Édition du mercredi 20 octobre 2021

Fonction publique territoriale
Financement de l'apprentissage dans les collectivités : gouvernement et employeurs territoriaux ont trouvé un accord
Les représentants des employeurs territoriaux, le CNFPT et le gouvernement ont finalement trouvé un accord sur le financement de l'apprentissage dans les collectivités territoriales, accord qui semble satisfaire tout le monde. Explications. 

« C’est un accord qui répare les erreurs manifestes de la loi Pénicaud », se réjouissait hier, auprès de Maire info, le président du CNFPT et maire du Teich, François Deluga. Depuis cette loi de 2018 qui a privé les régions de la taxe apprentissage (lire Maire info du 2 octobre 2019), la question du financement de l’apprentissage dans la fonction publique territoriale n’en finit pas de faire débat. Depuis le 1er janvier 2020, c’est le CNFPT qui doit payer 50 % des frais de formation des apprentis, sans moyens supplémentaires, ce qui n’était pas tenable à long terme. 

Enfin un accord

On sait depuis début septembre (lire Maire info du 16 septembre) que gouvernement, associations d’élus et CNFPT se dirigeaient vers un accord. La chose a été officialisée vendredi dernier, avec la parution d’un communiqué des deux ministres chargées de la Fonction publique et du Travail, Amélie de Montchalin et Élisabeth Borne : « Un nouveau mode de financement pérenne » a été trouvé et a fait l’objet d’un « accord unanime entre les ministres, les associations d’élus et le CNFPT ». Cet accord est qualifié par les ministres de « soutenable financièrement par les employeurs territoriaux ». 

Taxe de 0,1 % pour l’apprentissage

François Deluga reconnaît qu’une bonne partie des demandes des associations d’élus et du CNFPT ont été, in fine, acceptées – aux forceps – par le gouvernement. À commencer par la création de moyens nouveaux pour le CNFPT. 

« Sur la base de 14 000 apprentis dont il faudrait financer la formation en 2022, pour un coût de 6 000 euros par apprenti, cela donne un total de 80 millions d’euros », détaille le maire du Teich. Les collectivités payeraient la moitié de cette somme (autour de 40 millions d’euros) par le biais d’une cotisation spéciale à l’apprentissage, fixée à « 0,1 % de la masse salariale » de la collectivité et perçue par le CNFPT. Le principe de cette cotisation supplémentaire – qui a été validée par toutes les associations d’élus – sera inscrit dans la loi de finances pour 2022 par un amendement du gouvernement. Le produit de cette taxe « sera versé à un budget annexe dédié », explique François Deluga, « et ne pourra servir à rien d’autre que le financement de la formation des apprentis ». 

Reste les 40 autres millions d’euros. La négociation n’a pas réussi à faire plier entièrement le gouvernement et lui faire accepter le principe d’une prise en charge totale de cette part : l’État et l’opérateur France compétences mettront chacun au pot 15 millions d’euros, soit un total de 30 millions. « Il manquera donc dix millions d’euros, souligne François Deluga, auxquels il faut ajouter deux à trois millions d’euros de coûts de gestion supplémentaires pour le CNFPT ». Ces 12 à 13 millions restants seront pris en charge par le CNFPT sur ses réserves – la réforme de la perception des cotisations, en 2019, lui ayant laissé un excédent, dans lequel il va piocher pour payer la différence.

Clause de revoyure

« Une fois le principe acté, la coordination des employeurs territoriaux a consulté toutes les associations d’élus, qui ont, unanimement, décidé de dire ‘’d’accord’’, mais avec deux réserves : premièrement, il manque bien 13 millions d’euros. Et deuxièmement : que va-t-il se passer si la dynamique se confirme et si, l’année suivante, le nombre d’apprentis augmente et dépasse les 14 000 ? ».

Les employeurs territoriaux et le CNFPT ont donc demandé – et obtenu – le principe d’une clause de revoyure fin 2022. « On verra, à ce moment, s’il y a une dynamique », explique le maire du Teich. Dans le communiqué du ministère, cette « clause de revoyure » est bien évoquée : elle sera « annuelle » et « fixera les contributions et engagements de chacun des partenaires ». 

Une convention d’objectifs et de moyens sera signée « avant la fin de l’année » entre l’État, France compétences et le CNFPT. « Elle permettra, détaille encore François Deluga, de cadrer les conditions dans lesquelles le CNFPT va payer. Il faut notamment retenir que ce ne sera pas à guichet ouvert : les CFA [centres de formation des apprentis] devront nous demander notre accord et obtenir l’autorisation formelle du CNFPT avant d’ouvrir une formation. » 

François Deluga se réjouit donc d’un « accord satisfaisant », en premier lieu parce qu’il « reprend nos propositions ». « Il y a un vrai engagement de l’État, tout le monde fait des efforts, et on fera le point fin 2022. » 

À cette heure, l’amendement instaurant le « 0,1 % apprentissage » n’a pas encore été déposé par le gouvernement dans le cadre de la discussion sur le projet de loi de finances. 




Budget de l'état
PLF 2022 : les députés adoptent le volet recettes et améliorent la compensation de la taxe d'habitation
Le bloc communal devrait bénéficier d'« une centaine de millions d'euros » supplémentaires dans le cadre de la compensation de la suppression de la taxe d'habitation. Par ailleurs, la règle des prélèvements subis par les collectivités ayant augmenté leur taux de TH après 2017 devrait être légèrement corrigée. 

L'Assemblée nationale a largement adopté, hier, en première lecture, le premier volet (consacré aux recettes) du projet de loi de finances (PLF) pour 2022, qui comprend notamment le fameux « bouclier tarifaire » promis par le gouvernement pour contenir la hausse des prix de l'électricité et du gaz. 

Suppression de la TH : la compensation revue à la hausse

Le gouvernement a surtout fait adopter, vendredi, un amendement qui doit permettre de compléter et d’accroître d’« une centaine de millions d’euros » la compensation de la taxe d’habitation (TH) des résidences principales à la suite de sa suppression.

« Très technique », de l’aveu même du ministre des Comptes publics, Olivier Dussopt, cet amendement doit répondre à « un engagement pris par le gouvernement » : « Intégrer les rôles supplémentaires dans la base de compensation de la taxe d’habitation après sa suppression ». 

Cela doit permettre d’intégrer, dans la base de compensation, « des rôles supplémentaires qui n’avaient pas été intégrés à temps du fait de quelques retards administratifs dus à la période de confinement ». L’ancien maire d’Annonay a précisé que « tous les rôles supplémentaires seront pris en compte – pas uniquement ceux de Paris et de Lyon –, du moins tous ceux des collectivités qui en ont, car il n’y a pas d’automaticité ». Une disposition qui répond ainsi à la demande de l’AMF adressée au gouvernement depuis plusieurs mois.

Deux dérogations marginales

Toujours en lien avec la suppression de la taxe d’habitation, le gouvernement a également décidé, via un second amendement, de corriger à la marge la mesure votée en loi de finances pour 2020 permettant à l’Etat de prélever aux communes et aux EPCI, ayant augmenté leur taux de TH en 2018 et/ou 2019, le montant de TH issu de cette augmentation au titre de 2020. Il a ainsi fait voter deux dérogations après « l’expérience de cette première année ».

La première concerne les EPCI et les communes qui auraient été amenés à augmenter leur taux de taxe d’habitation entre 2017 et 2019 à la suite d’un « accord de gouvernance financière ». Selon le ministre chargé des Comptes publics, cette mesure ne concernerait qu’un nombre « très réduit » de communes, « sans doute compris entre 10 et 20 ».

« Cette mesure concerne les EPCI à fiscalité propre qui ont augmenté leur taux de TH entre 2017 et 2019, en contrepartie d’une baisse du taux de TH de leurs communes membres ou vice versa, sans que le produit communal et intercommunal de taxe d’habitation sur le territoire de l’EPCI à fiscalité propre n’ait globalement augmenté », explique-on, ce matin, à l'AMF. Ainsi, « elle vise à ne pas pénaliser les ensembles intercommunaux qui ont, dans le cadre d’un pacte financier et fiscal conclu notamment à la suite de la mise en œuvre des schémas départementaux de coopération intercommunale (SDCI), prévus un rééquilibrage des taux de TH communaux et intercommunaux n’ayant pas abouti à une hausse de pression fiscale sur leur territoire ».

La seconde dérogation vise « les EPCI et les communes concernées par un arrêté préfectoral qui les aurait contraints à augmenter leur taux de taxe d’habitation pour équilibrer leurs comptes à la suite d’observations formulées par une chambre régionale des comptes sur les trois exercices de 2017 à 2019 », a expliqué Olivier Dussopt, précisant que le nombre de communes et d’EPCI concernés est « suffisamment faible pour que le traitement puisse se faire au cas par cas ».

Il a également souligné que, le coefficient correcteur n’étant pas modifié, « nous procédons uniquement à une neutralisation des mécanismes de reprise de taxe d’habitation, ce qui fait qu’il n’y a pas lieu de tout recalculer depuis 2017 ».

Parmi les amendements rejetés concernant les collectivités, on peut citer ceux visant à rehausser le niveau de la dotation globale de fonctionnement à son niveau de 2013 ou à permettre aux collectivités territoriales de bénéficier du FCTVA pour la gestion de leur parc automobile. 

Un autre amendement visant à soutenir les communes situées en zone montagne, « fortement contraintes dans leur budget après plus d’une année de pandémie », et à rendre éligibles au FCTVA leurs dépenses de déneigement n’a également pas été adopté. 

Le deuxième volet du projet de budget, consacré aux dépenses, doit être abordé à partir de lundi prochain dans l'hémicycle, et complété notamment par le plan d'investissement France 2030 récemment présenté par Emmanuel Macron.




Crise sanitaire
Compensation des pertes de recettes des régies : un dispositif de plus en plus restrictif
Le gouvernement a confirmé hier, devant les députés, que le dispositif de compensation des pertes de recettes tarifaires pour les régies concernerait aussi les établissements thermaux. Il a également fait mine de s'étonner du fait que les représentants des élus aient rejeté le décret d'application de ce dispositif. 

C’est lors de la séance de questions au gouvernement, hier, que la question a été abordée : la députée Jeanine Dublé (Liberté et territoires, Hautes-Pyrénées) a interpellé le ministre des Comptes publics pour savoir si les établissements thermaux exploités en régie allaient bénéficier du dispositif. 

Activités thermales

Rappelons que la loi de finances rectificative votée en juillet dernier prévoit une compensation, à hauteur d’environ 200 millions d’euros, des pertes des régies locales liées à la crise sanitaire : une compensation des pertes de recettes subies par les Spic exploités en régie et relevant du bloc communal ou des départements ; et « une dotation en faveur des collectivités du bloc communal qui ont subi une dégradation de leur épargne brute supérieure à la moyenne nationale et dont une partie significative résulte d’une perte de recettes tarifaires liée à la fermeture de leurs services publics ».

Jeanine Dublé a noté que dans le document publié sur ce sujet, la semaine dernière, par Bercy (lire Maire info du 13 octobre), « il n’est pas fait état d’un soutien aux équipements relatifs au thermalisme ». Pourtant, ces établissements ont payé un lourd tribut à la crise : « Leur fermeture prolongée en 2020 a entraîné une baisse de près de 70 % de leur activité, ces établissements n’ayant fonctionné que quatre mois, de juillet à octobre. Par ailleurs, l’activité au cours de l’année 2021, du fait d’une réouverture totale des établissements thermaux le 9 juin 2021, est largement amputée avec des pertes de recettes tarifaires correspondantes. »

Le ministre Olivier Dussopt s’est montré rassurant sur ce point : « Toutes les activités industrielles et commerciales gérées en régie y sont éligibles, y compris le thermalisme. » À titre d’exemple, il a évoqué, pour le département de la députée, une aide de « 900 000 euros pour les activités thermales » sur un total de 2,8 millions.

Rejet du décret par le CFL

Jeanine Dublé s’est également étonnée que le décret d’application de ce dispositif ne soit toujours pas paru pas plus que l’arrêté listant les régies bénéficiaires. 

Olivier Dussopt a répondu que le décret serait publié « dans les prochains jours ». « Pourquoi seulement maintenant ? C’est que (…) nous devions d’abord le présenter aux associations d’élus puis au Comité des finances locales. Pour une raison qui m’échappe, ce dernier, présidé par André Laignel, a donné ce matin un avis défavorable au projet de décret, alors que nous évoquons ici une aide de 211 millions d’euros au profit des régies. »

Sur le fond, c’est exact : le CFL, hier matin, a bel et bien donné un avis défavorable au décret – ce qui ne bloquera nullement sa parution, puisque le CFL ne donne qu’un avis consultatif. Quant à savoir si la raison de ce vote défavorable « échappe » au ministre, c’est une autre affaire. « Si le ministre ne comprend pas, soupire ce matin André Laignel, contacté par Maire info, on va lui réexpliquer… ».

Restrictions supplémentaires

Le maire d’Issoudun tient d’abord à rappeler que cette position n’est pas celle « d’André Laignel », mais « celle de l’AMF et des représentants des autres associations qui, unanimement, se sont prononcées contre ce projet de décret. »

Le président du CFL confirme que l’enveloppe tourne bien autour de 220 millions d’euros, « ce qu’il faut rapprocher des pertes réelles de recettes dues à la crise sanitaire, qui sont estimées à 2,9 milliards d’euros. On est donc très, très loin du compte. » Mais surtout, « le décret ajoute des restrictions qui ne figuraient pas dans la loi de finances rectificatives, et c’est la raison de notre refus. » 

Il s’agit certes d’un point très technique, mais bien réel : l’article 2 du projet de décret excluait un certain nombre de régies du dispositif, celles dont « les redevances versées par les fermiers et concessionnaires représentent plus de 90 % des recettes réelles de fonctionnement ». « Cette mesure de restriction aurait pour effet de peser sur les tarifs, et donc sur les usagers », précise André Laignel. « Il ne nous a donc pas paru raisonnable de donner notre accord à un décret plus restrictif que la loi elle-même, qui l’était déjà beaucoup. » 

Le décret et l’arrêté paraîtront quand même, quoi qu’il en soit, a rappelé hier Olivier Dussopt, « avant la fin octobre ». L’arrêté listera « les 1 200 régies » qui vont bénéficier du dispositif, a conclu le ministre, qui s’est une fois de plus félicité du soutien du gouvernement aux collectivités frappées par la crise. L’incompréhension semble donc toujours totale à ce sujet entre le gouvernement et les associations d’élus : André Laignel, ce matin, rappelle que le « filet de sécurité » mis en place par le gouvernement représente moins de 200 millions d’euros, alors que « selon les chiffres mêmes de Bercy, les pertes de recettes et dépenses supplémentaires des collectivités du fait de la crise sanitaire représentent plus de 5 milliards d’euros ».




Santé publique
Désertification médicale : le désarroi des élus aux quatre coins du pays
La santé est décidément au coeur de l'actualité des maires en ce moment, entre satisfaction du gouvernement sur sa politique d'investissements et désarroi des élus locaux confrontés à des décisions qu'ils jugent incompréhensibles des ARS. 

En déplacement à Dijon, hier, le Premier ministre a fait un point d’étape sur « les investissements » après le Ségur de la santé. Une fois encore, le décalage semble considérable entre la vision du gouvernement et celle, sur le terrain, des élus – relayée, hier également, à l’Assemblée nationale. 

Soigner les citoyens « partout où ils sont »

« Nous investissons fortement dans la santé », s’est félicité hier le Premier ministre. Rappelant que le Ségur a acté « 19 milliards d’euros sur les dix années à venir », Jean Castex a décrit le mélange « d’investissements du quotidien et d’investissements structurants » aussi bien vers les hôpitaux que vers les Ehpad. « Ce n’est pas seulement un gros chèque », a insisté le chef du gouvernement : « C’est faire pour faire différemment, pour améliorer l'efficience de nos organisations, la qualité de la prise en charge décloisonnée au service de nos concitoyens, au service des patients. (…) La politique de santé doit permettre de soigner tous nos concitoyens partout où ils sont. » 

L’objectif est plus que louable – mais est-il vraiment à l’ordre du jour ? On peut en douter, au regard des nombreux conflits qui opposent, d’un bout à l’autre du territoire, les élus locaux et les ARS sur les fermetures d’établissement et la question des déserts médicaux. 

« SOS » et menaces de démission

Pendant la seule séance de questions au gouvernement d’hier, à l’Assemblée nationale, ce sont pas moins de quatre questions qui ont été posées sur la « désertification médicale » ou la situation dramatique d’un certain nombre d’établissements de proximité. 

Danielle Brulebois, députée du Jura, pourtant membre de la majorité, a par exemple « une fois encore alerté » le gouvernement « sur la situation du groupement hospitalier Jura sud et sur celle de l’hôpital de Lons-le-Saunier, sur le mauvais état des locaux, le manque de place, le besoin de rénovation et de modernisation. (…) Notre hôpital mérite mieux. »

Yannick Favennec-Bécot (Mayenne, UDI) a tonné dans l’hémicycle : « Quand c’est non, c’est non ! Non au démantèlement de notre hôpital, le centre hospitalier du Nord-Mayenne, qui rayonne sur un bassin de vie de plus de 100 000 habitants. » Le député a évoqué une manifestation qui s’est tenue le 9 octobre à Mayenne, lors de laquelle « 4 000 personnes, soit près d’un tiers de la population de la ville », sont descendues dans la rue pour dire « non aux déserts médicaux, non à une agence régionale de santé aux méthodes toujours plus technocratiques et comptables ». Le député a appelé sans détour « à la suppression des ARS, ces agences déconnectées de la réalité du terrain et des élus locaux. » 

Guillaume Garot, lui aussi député de la Mayenne (PS), a abondé dans le même sens, décrivant « une désertification médicale qui s’aggrave » aux quatre coins du pays : « En Mayenne, dans la Sarthe, dans l’Aisne, en Ardèche ou dans les Landes, (…) nous lançons un SOS ! Quand le gouvernement prendra-t-il enfin les mesures pour assurer la présence des médecins là où on a besoin d’eux, et d’abord là où ils manquent ? »

Dans certains territoires, la situation est critique – c’est le cas notamment dans les départements du Cher et de l’Indre, comme le soulignait au Sénat, début octobre, le sénateur Rémy Pointereau. « L’heure est grave, et je pèse mes mots. Le week-end dernier, l’hôpital de Bourges s’est retrouvé, pour la énième fois, dans l’incapacité de prendre en charge des patients à cause de l’absence de structure mobile d’urgence et de réanimation (SMUR) primaire et secondaire. Cette situation a obligé les hôpitaux des villes de Vierzon et Saint-Amand-Montrond à suppléer celui du chef-lieu du département. Or ces villes se situent à plus de quarante minutes de Bourges ; de surcroît chacun de ces hôpitaux ne dispose que d’une seule ambulance. » Le sénateur a rappelé que les maires de ces villes « ont porté plainte contre X pour mise en danger de la vie d’autrui ». 

Dans la même région, ce mois-ci encore, André Laignel, maire d’Issoudun et Gil Avérous, maire de Châteauroux, ont tenu un point de presse pour dénoncer une décision de l’ARS, qui a « retoqué » un projet de création de centre de traitement du cancer à Châteauroux. Actuellement les patients de l’Indre atteints d’un cancer doivent se faire soigner dans un département voisin. Rappelant que « les élus de l’Indre soutenaient unanimement ce projet », Gil Avérous, furieux, a déclaré lors de ce point presse : « Une fois encore l’ARS s’essuie les pieds sur les élus locaux ». « N’ayant pas vocation à être le paillasson des technocrates », le maire de Châteauroux a averti qu’il démissionnerait de la présidence du conseil de surveillance du centre hospitalier de Châteauroux et de la présidence du comité territorial des élus locaux du groupement hospitalier de territoire si le ministre de la Santé ne s’emparait pas de ce dossier. 

Questions de gouvernance

Les ARS sont donc dans la ligne de mire des élus. Certes, commente ce matin pour Maire info Frédéric Chéreau, maire de Douai et co-président de la commission Santé de l’AMF, « les situations sont très variables d’une région à l’autre », mais globalement, « il est vrai que les ARS ont une approche très administrative et doivent encore apprendre à parler avec les élus locaux ». Le maire de Douai appelle d’ailleurs à un dialogue renouvelé non seulement avec les ARS mais également avec les préfets. 

« Le problème des ARS est qu’elles ont une approche ‘’en tuyau d’orgue’’, elles raisonnent presque uniquement sur la question des hôpitaux, quand nous avons besoin d’une approche beaucoup plus transversale. » Frédéric Chéreau évoque les nombreuses pistes auxquelles l’AMF réfléchit depuis des années pour tenter de résorber les problèmes récurrents de la désertification médicale et de l’organisation du système de santé en général. « Il y a bien sûr la question de la gouvernance. Les maires doivent redevenir présidents des conseils d’administration des hôpitaux. Aujourd’hui ce sont les directeurs d’hôpitaux qui ont le pouvoir, et encore… comme ils n’ont pas la main sur les budgets, qui sont le nerf de la guerre, leur pouvoir est finalement aussi limité : ils ont le pouvoir, mais pas les moyens. » 

La « légitimité » des maires sur le sujet santé

Frédéric Chéreau souscrit entièrement aux propositions détaillées hier dans Le Monde par trois chercheurs, dont Maire info s’est fait l’écho hier : les chercheurs demandent que les communes et les EPCI soient dotés d’une compétence santé. « Oui, il faut que les communes et les intercommunalités aient une compétence sur la santé, sur le pilotage local de la santé », abonde Frédéric Chéreau. « Parce que les maires sont capables d’avoir ce regard transversal sur la santé. Parce qu’il faut réfléchir à inventer des lieux qui permettent de croiser le regard de la médecine de ville et celui de l’hôpital – et les maires peuvent faire cela. Il manque aujourd’hui un lieu de pilotage local qui permette de croiser tous les regards, et les maires ont, sur ce sujet, toute légitimité ». Notamment parce qu’ils sont en mesure de proposer des politiques « en amont de l’hôpital » : « Il ne s’agit pas seulement de soigner des pathologies comme le diabète ou les insuffisances cardiaques, quand les patients sont dans une situation critique : il faut les éviter, les prévenir. Et cela, les maires sont en situation d’y contribuer, parce qu’ils portent des projets intégrés, incluant le logement, la qualité de l’air, la mobilité, l’alimentation, l’activité physique…Les maires sont au cœur du sujet sur tout cela. »

C’est d’une véritable révolution culturelle que parle Frédéric Chéreau. Mais lorsque l’on voit le fossé qui sépare la vision du gouvernement de la réalité vécue par les élus – et les patients – il apparaît qu’il ne faudra peut-être pas moins.




Ecole
Les accompagnants d'élèves handicapés manifestent et crient leur colère
Pointant des conditions de travail dégradées, les anciens auxiliaires de vie ont fustigé les nouveaux PIAL et dénoncé la situation d'enfants handicapés qui doivent parfois se partager un accompagnant, dit « mutualisé ». Jean-Michel Blanquer a défendu son action à l'Assemblée.

« Du fric, des postes, un statut ! », « AESH en colère »,... Avec une grève, des rassemblements à Paris et dans de nombreuses villes de France, les accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH) se sont mobilisés, hier, pour protester contre leur précarité et la dégradation de leurs conditions de travail.

Salaires insuffisants, temps partiels imposés…

Salaires insuffisants, temps partiels imposés, absence de statut de la fonction publique, manque de formation, conditions de travail dégradées... : la liste des motifs d'insatisfaction est longue pour ces accompagnants d'enfants handicapés, anciennement appelés auxiliaires de vie scolaire (AVS), une profession largement féminine. 

« Je touche à peine 900 euros par mois. Qui voudrait faire ce travail ? Moi, parce que j'aime mon travail. Mais à un moment, ça suffit », s'est insurgée, par exemple, l’une des manifestantes. 

Les AESH sont par ailleurs unanimes pour dénoncer une dégradation de leurs conditions de travail avec la création des PIAL, ces pôles inclusifs d'accompagnement localisés mis en place en 2019 et généralisés depuis pour mieux coordonner leurs interventions, mais qui leur imposent de suivre souvent davantage d'élèves. 

« Les PIAL, ce sont des machines à broyer », dénonce Magalie Trarieux, enseignante et référente AESH dans le Val-de-Marne pour le Snuipp-FSU, premier syndicat du primaire, venue manifester à Paris. Ils auraient contribué à « déshumaniser cette fonction », estime Katia Batailler, AESH dans les Deux-Sèvres. Les syndicats réclament leur abandon, comme celui de la « mutualisation systématique des moyens ». 

« Depuis l'arrivée des PIAL, suivre quatre ou cinq élèves c'est courant, et ça l'est aussi qu'un élève puisse avoir plusieurs AESH », témoigne Sylvie Serrano, qui fustige « des emplois du temps complètement fragmentés ». 

Du côté des parents également, l'exaspération est aussi grande alors que beaucoup d'enfants sont privés de tout ou partie des heures d'accompagnement auxquelles ils ont droit, certaines familles n'hésitant pas à se tourner aujourd'hui vers la justice.

« Cette majorité est celle qui a fait le plus ! »

Lors des questions au gouvernement, hier, à l’Assemblée, plusieurs députés ont interpelé les membres de l’exécutif sur le malaise qui gagne la profession et les multiples problèmes dénoncés.

En guise de réponse, le ministre de l’Éducation nationale, Jean-Michel Blanquer, s’est contenté de rappeler l’action du gouvernement durant ce mandat. « Cette majorité est celle qui a fait le plus – et de très loin ! – pour la scolarisation des enfants en situation de handicap. Les chiffres, notamment budgétaires, en attestent », a défendu le ministre.

« Quand on analyse les chiffres, on constate qu’on est passé de 70 000 contrats aidés à 125 000 CDD voire CDI ; davantage de chemin a été parcouru en quatre ans qu’en dix ans. Nous avons scolarisé 100 000 élèves de plus, nous avons créé des ULIS, des unités d’enseignement externalisé pour l’autisme », a détaillé Jean-Michel Blanquer.

Concernant les très critiqués PIAL, ce dernier a défendu une organisation « au plus près du terrain, qui permet d’affecter les AESH en fonction des besoins et donc de répondre le plus précisément possible aux demandes des familles ». « Ces dernières sont beaucoup plus écoutées puisqu’elles peuvent aujourd’hui appeler une commission départementale lorsqu’elles ont un problème », a estimé le ministre.

« La situation est-elle pour autant idéale ? Non, d’abord parce que la demande est toujours plus forte : il y a 100 000 élèves handicapés supplémentaires dans le système scolaire par rapport à 2017 », a-t-il rappelé, soulignant la mise en place d'une grille indiciaire rénovée et la création de 4 000 nouveaux emplois d'AESH pour la rentrée 2022. Toutes deux jugées insuffisantes. 

Amendements dans le PLFSS

A noter que des députés de différents groupes politiques ont déposé des amendements au projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2022 afin de revaloriser les « métiers du lien », en particulier les auxiliaires de vie auprès des personnes âgées.

Les AESH étaient 125 500 à la rentrée, soit une augmentation de 35 % en cinq ans, selon le ministère de l'Education, tandis que plus de 400 000 élèves en situation de handicap étaient scolarisés dans les écoles et établissements.
 







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