Édition du mardi 26 octobre 2021

Environnement
Loi contre la maltraitance animale : ce que les élus doivent en retenir
La proposition de loi visant à lutter contre la maltraitance animale, dans sa version ultime, a enfin été publiée sur les sites du Parlement. Dans cette version finale, les maires échappent (pour l'instant) à l'obligation de stériliser les chats errants. Et en matière d'animaux de cirques, le texte est revenu en grande partie aux dispositions initiales. 

C’est une navette parlementaire de dix mois qui s’est achevée avec l’adoption de ce texte par la commission mixte paritaire, le 21 octobre. 

Tout a commencé, en réalité, en septembre dernier, lorsque la ministre de la Transition écologique, Barbara Pompili, a annoncé de façon assez inattendue la fin programmée de la présentation « des animaux issus d’espèces sauvages » dans les cirques itinérants et la fin des delphinariums. Une décision qui, à l’époque, n’avait nullement été discutée en Commission nationale des professions foraines et circassiennes (lire Maire info du 29 septembre 2020). 

Mauvaises surprises

Quelques mois plus tard, cette décision était mise en musique sous la forme d’une proposition de loi portée par les députés LaREM et MoDem et déposée le 14 novembre. Ce texte a été adopté en première lecture par l’Assemblée nationale le 29 janvier 2021 et, outre les chapitres consacrés aux cirques, il comportait quelques très mauvaises surprises pour les élus (lire Maire info du 19 janvier 2021) : extension aux policiers municipaux et gardes champêtres de la compétence de contrôle et d’identification des animaux domestiques ; création obligatoire d’une fourrière ou d’un refuge dans toutes les communes ou tous les EPCI ; et, enfin, l’obligation pour les communes de procéder à la stérilisation des chats errants. Cette dernière disposition avait fait sursauter les associations d’élus, dans la mesure où aucune compensation financière n’était prévue, alors que le coût pour les communes risquait de se chiffrer en centaines de millions d’euros. 

Stérilisation des chats et fourrières : les maires entendus

Après le passage du texte au Sénat, début octobre, cette mesure a été supprimée, le ministre de l’Agriculture lui-même ayant reconnu qu’elle était « complexe » et qu’elle pourrait avoir un « impact économique difficile à mesurer ». Dans le texte issu de la commission mixte paritaire, c’est bien la rédaction du Sénat qui a été retenue. Il n’y aura donc pas de stérilisation obligatoire à la charge des communes pour le moment, mais seulement l’obligation pour l’État d’élaborer dans les six mois « un rapport dressant un diagnostic chiffré sur la question des chats errants (et évaluant) le coût de la capture et de la stérilisation des chats errants. » Ce rapport devra proposer « des modalités de financement par les collectivités territoriales et l’État » d’un dispositif de stérilisation des chats errants, pouvant prendre la forme d’un « fonds de concours ou d’une dotation ». 

On en reste donc à une simple possibilité pour les maires de faire stériliser les chats errants. Le texte final précise que les EPCI peuvent « mettre les moyens nécessaires à disposition des maires pour exercer ce pouvoir de police ». 

Sur la question des fourrières, le texte définitivement adopté est là encore moins contraignant que la version initiale. Au lieu d’une fourrière obligatoire dans « chaque commune ou chaque EPCI », il a été acté (notamment sur proposition de l’AMF) que les fourrières peuvent être « mutualisées » entre plusieurs EPCI ou avec un syndicat mixte fermé. De plus, une commune qui n’a pas de fourrière en régie « peut confier le service public de la fourrière à des fondations ou associations de protection des animaux disposant d’un refuge, sous forme de délégation de service public ». 

Interdiction des animaux sauvages dans les cirques itinérants en 2028

Sur la question des animaux de cirque, en revanche, la commission mixte paritaire est plutôt revenue aux dispositions du texte initial. Elle a certes retenu la proposition du Sénat de créer une « commission nationale consultative pour la faune sauvage captive », incluant des représentants des associations d’élus, mais en modifiant le dispositif sur un point surprenant : alors que le Sénat proposait que les représentants du monde circassien – les premiers concernés par ces mesures – soient membres de droit de cette commission, la version finale ne prévoit que de les « inviter », « en fonction de l’ordre du jour ». 

Pour le reste, le texte acte l’interdiction « d’acquérir, de commercialiser et de faire se reproduire en vue de les présenter au public dans des établissements itinérants des animaux appartenant aux espèces non domestiques ». Cette interdiction entrera en vigueur deux ans après la promulgation de la loi, soit en octobre-novembre 2023. Quant à l’interdiction de détenir, transporter et présenter au public dans les cirques itinérants ces animaux, elle entrera en vigueur dans sept ans, soit à l’automne 2028. Il est toutefois prévu des possibilités de dérogations, dont les modalités seront fixées par décret, au cas où il n’existerait pas de solutions d’accueil favorables à leur bien-être pour ces animaux. 

Les autorisations d’ouverture des cirques itinérants ne seront plus délivrées si ceux-ci envisagent de présenter au public des animaux non domestiques. Tout établissement itinérant « détenant un animal en vue de le présenter au public » devra en outre enregistrer celui-ci dans un fichier national dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la loi.  

Le texte final acte, enfin, l’interdiction de détention de cétacés en captivité. Il interdit la détention « des ours et des loups » en vue de les présenter au public, ainsi que l’élevage des visons et d’autres animaux non domestiques en vue de produire de la fourrure. 

Ce texte doit maintenant être formellement adopté par les deux chambres avant d’être promulgué.

Accéder au texte de la commission mixte paritaire.




AMF
Philippe Laurent : « Je souhaite faire reconnaître tout l'apport des maires à notre pays »
Maire de Sceaux et secrétaire général de l'AMF, Philippe Laurent est candidat à la présidence de l'association. Il explique à Maire info et Maires de France vouloir « favoriser les synergies » entre les différentes associations d'élus, « renouer confiance et exigence » avec le gouvernement et faire de l'AMF une « force de propositions ». 

Avertissement : À des fins d’égalité absolue, les mêmes questions ont été posées aux deux candidats. Nous présentons des interviews de Philippe Laurent et David Lisnard de même durée (en vidéo) et de même longueur (retranscription écrite). Comme il est de coutume, les retranscriptions écrites ont été ajustées par nos rédactions pour respecter ces calibrages.

 

 

Extraits de l'interview.

Pourquoi avez-vous décidé de vous porter candidat à la présidence de l’AMF ?

C’est dans la continuité de mon parcours. Je suis extrêmement attaché à cette communauté des maires, j’en fais partie depuis longtemps, j’ai beaucoup travaillé pour elle et je souhaite continuer à me mettre à son service pour faire reconnaître tout l’apport que les maires amènent à notre pays. Je me suis engagé à l’AMF dès mon élection en tant que maire de Sceaux, en 2001. J’ai été vice-président de l’AMF pendant 13 ans, notamment auprès de Jacques Pélissard [président de l’AMF de 2004 à 2014] et, depuis 7 ans, secrétaire général de l’AMF aux côtés de François Baroin. L’expérience acquise et la connaissance du terrain liée à mes nombreux déplacements dans les associations départementales de maires, peuvent me permettre d’apporter quelque chose à l’association.

Quel a été votre parcours professionnel et votre parcours d’élu local ?

J’ai été élu en 1977 pour la première fois au conseil municipal de Sceaux dont je suis le maire depuis 2001. J’ai été conseiller départemental, je suis conseiller régional, président d’un certain nombre d’organismes, notamment le Conseil supérieur de la fonction publique territoriale (CSFPT). Professionnellement, j’ai travaillé essentiellement dans le conseil aux collectivités locales pendant une vingtaine d’années, d’abord dans un grand cabinet et ensuite dans ma propre structure, dans le domaine de la gestion publique locale. 

Pourriez-vous définir les caractéristiques des deux listes que vous déposez (bureau et comité directeur) ?

Ce sont des listes de maires engagés dans l’action locale pour leurs concitoyens, pour le service public, pour leur territoire, dans des petites communes, des grandes villes, dans l’intercommunalité. Des élus représentatifs de l’ensemble des maires de France avec les mêmes préoccupations, les mêmes propositions, les mêmes envies et le même engagement. 

Comment souhaiteriez-vous voir évoluer les relations entre l’AMF et les autres associations d’élus locaux ?

L’AMF a vocation à entretenir des liens étroits avec les départements et les régions, à travers Territoires unis, une structure à la création de laquelle j’ai contribuée. Elle doit aussi renforcer ses liens avec l’ensemble des associations. Car tout ce qui nous rassemble est bien plus fort que ce qui nous divise ou nous différencie. Il faut privilégier la synergie. Dans le domaine des finances locales, nous avons réussi à élaborer des propositions communes. Moi-même, en tant que président du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale (CSFPT), j’ai créé une coordination des employeurs territoriaux qui nous permet d’élaborer des positions communes, par exemple récemment sur la protection sociale complémentaire des agents ou sur le financement de l’apprentissage. Nous avons acquis un poids beaucoup plus important auprès du gouvernement et nos propositions sont davantage écoutées.

Je veux aussi souligner le rôle très important des associations départementales de maires. Sans elles, l’AMF ne disposerait pas de cet enracinement dans les territoires. A l’inverse, l’AMF porte au niveau national leurs préoccupations et leurs propositions. Il faut donc continuer de conforter ce lien très étroit entre elles. 

Comment les relations de l’AMF avec le gouvernement et le Parlement doivent-elles évoluer ?

Aujourd’hui, notre pays est quelque peu bloqué. Nous sommes dans des guerres de position. Il faut avancer. Avec le gouvernement, il y a une nécessité de renouer avec à la fois une confiance mais aussi une exigence. Les collectivités territoriales sont exigeantes sur les marges de manœuvre dont elles doivent disposer pour être efficaces. Elles ne doivent pas être considérées comme de simples sous-traitants de l’Etat et de l’administration centrale. 

Avec le Parlement, nous devons être forces de propositions. D’ores et déjà, les délégations à la décentralisation du Sénat et de l’Assemblée nationale entretiennent des relations avec l’AMF et les autres associations. Ces relations doivent être confortées car depuis la fin du cumul des mandats, un éloignement s’est produit naturellement. 

Si vous étiez élu président de l’AMF, quelles actions engageriez-vous pour lutter contre la baisse des moyens et de l’autonomie financière et fiscale des collectivités ?

Il y a la piste du partage des impôts nationaux [avec les collectivités]. Mais il ne faut pas partager le produit, il faut partager les bases en les territorialisant et, éventuellement, en donnant aux collectivités la capacité d’avoir une marge de manœuvre sur le vote de taux additionnels. C’est cela le vrai partage, nous en sommes très loin. Tant que les collectivités ne seront pas considérées comme des partenaires majeurs à même de représenter l’intérêt général, on n’avancera pas. La décentralisation, l’autonomie des collectivités, c’est un sujet de société, pas simplement une question d’organisation ou d’égos pour les élus locaux. 

L’AMF demande l’adoption d’une grande loi de décentralisation. Quelles sont vos propositions ?

L’Etat doit donner davantage de marge de manoeuvre aux collectivités dans la mise en œuvre des compétences déjà transférées. La différenciation est un point important. S’il y a un domaine où il faut aller plus loin dans la décentralisation de pouvoir, c’est probablement dans celui de la santé publique. Je ne parle pas de la gestion des hôpitaux mais de la logistique de la santé, de la prévention. Et aussi dans le domaine du logement car nous sommes dans une situation intermédiaire qui ne donne pas satisfaction. Il faut faire davantage confiance aux acteurs locaux. 

Quel regard portez-vous sur l’évolution de l’intercommunalité et pensez-vous nécessaire de faire évoluer sa gouvernance pour préserver les maires ?

L’intercommunalité a connu une évolution positive jusqu’à l’adoption de la loi Chevènement de 1999. On était là dans des lois positives qui permettaient aux élus de se saisir pleinement des opportunités de l’intercommunalité, en terme de développement, à une échelle plus large que celle de la commune. La loi de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles (Maptam) de 2014 et la loi portant sur la nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe) de 2015 sont des lois de contraintes. Elles obligent à faire. D’où les difficultés actuelles rencontrées par un certain nombre de maires qui ne trouvent plus de sens à leur action parce qu’ils sont noyés dans de grandes intercommunalités. Il faut redonner aux maires davantage de capacité d’adaptation des choix communautaires au niveau hyper local. Il faut aussi revoir la définition de l’intérêt communautaire. Il faut laisser les élus libres de s’organiser comme ils le souhaitent et non pas selon un schéma uniforme sur l’ensemble du pays. 

Comment jugez-vous le dispositif de l’agenda rural et quelles sont vos propositions pour les territoires ruraux ?

L’agenda rural est une démarche positive portée par le gouvernement et les associations d’élus. Les territoires ruraux se sentent davantage considérés. Il y a tout un tas de mesures encore à promouvoir, parmi lesquelles la refonte du statut des secrétaires de mairie qu’il faut revaloriser. L’AMF a fait des propositions sur le sujet. Il faut résorber l’écart de 1 à 2 entre la dotation globale de fonctionnement (DGF) par habitant des grandes villes et celle des territoires ruraux, une proposition que j’ai portée en tant que président de la commission des finances de l’AMF. Il n’y a pas de fatalité à la désertification. L’Etat et les métropoles doivent accompagner la vitalité des territoires ruraux. 

Si vous deveniez président de l’AMF, quel changement prioritaire souhaiteriez-vous impulser pour accroître davantage encore l’efficacité de l’association ?

L’AMF doit se replacer résolument au centre de la société, c’est-à-dire être présente d’abord dans les grands débats, auprès de toutes les forces vives du pays, évidemment auprès du Parlement. Et puis avoir des relations avec les représentants du gouvernement qui soient très exigeantes, en appelant au partenariat et à la confiance.  




AMF
David Lisnard : « L'AMF doit être le vaisseau amiral de la voix des communes »  
David Lisnard, maire de Cannes, vice-président de l'AMF et candidat à la présidence de l'association, a répondu à Maire info et Maires de France pour donner sa vision de l'avenir de l'association, qu'il veut « dynamiser » dans un contexte où les communes sont de plus en plus « dévitalisées ». 

Avertissement : À des fins d’égalité absolue, les mêmes questions ont été posées aux deux candidats. Nous présentons des interviews de Philippe Laurent et David Lisnard de même durée (en vidéo) et de même longueur (retranscription écrite). Comme il est de coutume, les retranscriptions écrites ont été ajustées par nos rédactions pour respecter ces calibrages.

Extraits de l'interview.

Pourquoi avez-vous décidé de vous porter candidat à la présidence de l’AMF ?

Pour moi, l’AMF doit être plus que jamais l’institution indépendante, forte, représentative de la diversité de nos communes, au service de tous les maires. Ce qui me motive, c’est d’essayer d’être au service de tous mes collègues. C’est une vision d’intérêt général, mais il y a une raison plus personnelle : j’ai commencé dans la chose publique avec Jacques Pélissard [président de l’AMF de 2004 à 2014] dont j’ai été le bras droit, et qui m’a donné la passion de l’AMF et la passion des communes. J’ai la chance d’être vice-président de l’AMF, d’avoir la confiance de François Baroin, et je souhaite ardemment pouvoir œuvrer à ce que notre association soit plus que jamais dynamique, au service des communes. 

Quel a été votre parcours professionnel et votre parcours d’élu local ?

J’ai eu un parcours professionnel dans le privé, j’ai été salarié de plusieurs entreprises, j’ai été également gérant de société, j’ai eu des petits commerces de distribution à Limoges et Cannes. Je n’en ai plus depuis 2016 – ma fonction de maire m’accapare à 100 %. J’ai une formation juridique, j’ai dirigé un cabinet d’audit et la société d’exploitation du Palais des Congrès. Parallèlement, j’ai été directeur de cabinet de Jacques Pélissard. Je suis élu local depuis 2001. Je suis conseiller départemental depuis 2008. Après avoir été adjoint au maire, puis premier adjoint, je suis maire de Cannes depuis 2014. 

Pourriez-vous définir les caractéristiques des deux listes que vous déposez (bureau et comité directeur) ?

Ce sont des listes d’union qui apportent la garantie de l’indépendance de l’AMF. Cette garantie, c’est la représentativité des listes que nous avons composées avec André Laignel. Une majorité de colistiers n’ont pas de carte dans un parti politique. Pour les maires qui ont un engagement, comme c’est mon cas, nous avons veillé à avoir tout le panel de la représentativité, ce qui permet d’équilibrer et de veiller à ce que l’AMF soit indépendante de tous les pouvoirs. C’est aussi la représentativité géographique, la représentativité hommes/femmes. C’est l’équilibre entre la ruralité et l’urbanité. Il est très important d’avoir cet équilibre géographique, démographique, économique et politique. C’est la garantie de la pérennité de l’institution AMF et de son efficacité. 

Comment souhaiteriez-vous voir évoluer les relations entre l’AMF et les autres associations d’élus locaux ?

Il y a à la fois complémentarité et compétition, il faut dire les choses clairement. Si j’ai l’honneur d’être président de l’AMF, je conforterai ce que François Baroin a réussi à mettre en place avec ses homologues des régions et des départements, Territoires unis. C’est extrêmement important de trouver un dénominateur commun des collectivités territoriales pour être force de propositions et de vigilance à l’égard de l’exécutif. Je crois qu’il est important que les autres associations se sentent représentées dans Territoires unis. Avec toutes les associations du bloc communal, j’essayerai de veiller à entretenir ce dialogue. On doit réussir à travailler en réseau. L’AMF doit être le vaisseau amiral de la voix des communes et porter la voix forte du bloc communal. 

Comment les relations de l’AMF avec le gouvernement et le Parlement doivent-elles évoluer ?

Dans un respect réciproque. Lorsque le pouvoir central attaque la liberté et la responsabilité locales, l’AMF assume son rôle de vigie exigeante. Il y a eu des tensions dans les périodes récentes, lorsque le pouvoir a pioché dans la dotation globale de fonctionnement (DGF) des collectivités en 2014. L’AMF, grâce à sa pluralité, a réagi. Plus récemment, avec la nationalisation de la taxe d’habitation, le hashtag #BalanceTonMaire, le dispositif des contrats de Cahors, l’AMF a réagi. Si j’ai cette charge de présider l’AMF, j’essayerai également d’en faire une entité proactive et force de propositions sur la décentralisation. Je propose par exemple que l’on crée un groupe de travail institutionnalisé avec les grands directeurs des administrations centrales, des parlementaires et des maires, dont des maires de la ruralité, en amont, sur tous les textes de loi concernant l’organisation des pouvoirs publics qui seront examinés au Parlement. Je voudrais aussi que l’on ait un regard sur les textes règlementaires d’application des lois, qui sont souvent hors sol.

Si vous étiez élu président de l’AMF, quelles actions engageriez-vous pour lutter contre la baisse des moyens et de l’autonomie financière et fiscale des collectivités ?

Le principe que je proposerai, c’est que chaque strate doit avoir un impôt. Si on n’a plus la liberté fiscale, on n’a plus de liberté d’action. Au sein des communes comme des intercommunalités, les évolutions à venir sur les impôts de production vont à nouveau nous mettre en position de dépendance et de quémandeurs. Or moi je ne veux plus que l’on soit quémandeurs d’un argent qui nous appartenait et que l’État nous a pris. Il faut un impôt pour l’intercommunalité lié à l’activité économique, un impôt pour les communes lié à la notion de résidence. Si on n’a plus la liberté fiscale, on dévitalise nos mairies. 

L’AMF demande l’adoption d’une grande loi de décentralisation. Quelles sont vos propositions ?

On a eu des grandes lois de décentralisation, mais depuis, il y a eu progressivement une forme de retour de tutelle. Une double tutelle : il y a un retour à une tutelle masquée de l’État qui a multiplié les appels à projets, lesquels enlèvent de la liberté d’action locale et privilégie les grandes entités qui ont l’ingénierie juridico-administrative pour y répondre. Une autre forme de tutelle est celle de la schématisation : lorsque vous voulez porter un projet, vous avez le SCoT, la DTA, le Sraddet, et j’en oublie. Ces schémas ont une contrainte normative : on crée de la centralisation dans la décentralisation. L’AMF doit porter la voix de la liberté et de la responsabilité des communes, et cela passe par le fait de retrouver la subsidiarité. 

Quel regard portez-vous sur l’évolution de l’intercommunalité et pensez-vous nécessaire de faire évoluer sa gouvernance pour préserver les maires ?

La nécessité ne sera pas d’avoir une grande loi sur l’intercommunalité, mais d’apporter des ajustements qui redonnent de la capacité de décision sur les compétences. Celles-ci ne doivent pas être imposées, un maire doit pouvoir dire : « J’assume cette compétence et si je n’y arrive pas, ou si j’y trouve un intérêt, je la mutualise. » Il faut remettre, par petites touches, de la simplicité et rendre la capacité décisionnelle aux maires. 

Comment jugez-vous le dispositif de l’agenda rural et quelles sont vos propositions pour les territoires ruraux ?

L’agenda rural part d’une bonne intention, mais quand on creuse, cet agenda a repris beaucoup de dispositifs qui existaient et leur a donné un habillage. Je crois qu’il faut surtout bien mieux utiliser l’ingénierie juridico-administrative et la mettre au service des maires. L’Agence nationale de cohésion des territoires devrait être au service des projets des communes et des intercommunalités rurales ! 

Si vous deveniez président de l’AMF, quel changement prioritaire souhaiteriez-vous impulser pour accroître davantage encore l’efficacité de l’association ?

Je créerai au sein de l’AMF une cellule qui sera H24 à disposition des maires en cas de catastrophe ou d’événements imprévus, pour apporter un soutien immédiat, jour et nuit. C’est vrai aussi pour le soutien des maires qui sont mis en cause dans l’exercice de leur mandat de façon injuste. 

Avec les associations départementales de maires, je proposerai que l’on puisse travailler en réseau sur des objectifs communs pour institutionnaliser encore plus qu’aujourd’hui la remontée des attentes du terrain.




Ruralité
Petites villes : le gouvernement soutiendra 500 opérations d'habitat inclusif
Cet appel à manifestation d'intérêt doit créer, d'ici à 2026, 500 habitats pour personnes âgées ou en situation de handicap au coeur des petites villes. Ceux-ci sont destinés à celles qui refusent d'aller en Ehpad ou qui ne peuvent plus vivre seules.

Près d’un an après le lancement du programme national à destination des petites communes de moins de 20 000 habitants, la ministre de la Cohesion des territoires et des Relations avec les collectivités territoriales, Jacqueline Gourault, a annoncé, hier, le lancement d’un appel à manifestation d’intérêt (AMI) visant à « faciliter la concrétisation de solutions autour de l’habitat inclusif » afin de « bien vieillir ».

45 millions d’euros

« Entre le maintien à domicile et l'Ehpad, cette solution permet d'habiter avec d'autres personnes, mais dans un format de colocation ou de petite unité de vie », a précisé la ministre à l’occasion de la première rencontre nationale Petites villes de demain, dont le programme prévoit de « dynamiser 1 600 villes » et est doté d'une enveloppe de 3 milliards d'euros d'ici 2026. Cet AMI doit ainsi permettre « à nos aînés et aux personnes en situation de handicap de rester ou de revenir vivre en centre-ville, dans des logements fonctionnels, adaptés à leurs besoins », dans « un cadre de vie de qualité, à proximité des commerces et des services de nos petites villes ».

« Ce seront 500 opérations d'habitat inclusif en cœur de ville » qui seront soutenues d’ici 2026, a également annoncé la ministre déléguée chargée de l’Autonomie, Brigitte Bourguignon, soulignant que, « pour l'année 2022, 45 millions d'euros seront mobilisés sur l'ensemble du territoire national pour l'aide à la vie partagée ».

Dans un communiqué, le ministère détaille que « 23 millions d’euros sont confiés aux départements pour soutenir l’animation et la coordination du projet à travers le versement aux personnes vivant en habitat inclusif d’une aide à la vie partagée ». Ceux-ci sont complétés de 22 millions d’euros de forfait habitat inclusif déployés par les agences régionales de santé « dans le même objectif ». « Les 100 premières collectivités bénéficieront en 2022 de 1,5 million d’euros dédiés à l’accompagnement des lauréats en ingénierie pour démarrer et développer leur projet : études pré-opérationnelles, montage de l’opération, dimension sociale et inclusive du projet. »

Ces projets doivent ainsi être complétés par une démarche de « site clé en main », permettant aux collectivités « d’identifier des terrains prêts à accueillir des projets, les faire connaître et rencontrer des porteurs de projets intéressés et ainsi favoriser le montage de projets autour ».

Fabrique à projet

Dans une circulaire publiée hier et consacrée à la mise en oeuvre du plan interministériel de développement de l'habitat inclusif, le gouvernement précise que les collectivités intéressées pourront, « dès l’automne 2021 [...] s’inscrire dans la fabrique à projet qui leur permettra, selon leur phase d’avancement, de bénéficier d’un soutien adapté et d’une mise en visibilité pour attirer les investisseurs et porteurs de projet qui recherchent des sites où s’implanter ».

En outre, la circulaire souligne que la conférence des financeurs de l’habitat inclusif (chargée de suivre le déploiement  des  financements du projet de vie sociale et partagée qui feront l’objet d’une convention signée par les conseils départementaux, la CNSA et les préfets) doit « devenir le lieu d’élaboration d’une stratégie territoriale partagée de développement de l’habitat inclusif, d’identification des projets du territoire, et d’élaboration d’un programme coordonné de financement des habitats inclusifs dans le parc social  et le parc privé ».

Ces projets devront « s’inscrire dans les dynamiques territoriales portées par les collectivités locales dans le cadre des contrats de relance et de transition écologique (CRTE), en cours d’élaboration ».

Pour rappel, plus de 1 600 communes ont intégré le programme Petites villes de demain afin d’être accompagnées dans leurs projets de territoires. Parmi elles, plus de 87 % ont actuellement signé leur convention d'engagement. Plus de 400 chefs de projets sont en poste, 20 millions d’euros de soutien à l’ingénierie sont engagés et plus de 500 postes de conseillers numériques sont financés.

100 000 euros pour dix projets patrimoniaux

À l’occasion de cette première rencontre, les 10 projets lauréats du prix « Engagés pour le patrimoine » ont, par ailleurs, été rendus publics. Alors que chaque projet retenu bénéficiera d’un « abondement » de 100 000 euros, le ministère rappelle, dans son communiqué, que « l’ambition de ce prix est de valoriser l’engagement d’élus locaux en faveur de projets patrimoniaux, porteurs de cohésion et de revitalisation des territoires ruraux ».

Pour être sélectionné, le projet devait se situer dans une commune de moins de 20 000 habitants, la mairie et des élus devaient faire preuve d’un « engagement soutenu » en faveur du patrimoine ou de projets territoriaux incluant le patrimoine et d’« une volonté de faire du patrimoine un levier d’attractivité et de développement ».

Récompensés à travers quatre catégories (aménagements urbains et équipements publics, patrimoine religieux, activités économiques et touristiques, lieux culturels) les projets lauréats sont : les remparts de la ville de Lectoure (Gers), l’hôtel de Ville de Stenay (Meuse), le château de Saint-Cirgues-sur-Couze (Puy-de-Dôme), l’église Sainte-Barbe de Nœux-les-Mines (Pas-de-Calais), la synagogue de Schirmeck (Bas-Rhin), le tribunal de Domfront-en-Poiraie (Orne), le château de Roquedols (Lozère), le marché couvert de Saint-Pierre (Martinique), l’abbaye de Senones (Vosges) et, enfin, le châtelet de Jonzac (Charente-Maritime).

 




Fonction publique
Le temps de travail des agents des collectivités a reculé de 73 heures en 2020 à cause de l'épidémie
Le rapport 2021 sur l'état de la fonction publique montre que la crise sanitaire a sensiblement impacté l'organisation et le temps de travail des agents publics. Durée annuelle travaillée en baisse, durée hebdomadaire stable et hausse des absences pour raison de santé sont les principaux indicateurs mis en exergue.

Confrontée à une crise sanitaire inédite, la fonction publique a connu en 2020 une évolution sensible de ses politiques et de ses pratiques de ressources humaines. C’est ce que montre l’édition 2021 du rapport sur l’état de la fonction publique publié le 22 octobre par la Direction générale de l’administration et de la fonction publique (DGAFP).

Ce document de référence qui compile de nombreuses données statistiques dans les domaines de l’emploi, des recrutements et des parcours professionnels, des retraites, de la formation, des rémunérations et des conditions de travail confirme notamment que les effectifs globaux des trois versants de la fonction publique ont continué de croître. Au 31 décembre 2019, ce sont, en effet, 5,61 millions de personnes qui travaillaient dans les services de l’État, les hôpitaux publics et les collectivités territoriales, soit 44 000 agents de plus que l’année précédente (+ 0,8 %).

Les progressions les plus fortes concernent la FPT (à égalité avec la FPE) qui voit ses effectifs croître de 0,9 %. Dans le détail, la territoriale enregistre 16 500 agents supplémentaires, une hausse qui s’explique en partie par la conversion de 8 500 contrats aidés en contrats de droit public. Hors contrats aidés, les effectifs des collectivités territoriales augmentent en réalité plus légèrement (+ 0,2 %). À noter qu’ils progressent de 0,6 % dans les communes, alors qu’ils y baissaient régulièrement depuis 2014.

Diminution « relativement contenue » 

Autre évolution notable soulignée par le rapport de la DGAFP : en 2020, le temps et l’organisation du temps de travail ont sensiblement été marqués par la pandémie de covid-19 dans les trois versants de la fonction publique. Pour l’ensemble de la sphère publique, les agents à temps complet (hors enseignants) ont travaillé 1 599 heures au cours de l’année, soit 41 heures de moins par rapport à 2019. Une diminution que la DGAFP qualifie de « relativement contenue », notamment au regard de la situation dans le secteur privé où la baisse de la durée travaillée a été beaucoup plus marquée (- 135 h) pour s’établir à 1 576 heures.

Si les personnels hospitaliers ont logiquement vu leur temps de travail augmenter pendant les vagues successives de l’épidémie, les agents de l’État et ceux des collectivités ont moins travaillé en raison de la situation sanitaire.

Dans la FPT, où la durée annuelle effective de travail s’est établie à 1 514 heures, c’est un recul de 73 heures travaillées par agent qui a été enregistré en 2020. Une baisse qui a été encore plus nette chez le personnel territorial à temps partiel (-82 heures) . Le document de la DGAFP indique, par ailleurs, que dans ce contexte, la durée hebdomadaire habituelle de travail est restée stable pour les agents de la fonction publique à temps complet en 2020. Dans leur ensemble, ces derniers ont travaillé en moyenne 39,3 heures par semaine, soit plus que les salariés du secteur privé (39,2 heures). Pour les agents territoriaux, la durée hebdomadaire habituelle déclarée (38,5 heures) est restée stable par rapport à 2019. 

Baisse record du temps de travail des agents pendant le confinement

En matière de temps de travail, le rapport fait un zoom sur la période particulière du premier confinement, à savoir la séquence allant de mi-mars à mi-mai 2020. Deux mois pendant lesquels la DGAFP note que si, dans certains secteurs, « l’activité s’est brusquement arrêtée, le recours massif au travail à domicile a, au contraire, permis de contenir la chute de l’activité pour les secteurs ayant pu y recourir ».

Le document montre précisément que pendant ce laps de temps, la durée travaillée des agents à temps complet a ainsi fortement chuté par rapport à la même période en 2019 pour s’établir en moyenne à 25,4 heures effectivement travaillées par semaine, contre 31,9 heures sur la même période l’année précédente. Une chute plus marquée pour les agents de la FPT (- 34,8% de la durée travaillée) que pour ceux de la FPE (- 20,9%) . Seuls les agents de la FPH ont connu une hausse de leur durée travaillée pendant cette période (+ 4,2 %) par rapport à 2019. 

Les absences pour raison de santé en hausse 

Selon le rapport, la part des agents de la fonction publique absents pour raison de santé a, logiquement, sensiblement augmenté entre 2019 et 2020, en particulier dans la FPT où ce taux a atteint 5,9 % (contre 4,8% pour l’ensemble des agents de la fonction publique). Dans le même temps, la durée globale des absences pour raison de santé s’est également allongée. En 2020, les agents publics se sont absentés en moyenne 10,8 jours au cours de l’année, soit 1,8 jour de plus par rapport à 2019, contre 10,3 jours dans le secteur privé (+1,5 jour). À noter que les territoriaux affichent une durée d’absence moyenne pour maladie de 13,7 jours. Là encore la pandémie explique en grande partie cette tendance à la hausse, même si la DGAFP note que « les conditions de travail (horaires de travail atypiques, risques psychosociaux, etc.) jouent aussi un rôle important dans les absences pour raison de santé ». 

Précisons enfin que les ASA (autorisations spéciales d'absence), qui ont forcément explosé pendant l'épidémie, ne sont pas décomptés comme des arrêts maladie, qu'elles soient dues au fait d'être cas contact ou à la garde d'enfants. 







Copyright 2020 AMF - www.maire-info.com - Tous droits réservés