'un marché de partenariat, d'un bail emphytéotique administratif, d'un marché public ou d'une autorisation d'occupation du domaine public assortie de droits réels, qui sont incorporées au domaine de la personne publique conformément aux clauses du contrat, au plus tard à l'expiration de ce contrat ».
On peut également citer « les constructions destinées à recevoir une affectation d'assistance, de bienfaisance, de santé, d'enseignement ou culturelle, scientifique ou sportive et édifiées par, ou, dans le cadre d'un des contrats, marchés, baux ou autorisations », et qui peuvent être exonérées dans certaines conditions.
Sont, en outre, détaillées les conditions d’exonération dans les zones d'aménagement concerté, dans les périmètres délimités par une convention de projet urbain partenarial ou des opérations d'intérêt national.
Enfin, pour la détermination de la surface de la construction, le décret précise que sont déduites, à la fois, « les surfaces correspondant à l'épaisseur des murs entourant les embrasures des portes et fenêtres donnant sur l'extérieur », « les vides et les trémies afférentes aux escaliers et ascenseurs » ainsi que « les surfaces de plancher sous une hauteur de plafond inférieure ou égale à 1,80 mètre ».
Plu et territoire infra-communal
Deux nouveaux articles, intégrés au Code des impôts, précisent également les conditions d’instauration de la taxe d’aménagement.
Le premier indique que, « dans les communes qui ne sont pas dotées d'un plan local d'urbanisme ou d'un plan d'occupation des sols à la date du 1er juillet et qui approuvent, à compter de cette date, un plan local d'urbanisme et procèdent aux formalités [nécessaires] avant le 1er janvier de l'année suivante, la taxe d'aménagement […] est instituée […] à compter du 1er janvier de la deuxième année qui suit ». Le texte précise que « les communes disposant d'un plan d'occupation des sols partiel ne sont pas considérées comme dotées d'un plan d'occupation des sols ».
Le second article concerne « les secteurs de territoire infra-communal » pour lesquels « un taux de taxe d'aménagement spécifique est applicable sont définis par référence au plan cadastral à la date de la délibération les instituant ». Le décret précise ainsi qu’ils peuvent être « délimités par unités de découpage cadastral, constituées d'une ou plusieurs sections cadastrales entières, ou par unités foncières cadastrales, constituées d'une ou plusieurs parcelles entières ».
En outre, « lorsque la délibération est prise par un établissement public de coopération intercommunale ou par la métropole de Lyon, chaque secteur peut couvrir une ou plusieurs communes ou fractions de communes ».
Le décret indique qu’un secteur peut être « constitué d'une section cadastrale unique, prise dans sa totalité » et, « le cas échéant, chaque secteur infra-communal peut être défini à l'échelle de la parcelle cadastrale ». À noter qu’un secteur peut être « constitué d'une ou plusieurs parcelles, prises dans leur totalité », la limite entre deux secteurs ne pouvant traverser une ou plusieurs parcelles, « chaque parcelle ne pouvant qu'être entièrement incluse dans le périmètre d'un seul secteur ».
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Journal Officiel du mardi 14 mars 2023
Ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires
Première ministre
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