Édition du mercredi 17 novembre 2021

Congrès des Maires de France
L'au-revoir de François Baroin aux congressistes de l'AMF
L'assemblée générale du congrès de l'AMF, a été l'occasion d'un discours en forme d'au-revoir de François Baroin, le président sortant de l'association, et d'un hommage appuyé de son premier vice-président délégué, André Laignel. 

Affluence des grands jours, hier après-midi, pour l’assemblée statutaire de l’AMF, dernière de la direction sortante. L’après-midi a d’ailleurs été marqué par une séance électorale, lors de laquelle les deux candidats à la présidence de l’AMF, Philippe Laurent et David Lisnard, ont fait un discours devant les congressistes pour présenter leur programme et leur vision. À l’issue de la séance, le scrutin a été ouvert, et sera clos aujourd’hui à 15 heures. Rappelons que cette année, le vote est entièrement dématérialisé, et que peuvent y participer tous les adhérents de l’association à jour de leurs cotisations, qu’ils soient congressistes ou non. 

On devrait connaître aux alentours de 15 h 30 ou 16 heures, cet après-midi, le nom du prochain président de l’association, ainsi que la composition des deux instances dirigeantes de l’AMF, le bureau et le comité directeur, élues au scrutin proportionnel. 

Les maires dans les crises

Le premier vice-président délégué de l’AMF et maire d’Issoudun, André Laignel a commencé son traditionnel discours par un affectueux hommage à François Baroin, estimant que les sept années passées auprès de lui ont été « les plus riches de (sa) vie politique et civique ». André Laignel s’est félicité de ce que le tandem qu’il a constitué avec François Baroin ait garanti « l’unité de l’AMF », de faire de l’association à la fois « une force de proposition et de résistance » exerçant, selon le mot de Tocqueville, « son droit aux résistances honnêtes et aux rebellions légitimes ». 

Rappelant les crises successives traversées par le pays – attentats, Gilets jaunes, épidémie de covid-19 – André Laignel a constaté qu’une partie d’entre elles ont révélé « une rupture du dialogue entre la base et le sommet ». L’épidémie a marqué, selon lui, « la faillite de la technocratie des ARS, incapables de répondre aux attentes ». « Masques, tests, vaccination, c’est nous, les maires, qui avons répondu aux attentes, nous avons été le premier recours et le dernier espoir ». 

Le maire d’Issoudun a tour à tour fustigé « la stigmatisation » dont les maires ont été victimes de la part de l’État, la « recentralisation » rampante, les élus « vus comme de simples exécutants », voire « des figurants », les conséquences financières de la crise du covid-19 pour les collectivités et la très insuffisante compensation de l’État, qui a conduit à « une baisse faramineuse » des capacités d’autofinancement. 

« La libre administration est en guenilles, a conclu André Laignel. L’autonomie financière et fiscale des communes est un fantôme, la Constitution est bafouée. Je propose que la nouvelle direction de l’AMF interpelle le Conseil constitutionnel sur le sujet. »

« Nous serons là »

Très ému, le président sortant François Baroin a ensuite pris la parole pour un discours d’au-revoir aux congressistes – puisque le discours de clôture, demain, sera tenu par le nouveau président. « La responsabilité de président de l’AMF est peut-être la plus belle que j’ai exercée en trente ans au service de la vie publique ». Le maire de Troyes a rappelé qu’il avait fait le choix d’accepter la proposition de Jacques Pélissard de prendre la tête de l’AMF parce qu’il « ne supportait plus de voir matin, midi et soir des gens qui n’ont jamais exercé la moindre responsabilité nous expliquer qu’il y avait trop de communes et qu’il fallait en supprimer la moitié ».

Rendant, à son tour, un hommage appuyé à André Laignel, François Baroin a rappelé les batailles communes menées ensemble : contre l’élection au suffrage universel direct des conseillers communautaires, contre la baisse des dotations… puis, en 2017, alors que l’AMF n’avait « aucune prévention contre le nouveau gouvernement », une série d’épisodes qui ont conduit l’AMF non à « attaquer » mais à agir « en légitime défense ». 

Pourtant, « quand l’État a été en difficulté face aux Gilets jaunes et qu’il a appelé les maires à l’aide, nous avons dit : ‘’Nous serons là, M. le président’’, et nous avons été les acteurs de la restauration du dialogue ». 

De même pendant l’épidémie, « ce sont les maires qui ont été à la manœuvre », « lorsqu’il a fallu organiser la logistique, sur les masques, lorsqu’il a fallu organiser les centres de tests. » « Quand nous avons proposé d’organiser les vaccinodromes, on nous a répondu : pas besoin. On a vu ce qu’il en a été deux mois plus tard… ». 

Une loi de libertés locales

À l’issue de ces crises, « comment ne pas réfléchir à une nouvelle organisation locale, notamment sur le système de santé ? Il faut réfléchir à la question du patrimoine hospitalier, il faut rétablir les conseils d’administration dans les hôpitaux, il faut transférer le médico-social à 100 % aux départements ! Mais plus généralement, sur tous les services publics de proximité, un véritable transfert de compétences doit être organisé ». Une fois encore, mais en guise cette fois de dernier message, le maire de Troyes a demandé « une grande loi de libertés locales, pour que l’État « puisse se remuscler là où on l’attend, sur le régalien. » 

Concluant son discours sous de longs applaudissements debout du congrès, François Baroin, qui restera maire de Troyes et président de l’association départementale des maires de l’Aube, a terminé son discours avec le sourire, en glissant aux congressistes : « Je ne serai jamais loin. »  
 




Congrès des Maires de France
Incertitudes sur l'amélioration des finances locales, selon l'AMF
Face à l'optimisme gouvernemental, l'AMF a largement relativisé l'amélioration annoncée des finances des collectivités. Elle s'inquiète notamment des nombreuses incertitudes qui pourraient peser sur la reprise des investissements.

« La situation n’est pas catastrophique, mais on ne peut pas dire que tout va très très bien. On aurait tort de croire que la situation financière des collectivités est florissante. » C’est le message, en substance, qu’a, une nouvelle fois, voulu faire passer l’AMF à l’occasion de la présentation, hier, de son étude (réalisée avec la Banque des Territoires) sur l’impact de la crise sanitaire sur les équilibres financiers des communes et des intercommunalités en 2020. 

S’opposant au bilan « optimiste » de la crise sur les finances locales présenté par l’exécutif et la majorité parlementaire, l’AMF a exposé sa propre analyse de la situation et estimé que l’impact a été loin d’être négligeable sur le fonctionnement des collectivités locales.

Pour preuve, le premier vice-président délégué de l’AMF, André Laignel, a rappelé que « le coût global de la crise en 2020 pour l’ensemble des collectivités a été de 5,1 milliards d’euros tandis que la compensation de l’Etat a été de 440 millions d’euros. Ce sont ces chiffres qu’il faut mettre en relation ». 

Effet de ciseaux inédit

In fine, l’année 2020 a été « une année inédite car rien n’a ressemblé à une première année de mandat ». Et à année inédite, effet de ciseaux « aux caractéristiques inédites », expliquent les auteurs de l’étude. 

L’autofinancement du bloc communal a ainsi reculé de 5,53 %. Un recul plus important encore que celui intervenu en 2008 et qui avait chuté de 4,9 %. De la même manière, l’épargne nette a baissé de 8 % l’an passé, contre 6 % en 2008.

En cause, des recettes de fonctionnement qui ont baissé (de 0,9 %) et des dépenses de fonctionnement qui ont globalement stagné par rapport à 2019. Un phénomène atypique puisque, habituellement, les dépenses de fonctionnement augmentent plus vite que les recettes lors d’une première année de mandat, comme c’était le cas en 2008. 

En 2020, les pertes de recettes ont ainsi représenté plus de 1 milliard d’euros pour les communes et les EPCI, et se sont concentrées sur les produits de services (- 3,2 milliards d’euros). La situation est d’autant plus singulière que « sur les quatre derniers mandats, c’est la première fois que les recettes de fonctionnement accusent une diminution nette en première année de mandat » . Une baisse qui a été particulièrement importante pour les communes de plus de 100 000 habitants, et à laquelle seules celles de moins de 500 habitants ont échappé (voir également l'analyse par strate démographique).

« On nous disait il y a quelques mois “vous exagérez”, malheureusement non, nous n'exagerions pas. Les chiffres confirment bien ce que l’on disait », a rappelé André Laignel. « La réalité, c’est que l’Etat a beaucoup fait pour les entreprises, pour la protection sociale, sur tout un ensemble de domaines… mais les seuls qui n’ont pas bénéficié de la sollicitude de l'Etat à un niveau normal, ce sont les collectivités territoriales », a estimé le président du Comité des finances locale (CFL).

« À partir du moment où nous avons un effet de ciseaux, une baisse de moyens de fonctionnement, c’est l’investissement qui est la variable d’ajustement. Nous n’avons plus d’autre choix que de ralentir l’investissement », a expliqué le maire d’Issoudun. Résultat, les dépenses d’investissement des communes et des EPCI ont chuté de 14,5 % (dont près de 18 % pour les communes). Cette baisse de 5,27 milliards d’euros « dépasse largement les niveaux habituellement constatés en première année de mandat », puisqu'elle est « deux fois plus forte que celles de 2008 et 2001 », indiquent les auteurs de l’étude.

Incertitudes

De son côté, André Laignel a rappelé que la crise a frappé davantage les villes et bourgs-centres. « Plus vous avez des niveaux d’équipement, plus vous êtes touché par la crise. Or, ce sont eux qui sont les premiers investisseurs. On peut donc s’interroger sur leur capacité d'investissement ».

La hausse attendue des investissements en 2021 sera-t-elle ainsi suffisante pour combler la baisse de 2020? Rien n’est moins sûr. D’autant que si la reprise se rapproche de son niveau de 2010, il faut la nuancer : « Si l’on intègre l’inflation, on constate qu’on serait finalement deux milliards d’euros en deçà du niveau de 2010, soit à peu près 10 %. Et encore davantage si l’on prend en compte la croissance démographique », a tempéré Luc Alain Vervisch, directeur des études de la Banque postale.

En outre, plusieurs incertitudes pèsent sur les ressources nécessaires à l’investissement. « Les incertitudes économiques, sanitaires, réglementaires induisent de nouvelles modifications dans la répartition des ressources à venir ; elles sont de nature à freiner le développement des investissements », rappellent les auteurs de l’étude. 

Des incertitudes sur les recettes qui se multiplient, selon Philippe Laurent, coprésident de sa commission des finances de l’AMF, avec la question de la réforme de la taxe d’habitation qui n’est « pas totalement réglée »  (« 6 000 communes n’ayant pas reçu de compensation intégrale » ), les craintes autour d’une éventuelle réforme de la taxe foncière ou encore la diminution du niveau de participation des départements au financement des investissements communaux et intercommunaux. Et le secrétaire général de l’AMF d’évoquer également la revalorisation de la rémunération des agents de catégorie C qui pourrait se faire ressentir sur les dépenses.

A ses yeux, « si l’on veut garder le niveau de service public actuel, créer de nouveaux équipements et rénover les autres, on ne peut pas échapper à une mise à plat de tout le système des finances publiques dans le but d’obtenir un partage des ressources publiques ».

En outre, les communes doivent composer avec une augmentation de l’indice de prix des dépenses communales (de 1,12 % à la fin du premier semestre 2021) « presque trois fois supérieur à l’inflation supportée par les consommateurs ». « Cette situation est à surveiller : il ne faudrait pas qu’elle réduise l’impact de l’effort budgétaire engagé en matière d’investissement ; ou plus spécifiquement, qu’elle vienne amputer l’accompagnement de la relance (en provoquant, couplée à des difficultés d’approvisionnement, des reports voire des arrêts des chantiers) et remettre en cause la qualité des services publics assurés par l’échelon local », met en garde La Banque postale dans la dernière mouture de son panier du maire.

Un point positif toutefois : « Il semble que l’année 2021 soit marquée par une amélioration. Cela reste à confirmer, mais on retrouve les tendances normales du cycle électoral » a nuancé Gisèle Rossat-Mignod, directrice réseau de la Banque des Territoires, qui a souhaité aussi voir « le verre à moitié plein ».
 




Congrès des Maires de France
Confiance et solidarité territoriale, clefs de réussite de la transition énergétique
Un forum s'est tenu hier afin de valoriser les outils à disposition des collectivités pour mener à bien leur politique de transition énergétique. Sans verser dans les polémiques actuelles sur les différentes technologies. 

Premiers touchés, les maires partagent, unanimement, la nécessité de répondre à l’urgence climatique. Alors que les réunions au sommet, les chiffres et les rapports alarmants se multiplient, et devant le « maquis » d’outils et de structures parfois inadaptés aux spécificités de leur territoire, les élus peuvent se sentir démunis – bien qu’emplis de bonne volonté. Traduire les discours en actes : tel était donc l’objet du forum du 16 novembre, dédié à la transition énergétique des territoires, co-présidé par Michaël Weber, maire de Woelfling-lès-Sarreguemines (Moselle), président de la fédération des parcs naturels régionaux, élu référent énergies renouvelables de l’AMF, et Guy Geoffroy, maire de Combs-la-Ville (77), président de l’Association des maires et présidents d’intercommunalité de Seine et Marne, et des Éco maires.

Information des élus 

« Chacun, à sa place, peut trouver des solutions, quelle que soit l’échelle de territoire », indique immédiatement Michaël Weber, « la question est de savoir comment ». Car les outils, y compris financiers, existent – et semblent se renforcer : le plan de relance a récemment injecté 950 millions d’euros, via un fléchage de la Dsil, pour encourager la mise en place de politiques énergétiques à l’échelle des collectivités. Mais ils restent souvent ponctels et méconnus, notamment en zone rurale, où les moyens budgétaires et en ingénierie sont extrêmement contraints. C’est pourquoi la solidarité territoriale est essentielle, a relevé Michaël Weber. « Nous avons besoin d’un rapport de confiance entre territoires ruraux et territoires urbains », pour partager bonnes pratiques et savoir-faire.

Guillaume Perrin, président de la Fédération nationale des collectivités concédantes et régies (FNCCR), coordinateur du Programme ACTEE sur la rénovation énergétique, partage ce constat : « difficile pour les communes rurales de s’y retrouver dans la multitude des dispositifs ». Sujet politique et transpartisan par excellence, les territoires ont tout intérêt à poser un diagnostic de leur vulnérabilité face aux bouleversements à venir, et à réfléchir aux moyens d’action dont ils peuvent se saisir. « Avec la pandémie, la prise de conscience de l’urgence climatique s’est accrue, et un phénomène d’exode urbain s’est produit. Un projet politique solide en faveur de la transition énergétique peut être un critère dans le choix des citadins souhaitant s’installer hors les villes ». 

Agir en interne, décloisonner, instaurer un dialogue entre services, c’est ce qu’a mis en place Pierre Sanier, maire de Bû (Eure-et-Loire, 1200 hab.) récemment mis en lumière dans le cadre des prix RMC. Tous les agents ont été mobilisés pour participer à la transition énergétique de la commune, au delà des seuls services techniques. En valorisant les compétences des agents pour rénover les bâtiments, installer des pompes à chaleur, et en sensibilisant les habitants, le maire est parvenu à faire 50 % d’économies sur son budget de fonctionnement, avec pour corollaire d’augmenter la capacité d’investissement de la commune. Preuve en est que chaque commune peut agir à son échelle, pour parvenir, étape par étape, à des résultats tangibles. 

Boîte à outils

Des intervenants issus d’organismes œuvrant pour le climat sont venus rappeler qu’il existe des outils méthodologiques à disposition des collectivités. Pour Morgane Nicol, directrice du programme Territoires, à l’Institut économique pour le climat (I4CE), « agir pour la transition énergétique implique l’ensemble des acteurs et des services des collectivités ». À ce titre, l4CE propose une méthode d’évaluation de l’impact climatique des budgets des collectivités, en libre accès sur le site Internet de l’institut. 

Laurent Delcayrou, chef de projet à The Shift Project, était également présent pour rappeler combien les collectivités sont un « levier essentiel de cette transformation inéluctable ». Exemple à l’appui : « Les collectivités sont responsables de 15 % des émissions de gaz à effet de serre. Selon les choix politiques, cette proportion peut grimper jusqu’à 50 % ». L’organisation, dans ses publications, conseille aux élus « d’investir massivement sur la connaissance des enjeux anthropocènes », et de consacrer au moins 1 % de leur budget d’investissement à cette politique. 

Côté étatique, Joëlle Colosio, directrice exécutive adjointe à l’action territoriale de l’Ademe, a mis en avant les programmes et appels à projet  (« Territoires engagés pour la transition énergétique », notamment), proposés aux collectivités. Une boîte à outils à retrouver sur le site de l’Agence « Agir pour la transition ». Elle a par ailleurs annoncé la date de publication – le 30 novembre – du prochain rapport de l’Ademe, qui présentera quatre « visions », ou scénarii, pour baisser drastiquement la consommation d’énergie. Autre outil au service des collectivités : le financement de conseillers en matière d’éolien et de photovoltaïque, qui vient d’être annoncé par Barbara Pompili. 

Sur le processus de concertation, Joëlle Colosio a appuyé sur la nécessité de se regrouper entre collectivités pour mieux avancer : « quand on est plusieurs, les projets vont plus vite ». « Nous sommes aujourd’hui dans un temps ‘ciseau’ : il faut aller vite, tout en prenant le temps de concertation ». Un processus long, mais qui, au final « fait gagner du temps », a abondé Jean-Louis Bal, président du syndicat des énergies renouvelables.

Message direct au gouvernement, le maire de Combs-la-Ville, Guy Geoffroy, a conclu les débats sur la condition essentielle d’une politique de transition efficace: la confiance entre l’État, les collectivités, et les citoyens. Et le respect de la libre administration des collectivités et de leur autonomie fiscale : « les maires sont les mieux placés pour agir, et ils sont parfois dotés de discernement… ! ».

 

Accéder au site de l’Ademe « Agir pour la transition écologique ».
Accéder au memento « résilience des territoires » du Shift Project « pour une politique adaptée aux bouleversements à venir ».
Accéder à la méthodologie d’évaluation de l’impact climatique des budgets locaux de l’Institut économique pour le climat.
 




Congrès des Maires de France
Le congrès des maires se penche sur les questions du grand âge
Le forum « mieux répondre à l'urgence du grand âge » a fait le pari d'aborder les enjeux du vieillissement sous un double prisme : l'urgence à court et plus long terme. Les réponses ne sont pas plus simples dans un cas comme dans l'autre. Reste une certitude : la société vieillit, certains territoires seront amplement touchés, notamment les ultramarins. Autant s'y préparer

 Directeurs d’Ehpad, d’hôpitaux locaux, d’acteurs du domicile, « tous font le même constat : tous manquent de personnel, ne reçoivent plus de candidatures aux offres, enregistrent des démissions en cascade de personnels… ». Ce constat, Pierre Martin, maire de Chauvé (44), référent grand âge de l’AMF, le tient des entretiens qu’il a menés avant ce forum. « Je voulais vérifier ». Le tableau est comme il le dit « bien sombre ». « Ici, c’est un service de soins de réadaptation qui a fermé cet été faute de personnel ; là un Ehpad qui doit fonctionner avec un effectif réduit faute d’avoir pu remplacer un agent, ou un service à domicile qui refuse des accompagnements de personnes âgées en sortie d’hospitalisation faute de personnel suffisant ». Cela illustre la première urgence du grand âge. Celle d’un système à bout de souffle. 

Le constat n’est pas nouveau. Déjà la canicule de 2003 avait fait l’effet d’un électrochoc. La crise liée au covid-19 enfonce le clou près de vingt ans plus tard, et démultiplie l’urgence. Certes, les personnels ont malgré tout « évité le pire », les réseaux de solidarité ont montré leur richesse, les communes, « en première ligne » ont fait beaucoup pour cela, les maires en ont témoigné lors de ce forum.

Mais ils ont aussi interpellé : « Nous sommes les oubliés de la politique sociale », a lancé Pierre Lamarque, maire de Sarbazan et président de l’Union des CCAS des Landes, voulant rendre hommage à ces personnels dans les CCAS et CIAS, les auxiliaires de vie et aides à domicile. La formule déclenche les premiers applaudissements du débat. Elle provoque aussi l’agacement de la ministre chargée de l’Autonomie, Brigitte Bourguignon. La ministre réplique (« évitons ce genre de tribune politicienne ») et contre-attaque en rappelant la récente revalorisation salariale concernant « la branche la plus importante de l’aide à domicile, celle des associations (type ADMR, UNA…), soit 60% de l’aide à domicile ». « L’attractivité ne se décrète pas, on commence par la revalorisation, j’ai inscrit 200 millions d’euros pour les cinq ans qui viennent. C’est du jamais vu ». Si les agents de la fonction publique n’ont pas bénéficié de cette revalorisation de 13 à 15 % de leur salaire, ils ont bénéficié d’une revalorisation de la catégorie C, renvoie-t-elle encore. 

Les élus restent visiblement sceptiques. Car la réponse de l’État tarde depuis des années – alors qu’un nouveau projet de loi Grand âge a une nouvelle fois été finalement remisé dans les tiroirs. « Certes il y a eu le Ségur de la santé, un tarif plancher harmonisé pour les services à domicile à 22 euros, un programme d’investissement dans les Ehpad. Ces mesures vont dans le bon sens mais elles ne sont pas à la hauteur » a résumé Pierre Martin. Les maires attendent un cadre, une marque, un soutien.

Changement de paradigme

« Le problème c’est que la société n’est pas encore convaincue de cette urgence (du grand âge) », reprend Jérome Guedj, Elle est pourtant « aussi importante que la transition écologique ou digitale » estime l’ancien président de conseil départemental, auteur d’un rapport de 2020, intitulé Déconfinés mais toujours isolés. Il insiste : « Nous devons être fiers de l’allongement de l’espérance de vie, nous avons des personnes qui vont avoir 30/40 ans d’une vie dans laquelle se pose la question de leur utilité sociale autant que de leurs fragilités…»

Le défi, « c’est celui de l’adaptation de la société dès maintenant à l’explosion démographiques des 75/84 ans, plus que le défi de la grande dépendance dans dix ans » complète Luc Broussy, auteur d’un autre rapport, Nous vieillirons ensemble, 80 proposition pour un nouveau pacte entre générations, en mai 2021. Le curseur se déplace vers ceux qui « vont vouloir révolutionner la vieillesse comme ils ont révolutionné la société il y a trente ans ». 

Cela oblige à sortir la question du vieillissement du seul domaine « médico-social ». Pour appréhender les questions de logement, de lien social, d’urbanisme, etc. Les maires acquiescent. « Oui, la question de la longévité est transversale dans les communes, et ne doit pas être du seul ressort du CCAS ou de l’adjoint aux Affaires sociales », appuie Marie Garon, adjointe au maire de Schoelcher (972). « Les gens doivent vivre et pas seulement être accompagnés à cause de leur dépendance. C’est notre devoir ». À la ministre, les maires envoient ce dernier message : « Aidez ceux qui veulent faire ! ».




Eau et assainissement
Le gouvernement présente son plan de gestion durable des eaux pluviales
À Lille, hier, la secrétaire d'État chargée de la biodiversité, Bérangère Abba, a annoncé le lancement d'un premier plan national d'actions sur deux ans pour la gestion durable des eaux pluviales. 

Semaine après semaine, le gouvernement dévoile sa stratégie en matière de développement durable. Après le photovoltaïque, l’éolien, puis les projets d’énergies renouvelables de proximité la semaine dernière, c’est maintenant au tour de la gestion des eaux pluviales.

Comme le savent tous les familiers de la gestion de l’eau, les « eaux pluviales » ne sont pas les « eaux de pluie » ! Il faut en effet distinguer les premières, « partie de l’écoulement gérée par des dispositifs dédiés », des secondes, « qui sont les eaux collectées à l’aval des toitures ». La gestion durable des eaux pluviales, dont il est question ici, consiste à trouver des solutions pour « limiter au maximum le ruissellement des eaux pluviales, en ayant par exemple recours à des solutions favorisant leur infiltration ». Elle est un élément essentiel de la lutte contre les inondations – un risque qui concerne quelque 17 millions d’habitants en France. 

Constats

Pour prévenir le risque inondation, rappelle le ministère, plusieurs leviers peuvent être activés : la lutte contre l’artificialisation des sols, la « désimperméabilisation » des sols urbains, la maintenance des réseaux. Ces questions, estime Bérangère Abba, sont « insuffisamment prises en compte et intégrées dans les politiques d’aménagement du territoire » : la prise en compte de la gestion des eaux pluviales « dès la conception des projets d’aménagement semble être une pratique encore relativement rare », et le nombre de « zonages pluviaux » élaborés par les communes reste « très faible ». Le gouvernement pointe le manque de « projets stratégiques territoriaux cohérents » et une gestion des eaux pluviales souvent éclatée entre plusieurs services (assainissement, voirie, espaces verts, aménagement). La Gepu (gestion des eaux pluviales urbaines), est rattachée depuis la loi Ferrand de 2018 à la compétence assainissement pour les métropoles et les communautés urbaines, alors qu’elle est une compétence distincte dans les communautés d’agglomération. La gestion des eaux pluviales relève donc, selon les cas, ou de la commune ou de la structure intercommunale.

Le gouvernement juge que « la réglementation relative à la gestion des eaux pluviales est éclatée et trop lacunaire » : la réglementation est dispersée dans cinq codes, et son application est « partagée entre l’État et les collectivités ». « La principale difficulté d’articulation entre les missions de l’État et celles des collectivités réside dans l’absence de stratégies de gestion des eaux pluviales élaborées au niveau national et dans les communes et dans la méconnaissance du patrimoine existant, qui rend difficile l’exercice de leurs missions de contrôle », estime la secrétaire d’État. 

24 actions

C’est pour répondre à toutes ces difficultés que le gouvernement lance son plan, organisé en « 24 actions ciblées sur 4 grands objectifs ». Axe principal : « Intégrer la gestion des eaux pluviales dans les politiques d’aménagement du territoire en améliorant la transversalité entre acteurs de l’eau et aménagement ». Le gouvernement prévoit notamment de faciliter l’accès aux aides financières pour les projets en lien avec la gestion des eaux pluviales, et de créer un « centre de ressources Eau dans la ville » pour « faciliter le transfert de connaissances ». Le déploiement par les communes ou les EPCI de « zonages pluviaux » va être « généralisé », signale le gouvernement, sans que l’on sache précisément ce que recouvre cette expression. 

Afin de faciliter l’exercice de la compétence Gepu, le ministère souhaite « clarifier » son périmètre et travailler « sur l’articulation entre la Gepu, la Gemapi et l’assainissement », pendant la période 2022-2024. 

Les autres actions envisagées sont essentiellement du domaine de la formation, de la valorisation des connaissances ou de la recherche scientifique. 

Il reste à savoir si, au regard de la complexité du sujet et des constats de blocage bien réels énumérés par le ministère, ces actions seront à même de résoudre ceux-ci, ou si la montagne aura accouché d’une souris. 







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