Édition du mardi 19 octobre 2021

Crise sanitaire
Les députés proposent une « territorialisation » du pass sanitaire
Le projet de loi permettant une éventuelle prolongation de l'usage du pass sanitaire au-delà du 15 novembre arrive en débat en séance publique à l'Assemblée nationale aujourd'hui. Le texte a été modifié à la marge en commission des lois. Revue de détail.

Ce texte vise à proroger jusqu’à l’été prochain la possibilité de prononcer l’état d’urgence sanitaire et de prendre certaines décisions dont la remise en œuvre, en cas de besoin, du pass sanitaire. 

Nouveaux débats sur le pass sanitaire

En commission des lois, les députés ont validé le principe d’une possibilité de rétablissement du pass sanitaire mais ont tenu à la borner plus précisément que ce qu’avait prévu le gouvernement. En effet, comme l’a expliqué le député LaREM de Paris Pacôme Rupin, le pass sanitaire a certes montré son efficacité mais « reste un outil très problématique en ce qu’il va à l'encontre de la liberté de conscience et de choix de chacun (en instaurant une forme d’obligation vaccinale déguisée), surtout dès lors que les tests de dépistage sont rendus payants ». Le député de la majorité va jusqu’à qualifier de « précédent dangereux » le fait que le passe oblige des personnes à faire état de leur situation de santé « à des interlocuteurs autres que le personnel de santé ». Il souhaite donc – et la commission des lois l’a suivi sur ce point – que l’utilisation du pass sanitaire soit « circonscrite au maximum » et qu’elle soit « territorialisée », en fonction de critères objectifs. 

Son amendement prévoit donc que le pass ne puisse être rétabli que lorsqu’un département connaît un taux d’incidence « supérieur ou égal à 50 cas pour 100 000 habitants sur une durée continue d’au moins sept jours. » 

L’amendement a certes été adopté par la commission des lois, mais il n’est pas du tout certain qu’il survive à la séance publique, dans la mesure où il ne fait pas l’unanimité dans la majorité elle-même : le rapporteur du texte, le député LaREM du Pas-de-Calais Jean-Pierre Pont, s’est opposé à cet amendement, estimant que « des seuils ou des critères trop stricts auraient pour conséquence de rendre inapplicable le dispositif ». Il a pris l’exemple de son département où, lors de l’une des vagues, « le taux d’incidence est passé en huit jours de 17 à 23 cas. Cela représente une augmentation de 35 %, très forte en proportion mais faible en valeur absolue. S’enfermer dans des critères trop stricts peut être contre-productif. » 

Le même Pacôme Rupin a aussi proposé, comme d’autres députés, un amendement pour limiter la prolongation du régime transitoire au 14 février 2022 plutôt qu’au 31 juillet, comme le souhaite le gouvernement. Avec des mots assez violents : « Nous sommes en train de créer une accoutumance coupable au pass sanitaire. (…) (Celui-ci) implique la discrimination de tous ceux qui n’ont pas l’état de santé requis selon les pouvoirs publics. Comment pouvons-nous laisser durablement près de 7 millions de Français non vaccinés à l’écart de lieux de vie du quotidien ? Sommes-nous devenus incapables de vivre avec des personnes qui ne pensent pas ou qui n’agissent pas comme nous ? » Cet amendement, comme tous ceux qui proposaient de ne pas légiférer directement jusqu’au mois de juillet prochain, a été repoussé par la commission. 

D’autres députés ont tenté, sans succès, d’introduire des amendements visant à abroger le pass sanitaire, à supprimer la possibilité de suspendre les soignants non vaccinés, à exclure les aides à domicile du champ de l’obligation vaccinale… Ils ont à chaque fois rencontré la ferme opposition du rapporteur Jean-Pierre Pont et de la présidente de la commission des lois, Yaël Braun-Pivet. 

Il est à noter que personne, lors de la discussion en commission, n’a soulevé la question des crèches, et l’on ne sait donc toujours pas clairement à ce jour si le personnel des crèches est, ou non, soumis à l’obligation vaccinale (lire Maire info du 22 septembre 2021). 

Directeurs d’école

La discussion en séance publique commencera cet après-midi, après la séance de questions au gouvernement. La très grande majorité des presque 400 amendements déposés vise à empêcher le gouvernement de proroger le régime de transition jusqu’en juillet, préférant, pour certains, le 31 décembre, pour d’autres, le mois de février – qui marquera le début de la vacance parlementaire pour cause de campagne électorale. 

Plusieurs amendements, dans le même sens que celui qui a été adopté en commission, visent à instaurer des seuils pour toute décision de remise en vigueur de l’état d’urgence sanitaire (taux d’incidence supérieur à 50 pendant plus de 14 jours, etc.). 

Aucun amendement ne concerne l’article 5 du projet de loi, qui prévoit notamment la remise en vigueur des mesures dérogatoires au droit commun pour les réunions des assemblées délibérantes des collectivités locales et de leurs groupements.

On notera enfin que le gouvernement propose deux amendements à son propre texte. Le premier d’entre eux vise à autoriser les directeurs d’établissements scolaires du premier et du second degré à accéder « aux informations relatives au statut virologique des élèves, à l’existence de contacts avec des personnes contaminées ainsi qu’à leur statut vaccinal ». Ces informations relèvent normalement du secret médical, ce qui ne facilite pas, selon le gouvernement, le « ciblage » des établissements devant faire l’objet d’une campagne vaccinale prioritaire. Par ailleurs, pour pouvoir admettre à nouveau un élève qui a été renvoyé chez lui parce que positif, les directeurs d’école ne peuvent actuellement que s’appuyer sur les attestations des parents, ce qui rend la mise en œuvre du protocole « extrêmement difficile ». 

Accéder au texte de la commission.

 




Cybermalveillance
Cyber-sécurité : des pistes pour mieux se protéger et couvrir les risques dans les collectivités
Alors que le nombre de cyber-attaques a explosé en France depuis le début de la crise, les collectivités comme les entreprises peinent à se couvrir. Un rapport parlementaire propose une série de mesures pour mieux structurer le marché de la cyber-assurance.

Verser les aides directement aux collectivités, renforcer la prévention, adapter l’offre d’assurance... Dans un rapport publié la semaine dernière, la députée de la Loire Valéria Faure-Muntian (LaRem), fait un état des lieux de la situation de la cyber-assurance et du « risque cyber » en France, et fait 20 propositions.

Des cyber-attaques multipliées par quatre durant la crise

Premier constat, la crise sanitaire a démultiplié les cyber-attaques. Citant les derniers chiffres de l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (Anssi), la co-présidente du groupe d’études assurances à l’Assemblée rappelle que le nombre d’attaques a quadruplé depuis le début de la pandémie de Covid-19. En 2020, les signalements d’attaques par rançongiciels ont ainsi augmenté de 225% par rapport à 2019 tandis que « les tentatives de phishing ont augmenté de 400 % » entre mars 2020 et février 2021.

Selon les données de la gendarmerie nationale reprises dans le rapport, 46 % des victimes de rançongiciels étaient, en 2020, des PME, 21 % des TPE, 14 % des administrations et 9 % des grands groupes.

Avec le recours massif au télétravail et la dématérialisation de nombreuses démarches, Valéria Faure-Muntian estime que la crise sanitaire a joué « un rôle d’accélérateur » pour les entreprises, les collectivités, mais également les cybercriminels qui se sont, « eux aussi, saisis de cette opportunité pour multiplier les cyber-attaques ». « Ces dernières ont mis en évidence la vulnérabilité des entreprises françaises, des collectivités territoriales, des administrations et des établissements publics face à ce phénomène de grande ampleur », constate l’élue. 

Orienter les aides directement vers les collectivités

Alors que les entreprises et les collectivités territoriales ont mis en œuvre une digitalisation à « marche forcée », durant ces deux dernières décennies, « l’une des conséquences de ce processus a été de minorer pour partie les investissements en termes de cybersécurité, que cela soit sur le plan de la sensibilisation des collaborateurs, de la mise en place de systèmes de cybersécurité dans les systèmes d’information ou de la couverture assurantielle des risques cyber », explique Valéria Faure-Muntian.

Et bien que « de plus en plus d’entreprises et de collectivités prennent conscience des risques cyber », celles-ci « ne savent pas toujours comment commencer, et à qui faire appel ». 

Pour tenter de résoudre ce problème qui touche parfois « des services publics essentiels et vitaux », la députée préconise, entre autres, « d’orienter directement les aides publiques aux collectivités », et non forcément via l’Anssi, afin qu'elles puissent effectuer des audits de cybersécurité et se doter d’un dispositif dédié.

Plus de moyens pour cybermalveillance.gouv.fr

Afin de renforcer la prévention pour limiter les risques, le rapport préconise de « sensibiliser au moins une fois par an les salariés des petites et moyennes entreprises aux risques cyber » et de « créer pour les collectivités, les administrations et les entreprises un prérequis en matière de cybersécurité ».

En outre, Valéria Faure-Muntian recommande de renforcer l’écosystème de cybersécurité, qu’elle juge « éclaté » en France. Pour cela, elle suggère de renforcer les moyens humains, matériels et financiers du dispositif cybermalveillance.gouv.fr qui accompagne les victimes de cyber-attaques avec, notamment, une assistance en ligne et une mise en relation avec des experts en cyber-sécurité dans les territoires. 

Une augmentation du soutien de l’État qui permettrait de réaliser dans de bonne condition la création d’un Observatoire national de la menace et du risque numérique, tout comme celle d’un recueil anonyme des cyber-attaques, réclamé par l’élue.

Celle-ci souhaite également favoriser « l’achat par les collectivités et les administrations de solutions souveraines » puisque la France dispose avec ses entreprises de cybersécurité « des meilleurs outils de cyber-protection après les États-Unis, Israël et la Grande-Bretagne ». 

Interdiction d’assurer les rançons

Par ailleurs, elle recommande d’imposer aux entreprises qui travaillent avec l’État, des opérateurs d'importance vitale (OIV) ou des opérateurs de services essentiels (OSE) à se doter d’une police d’assurance cyber.

Et si près de 87 % des grands groupes bénéficient d’un programme d’assurance cyber, c'est le cas de seulement 8 % d’ETI, 0,0026 % des PME et 1 % des collectivités. Un marché de la cyber-assurance que l’élue juge encore « timide » avec un taux de pénétration « très faible », pour lequel elle propose de créer une nouvelle branche d’assurance dédiée et de développer des « solutions hybrides de cybersécurité et de cyber-assurance » pour les petites et moyennes entreprises et les collectivités.

Bien qu’elle appelle à mettre en place une offre d’assurance adaptée, Valéria Faure-Muntian estime qu’il conviendrait d’inscrire dans la loi « l’interdiction pour les assureurs de garantir, couvrir ou d’indemniser la rançon et se porter davantage vers la prévention, l’accompagnement et l’assurance des conséquences pour une entreprise ».

Alors que 14 % des entreprises françaises ont déjà fait l’objet d’une cyber-attaque avec une demande de rançon, près de deux sur trois admettent l’avoir payée. « Ce qui fait de la France l’un des pays qui paye le plus au monde ces demandes de rançons », pointe la députée.
 




Santé publique
Des chercheurs défendent l'idée d'une compétence santé pour les communes et intercommunalités
Dans une tribune publiée hier, trois chercheurs défendent, de façon très argumentée, la nécessité de renforcer les compétences des communes et des intercommunalités en matière de santé. « La France, écrivent-ils, a besoin de capacités territoriales rénovées en santé publique, reconnues légalement et accompagnées financièrement ».

C’est une tribune parue dans Le Monde daté du 19 octobre et signée par deux sociologues (Daniel Benamouzig et Renaud Epstein) et un chercheur en sciences politiques (Patrick Hassenteufel). Pour eux, il est indispensable de « renforcer les compétences des communes et intercommunalités dans le domaine de la santé ».

La « faiblesse criante » des échelons locaux

Les chercheurs rappellent que « les épidémies ont souvent renforcé les compétences sanitaires des pouvoirs locaux ». Celle que nous venons de vivre a, à la fois, montré le rôle crucial joué par les communes notamment et « les limites » de leurs possibilités d’action. 

Tout au long de la crise qui dure depuis le mois de mars 2020, les maires ont en effet été en première ligne pour gérer la situation – comme Maire info a eu l’occasion de le montrer depuis 18 mois : sur les aspects directement sanitaires, ils ont notamment géré, souvent à la place de l’État, la distribution de masque, la mise en place de capacités de tests, et surtout celle des centres de vaccination. Faut-il rappeler qu’au tout début de la campagne de vaccination, le gouvernement tablait sur 600 centres de vaccination – soit six par département – et qu’il a fallu l’action résolue des maires pour que le nombre passe à plus de 1500 dès la fin février ?

Les auteurs de la tribune rappellent les relations compliquées qui se sont mises en place entre les communes, d’un côté, et les Agences régionales de santé : « Il aura fallu que les élus et les acteurs locaux multiplient les interpellations et les propositions en direction de ces agences étatiques, (…) avec des succès divers. » Malgré tout, « l’épidémie a révélé une faiblesse criante des échelons locaux : les opérateurs territoriaux de santé publique ont manqué à des moments critiques ». La carence de ces « opérateurs locaux », écrivent encore les chercheurs, a été un handicap lorsqu’il a fallu faire du « tracing » à une échelle très fine ou « pour prendre en charge la vaccination des personnes âgées ou précaires ». Résultat : « La France s’est tournée vers les acteurs du soin : médecins, infirmiers libéraux ou organismes de Sécurité sociale – chargés du remboursement des soins de ville – se sont ainsi transformés en acteurs de santé publique. » 

Investissement local dans les politiques de santé

Les auteurs pointent très justement un certain nombre de questions soulevées depuis des mois par les associations d’élus. S’ils saluent l’engagement « de milliers de professionnels et d’agents publics », ils notent que cet engagement « ne pourra se poursuivre sans perturber leurs missions habituelles ». On pourrait ici citer l’exemple des centres de vaccination, qui mobilisent, dans de nombreuses communes, des locaux, des moyens et des agents qui, de facto, ne peuvent plus depuis des mois être affectés à leurs missions normales. Dans combien de communes l’activité associative est-elle pour partie paralysée parce que la salle polyvalente est mobilisée depuis le mois de février pour servir de centre de vaccination ?

Les auteurs de la tribune énumèrent les différents biais – au-delà de l’épidémie elle-même – à travers lesquels les acteurs locaux « s’investissent dans les politiques de santé », mais « sans que le droit leur reconnaisse une compétence explicite » : contrats locaux de santé, actions permettant de favoriser l’installation de professionnels de santé libéraux, « création de maisons de santé pluriprofessionnelles ». Ou encore, de façon plus transversale et préventive, développement des mobilités actives ou projets alimentaires territoriaux. 

« Démocratie sanitaire de proximité »

Les chercheurs plaident donc clairement pour qu’une compétence « élargie en santé » soit confiée aux communes ou à leurs groupements, en profitant par exemple de l’opportunité qu’offre le débat sur le projet de loi 3DS – qui, en l’état, ne propose que « de timides mesures visant à renforcer la participation des communes et des départements à la sécurité sanitaire territoriale ». « Il faut donner [aux communes et aux EPCI] les compétences sanitaires du futur, qui débouchent sur d’autres politiques, écrivent les trois chercheurs. Les compétences juridiques ne se substituent pas aux choix politiques, mais elles les rendent possibles. »

Si elles devenaient réalité, ces nouvelles compétences pourraient « être débattues localement avec la population », favorisant une « démocratie sanitaire de proximité favorisant une réappropriation partagée des décisions publiques ». Les trois signataires demandent aussi que l’État ne se contente pas de transférer la compétence mais « accompagne les territoires les moins dotés par des soutiens financiers et en expertise ». « Il est temps, concluent-ils, que de nouvelles compétences locales en santé soient reconnues légalement, accompagnées financièrement et développées à hauteur des enjeux et des besoins actuels de nos concitoyens. » 

Ces propositions, qui rejoignent celles que défend, depuis deux ans, Territoires unis (qui regroupe l’AMF, l’ADF et Régions de France), seront-elles entendues par le gouvernement, qui semble – c’est le moins que l’on puisse dire – très réticent à confier aux collectivités de nouvelles responsabilités en la matière ? Quoi qu’il en soit, le débat continuera certainement au congrès de l’AMF, lors duquel, le jeudi 18 novembre à 9 h 30, un forum sera consacré au thème : « Agir pour la santé des habitants ». 




Territoires
Une réduction des disparités entre les régions, selon le baromètre de l'ANCT
Les inégalités se réduisent entre les régions, masquant toutefois des disparités importantes et parfois croissantes à une échelle plus locale, selon le nouveau baromètre de la cohésion des territoires publié par l'ANCT.

Le baromètre 2020 de la cohésion des territoires, publié le 12 octobre par l’Agence nationale de cohésion des territoires (ANCT) montre une « réduction des disparités entre régions », selon la ministre de la Cohésion des territoires et des Relations avec les collectivités territoriales, Jacqueline Gourault, qui en signe l’introduction. Cependant, les inégalités restent fortes, notamment à l’échelle locale, et si les métropoles et les régions littorales confirment leur attractivité et leur dynamisme, ce sont elles aussi qui « concentrent les plus grandes difficultés ».

En effet, si le taux de croissance de l’emploi et de création d’entreprises est plus important dans les métropoles, elles concentrent aussi plus de chômage et de difficultés pour se loger : « Certains quartiers politique de la ville (QPV) ont un taux de pauvreté parfois trois fois plus élevé que le reste de la moyenne métropolitaine », établit le baromètre.

Toutefois, « l’indicateur relatif au revenu médian disponible par unité de consommation montre en effet une réduction des disparités entre régions, avec une hausse des revenus enregistrée dans l’ensemble d’entre elles », avance Jacqueline Gourault, même si cela est pour partie dû à la part croissante des retraites et des prestations sociales (RSA, APA, AAH) dans le revenu disponible des Français. 

Cette part progresse partout, avec une moyenne nationale de 33,8 % en 2017, contre 31,4 % en 2012. Ce n’est pas dans les Outre-mer mais en Nouvelle-Aquitaine, en Bretagne et en Occitanie que cette part est la plus forte ; elle s’explique par la forte proportion de personnes âgées dans leur population, tandis que dans d’autres régions en tête de classement, comme les Hauts-de-France, elle est due au taux important de pauvreté. Les différences sont plus marquées au niveau local, entre les zones d’emploi dynamiques et celles en déprise, comme entre le bassin bordelais et son voisin de Royan.

Le baromètre propose un indicateur intéressant sur le ressenti de la pauvreté : issu d’enquêtes en face-à-face du ministère des Solidarités et de la Santé, il montre que si la proportion des Français qui pensent courir un risque de devenir pauvre dans les cinq prochaines années décroît, en revanche, la proportion de ceux qui se considèrent déjà comme pauvres a très fortement augmenté : de 8 à 17 % entre 2014 et 2018. C’est dans les villes moyennes, entre 20 000 et 100 000 habitants, que cette part est la plus forte.

CIF, 4G, artificialisation des sols

Le baromètre contient six chapitres qui couvrent des sujets aussi variés que la démographie, l’emploi, le niveau de vie, l’attractivité économique et résidentielle. La maille retenue pour l’analyse est l’intercommunalité, ce qui a pour effet de gommer les inégalités internes que l’on peut constater partout entre les villes-centre et leur périphérie, rurale ou non, mais permet de dresser un portrait d’ensemble du territoire assez complet.

À ce propos, les auteurs du baromètre constatent que « l’intégration fiscale des intercommunalités tend a s’accroître et les disparités, par conséquent, (tendent) a se réduire ». S’il faut relativiser cette statistique, en raison de la grande recomposition de la carte intercommunale, en 2016, le coefficient d’intégration fiscal moyen des EPCI (qui mesure le rapport entre la fiscalité qu’ils lèvent et la totalité de la fiscalité levée sur leur territoire par les communes et leurs groupements) est de 37,9% en 2019 contre 35,6 % en 2016.

Un nouvel indicateur intéressant est le temps d’accès moyen, par la route, à un « panier d’équipements de la vie courante » : en langage courant, le temps que l’on met en voiture pour accéder à une poste, banque, epicerie-superette, boulangerie, boucherie, école, médecin, pharmacie... Dans les communes urbaines les plus denses, il est de 2,6 minutes, contre 9,7 minutes dans les zones les plus rurales – ce qui n’est pas en soi un écart si important.

En termes d’aménagement du territoire, le baromètre montre un ralentissement de l’artificialisation des sols, c’est-à-dire de la construction « pouvant entraîner une imperméabilisation partielle ou totale » des sols d’une parcelle naturelle, agricole ou forestière. Cette artificialisation, ciblée par plusieurs lois récentes dont la loi Climat et résilience, reste importante : 100 000 hectares tout de même artificialises entre 2013 et 2017, mais une réduction importante de 20 % par rapport à la période 2009-2012 (129 000 ha). Sans surprise, ce sont les régions où la pression démographique est la moins importante qui s’en tirent le mieux, comme le Grand Est ou le Centre-Val-de-Loire, même si des régions en déprise démographique comme les Hauts-de-France ou la Normandie présentent un taux d’artificialisation deux fois supérieur.

Enfin, source d’inégalité fréquemment citée par les maires des zones rurales et périphériques, la couverture du réseau de téléphonie mobile progresse nettement : si en 2017, seulement 70,6 % des territoires étaient couverts en 4G par au moins deux opérateurs, en 2019, ils étaient 86,5 %. « Si l’Ile-de-France est couverte à près de 100%, la Corse ou Provence-Alpes-Côte-d’Azur sont les régions de France métropolitaine les moins bien dotées (couverture à 75 %) », révèle le baromètre, qui ajoute que les écarts entre régions se réduisent, étant passés de 43 points à 26 points en deux ans. Au niveau des intercommunalités, c’est la même chose : les EPCI les moins bien couverts sont situés dans les territoires les moins denses au sud-est des régions Pays-de-la-Loire, Ile-de-France, Hauts-de-France.

Accéder au baromètre 2020 de la cohésion des territoires.
 




Santé publique
650 millions d'euros pour la stratégie d'accélération « Santé numérique »
En juin dernier, le président de la République avait annoncé la mise en place de la stratégie gouvernementale d'accélération « Santé numérique » dans le cadre du plan « Innovation santé 2030 ». Quelques mois après, le gouvernement dévoile les budgets et les mesures qui l'accompagnent. Décryptage. 

Ce lundi 18 octobre, Olivier Véran, ministre des Solidarités et de la Santé, Frédérique Vidal, ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation, Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Économie et des Finances et Cédric O, secrétaire d'État chargé du Numérique, se sont rendus à Station F (une pépinière de start-up située à Paris) pour préciser les contours de la stratégie d’accélération « Santé numérique ». 

Son but ? Encourager « une véritable médecine dite des ‘’5 P’’, a déclaré Olivier Véran lors de son discours. Une médecine plus préventive, plus prédictive, plus personnalisée, plus participative et basée sur des preuves. » Et c’est notamment en encourageant l’émergence d’un écosystème important de la santé numérique en France et en développant la capacité de traiter la donnée de santé de manière sécurisée et indépendante, que le gouvernement veut réussir ce pari. 

Avec le plan « Innovation santé 2030 » de plus de 7,5 milliards d’euros annoncé le 29 juin dernier lors du Conseil stratégique des industries de santé (CSIS), l'objectif du gouvernement est de faire de la France l'une des premières nations innovantes en santé. Fort de ces ambitions, la stratégie d'accélération « Santé numérique » est dotée de 650 millions d'euros, provenant notamment du Programme d'investissements d'avenir (PIA). 

L’importance de la recherche et de la formation 

La formation à la santé numérique semble être l’axe incontournable de ce plan. Création de nouveaux cours dans les filières médicales, émergence de nouveaux cursus visant à former 2 000 ingénieurs en santé, 200 juristes en santé numérique et 450 experts en réglementation des dispositifs médicaux numériques… Un budget de 81 millions d’euros va être déployé à cette fin. Des appels à projets seront ouverts pour mettre en œuvre ces mesures d’ici la fin de l’année. 

Un budget de 60 millions d’euros sera aussi accordé à la recherche. « L’objectif est de lancer les défis scientifiques et structurer les communautés de recherche pour obtenir des avancées scientifiques et faire émerger des technologies de rupture d’ici cinq à dix ans », peut-on lire dans le dossier de presse. Il est ainsi prévu un PEPR (programmes et équipements prioritaires de recherche exploratoires) pour concentrer les efforts de la recherche sur une thématique qui pourrait positionner la France comme leader dans ses innovations du futur. Les contours précis de ce PEPR seront proposés et pilotés par l’Inserm et l’Inria au début de l’année 2022. 

Des appels à projets qui vont se multiplier 

Le troisième axe de ce plan vise à dynamiser et accompagner la maturation des innovations en France. Avec un budget de 202 millions d’euros au total, la filière de l’imagerie médicale fera l’objet d’un appel à projet avec une enveloppe de 95 millions d’euros sur 2022-2025, via le concours i-Nov et le guichet I-Démo de BPIfrance. Les « nouveaux usages du numérique » feront eux aussi l’objet d’un appel à projets, de 50 millions d’euros jusqu’en 2025, via le concours i-Nov. Ces appels à projets sont annoncés pour février 2022. Un autre appel à projets autour de la télésanté et la fracture numérique sera lancé « afin d’encourager le déploiement de solutions numériques de téléconsultation/télésanté accessibles aux personnes en situation de handicap ou de perte d’autonomie », comme précisé dans le communiqué de presse. 

Il reste à savoir si ces appels à projets seront ou non ouverts aux collectivités. Interrogés hier sur ce point par Maire info, les cabinets des ministères concernés n’avaient pas vraiment de réponse claire, indiquant simplement que les collectivités pourraient éventuellement « s’associer aux porteurs de projets ». 

Le gouvernement dédie également un budget de 168 millions d’euros pour l’évaluation concrète de la performance des solutions de santé numérique. 100 millions seront déployés sur 5 ans pour l’appel à projets « évaluation du bénéfice médical et/ou économique des dispositifs médicaux numériques ou à base d’intelligence artificielle ». Le premier appel a été lancé le 15 septembre 2021. Un budget de 20 millions d’euros annuel est dédié pour chaque vague d’appel à projets. En complément, un budget de 63 millions d’euros permettra enfin de créer 30 tiers lieux, qui serviront de « terrain d’expérimentation », dans des organisations de soins, d’ici 2025.

Objectif principal : faciliter la vie des entrepreneurs 

La question du numérique en santé est en constante mutation. Les chiffres démontrent cette évolution à grande vitesse : En 2019, 140 000 télé-consultations avaient été réalisées contre 8,4 millions en 2020, et 350 000 applications mobiles de santé, dont 90 000 nouvelles applications en 2020, ont été créées dans le monde. Une cadence difficile à suivre pour celles et ceux qui veulent contribuer à rendre l'e-santé plus performante en France. C’est pourquoi le dernier axe, avec 35 millions d’euros de budget, vise à « favoriser les conditions de la réussite d’un déploiement à grande échelle ». 

« Afin de faciliter la vie des entrepreneurs, le ministère des solidarités et de la santé a mis en place dès 2020 un guichet d’orientation G_NIUS (Guichet national de l’innovation et des usages en e-santé), est-il précisé dans le dossier de presse. Dès octobre 2020, G_NIUS a mis en ligne de premiers contenus et services dans une démarche de guichet transverse. Cette approche a fédéré les acteurs nationaux et régionaux qui interagissent avec les innovateurs en santé numérique, soit dans leur mission de régulateur (acteurs nationaux institutionnels) soit dans leurs missions d’accompagnement (acteurs dans les territoires). »

Cette visite a été aussi l’occasion pour Olivier Véran d’annoncer que « l'espace numérique de santé » sera déployé pour tous les Français le 1er janvier 2022, « après une expérimentation satisfaisante dans trois départements pilotes ». Cet exemple permet notamment de se faire une idée concrète de ce qui va être mis en place sur le territoire national dans les prochaines années pour encourager l'e-santé. 

Il est tout de même notable que, dans le dossier de presse de 44 pages du gouvernement, le mot de « collectivités » n’apparaisse pas une seule fois. Comme si elles n’étaient pas concernées par une stratégie qui, pourtant, vise à s’attaquer à l’un des problèmes les plus cruciaux rencontrés par les élus : celui de la désertification médicale.  







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