Édition du vendredi 22 juillet 2022

Finances locales
Diminution forcée des dépenses des collectivités, le retour
Mauvaise surprise, hier, avec la présentation par Bruno Le Maire du « chemin budgétaire » prévu pour le quinquennat. L'exigence de réduction des dépenses de fonctionnement des collectivités territoriales, qu'on espérait enterrée, est pourtant bien là. 

L’« effort » de plusieurs milliards d’euros sur les dépenses de fonctionnement des collectivités locales, à peine sorti par la porte, est-il déjà revenu par la fenêtre ? Il semble clairement que oui, même si les chiffres évoqués hier par le ministre de l’Économie sont inférieurs à ce qui était initialement prévu. 

10 milliards « caducs »

Dans un gouvernement, c’est toujours, au final, Bercy qui décide. Cet adage semble se vérifier une fois de plus puisque, malgré les affirmations très claires des ministres chargés des collectivités territoriales, ces derniers jours, Bruno Le Maire est bien décidé à exiger de celles-ci qu’elles diminuent leurs dépenses de fonctionnement. 

Pour rappel, pendant la campagne d’Emmanuel Macron, il avait été clairement annoncé qu’un « effort » de 10 milliards d’euros sur le quinquennat serait demandé aux collectivités pendant la mandature 2022-2027. Ce que les associations d’élus, AMF en tête, ont jugé inacceptable, au regard notamment de l’inflation et de la hausse mécanique des dépenses que celle-ci entraîne. 

Les deux ministres chargés directement des collectivités, Christophe Béchu et Caroline Cayeux, se sont montrés très rassurants sur ce sujet, dès leur prise de fonction. Mais en choisissant prudemment leurs mots. Ainsi, le 7 juillet, à l’occasion d’un déplacement en Seine-Saint-Denis, Christophe Béchu expliquait à Maire info que le chiffre de 10 milliards d’euros était « caduc », et qu’il fallait « débrancher » ce chiffre. Les mêmes propos ont été tenus, de façon « très claire », lors de la rencontre de mardi dernier entre le ministre et les associations d’élus, rapportait le lendemain le président de l’AMF, David Lisnard, à Maire info : « Le ministre a été très clair : [l’effort de 10 milliards] n’est plus à l’ordre du jour ». 

On pouvait d‘ores et déjà craindre que seul le chiffre de 10 milliards d’euros soit « caduc », ce qui pouvait laisser entendre qu’un chiffre inférieur serait brandi par le gouvernement. Mais même sur ce sujet, Christophe Béchu s’était montré plutôt rassurant, le 7 juillet, en déclarant : « Il va de soi que l’idée de penser que l’on va faire dans ce quinquennat la même chose que ce que l’on a fait dans le précédent, avec un contrat de Cahors, des objectifs, etc., n’existe pas. » 

0,5 % de baisse des dépenses de fonctionnement

« N’existe pas » ? Ce n’est apparemment pas l’avis du ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, qui a présenté à la presse, hier, les grandes lignes du « programme de stabilité » que le gouvernement va adresser, mi-août, à la commission européenne. « Objectif prioritaire » de ce plan, selon le locataire de Bercy : contenir à 0,6 % la hausse de l’ensemble des dépenses publiques. Dans la mesure où les dépenses sociales vont mécaniquement augmenter, « pour répondre aux engagements du Ségur, du plan hôpital, du plan urgence », il faudra faire des économies ailleurs, a expliqué Bruno Le Maire, c’est-à-dire au niveau des dépenses de l’État… et des collectivités locales, ajoutant : « Chacun doit être devant ses responsabilités. (…) Les collectivités locales doivent être aussi à ce rendez-vous dans l’effort de réduction des dépenses publiques. » Sauf que, rappelons-le, les collectivités n’ont aucune « responsabilité » dans le déficit abyssal des comptes publics, puisqu’elles sont dans l’obligation de voter des budgets à l’équilibre. 

Plus surprenant encore, Bercy sera plus exigeant avec les collectivités qu’avec l’État. En effet, le ministre a donné un objectif de 0,4 % par an de diminution des dépenses de l’État, mais de 0,5 % pour les collectivités. 

Les dépenses de fonctionnement des collectivités se sont élevées, en 2021, à 180 milliards d’euros, et 0,5 % représenteraient, si l'on ne tient pas compte de l'inflation, 900 millions d'euros sur cette somme.Mais il faut remarquer que, par rapport aux contrats de Cahors mis en place pendant le précédent quinquennat, l’effort demandé serait ici plus important et pourrait dépasser largement, en tendance, les 10 milliards d’euros initialement proposés si l’on compare au manque à gagner par rapport à l’inflation prévue jusqu’en 2027 (3,3% en 2023, 1,9% en 2024 et 1,75% par an jusqu’en 2027). D'ailleurs, rappelons que les contrats de Cahors n'imposaient qu'une maîtrise de la hausse de dépenses, alors qu’ici, on parle bien de baisse des dépenses. 

Objectif intenable ?

Cet objectif paraît particulièrement difficile à tenir dans une période où absolument tout concourt à une hausse des dépenses de fonctionnement : il faut rappeler que les collectivités doivent d’abord assumer la revalorisation du point d’indice, celle des catégories B et C, des secrétaires de mairie, sans parler du classique GVT (glissement vieillesse technicité).  Qu’elles font face, sans aide du gouvernement ni « bouclier tarifaire » à l’explosion des tarifs de l’énergie – encore du fonctionnement – et à celle des matières premières. Sans oublier la hausse rapide des taux d’intérêt, puisqu’il faut rappeler que le paiement des intérêts des emprunts, même lorsqu’il s’agit d’emprunt pour investir, fait partie des dépenses de fonctionnement. Et qu’enfin, n’en déplaise au gouvernement, la population continue d’augmenter, ce qui augmente mécaniquement les dépenses de fonctionnement en services publics des collectivités.

Dans ces conditions, on ne voit pas comment ces dernières vont pouvoir diminuer les dépenses de fonctionnement sans être, une fois encore, soumises au choix cornélien de devoir ou bien diminuer le niveau de service aux habitants, ou bien augmenter les impôts, ou bien renoncer à des investissements. Ce qui, du point de vue de la « relance » dont Bruno Le Maire est également ministre, n’a rien d’encourageant. 

Bruno Le Maire n'a encore rien dit des modalités pratiques de ces nouvelles exigences. On en saura sans doute davantage les 2 et 3 août, lorsque le ministre présentera son programme de stabilité, en séance publique, devant l'Assemblée nationale et le Sénat. En attendant, du côté de l'AMF, on s'interroge ce matin sur « les leviers effectifs » dont dispose le gouvernement pour parvenir à mettre en œuvre cette diminution des dépenses, au regard du principe de libre administration des collectivités territoriales. En attendant des clarifications, il reste à espérer que le gouvernement n'envisage pas une diminution de la DGF. 




Hausse des prix
Agriculteurs retraités et élus : une injustice réparée !
Les députés ont adopté, ce vendredi au petit matin, le projet de loi sur la protection du pouvoir d'achat. Au fil des débats, un certain nombre d'amendements ont été adoptés, dont certains intéressent directement les collectivités territoriales, et, en particulier, les élus agriculteurs retraités. Explications.  

Première étape franchie pour le projet de loi « portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat » : après quatre jours et autant de nuits de débats, l’Assemblée nationale a adopté le texte cette nuit, complété de 84 amendements. 

Parmi les ajouts au texte initial, on retiendra d’abord la mesure de « déconjugalisation » de l’AAH (allocation adulte handicapés) – qui avait provoqué une bronca l’an dernier au Parlement (lire Maire info du 18 juin 2021). Rappelons que jusqu’à présent, les revenus du conjoint étaient pris en compte pour le calcul du montant de l’AAH, ce qui a pour conséquence que celle-ci diminue si le conjoint dépasse un certain seuil de salaire. Cette disposition était unanimement vilipendée par les associations de défense des personnes handicapées, en cela qu’elle rend celles-ci dépendantes de leur conjoint… ou, dans certains cas, oblige les personnes à cacher leurs relations pour ne pas voir leur allocation diminuer. La majorité présidentielle, lors de la précédente mandature, s’était montrée inflexible sur ce sujet, et avait usé de tous les artifices de procédure possibles pour empêcher la déconjugalisation de l’AAH d’être votée. Un an et une majorité absolue perdue plus tard, les députés macronistes ont, semble-t-il, changé d’avis, et ont voté la mesure comme un seul homme, avec ovation debout. 

Agriculteurs retraités et élus

L’amendement qui concerne le plus directement les élus locaux a été porté par le député communiste du Puy-de-Dôme, André Chassaigne. Il permet de réparer une injustice dénoncée depuis janvier dernier par l’AMF et qui concernait les élus retraités du monde agricole. 

Une loi du 3 juillet 2020, initiée par le même André Chassaigne, a prévu de revaloriser les pensions agricoles, en garantissant un montant minimum de 85 % du smic. Mais de nombreux élus ou anciens élus ont réalisé, au début de l’année 2022, que le dispositif mis en œuvre lésait les agriculteurs retraités lorsqu’ils avaient été, ou étaient encore, élus. Les anciens élus, du fait qu’ils touchent une retraite Ircantec, voient le complément prévu par la loi réduit. Quant aux agriculteurs retraités toujours élus, ils sont encore plus désavantagés : tant qu’ils sont en fonction, ils ne pouvaient pas prétendre à la revalorisation, puisque la loi prévoit que pour y avoir droit, un assuré doit avoir liquidé l’intégralité de ses pensions de retraite. Or un élu en fonction, s’il touche des indemnités, doit obligatoirement cotiser à l’Ircantec. Une situation « particulièrement choquante », commentait dans Maire info le président de l’association départementale des maires du Cantal, Christian Montin. 

Ce deuxième cas devrait être définitivement réglé lorsque sera adopté le projet de loi sur le pouvoir d’achat, grâce à l’amendement déposé par le groupe communiste et visant à « corriger une situation profondément injuste subie par les élus locaux ». Grâce aux interpellations de l'AMF, la situation avait déjà été prise en compte par le gouvernement, puisque, par une lettre interministérielle du 25 mars, le ministre de l’Agriculture et le ministre chargé des retraites avaient demandé à l’Ircantec, à la MSA et à la Cnav de lever cette impossibilité. L’amendement adopté hier matin permet de « donner une base légale » à ces dispositions et de « garantir  aux élus locaux l’accès aux minima de pension et aux majorations de réversion du régime général et du régime des non-salariés agricoles, de base et complémentaire ». 

Plafonnement des loyers dans les ZRR 

Parmi les autres amendements que les élus doivent retenir, plusieurs concernent le logement. Rappelons que dans le texte présenté par le gouvernement, il est proposé de revaloriser les APL de 3,5 % et de plafonner la hausse de l’indice de référence des loyers également à 3,5 %. 

Les députés du groupe Liot (Libertés, indépendants, outre-mer et territoires) ont fait adopter un amendement permettant, dans les zones de revitalisation rurale (ZRR), « une modulation du plafonnement de la revalorisation des loyers », avec un plafond à 1,5 %. Dans ces zones en effet, « les tensions sur le logement sont faibles, voire inexistantes », et le revenu médian est plus faible que sur le reste du territoire. L’amendement prévoit donc que le préfet puisse décider d’un plafonnement de la hausse de l’IRL à 1,5 % en fonction du taux de pauvreté d’un territoire situé en ZRR, des caractéristiques du parc de logement social et de l’inflation constatée sur ce territoire. 

Un autre amendement du même type a été adopté pour plafonner à 2,5 % la hausse des loyers dans les territoires ultra-marins – du fait d’un « coût de la vie plus élevé qu’en France métropolitaine ». Un troisième fixe le plafond à 1,5 % pour la Corse. 

Sur la question des loyers toujours, deux amendements ont été adoptés concernant les APL. Le premier touche à la question du zonage des APL, qui devrait être « actualisé » pour tenir compte des fortes augmentations du coût du logement dans les zones littorales et de montagne : « Certaines zones très chères ne se trouvent pas dans les zones APL pertinentes, ce qui a un impact sur le loyer plafond, paramètre de dépense de l'APL, et donc sur la prestation versée », écrit la députée Renaissance de la Charente auteure de l’amendement, Sandra Marsaud. Son amendement impose au gouvernement la rédaction d’un rapport sur cette actualisation. Un sous-amendement, également adopté, demande que l’actualisation touche également les territoires ultramarins. 

Huiles alimentaires usagées : une mesure triplement intéressante pour les collectivités

Enfin, l’un des derniers amendements adoptés en fin de nuit concerne, indirectement, les collectivités : il s’agit d’une disposition portée par les députés écologistes, qui vise à légaliser l’usage des huiles alimentaires usagées (HAU) comme carburant. 

L’utilisation des HAU comme carburant ou composant de carburant est interdite en France (bien qu’encouragée par l’Union européenne), même si certains usagers y ont recours, illégalement. Le carburant issu des HAU rejette pourtant « 90 % de gaz à effet de serre en moins qu’un diesel classique », plaident les députés écologistes, et est, de surcroît, beaucoup moins cher. 

L’amendement adopté « autorise » donc, tout simplement, cette pratique (sous réserve d’une étude de l’Agence de santé, toutefois, ont demandé les députés de la majorité). 

Cette disposition est triplement intéressante pour les collectivités : premièrement, parce qu’elles auront la possibilité d’utiliser un carburant moins cher pour leurs propres véhicules ; deuxièmement, parce qu’elles sont elles-mêmes, via la restauration scolaire, « productrices » d’huiles alimentaires usagées, qu’elles pourront donc valoriser ; et troisièmement, enfin, parce que les huiles de cuisson usagées (170 millions de litres sont utilisés chaque année dans la restauration), non recyclées, posent des problèmes d’obstruction des canalisations et renchérissent le traitement des eaux usées dans les stations d’épuration. Il s’agit donc d’une mesure particulièrement vertueuse, donc on ne peut qu’espérer qu’elle subsistera dans le texte final. 




Aménagement numérique du territoire
Raccordements à la fibre : une proposition de loi pour bousculer les opérateurs
Le sénateur de l'Ain et président de l'Avicca, Patrick Chaize, a déposé mercredi dernier au Sénat une proposition de loi. Publiée hier sur le site du Sénat, elle a pour ambition de « contraindre les opérateurs à réaliser les raccordements à la fibre optique dans les règles de l'art et de sécurité » et de « garantir aux consommateurs une connexion Internet de qualité. »

Chose promise, chose due.  Après l’avoir annoncé il y a deux semaines, le président de l’Avicca, Patrick Chaize, a déposé mercredi une proposition de loi visant à assurer la qualité et la pérennité des réseaux de communications électroniques à très haut débit en fibre optique. 

Déconnexions sauvages, armoires saccagées, raccordements qui échouent : la situation actuelle du déploiement de la fibre est loin d’être satisfaisante, et ce dans de nombreux territoires. Le président de l’Avicca a rappelé lors de la conférence de presse du 7 juillet (lire Maire info du 8 juillet) que c’est « une situation qui dure depuis trop longtemps » et où les opérateurs « se regardent entre eux » et ne prennent pas l’initiative d’agir.

« On ne peut plus attendre » 

Si lors du précédent colloque de l’Avicca (lire Maire info du 3 juin) tous les acteurs de la filière ont convenu qu’il était temps de tirer des conclusions par rapport aux malfaçons et problèmes opérationnels de plus en plus graves, et de s’accorder sur la mise en place de solutions, rien n’a été fait en ce début d’été. 

Pourtant, « on ne peut plus attendre », estime Patrick Chaize qui rappelle qu’après cinq années de demandes d’intervention répétées auprès de la filière télécoms de la part des élus membres de l’Avicca, le temps est venu de « mettre la pression » sur les opérateurs, « non pas par plaisir », mais dans le but d’assurer la qualité et la pérennité des réseaux. 

Le sénateur demande, dans l’exposé des motifs de la proposition de loi, à ce que « le législateur reprenne la main » afin de mettre « un terme définitif aux pratiques actuelles, obtenir la remise en état des réseaux dégradés aux frais des responsables » et « contrôler et sanctionner tout manquement aux règles de l’art. » 

Redonner la main à l’opérateur d’infrastructures 

Le titre premier de la proposition de loi déposée par le sénateur vise à « normaliser les conditions de raccordement des utilisateurs finals aux réseaux de communications électroniques à très haut débit en fibre optique. » En effet, la répartition du travail de déploiement entre « opérateurs commerciaux, via une cascade de sous-traitants, et opérateurs d’infrastructures » est incompréhensible pour l’abonné et peut être contre-intuitive. 

Ainsi, le premier article veut redonner le pouvoir à l’opérateur d’infrastructures qui pourra contrôler les travaux de raccordements réalisés par l’opérateur commercial et même imposer des sanctions en cas de malfaçons. Il est prévu également que l’opérateur d’infrastructures mette en place « un guichet unique permettant d’assurer la prise en charge des difficultés rencontrées ». 

Une importante partie de cette proposition de loi prévoit des mesures coercitives pour « s’assurer que des éléments soient remontés par les opérateurs commerciaux auprès des opérateurs d’infrastructures. » Les rangs de sous-traitance seraient limités, les plannings d’intervention devraient être communiqués, des preuves de la bonne exécution des prestations devraient être envoyées. 

Une plus grande marge de manœuvre pour les clients 

Au titre de l’article 1, il est prévu que l’opérateur commercial remette à l’abonné un certificat de conformité, pour permettre à l’abonné de demander plus facilement réparation en cas de préjudice mais surtout pour garantir la qualité de l’intervention. 

Enfin, l’article 5  prévoit qu’en cas de coupure internet, l’abonné puisse suspendre son paiement pour l’abonnement. De plus, si les coupures se répètent, il pourra être indemnisé et résilier complètement son abonnement. 

Ce dernier article représenterait une avancée particulière pour tous les clients qui doivent faire face à des coupures prolongées d’accès à internet ou encore à des débranchements sauvages. Un maire d'une petite commune en Ardèche a par exemple récemment saisi l’AMF à ce sujet, indiquant que sa commune qui compte pas loin de 200 habitants est complètement privée d’internet depuis le 28 juin dernier.

Renforcer les pouvoirs de l’Arcep 

Patrick Chaize l’avait précisé pendant la conférence de presse : le dépôt de cette proposition de loi n’a pas pour but de marcher sur les plates-bandes de l’Arcep. Au contraire : le quatrième article  prévoit un véritable renforcement des actions du gendarme des télécoms. 

Concrètement, il est prévu d’inscrire « dans le code des postes et des communications électroniques le fait que l’Arcep et le gouvernement exercent un pouvoir de police spéciale des communications électroniques » puis de renforcer « les pouvoirs de contrôle technique de l’Arcep en matière de réseaux en fibre optique et ses pouvoirs d’astreinte et, enfin, » de lui octroyer « des pouvoirs spécifiques sur la qualité des raccordements des utilisateurs finals aux réseaux en fibre optique. »

« Veiller à la bonne utilisation de l’argent public » 

Une grande partie de la proposition de loi prévoit aussi « de garantir la bonne utilisation des deniers publics. » Patrick Chaize déplorait ce manque de suivi au début du mois : « Que le travail de raccordement soit bien fait ou pas, actuellement, l’opérateur commercial de premier rang est payé et reçoit des subventions. » Selon lui, il est donc nécessaire de « conditionner ce règlement à une garantie de résultats. »  

Par conséquent, en zone d’initiative publique, le paiement ou le versement d’une subvention à l’entreprise qui a réalisé le raccordement sera soumis à la vérification par la collectivité territoriale et/ou son prestataire de la conformité de l’installation.

Patrick Chaize a également annoncé vouloir « solliciter au Sénat la mise en place d’une commission d’enquête » dans le but notamment d’analyser « la répartition de valeur entre l’opérateur et l’entreprise qui réalise les raccordements afin de régulariser les montants de prestataires. » (lire Maire info du 8 juillet) 
 




Catastrophes
Incendies en Gironde : la solitude des élus et bénévoles, en première ligne du soutien logistique
Hébergement et ravitaillement des pompiers, information de la population, gestion des évacuations, lutte contre les reprises de feu... Les maires sont en première ligne pour soutenir les soldats du feu et leurs habitants. À Cabanac-et-Villagrains, Saint-Morillon et Saint-Michel-de-Rieufret, communes proches de Landiras où le feu a dévoré plus de 13 000 hectares de forêt depuis le 12 juillet, les élus témoignent de leur engagement. Et pointent la faiblesse du soutien de l'État dans cette épreuve. Récit.

La maire de Cabanac-et-Villagrains (33) s’effondre soudain, en larmes. Ce 21 juillet après-midi, Anne-Marie Caussé, élue en 2020, est « épuisée », a « perdu la notion du temps » depuis l’évacuation en trois temps des 2 400 habitants de sa commune, entre le 13 et le 17 juillet, devant la progression inexorable de l’incendie qui a déjà ravagé plus de 13 000 hectares autour de Landiras, depuis le 12 juillet. Cabanac-et-Villagrains fait partie des 15 communes qui ont dû être évacuées dans le sud de la Gironde. L’élue craque car elle a dû gérer, avec les membres de son conseil municipal et la gendarmerie, ces départs traumatisants, effectués en quelques heures après « un coup de fil du sous-préfet », accompagner psychologiquement les habitants, qui ont pour la plupart trouvé asile chez des amis et qu’elle tente de tenir informés de l’évolution de la situation sur la page Facebook de la mairie. Les services de la commune (dix agents « dont certains ont annulé leurs vacances et sont revenus ») se sont installés, avec les élus, dans la salle du conseil municipal de la commune voisine de Saint-Morillon qui les accueille depuis lors, mettant à leur disposition tout le matériel de bureautique nécessaire. 

La solitude des élus

Dans la commune déserte, ce 21 juillet, seuls Anne-Marie Caussé, ses adjoints et les bénévoles en charge du PC de ravitaillement des pompiers luttant sur le front de l’incendie sont présents. Avec les gendarmes, qui surveillent les maisons désertées et les voies d’accès au village. Les bénévoles (une cinquantaine d’habitants qui se relaient), gèrent les nombreux dons de particuliers et d’entreprises, les collectes effectuées auprès des supermarchés. Ils préparent quotidiennement, avec le renfort d’autres bénévoles basés dans la salle des fêtes de Saint-Morillon, des centaines de repas pour les soldats du feu. La maire de Cabanac-et-Villagrains reste sans voix devant l’élan de générosité et la mobilisation des habitants. Elle titube de fatigue mais n’a pas le temps de se reposer. Le feu, à proximité de la commune, n’est pas encore « fixé » mais il est « contenu » depuis 48 heures. L’élue coordonne donc, en concertation avec les pompiers, l’intervention des bénévoles de la défense de la forêt contre l’incendie (DFCI) chargés, 24 heures sur 24, avec le renfort de la réserve citoyenne, de l’extinction des fumerons en lisière, pour prévenir toute reprise du feu. Ce travail de veille durera plusieurs semaines, voire plusieurs mois « car le feu sommeille très longtemps sous la tourbe et le vent peut relancer l’incendie à tout moment », explique l’élue. 

En ce 21 juillet après-midi, alors que le balai des Canadair est incessant car la lutte contre les flammes continue, Anne-Marie Caussé raconte sa solitude, celle de son conseil municipal, « pour gérer tout cela », l’État étant « peu présent », euphémise-t-elle. « Tout cela » : la colère de certains habitants qui « nous crient dessus » et veulent revenir à tout prix, les soins aux animaux domestiques restés sur place, la réquisition de matériels, les personnes malades qui veulent revenir chercher leur traitement médical, le suivi des personnes âgées. « Tout cela » : les projets communaux brusquement interrompus, les nombreuses heures supplémentaires qu’il faudra régler aux agents. Et la gestion du retour des habitants : la préfecture de la Gironde procède actuellement à une analyse de la situation, secteur par secteur, et a annoncé, dans la soirée du 21 juillet, qu’une partie des habitants de Cabanac-et-Villagrains pouvaient réintégrer leur domicile.

« L’État nous a abandonnés »

Son homologue de Saint-Morillon (1 800 habitants), une commune située à quelques kilomètres, qui n’a pas été évacuée et accueille élus et agents de Cabanac, est beaucoup plus sévère vis-à-vis de l’État : « Les élus s’entraident, l’État, lui, nous a abandonnés. Je n’ai eu aucun appel ou mail de la sous-préfecture de Langon », déplore Laurence Bourgade, qui peine à contenir sa colère. Élue maire en 2018, celle qui cumule son mandat avec la direction d’une pharmacie, s’emporte finalement : « Est-il normal que le ravitaillement des pompiers en nourriture, sérum physiologique, etc., incombe à des volontaires depuis neuf jours ? Est-il normal que l’État laisse les élus gérer la logistique à l’arrière du feu, sans se préoccuper de leurs besoins éventuels, sans proposer un renfort ou simplement pour nous dire un mot d’encouragement ?  Est-il normal qu’il ne se préoccupe pas des coûts de cette gestion de crise pour le budget communal que notre communauté de communes prendra à sa charge ? Est-il normal qu’il ne nous ait délivré aucune information quand la commune était envahie par les fumées ? C’est aberrant. L’État doit faire attention aux petites communes et les soutenir », conclue-t-elle, en soulignant que « la fatigue et la déception n’altère pas [sa] fierté d’être élue ». 

À quelques kilomètres, Saint-Michel-de-Rieufret accueille, depuis le 12 juillet, près d’une centaine de pompiers venus d’Île-de-France. Ils sont hébergés dans l’église, l’école communale et la salle des fêtes. La salle du conseil municipal a été réquisitionnée pour accueillir les nombreux dons (nourriture, produits de toilette…) de la population, des entreprises, des restaurateurs et traiteurs. Une quinzaine de bénévoles, habitants de la commune et des communes avoisinantes, revêtus d’une chasuble bleue, préparent quotidiennement plusieurs centaines de repas pour nourrir les soldats du feu, lavent et font sécher leurs vêtements, et répondent à toutes leurs sollicitations. La commune accueille le PC opérationnel situé à 4 kilomètres du feu. Sur proposition du maire, Jean-Bernard Papin, au sous-préfet de Langon, elle est devenue un centre de ravitaillement des pompiers au front. « Nous avons accueilli d’un coup une centaine de pompiers ! La commune est pour eux une base arrière essentielle, témoigne l’élu. Chaque jour, un membre du conseil municipal est nommé coordonnateur des initiatives et les autres élus [arborant une chasuble jaune] participent aux multiple tâches ». Le conseil départemental a prêté un camion réfrigéré, un magasin de sport des douches de campings pour les pompiers, la Croix-Rouge des lits picots. Les élus ne ménagent pas leur peine mais déplorent « l’absence de l’État qui ne répond pas à nos questions, souligne Isabelle Courbin, première adjointe au maire. Les pompiers vont être remplacés prochainement mais nous ne savons pas combien leur succèderont, ni quand. Comment préparer les repas dans ces conditions et dimensionner les approvisionnements ? ». 

Comment gérer le long terme ?

Ce 21 juillet, la commune a reçu la visite du président du département de la Gironde, Jean-Luc Gleyze, qui écoute et partage leurs doléances : « Les maires ont un plan communal de sauvegarde. Mais là, ils doivent gérer les choses à l’échelle d’un méga-feu, et l’État n’est pas à leurs côtés ! Il faut de la méthode, de la concertation, du soutien. Or les maires sont seuls. Il faudra un gros débriefing après cette crise pour élaborer un véritable plan d’intervention État-élus », estime-t-il. Hélène Ricard, directrice de l’association des maires de la Gironde (AMG), est également présente pour apporter son soutien aux élus, prendre note de leurs demandes que le président de l’AMG, Bernard Lauret, fera remonter à la sous-préfecture. En attendant, tout le monde se mobilise. La commune « a engagé environ 10 000 euros de frais depuis le 12 juillet auxquels s’ajouteront les heures supplémentaires des agents dont certains n’ont pas pris leurs vacances », précise le maire. Un coût qu’elle assumera. Une question taraude les élus : combien de temps ce soutien logistique va-t-il durer ? Car, une fois le feu éteint, pompiers et bénévoles de la DFCI devront participer à la « garde du feu » qui pourrait s’étaler jusqu’en octobre…. « Nous sommes organisé pour 8 à 15 jours, mais après ? L’État va-t-il mobiliser l’armée pour nous relayer ? », questionne Isabelle Coubin. La commune s’inquiète car les travaux dans l’école ont été interrompus pour accueillir les pompiers. Or, la rentrée scolaire viendra vite. 

À plus court terme, le maire doit libérer la salle du conseil municipal, encombrée de victuailles et de fournitures diverses, pour… célébrer un mariage. « Car la vie continue », se réjouit Jean-Bernard Papin. Sa première adjointe, toujours souriante bien que fatiguée, se félicite pour sa part de voir la mairie « plus que jamais transformée en maison commune des habitants, des bénévoles, de toutes celles et de tous ceux qui veulent s’investir. La fraternité et la solidarité ne sont pas que des mots ! ».




Transition écologique
Fonds friches : les 264 sites lauréats de la troisième édition dévoilés
Les projets retenus pour cette édition recevront 121 millions d'euros de subventions afin de financer des opérations de recyclage de friches et de transformation de foncier déjà artificialisé. Ils doivent contribuer à recycler près de 675 hectares de friches et à créer près d'un million de mètres carrés de logements, selon le gouvernement.

Le ministère de la Transition écologique a publié, hier, la liste des lauréats de la troisième édition du fonds friches. Lancé en février dernier par l’Ademe (pour les friches industrielles et minières polluées) et les préfets de région (pour les autres friches de toute nature), ce nouvel appel à projets avait suscité plus de 1 200 candidatures pour un montant de 431 millions d’euros de subventions. 

Au final, ce sont 264 sites qui ont été sélectionnés, dont quatre dossiers en commun pour 121 millions d’euros de subventions attribuées après redéploiement des crédits des premières éditions. Une carte détaillée permet de visualiser les lauréats des trois éditions avec les montants de subvention de chaque opération, le type de projet et la surface concernée. 

Près de 1 400 projets financés depuis 2020

Les projets ainsi retenus vont contribuer à « recycler près de 675 hectares » et à « générer de l’ordre d’un million de mètres carrés de logements », dont près de la moitié de logements sociaux, mais aussi « 179 000 m² d’équipements publics et 750 000 m² de surfaces économiques dont près de 200 000 m² de surfaces industrielles », selon le communiqué du ministère.

Ce dernier précise que « près de 40 % » des projets lauréats sont inscrits dans les dispositifs « Petites villes de demain » ou « Action cœur de ville ». Ces réalisations feront également preuve d’une grande ambition de qualité environnementale au travers de labels ou certifications en ce sens, ajoute l’exécutif.

Les deux premières éditions du fonds friches avaient déjà permis de financer « 1 118 projets pour 650 millions d’euros », ceux-ci devant permettre de « recycler environ 2 700 ha de friches et générer près de 5 700 000 m² de surfaces de logements (dont un tiers de logements sociaux), plus de 4 100 000 m² de surfaces économiques (bureaux, commerces, industrie…) et plus de 3 900 000 m² d'équipements publics », rappelle ainsi le ministère dans son communiqué.

Pérennisation jusqu’en 2026 et extension ?

Mis en place en 2020 dans le cadre du plan de relance, ce fonds vise à accompagner les élus locaux dans leur politique de reconversion de friches. Avec en toile de fond l’objectif « zéro artificialisation nette » (Zan) des sols en 2050 et la réduction par deux de la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers d’ici 2032 ; alors que 20 à 30 000 hectares de ces espaces sont artificialisés chaque année, en France, et sont l’une des causes premières du changement climatique, de l'érosion et de la perte de biodiversité.

Initialement doté de 650 millions d'euros, le fonds a bénéficié d’une rallonge de 100 millions d'euros supplémentaires en début d’année « compte tenu du très grand succès des deux premières éditions et des besoins exprimés par les territoires ».

En septembre dernier, Emmanuel Macron avait d’ailleurs fait savoir qu’il souhaitait le pérenniser à l'issue du plan de relance, probablement jusqu’en 2026. Dans un rapport publié fin juin, la commission des finances du Sénat a également proposé sa pérennisation, ainsi que l’extension de son périmètre « à l’ensemble des terrains sur lesquels la construction peut se faire sans artificialisation ou avec une artificialisation très limitée n’entraînant pas d’extension urbaine »  (friches, « dents creuses » , réhabilitation de logements vacants…).

Si cela se confirme, les modalités de la pérennisation du fonds seront donc débattues, cet automne, dans le cadre du projet de loi de finances (PLF) pour 2023.

Renaturation des villes : 500 millions d’euros annoncés

En parallèle, et toujours dans le cadre de l’adaptation de la France aux conséquences du changement climatique, Elisabeth Borne avait annoncé, à la mi-juin, durant l’entre-deux-tours des élections législatives, la création d’un fonds complémentaire dédié à la renaturation des villes et des centres-villes doté de 500 millions d’euros.

Alors que les vagues de chaleur se succèdent, la Première ministre avait précisé que ce programme permettrait de « cofinancer », avec les collectivités « qui en expriment le besoin », des « îlots de fraîcheur » en ville, et plus précisément des opérations visant à constituer des « canopées urbaines » ou à « végétaliser certaines façades ».

Si « plusieurs collectivités [se] sont déjà engagées » à développer les villes avec « moins de goudron et plus d’arbres », le gouvernement avait estimé, dans son compte rendu du Conseil des ministres du 14 juin, qu’il « fa[llai]t d’évidence accélérer ». L’exécutif avait ainsi assuré qu’il sera « aux côtés de tous les maires qui veulent accélérer la renaturation de quartiers urbains ». 

Ce programme doit être lancé avec l’appui du Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (Cerema), de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe) et de la Caisse des dépôts et consignations afin d’« accompagner les collectivités locales avec des prêts adaptés ». En outre, les procédures pourraient être « simplifiées » afin de réaliser ces opérations plus rapidement. 






Journal Officiel du vendredi 22 juillet 2022

Ministère de l'Intérieur et des Outre-mer
Arrêté du 8 juillet 2022 portant reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle
Ministère de l'Intérieur et des Outre-mer
Arrêté du 9 juillet 2022 portant reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle
Ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires
Arrêté du 21 juillet 2022 portant dérogation temporaire aux règles en matière de temps de conduite et de repos pour les opérations de transport nécessaires à la lutte contre les feux de forêt en Gironde

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