Édition du lundi 18 juillet 2022

Finances locales
Augmentation du point d'indice : vers une compensation intégrale pour les collectivités ?
Contre l'avis de la majorité, la commission des finances de l'Assemblée nationale a adopté, mercredi dernier, un amendement prévoyant la compensation intégrale par l'État de l'augmentation du point d'indice dans la fonction publique territoriale. Cet amendement à 1,14 milliard sera débattu en fin de semaine en séance publique.

C’est encore une nouvelle démonstration des difficultés, pour le gouvernement, créées par l’absence de majorité absolue à l’Assemblée nationale : les oppositions se sont de nouveau retrouvées d’accord, la semaine dernière, pour imposer une mesure que la majorité présidentielle ne voulait pas : la compensation intégrale aux collectivités du coût de l’augmentation du point d’indice des fonctionnaires territoriaux. 

Qui décide paye

Cette compensation avait encore été réclamée, mardi dernier, par les élus de l’association Villes de France, devant leur ancienne présidente devenue entretemps ministre chargée des Collectivités territoriales, Caroline Cayeux (lire Maire info du 13 juillet). Depuis le mois de mars, lorsque l'augmentation du point d'indice a été annoncée, l'AMF et la Coordination des employeurs territoriaux avaient demandé « que soient dégagées de nouvelles ressources afin de préserver l’autonomie financière des collectivités » face à cette dépense nouvelle.

Caroline Cayeux, la semaine dernière, s’était dite, à titre personnel, favorable à une telle compensation, et devait en parler le même jour avec son homologue chargé du Budget, Gabriel Attal. Rien n’a filtré de leur entretien et on ne connaît pas, à cette heure, le point de vue du gouvernement sur cette question – mais on a pu constater mercredi que les députés de la majorité présidentielle, eux, sont opposés à une telle compensation. 

Chacun a en effet pu s’exprimer sur le sujet mercredi 13 juillet, lors de l’examen par la commission des finances de l’Assemblée nationale du projet de loi de finances rectificative (PLFR). 

Ce sont des députés du groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires qui ont lancé le débat en proposant un amendement visant à « assurer, pour les collectivités territoriales, une compensation à l’euro près de la revalorisation du point d’indice dans la fonction publique ». Ces députés estiment en effet, conformément à la célèbre formule de François Baroin « qui paye décide, qui décide paye », que « la décision de revalorisation est actée de manière unilatérale par l’État et s’impose aux budgets locaux », et qu’il « est donc normal que l’État assure seul le coût des décisions qu’il prend ». 

La hausse de 3,5 % du point d’indice aura un coût de 2,3 milliards d’euros par an, en année pleine, pour la fonction publique territoriale. Pour cette année 2022, la mesure ne s’appliquant que sur les six derniers mois de l’année, le coût sera de 1,136 milliard d’euros. « Avec la hausse des dépenses de l’énergie, les budgets locaux sont déjà fortement impactés et ne pourront pas faire face à ce coût supplémentaire », plaident les députés signataires de l’amendement (Bertrand Pancher, Michel Castellani et Charles de Courson). L’amendement prévoit donc de créer un prélèvement opéré sur les recettes de l’État, à hauteur de 1,136 milliard d’euros, permettant de compenser entièrement le surcoût de la mesure pour les collectivités. 

Amendement « de bon sens »

Lors de la réunion de la commission des finances, des députés de chaque groupe se sont exprimés sur cet amendement, et, de nouveau, tous les groupes d’opposition l’ont soutenu, tandis que les députés macronistes ont tenté, en vain, d’y faire barrage. 

Damien Maudet, pour la France insoumise, a soutenu « la philosophie générale de l’amendement », en expliquant que « l’État doit assumer son rôle et mettre les moyens en conséquence ». Le socialiste Philippe Brun a noté que dans la commune dans laquelle il est élu, Louviers (Eure), la facture énergétique a augmenté de « 450 000 euros ». « Il faut que l’État vienne en aide aux collectivités publiques, c’est un amendement de bon sens ». Le communiste Nicolas Sansu n’a pas dit autre chose : « L’augmentation du point d’indice est bienvenue, mais les budgets 2022 ne la prévoient pas. » L’ancien maire de Vierzon en a profité pour relayer la demande « de l’AMF et du CFL » d’une loi de finances dédiée aux collectivités. 

À droite, Véronique Louwagie, pour les Républicains, a dit sa « surprise » d’avoir constaté que dans le PLFR, « l’impact des mesures prises pour les collectivités ne soit pas du tout évoqué ». Dans son département de l’Orne, entre les mesures du Ségur, l’augmentation du prix de l’énergie, celle du point d’indice, la facture va se chiffrer à « 10 millions d’euros ». Les Républicains soutiennent donc cette compensation. À l’extrême droite enfin, Philippe Lottiaux, du Rassemblement national, a lui aussi soutenu l’amendement, en expliquant que « l’autonomie financière des collectivités locales est de plus en plus relative ».

Pour la majorité, les finances locales « peuvent encaisser » la dépense

Seuls les députés d’Ensemble (majorité présidentielle) ont combattu cet amendement, à commencer par le rapporteur du texte, le député du Gers Jean-René Cazeneuve, qui a estimé que la situation financière des collectivités leur permettait largement d’assumer elles-mêmes le coût de l’augmentation du point d’indice : « Les recettes des collectivités sont extrêmement dynamiques – que ce soit la TVA, la taxe foncière... » De façon quelque peu étonnante, le député du Gers a soutenu que cette compensation mettrait en péril l’autonomie financière des collectivités locales. Le même point de vue a été défendu par le député Pascal Lecamp, maire « pour quelques semaines encore » de la commune de Civray, dans la Vienne. « Les recettes sont bien là, en excès, le problème est qu’elles ne sont pas toujours bien réparties entre les communes et les communautés de communes. Mais ce n’est pas du ressort de notre commission. » Quant au député Renaissance du Val-de-Marne, Mathieu Lefèvre, il a estimé qu’on « ne peut pas tout demander à l’État, qui porte déjà la majeure partie du déficit public. » En fin de débat, Jean-René Cazeneuve a repris la parole pour affirmer qu’il ne fallait pas laisser croire que les finances des collectivités « seraient en péril » : « La capacité d’autofinancement des collectivités est de 45 milliards d’euros. L’impact [de la hausse du point d’indice] est de 1,14 milliard d’euros. C’est 0,5 % des recettes, il faut le ramener à sa juste proportion ! Les finances locales peuvent parfaitement encaisser cela. » 

Les députés de la majorité n’ont pas convaincu la commission, qui a voté l’amendement. 

Il reste à savoir si le vote sera le même en séance publique – où le texte sera débattu entre jeudi et vendredi prochain. Mais au vu des rapports de force, si les groupes politiques votent en séance de la même façon qu’en commission, la mesure a toutes les chances d’être adoptée. Sauf si la présidente de l’Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, comme elle en a le pouvoir, censure cet amendement au titre de l’article 40 de la Constitution, qui interdit l’adoption d’amendements lorsque ceux-ci « créent ou aggravent une charge publique ». La présidente du Palais-Bourbon a déjà fait jouer cette possibilité la semaine dernière mais, cette fois, la chose risque d’être plus difficile, dans la mesure où la charge nouvelle créée par cette compensation est compensée, précise l’amendement, par la création d’un taxe additionnelle sur les tabacs. 

Réponse, en séance, à la fin de la semaine. 




Catastrophes
Incendies en Gironde : solidarité des maires et critiques sur le manque de moyens de lutte contre l'incendie
En Gironde, où de terribles feux de forêt font rage depuis mardi dernier, la situation ne s'améliore pas malgré les efforts exceptionnels des pompiers. Alors que les maires font jouer à plein la solidarité, des voix s'élèvent pour dénoncer le manque de moyens de la sécurité civile. 

Avec 14 000 hectares de forêt déjà détruits, les deux incendies qui ravagent une partie de la Gironde autour de Landiras et de La Teste-de-Buch depuis mardi dernier s’annoncent déjà comme faisant partie des plus graves que le pays ait connu. Il suffit, pour le réaliser, de savoir que ces deux incendies ont déjà détruit une surface supérieure à celle qui brûle, en moyenne, sur l’ensemble du pays chaque année (11 000 ha). 

Incendies majeurs

Hier, alors que la situation semblait maîtrisée, les feux ont très violemment repris sous l’effet du vent, et ce sont quelque 2 000 hectares qui sont partis en fumée en seulement une heure et demie autour de La Teste-de-Buch. Ces images rappellent le dramatique incendie de 1949, à Saucats au sud de Bordeaux, à ce jour le plus meurtrier des feux de forêt qu’ait connu le pays : 50 000 hectares avaient été détruits et plus de 80 personnes avaient trouvé la mort. 

Si les incendies actuels en Gironde n’ont, pour l’instant, pas fait de victime, la plus grande inquiétude reste de mise en particulier pour la journée d’aujourd’hui, où la chaleur écrasante (on attend des pointes à 42 ° C) va s’accompagner de vents à 60 km/h. La journée de ce lundi est donc présentée comme la plus « à risque ». 

Autour de La Teste-de-Buch, tout près d’Arcachon, ce sont 4 200 ha qui ont déjà brûlé, et plus de 10 000 personnes ont dû être évacuées. Plus à l’est, autour de Landiras,  9 800 ha sont partis en fumée, annonce la préfecture ce matin, et 6 000 personnes ont été évacuées pour échapper à un incendie de 40 km de circonférence. Les moyens déployés pour lutter contre ces deux feux sont exceptionnels : 2 400 pompiers de la Gironde sont à la lutte, et 1 400 hommes supplémentaires, venus des quatre coins du pays, les épaulent. Le ministère de l’Intérieur, hier matin, a annoncé que « compte tenu de l’évolution défavorable des conditions climatiques prévue demain en Gironde et de l’imprévisibilité des feux due à des vents à 360 ° », trois avions supplémentaires seraient envoyés pour appuyer « les six déjà engagés », ainsi que 200 hommes supplémentaires avec onze camions lourds. 

« Élan de solidarité » chez les maires

Cette situation est évidemment suivie de très près à l’association départementale des maires de Gironde, dont le président, Bernard Lauret (maire de Saint-Émilion), a répondu ce matin aux questions de Maire info. Autour des foyers, les maires ont à gérer les évacuations – « évacuations des campings autour de La Teste et de villages entiers autour de Landiras », explique Bernard Lauret. « Il faut également gérer la logistique des centaines de pompiers et secouristes supplémentaires », poursuit l’élu, qui salue « l’immense élan de solidarité » des maires du département. « Nous sommes en contact permanent avec le cabinet de la préfète, qui nous a par exemple demandé de faire un appel aux dons sur les bouteilles d’eau. Très vite, le maire de la commune chargée de réceptionner les packs d’eau a dû dire ‘’stop’’, parce qu’il n’avait plus de place pour stocker ! ». Les communes ont également fourni des lits picots (lits de camp), et même « des camions frigos pour stocker les denrées destinées aux pompiers », salue Bernard Lauret, qui tient à remercier ses collègues pour cet élan de solidarité. « Comme toujours dans ces situations, les maires sont un relais extraordinaire ». 

Des moyens jugés insuffisants

Mais la solidarité qui se déploie n’empêche pas la polémique de monter sur les moyens disponibles en matière de sécurité civile. Dès samedi, le président du département, Jean-Luc Gleyze, dénonçait « une flotte de Canadair insuffisante » et un problème « d’implantation ». Gérald Darmanin a également été interpellé, ce matin, par le maire de Biganos, Bruno Lafon, sur les antennes de France bleu Gironde, qui reproche à l’État l’absence de Canadair à demeure sur l’aéroport de Bordeaux-Mérignac. Un point de vue « totalement partagé » par le président des maires de la Gironde : « Nous avons le plus grand massif forestier d’Europe… et les Canadair sont basés à Nîmes ! Il faut se rendre compte que tous les jours, les avions font la navette entre la Gironde et Nîmes où ils sont entretenus, ce n’est tout de même pas normal, alors que nous avons à proximité l’aéroport de Bordeaux-Mérignac et un certain nombre de bases aériennes militaires. »

Au-delà des maires, d’autres voix s’élèvent contre « le manque de moyens humains et techniques » de la sécurité civile, comme celle du Syndicat national du personnel navigant de l’aviation civile (SNPNAC), dont un porte-parole dénonce, ce matin, le fait que des avions, par manque d’entretien, sont « garés au parking et ne peuvent pas voler ». Le SNPNAC, il y a un an, avait déjà interpellé le gouvernement sur le manque de moyens aériens, dénonçant « une catastrophe annoncée » : fermeture de bases, non-remplacement d’appareils perdus en mission de secours, « flotte vieillissante », « intolérables immobilisations au sol d’appareils », « manque de pièces détachées »… « Notre incompréhension est totale face à la discordance voire même l’antinomie entre les discours et les actes par le manque de stratégie et d’anticipation des besoins et des moyens », écrivait en mai 2021 le syndicat.

Dans un communiqué diffusé vendredi, l’AMF a appelé l’État à « entendre la parole des maires qui appellent au nécessaire renfort des moyens aériens permanents sur place ». Plus largement, l’association estime que « ces incendies violents doivent aussi nous conduire au niveau national à nous interroger sur notre organisation de défense contre l’incendie et les moyens qui y sont consacrés ». C’est aussi le point de vue de Bernard Lauret : « Oui, il va falloir écouter les maires, qui ont les mains dans le cambouis, sur la question des moyens comme sur celle de l’entretien des forêts. » Le maire de Saint-Émilion a rencontré, hier, le président du Sénat, Gérard Larcher, qui s’est déplacé en Gironde, et lui a décrit la situation. Gérard Larcher s’est engagé à organiser au Sénat, dès que possible, une réflexion sur ces questions, par exemple sous la forme de tables rondes « dont les maires seront partie prenantes ». « Il faut gérer la catastrophe au présent, conclut Bernard Lauret, mais ensuite, il faudra en tirer les conséquences. Une situation pareille, on la vit une fois, mais on ne peut pas la vivre deux fois. »




Santé publique
Manque de personnel médico-social : le gouvernement met en place un plan d'action estival
Les établissements et services médicosociaux (ESMS) souffrent depuis longtemps du manque de personnel. À l'approche des congés d'été, ces tensions risquent de s'accroitre. Une instruction du gouvernement, publiée le 13 juillet, détaille les modalités d'une mobilisation nationale « pour assurer la continuité de service » et ce, « au plus vite », notamment dans les Ehpad.

Face au manque criant de personnel, l’été est un moment particulièrement redouté dans le secteur de la santé qui traverse une crise sans précédent depuis plusieurs années. Fermetures de lits, conditions de travail de plus en plus difficiles, services qui fonctionnent au ralenti : la situation est critique pour les établissements et services médicosociaux (ESMS), notamment les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) et les services de soins infirmiers à domicile (SSIAD) pour personnes âgées et personnes en situation de handicap.

Ainsi, le gouvernement a mis en place, via une circulaire publiée mercredi dernier, « une mobilisation nationale visant à garantir la continuité de service et le bon fonctionnement des établissements et services médicosociaux pendant la période estivale 2022. » Il est indiqué dans la circulaire que des « tensions fortes » sont à prévoir particulièrement « sur les postes d’aides-soignants et accompagnants éducatifs et sociaux », « les infirmiers diplômés d'État (IDE) et les personnels médicaux (médecins coordonnateurs d’établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) »

Les consignes énoncées dans cette circulaire ne sont pas révolutionnaires puisqu'elles reprennent en grande partie les dispositifs qui sont déployés depuis l'arrivée du covid-19 en France. Ce plan a donc davantage l'allure d'une piqûre de rappel que d'une solution construite sur-mesure. 

Des dispositifs de coordination estivale

Les agences régionales de santé (ARS) sont avant tout invitées à « réactiver ou consolider les dispositifs de coordination au niveau territorial, sur le modèle de ceux activés pendant la crise sanitaire et dans la continuité des gouvernances mises en place dans le cadre des campagnes de recrutement d’urgence. »

Pour renforcer les effectifs des ESMS, ces dispositifs de coordination « nécessiteront une organisation renforcée de l’ensemble des acteurs : secteur de l’aide à domicile, collectivités territoriales, régions et départements, autres services de l’État et fédérations du secteur social et médico-social. » 

Des mesures supplémentaires peuvent être déployées à travers ces dispositifs. Elles peuvent être prises « si nécessaire » selon le gouvernement, qui ne précise cependant pas à partir de quand ce type de décision peut être prise. 

À la recherche de personnel en urgence

Première possibilité : organiser « des « pools » de remplacement au niveau territorial, notamment en jouant un rôle d’appui aux initiatives des établissements et de leur groupement, et solliciter les différents viviers de professionnels dans une logique de mutualisation (par exemple mobiliser les aides à domicile sur leurs heures creuses dans les EHPAD). » Si cette solution d’urgence peut être rapidement mise en place, l’épuisement des personnels risque encore de s’aggraver. Le gouvernement rappelle aussi via la circulaire que les étudiants peuvent être mobilisés sur des contrats à durée déterminée (CDD) pour assurer des missions de remplacement correspondant à leurs compétences. 

Le gouvernement appelle également, en cas de situation sensible, à « innover dans les partenariats pour attirer de nouveaux viviers. » L’exemple donné dans la circulaire interpelle. Le gouvernement indique que les ARS pourront s’appuyer « sur les préfets de départements et les collectivités territoriales pour proposer des CDD en cumul d’emploi aux agents territoriaux des cantines scolaires pour les besoins de remplacement estivaux au sein des cuisines des établissements médico-sociaux et plus particulièrement des EHPAD. » Si le cumul d’emplois des agents territoriaux est autorisé, il faut cependant rappeler que les cantines scolaires font, elles aussi, face à une pénurie de personnel et que les agents des cantines ont, eux aussi, droit à une période de congés et de repos. 

La circulaire appelle également à une mobilisation renforcée des filières gériatriques en élargissant leurs « hotlines » téléphoniques pour les EHPAD. Ces hotlines, mises en place pendant la crise sanitaire permettent notamment de déterminer à quel moment l’hospitalisation est nécessaire. 

Enfin, le gouvernement conseille en cas de situation urgente de réactiver les dispositifs d’aides à la garde d’enfants et au logement comme « par exemple les dispositifs d’accueil d’enfants des personnels prioritaires des ESMS » ou « les services de l’Etat et leurs partenaires pour identifier des solutions de logement temporaire dans le parc public ou privé (Centre régional des œuvres universitaires et scolaires (CROUS), foyers de jeunes travailleurs, meublés touristiques, …). »

La direction régionale de Pôle emploi est aussi mobilisée pendant cette période pour accélérer le recrutement de personnel et participer à l’attractivité de ces métiers. 

Des dispositifs proposés aux personnels 

Entre le 1er juin et le 15 septembre prochain, un dispositif « d’incitation financière pour les personnels non médicaux de la fonction publique hospitalière exerçant dans les établissements publics de santé et établissements sociaux et médico-sociaux » est mis en place. Cette mesure prévoit « une majoration exceptionnelle des heures supplémentaires » pour les personnels non médicaux des ESMS relevant de la fonction publique hospitalière et ce « quel que soit leur service d’affectation. » 

Autre décision du gouvernement : les infirmiers remplaçants peuvent exercer en même temps que les titulaires. « Cette mesure dérogatoire est en vigueur jusqu’à la fin de l’état d’urgence sanitaire (31 juillet 2022) », peut-on lire dans la circulaire. 

Contrats de vacation et mobilisation des Dreets 

Les ESMS ont « la possibilité (…) de recourir à des contrats de vacation de gré à gré avec des professionnels médicaux et paramédicaux libéraux ou exerçant en centre de santé. » Il est précisé que dans ce cadre, « la rémunération s’effectue au forfait à la demi-journée » (c’est-à-dire quatre heures), « avec des tarifs plafond de remboursement variant selon le statut des professionnels ». Les médecins ont un forfait de 320 euros et les infirmiers 120 euros. 

La circulaire insiste aussi sur le fait que les EHPAD ont « la possibilité de recourir aux professionnels de l’hospitalisation à domicile (HAD). » Mais là encore, la solution semble mince puisque le personnel à domicile manque aussi, surtout dans les territoires ruraux, selon les observations de l'association Urmad (Unité de retour et de maintien à domicile). Même si l’urgence de la situation nécessite une mobilisation rapide, le problème ne fait qu’être déplacé pour le moment. 

Dernière recommandation du gouvernement : il a été demandé aux directions régionales de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités (Dreets) d’accélérer « le processus de diplomation » pour « permettre à un maximum de professionnels de pouvoir exercer durant la période estivale. »
 




Aménagement du territoire
Bilan France services : une dynamique encourageante mais un modèle financier à revoir, selon le Sénat
Mercredi dernier, Bernard Delcros, rapporteur spécial des crédits de la politique des territoires au Sénat, a dressé un bilan du dispositif des France services. Si apparemment « France services donne dans l'ensemble satisfaction aux usagers comme aux élus », le modèle financier de ces lieux n'est en revanche « plus soutenable » pour les collectivités.

Les France services, annoncées par Emmanuel Macron dès avril 2019, se sont rapidement déployées dans les territoires. En avril 2022, 2 197 maisons France service ont été labéllisées, dépassant donc l’objectif fixé par le gouvernement (2 000 en 2022). La mise en place de bus en complément des structures fixes a aussi été une réussite puisque 106 bus France services sont aujourd’hui déployés.

Pour rappel, les France services résultent « en partie du dispositif des 1 300 maisons de services au public (MSAP), lui-même né de la structuration au niveau national d’initiatives locales antérieures, comme l’explique Bernard Delcros, rapporteur spécial des crédits de la politique des territoires au Sénat. Il s’agit d’un réseau de services publics mutualisés devant permettre aux usagers d’effectuer différentes démarches administratives dans un lieu unique. »

Le rapporteur spécial des crédits de la mission « cohésion des territoires » de la commission des Finances du Sénat a présenté le 13 juillet les résultats de son contrôle budgétaire sur les France services avec la publication d’un rapport qui s’est notamment construit sur des retours de terrain via une consultation auprès de 500 élus locaux.

Ce bilan insiste sur l’importance « d’éviter l’essoufflement de la dynamique France services » et Bernard Delcros formule pour cela 27 recommandations.

L’AMF a été auditionnée dans le cadre de cette enquête. Constance de Pélichy, maire de La Ferté-Saint-Aubin (45) et co-présidente de la commission Aménagement, urbanisme, habitat, logement, représentait l'association et avait insisté sur la pérennisation des aides indispensables au maintien des structures et sur le besoin de créer du lien entre France services et la mairie. Elle avait également rappelé la nécessaire coordination entre les mairies et les structures France Services quand elles sont portées par les associations ou par La Poste afin de parfaire l’orientation du public. L'AMF avait aussi inidqué que l’implication des opérateurs doit être réelle pour garantir la qualité du dispositif qui ne doit pas reposer seulement sur les agents « France services ». 

Un maillage actuel insuffisant en milieu rural

Même si le rapporteur salue dans son rapport « la mise en place de bus en complément des structures fixes » c’est-à-dire les 106 bus France services aujourd’hui déployés, il pointe néanmoins « un maillage territorial à parfaire ». 

« Le réseau France services doit coller davantage à la proximité et à la réalité du quotidien des usagers », peut-on lire dans le rapport. En milieu rural, un France services « dans chaque bourg centre » serait indispensable, selon le rapporteur. 

64 % des France services sont portées par les collectivités territoriales, 18 % par La Poste, 15 % par un réseau associatif et « le reste est partagé entre l’État (1 % des France services sont localisées dans des sous-préfectures) et la mutualité sociale agricole (MSA). Le nombre de maisons et leur fréquentation connaissent également d’importantes variations selon les départements. »

Des améliorations en termes de qualité 

Pour aller « vers des maisons France services nouvelle génération », la formation et la valorisation professionnelle des agents est indispensable. « Aujourd’hui l’enjeu est de stabiliser les équipes d’accueil, de mieux les former et de mieux reconnaître ces métiers devenus essentiels », peut-on lire dans le rapport. Les conseillers numériques doivent aussi être pérennisés car ils jouent un rôle « essentiel en faveur de l’inclusion numérique. » 

Le sénateur insiste aussi sur le besoin de « consolider le cadre existant » notamment avec le développement de nouveaux services en partenariat avec les neuf opérateurs déjà présents et avec de nouveaux opérateurs comme par exemple le réseau France Rénov’, « pour lequel le besoin d’accompagnement est très grand. »

Enfin, comme de nombreux acteurs sont impliqués dans le programme France services, « l’ANCT doit formaliser un cadre départemental d’animation en s’inspirant des bonnes pratiques dans certains départements » et en développant « un lien étroit avec les communes, notamment en maintenant un contact continu avec les secrétaires de mairie, qui constituent historiquement le premier relais de services publics de proximité. »

Une participation financière de l’État jugée « insuffisante »

De nombreux paramètres sont à réviser sur le plan financier notamment du côté de la participation de l’État et du mode de calcul des contributions. Il est rappelé qu’actuellement, « chaque France services est financée par un forfait de 30 000 euros par an et par maison. Ce financement s’appuie sur le fonds national d’aménagement et de développement du territoire (FNADT) et sur le fonds national France services (FNFS). »

Problème : le coût de fonctionnement annuel moyen d’une maison France services est d’environ 110 000 euros et 150 000 euros pour les France services postales. « Le reste à charge moyen pour les porteurs de projet, une fois décompté le forfait de 30 000 euros, est donc de 80 000 euros par an et par maison. En d’autres termes, le forfait finance actuellement à peine plus du quart du coût de fonctionnement réel d’une maison France services. Il n’a pas évolué depuis les MSAP, alors même que le coût de fonctionnement des maisons est nettement supérieur en raison d’un cahier des charges beaucoup plus exigeant. »

Cette politique France services est donc essentiellement à la charge des collectivités territoriales, ce qui « n’est plus soutenable pour les porteurs de projet, notamment pour les collectivités rurales qui assurent parfois le fonctionnement et le financement de plusieurs maisons en raison de la faible densité de population et de l’étendue de leur territoire, alors même que leurs capacités financières sont souvent les plus faibles. »

Bernard Delcros appelle donc l’État à mieux accompagner les collectivités « pour atteindre l’ambition du programme France services » et propose concrètement que « la participation cumulée de l’État et des opérateurs nationaux devrait être portée à 50 % du coût minimum d’une maison France services, soit 50 000 euros par maison. » 
 




Outre-mer
En Outre-mer, la pauvreté est 5 à 15 fois « plus fréquente » qu'en métropole, selon l'Insee
Près de 18 % des Français en grande pauvreté résident en Guadeloupe, Martinique, Guyane et à La Réunion. Pourtant ces territoires ne représentent que 3 % de la population française. Les familles monoparentales, les chômeurs et les retraités sont particulièrement touchés.

La pauvreté est « cinq à quinze fois plus fréquente » en Outre-mer qu'en métropole, d’après une étude de l'Institut national de la statistique (Insee), publiée la semaine dernière, qui a analysé la situation des personnes vivant en logements ordinaires (et non en habitat mobile ou sans domicile) en 2018 dans les quatre départements ultramarins dits « historiques » : la Guadeloupe, la Martinique, La Réunion et la Guyane.

Plus des deux tiers des Guyanais sont pauvres

Ce dernier département a les indicateurs les plus inquiétants puisque près de 70 % des Guyanais sont considérés comme pauvres, c’est-à-dire cumulant faibles revenus et privations de certains biens de première nécessité. Parmi eux, 29,1 % subissent une situation de grande pauvreté* et 40,2 % connaissent une situation de pauvreté*. Seul moins d’un Guyanais sur trois n’est donc pas considéré comme pauvre.

Dans les trois autres départements étudiés, la part des personnes vivant en situation de grande pauvreté est de 10 % en Martinique, de 12 % en Guadeloupe et atteint 14 % à La Réunion… contre 2 % en France métropolitaine. Dans chacun de ces départements, une minorité de personnes n’est pas considérée comme pauvre (moins de 50 % de la population), contre près de 80 % en France métropolitaine. 

Au total, près de 18 % des Français en grande pauvreté résident dans ces DOM, alors que ces territoires ne représentent que 3 % de la population française, constate l'Insee. 

Une précarité « plus intense » qu’ailleurs

La grande pauvreté est aussi « plus intense » dans les DOM historiques qu'en France métropolitaine, le niveau de vie des personnes dans cette situation étant plus bas, et là encore de manière particulièrement marquée en Guyane. 

« En Guadeloupe, en Martinique et à La Réunion, la moitié des personnes vivant en logement ordinaire en situation de grande pauvreté ont un niveau de vie inférieur à 700 euros par mois, soit 1 400 euros de revenu disponible pour un couple avec deux enfants de moins de 14 ans », explique l’Insee, qui précise qu’en métropole, elles « ne sont qu’un quart dans ce cas ». En Guyane, le niveau de vie médian de ces personnes chute à 470 euros par mois, soit moins 1 000 euros de revenu disponible pour un couple avec deux enfants. 

En matière de privation matérielle et sociale, près de la moitié des Guyanais en situation de grande pauvreté cumulent plus de 10 privations sur les 13 observées, contre moins d’une personne sur cinq en France métropolitaine et dans les autres DOM historiques.

Familles monoparentales, retraités et personnes seules

Là où les ultramarins et les métropolitains se rejoignent, ce sont sur les catégories de personnes touchées : les familles monoparentales, les ménages dits complexes (foyers regroupant plusieurs familles ou générations) et les personnes seules. 

Mais en Outre-mer, la part de ces foyers considérée comme pauvre est bien plus importante. Ainsi, lorsque 32 % et 24 % des familles monoparentales de Guyane et de La Réunion sont en grande pauvreté, elles ne représentent « que » 5 % dans l'Hexagone. 

À noter que les enfants sont « un peu plus souvent » en situation de grande pauvreté dans les DOM que l’ensemble de la population : de 12 % en Guadeloupe à 36 % en Guyane. « Ils vivent plus souvent dans une famille monoparentale ou un ménage complexe, contrairement à ceux de France métropolitaine qui vivent très majoritairement dans un ménage composé d’un couple », indiquent les auteurs de l’étude. 

« Quel que soit le type de ménage, l’absence d’emploi d’un adulte aggrave fortement la situation », expliquent-t-ils, rappelant que « le chômage et l’inactivité (hors étudiants et retraités) sont très répandus dans les DOM ».

Par ailleurs, les retraités d'Outre-mer sont également davantage en situation de grande pauvreté qu'en métropole. Si 9 % des retraités martiniquais et 15 % des retraités guyanais sont pauvres, Il sont seulement 1 % en métropole. 

Des privations de nourriture et de vêtements

La privation matérielle et sociale y est également « de trois à cinq fois » plus fréquente, « y compris pour des besoins fondamentaux comme la nourriture ou l’habillement pour quatre à huit personnes sur dix en situation de grande pauvreté », constate l’Insee. 

Dans les foyers ultramarins les plus pauvres, l’impossibilité d’acheter des vêtements neufs touche ainsi six à huit personnes en grande pauvreté dix et la difficulté à pouvoir faire « un repas contenant des protéines » au moins tous les deux jours atteint quatre à cinq personnes sur dix en situation de grande pauvreté.

Cependant, à l’exception de la Guyane, le renoncement à la voiture est, lui, moins fréquent qu’en France métropolitaine. De la même manière, l'impossibilité de disposer à son domicile d'une connexion personnelle à internet par manque de moyens financiers est « l’une des privations les moins fréquentes, voire la moins fréquente en France métropolitaine, à La Réunion et en Martinique ».

Télécharger l’étude.

*Une personne est en situation de grande pauvreté si elle est à la fois en situation sévère de pauvreté monétaire (niveau de vie inférieur à 50 % du niveau de vie médian français) et de privation matérielle et sociale (au moins sept privations sur 13). La pauvreté, elle, se définit par « une pauvreté monétaire à 60 % du niveau de vie médian et/ou au moins cinq privations matérielles et sociales sur 13, hors grande pauvreté ».
 






Journal Officiel du dimanche 17 juillet 2022

Ministère de l'Intérieur et des Outre-mer
Arrêté du 15 juillet 2022 relatif au compte financier unique pour les collectivités territoriales et les groupements de moins de 3 500 habitants, admis à l'expérimentation de ce compte
Journal Officiel du samedi 16 juillet 2022

Ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires
Décret n° 2022-1008 du 15 juillet 2022 portant diverses mesures relatives aux dotations de l'Etat aux collectivités territoriales, à la péréquation des ressources fiscales, à la fiscalité locale et aux règles budgétaires et comptables applicables aux collectivités territoriales

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