Édition du mercredi 22 septembre 2021

Coronavirus
Obligation vaccinale pour les personnels des crèches : l'imbroglio
Depuis début septembre, plusieurs administrations centrales estiment que les personnels des crèches ne sont pas soumis à l'obligation vaccinale. Ce n'est, apparemment, pas l'avis de la justice administrative. 

Depuis que la loi du 5 août 2021 sur le pass sanitaire et l’obligation vaccinale a été publiée, la question se posait : les personnels des crèches – professionnels de santé ou non – sont-ils soumis à cette obligation ? Non, ont répondu la Direction générale des collectivités locales (DGCL) et la Direction générale de la cohésion sociale (DGCS) dès le 1er septembre. Si, a rétorqué, hier, le tribunal administratif de Pontoise. Le point pour essayer de comprendre. 

La position des administrations centrales

Le 1er septembre dernier, la DGCL mettait à jour sa « foire aux questions » (FAQ) du 11 août sur le chapitre « quels sont les agents territoriaux concernés par l’obligation de vaccination ? ». Y était ajoutée cette phrase : « Les professionnels de crèche, d’établissements ou de services de soutien à la parentalité ou d’établissements et services de protection de l’enfance ne sont pas concernés par l’obligation vaccinale. » La DGCL, en cela, s’appuyait sur une instruction de la DGCS, à laquelle elle renvoie dans sa FAQ. Cette instruction, page 16, est tout aussi claire : « En revanche, ne sont pas concernés par l’obligation vaccinale les professionnels de crèche, d’établissements ou de services de soutien à la parentalité ou d’établissements et services de protection de l’enfance. » 

Cette information importante a été relayée – à la demande de la DGCL elle-même – par l’AMF et les autres structures concernées. 

Contestation

Déjà, à ce moment, un certain nombre de juristes ont contesté cette interprétation au regard de la loi du 5 août, notamment parce que la loi impose l’obligation vaccinale à tous les professionnels de santé et que dans les crèches travaillent, à tout le moins, des auxiliaires de puériculture, qui sont des personnels de santé. Par ailleurs, plusieurs textes officiels évoquent le cas des personnels travaillant « aux côtés » des professionnels de santé, pour leur imposer également l’obligation vaccinale, ce qui pouvait conduire à comprendre que tous les personnels travaillant, dans les structures de la petite enfance, « aux côtés » des auxiliaires de puériculture, étaient concernés. 

C’est apparemment ce qu’a estimé aussi la commune de Nanterre (Hauts-de-Seine), qui a décidé, fin août, d’imposer la vaccination obligatoire à tous les agents territoriaux affectés dans les établissements de la petite enfance de la commune. Le syndicat CFDT a porté l’affaire devant le tribunal administratif, pour demander la suspension de cette décision et « le libre accès des agents territoriaux aux établissements de la petite enfance », en évoquant, notamment, les documents diffusés par la DGCL et la DGCS. 

Contre toute attente, le juge des référés, dans une décision rendue le 17 septembre, a donné raison au maire et tort au syndicat. 

La décision du tribunal

Le tribunal a estimé en effet que la loi du 5 août recense « les professionnels de santé soumis à l’obligation vaccinale en raison de leur seule appartenance à une profession de santé reconnue par la 4e partie du Code de la santé publique, indépendamment du lieu où ils exercent leur activité professionnelle ». Il est « constant », rappelle le juge, que cette partie du Code de la santé publique mentionne, parmi les professions de santé, « les médecins, infirmiers, (…) auxiliaires de puériculture, qui sont des professions susceptibles d’exercer en crèche quel que soit le statut de l’établissement ou du service. » Autrement dit, même si les crèches ne sont pas des lieux « dédiés à titre principal à des activités de soin », comme le défend la CFDT à l’appui de son argumentation, rien dans la loi du 5 août « ne conditionne l’obligation vaccinale au fait que les professionnels de santé (…) doivent effectivement exercer leur activité dans un lieu ou un service principalement dédié aux activités de soin ». 

La décision de la commune de Nanterre n’a donc, aux yeux du juge, rien d’illégal, ce qui signifie que ce tribunal considère que l’obligation vaccinale doit s’appliquer dans les crèches. 

Quant à la question des prises de position de la DGCL et de la DGCS, le juge des référés ne les prend aucunement en considération. En des termes choisis, le juge explique que ce n’est pas parce que les administrations centrales ont fait une erreur d’interprétation que cela change le contenu de la loi votée par le Parlement : « Les prises de position de ces administrations ne sauraient (…) avoir pour objet ou pour effet de restreindre la liste des personnes assujetties à l’obligation vaccinale définie par le législateur. » 

Reste à savoir maintenant si l’affaire en restera là – ce qui voudrait dire que désormais, la jurisprudence impose l’obligation vaccinale dans les crèches. Ou si l’affaire sera portée devant le Conseil d’État. Pour l’instant, la DGCL n’a pas modifié la FAQ du 1er septembre, toujours disponible sur son site.

Si cette décision devait faire jurisprudence, cela mettrait les structures dans une situation très problématiques, comme le soulignait déjà l’AMF en juillet dernier, alors que l’on ne savait pas encore quel serait le sort réservé aux crèches. Dans un courrier co-signé avec plusieurs fédérations de professionnels de la petite enfance, y compris les acteurs du service privé non lucratif, l’AMF demandait instamment que le gouvernement n’applique pas strictement l’obligation vaccinale au sein des établissements d’accueil du jeune enfant : le secteur étant « en très grave pénurie de main-d’œuvre », les signataires craignaient, en cas d’application de l’obligation vaccinale, de se trouver « contraints de refuser d’accueillir des enfants par manque de personnel ». 

Accéder à la décision du tribunal administratif de Cergy-Pontoise.




Sécurité
Projet de loi sur la sécurité intérieure : plusieurs dispositions intéressent directement les maires
L'examen en première lecture à l'Assemblée nationale du projet de loi Responsabilité pénale et sécurité intérieure a débuté hier. Zoom sur les dispositions (et les amendements) qui concernent les collectivités territoriales. 

Après une séance de questions au gouvernement assez largement consacrée à la crise des sous-marins, l’Assemblée nationale, pour l’ouverture de sa deuxième session extraordinaire de septembre, a engagé les débats sur le projet de loi Responsabilité pénale et sécurité intérieure. Le texte a d’abord été présenté par le garde des Sceaux, Éric Dupond-Moretti, qui est revenu sur ses dispositions purement judiciaires, notamment sur la question de la responsabilité ou de l’irresponsabilité pénale.

Le ministre de la Justice a également souligné que le texte contient des propositions de modifications du Code pénal afin d’aggraver la répression contre les actes de violence envers « ceux qui assurent notre sécurité », dont les policiers municipaux. Gérald Darmanin, ministre de l’Intérieur, a quant à lui développé sur la partie « sécuritaire » du texte : lutte contre les rodéos urbains, drones et caméras embarquées. 

Principales dispositions du texte intéressant les maires

C’est le titre II du projet de loi qui est consacré au durcissement des peines pour les atteintes commises contre les forces de sécurité. Les peines prévues par le Code pénal seraient alourdies lorsque des violences sont commises contre un militaire, un gendarme, un policier national ou municipal, un agent des douanes, un sapeur-pompier volontaire ou un agent de l’administration pénitentiaire. 

Par ailleurs, le même titre II comprend des mesures durcissant le Code de la route afin de réprimer plus durement les auteurs de « rodéos urbains ». Si le ministre de l’Intérieur s’est félicité du bon « fonctionnement » de la loi du 3 août 2018, il estime nécessaire d’aller plus loin. Le projet de loi double la peine encourue pour refus d’obtempérer, et durcit l’arsenal législatif en matière de saisie des véhicules incriminés. Le texte permet la confiscation systématique du véhicule qui a servi à commettre le délit, sauf s’il appartient à un autre propriétaire qui est en mesure de prouver sa bonne foi. 

Le gouvernement remet sur la table le sujet de l’utilisation des drones par la police et la gendarmerie nationales, notamment lors des manifestations. Rappelons que les dispositions introduites à ce sujet dans la loi Sécurité globale, au printemps dernier, avaient finalement été censurées par le Conseil constitutionnel. Le gouvernement a donc revu sa copie, et assure donner cette fois les assurances nécessaires pour garantir « le droit au respect de la vie privée ».  

Enfin, après avoir généralisé l’usage des caméras-piétons portées par les forces de l’ordre, le gouvernement introduit dans son texte l’usage des caméras embarquées dans les véhicules, notamment ceux des gendarmes, des policiers nationaux et des sapeurs-pompiers. Les véhicules concernés seraient marqués par une « signalétique spécifique » indiquant la présence d’une caméra, et les images devraient pouvoir être transmises « en temps réel » aux postes de commandements. Il serait interdit, en revanche, de munir ces caméras d’un dispositif de reconnaissance faciale. 

Les amendements en discussion

Plus de 400 amendements ont été déposés sur ce texte. Le sort de l’un d’entre eux au moins est déjà scellé : celui qui propose d’étendre le durcissement des peines aux auteurs de violences contre les gardes-champêtres. Le garde des Sceaux a déclaré, dans son propos introductif, que le gouvernement y était « favorable », dans la mesure où les missions des gardes-champêtres « rejoignent celle de la police municipale ». 

Un important amendement, porté par la députée de la Seine-et-Marne Patricia Lemoine (Agir), est issu « des propositions de l’AMF ». Il a finalement été retiré avant la discussion, et ne sera pas débattu. Mais la question posée est intéressante : il était proposé de permettre, à titre expérimental, aux policiers municipaux et aux gardes-champêtres d’utiliser des drones dans l’exercice de leurs missions « aux fins d’assurer l’exécution des arrêtés de police du maire », notamment en matière de « respect des règles d’urbanisme » et de « respect des arrêtés municipaux relatifs à l’environnement et aux dépôts sauvages sur les terrains communaux ». L’usage de drones serait également autorisé pour « la recherche de personnes à secourir ». L’amendement fixe précisément le cadre de cette captation d’images et la soumet à une autorisation préfectorale. L’expérimentation était proposée pour une durée de cinq années, et devait faire l’objet, pendant cette période, à un débat au sein de l’assemblée délibérante des communes concernées. 

D’autres amendements seront à suivre. Plusieurs d’entre eux visent à étendre le durcissement des peines prévu au titre II aux « personnes investies d’un mandat électif public ». « Les élus ne sont pas au-dessus des lois, mais quand on s’en prend à eux, c’est la République que l’on atteint », plaident les auteurs d’un de ces amendements.

Un autre amendement vise, non sans logique, à étendre certaines dispositions prévues pour lutter contre les rodéos urbains aux policiers municipaux, afin notamment que ceux-ci puissent accéder directement au fichier Dicem (déclaration et identification de certains engins motorisés). Le gouvernement serait, semble-t-il, favorable à cette évolution.

Enfin, plusieurs députés proposent par amendement de supprimer l’article 17 du projet de loi, qui dispose que les gardes privés assermentés pourraient constater par procès-verbal certaines infractions en matière de police de la circulation et de la sécurité routière. « Le pouvoir de constater, par procès-verbal, les infractions aux règles concernant la circulation, l’arrêt et le stationnement des véhicules doit donc demeurer une prérogative des forces de sécurité et de la police municipale », estiment les signataires de cet amendement. 
La discussion de ce texte à l’Assemblée nationale doit durer jusqu’à jeudi.

Télécharger le texte de la commission. 




Finances locales
Projet de loi de finances pour 2022 : les régions particulièrement irritées
Le projet de loi de finances pour 2022 est présenté ce matin en Conseil des ministres. Dès hier, l'association Régions de France s'est insurgée contre la baisse des dotations que celles-ci vont subir, jugeant qu'il s'agit d'une « mauvaise manière » du gouvernement.

C’est dans son édition de demain que Maire info reviendra précisément sur le contenu du projet de loi de finances pour 2022, qui est officiellement présenté ce matin. Mais les premières informations sorties de la présentation de ce texte devant le Comité des finances locales (CFL), hier, font état d’une relative stabilité de ce dernier PLF de la mandature sur la question des finances locales. Les concours de l’État aux collectivités territoriales devraient même être en légère hausse et la dotation de soutien à l’investissement local (Dsil) connaîtrait une augmentation de quelque 350 millions d’euros, fléchés vers les contrats de relance et de transition énergétique (CRTE). 

Un autre motif de satisfaction pour les collectivités, selon les premières informations disponibles, serait la prise en compte par le gouvernement de certaines recommandations du CFL sur les indicateurs financiers entrant en compte dans le calcul de la DGF. 

50 millions en moins pour les régions

Mais l’association Régions de France n’a pas attendu la présentation officielle du projet de loi pour s’insurger, par voie de communiqué de presse, hier, sur le traitement réservé aux régions. Les dotations de celles-ci seraient en effet en baisse de « 50 millions d’euros », la TVA attribuée aux régions en remplacement de la DGF augmentant cependant de 9%. Toutefois, le total des diminutions opérées sur le budget des régions depuis 2017 atteindrait, selon Régions de France, 850 millions d’euros. 

L’association se montre particulièrement choquée par le fait que les régions sont les « seules mises à contribution. Les communes, les départements ? Rien ! Du jamais vu », s’insurge l’association. Il est quelque peu surprenant de voir l’association regretter que les communes et les départements ne voient pas leurs dotations baisser, même si « l’amputation » du budget des régions est bien réelle. 

L’association rappelle pourtant que les régions ont « fait le choix de participer largement à l’effort de relance », ont « engagé plus de 2,2 milliards de dépenses dans l’urgence » et signé pour 2021 et 2022 « pour plus de 15 milliards d’euros d’accords de relance ». 

Régions de France réfute l’argument selon lequel « les finances publiques sont en crise », se demandant alors « d’où sortent les 350 millions annoncés pour la Dsil ? ». L’association souligne que lors de la rencontre du 13 septembre dernier entre les présidents de région et le Premier ministre, celui-ci « s’est bien gardé de leur annoncer la potion amère qui se préparait à Bercy ». Ceux-ci attendent maintenant, au moment du congrès de Régions de France le 30 septembre, que Jean Castex « réponde à des questions précises ». Notamment : « Y aura-t-il un volet consacré aux infrastructures de transport dans les CPER ? Le gouvernement prendra-t-il, comme il s’y était engagé l’an dernier, des mesures pour compenser les pertes de recettes des transports publics pour Île-de-France mobilités (1,3 milliard d’euros) comme pour les autorités organisatrices dans les autres régions (300 à 400 millions d’euros) ? ».

Régions de France conclut son communiqué en constatant avec amertume que les régions, en matière de relance et de reprise, doivent agir « dans la défiance, parfois même contre la volonté politique du gouvernement comme si celui-ci voulait en réduire le poids pour s’arroger le rôle-titre ». 
Maire info reviendra donc dans son édition de demain sur le contenu du PLF pour 2022.




Social
Les épiceries solidaires pour lutter contre la précarité alimentaire
Alors que la demande d'aide alimentaire ne faiblit pas, les communes peuvent se tourner vers la création d'épiceries solidaires. Un appel à candidatures soutient leur développement.

La demande d'aide alimentaire avait augmenté pendant la crise sanitaire. Des personnes qui « se débrouillaient » sans avoir recours aux aides pour diverses raisons (méconnaissance, pudeur, etc. ) n'ont eu d'autre choix pendant la crise que d'y recourir. « Nous savons que c'est durable, notamment pour certains publics, jusque là absents des files d'attente », mesure aujourd'hui Gaël Perdriau, président de la commission affaires sociales de l'AMF.

C'est notamment le cas des jeunes, et particulièrement des étudiants. « Pas mal de jobs étudiants n'ont pas repris donc les besoins perdurent », soupèse l'élu. Cela justifie par exemple dans sa ville de Saint-Étienne (Loire), le coup de pouce de la municipalité à l'ouverture  d'une deuxième épicerie solidaire pour étudiants AGORAé. 

La réponse complémentaire des épiceries solidaires

Ce sujet de la précarité alimentaire était une nouvelle fois au coeur des échanges entre les élus locaux, lors de la commission sociale de rentrée de l'AMF. Avant l'été, les maires avaient rencontré les Restos du coeur et s'étaient intéressés à leurs projets de jardins partagés. Cette fois, ils ont échangé avec le réseau des épiceries solidaires (ANDES).

Près de 450 épiceries existent actuellement, réparties relativement partout sur le territoire national. En 2020, elles ont accueilli et accompagné 200 000 « clients bénéficiaires » - représentant 25 millions repas. Elles ressemblent à un « magasin de quartier », avec des produits « frais et de qualité » précise l'ANDES, à la nuance près qu'elles sont réservées à des personnes en « vulnérabilité économique et sociale » qui viennent y faire leurs courses à un prix inférieur à la valeur marchande (entre 10 à 30 %). L'accès est limité dans le temps, pour que l'épicerie reste un coup de pouce, qui permet à une personne pendant ce temps d'économiser, pour rembourser des dettes ou financer un projet (réparation de voiture, etc.).

Lauréat du plan de relance pour le développement d’une alimentation locale et solidaire depuis cet été, le réseau a les moyens (techniques et financiers) pour accompagner la création de 300 nouvelles épiceries solidaires, dont 40 itinérantes, plus adaptées à des territoires ruraux. 

Dans les communes, d'autres formes de réponses se développent en plus des distributions classiques de colis ou de produits alimentaires. Saint-Étienne est également partie prenante d'un marché solidaire, en partenariat avec le Secours Populaire. Ce marché se tient une fois par mois, et peut être à l'avenir de façon hebdomadaire. Des personnes répertoriées par des associations peuvent y venir faire leur marché, de produits de saison, comme au marché, mais moins cher. L'association et la collectivité compensent la différence auprès des producteurs. « Un cuisinier est également présent pour distribuer des recettes et expliquer comment cuisiner les légumes que les gens n'ont pas l'habitude de cuisiner, ce qui permet également de diversifier l'alimentation », apprécie Gaël Perdriau. 

L'AMF rappelle à cette occasion que le pass sanitaire n'est pas demandé pour ces distributions alimentaires. 
À noter que la précarité alimentaire sera l'un des sujets abordés lors du forum sur les solidarités qui se tiendra mercredi 17 novembre au Congrès des maires de France. 




Fonction publique
Des agents du service public s'interrogent sur le sens de leur mission
À l'Éducation nationale, à l'hôpital, au sein des collectivités, un certain malaise d'agents du service public, fonctionnaires comme contractuels, est pointé du doigt par une enquête réalisée par le collectif Nos services publics et mise en ligne cette semaine. Le manque de moyens et le sentiment de servir autre chose que l'intérêt général en sont deux des principales causes.

La perte de sens gagne-t-elle les agents du service public ? « Alors que la grande majorité déclare avoir rejoint le service public pour servir l’intérêt général (68 % des sondés) », la quasi-totalité (97 %) des 4 555 répondants, des catégories A pour 60 % d’entre eux, s’est déjà dit au moins une fois dans un cadre professionnel : “c’est absurde… ou si cela a un sens ce n’est pas celui pour lequel je me suis engagé”. 80 % des répondants déclarent même être confrontés "régulièrement” ou “très fréquemment” à ce sentiment d’absurdité dans l’exercice de leur travail, synthétisent les commanditaires de l’enquête. 

Ce « sentiment d’absurdité » est présent dans tous les secteurs et pour tous les statuts de répondants, et plus encore chez les agents de catégorie A (parmi les répondants, 34 % rencontrent ce sentiment d’absurdité « très fréquemment » chez les agents de catégorie A, 31 % chez les agents de catégorie B, 27 % chez les agents de catégorie C et 21 % chez les contractuels). Il s’exacerbe avec les années : les moins de 30 ans sont « seulement » 23 % à affirmer être touchés par ce sentiment très fréquemment, quand ils sont 33 % entre 40 et 49 ans et 35 % entre 50 et 59 ans. 

Certes, reconnaissent en toute transparence les membres du collectif, « les résultats et les chiffres mis en avant ne peuvent être extrapolés à l'ensemble du secteur public ». Notons que les répondants à cette enquête semblent appartenir majoritairement à la fonction publique de l'État, et que ces résutats ne sont pas forcément représentatifs du sentiment qui règne dans la « territoriale ». Mais « le nombre de réponses (4 555), le nombre de témoignages écrits recueillis (3 290) et leur niveau de concordance sont néanmoins significatifs d'un sentiment de mal-être partagé chez les agents des services publics dans tous les secteurs, par tous les statuts et par tous les âges ». 

« Un immense gâchis d’énergie, d’argent, d’avenir »

3 290 témoignages, dont 2 590 en accès libre ici, accréditent, en effet, un certain désenchantement de certains agents, qui se sentent dans l’incapacité de mener à bien les missions de service public pour lesquelles ils ont pourtant été engagés. 

Comme le résume cette chargée de mission dans une agglomération : « Je conduis un projet de transformation de tout un pan de services culturels d’une collectivité, pour lequel elle est venue me débaucher. Je suis toute seule mais je parviens à mobiliser tous les acteurs internes et externes. Malgré de très fréquents revirements de l’élu porteur et de la DG, malgré une absence totale de soutien, le projet avance ».

« Au moment de lancer le déploiement du nouveau modèle, poursuit-elle, l’élu refuse le projet en bloc, pour des raisons de luttes de pouvoir au sein de la gouvernance. Deux ans de travail, des consultants de grande envergure et 50 personnes mobilisées en intelligence collective (...) et tout tombe à l’eau du jour au lendemain sur décision d’un seul homme politique (…) Un immense gâchis d’énergie, d’argent, d’avenir... et tant d’espoirs collectifs déçus. »

Manque de moyens et de reconnaissance, défaut de vision

Ce témoignage est intéressant puisqu’il concentre à lui seul les « cinq principales catégories de motifs liés à la perte de sens : le manque de moyens, un défaut de vision, le sentiment de servir autre chose que l’intérêt général, le poids de la structure et le manque de reconnaissance ».

Plus de 60 % des répondants déplorent, en effet, un manque de moyens (64 %, soit 2 895 réponses) ou un désaccord avec les orientations stratégiques (61 %, soit 2 800 réponses). La proximité des agents territoriaux avec le pouvoir politique peut être difficile à appréhender. Les difficultés liées aux conditions de travail ou à leur environnement professionnel (rémunération, carrière, etc.), elles, « sont également citées, mais en deuxième lieu ».

Notons enfin, point plus réjouissant, que malgré le désenchantement de certains agents, « le service de l’intérêt général et l’intérêt pour la mission restent les premiers motifs évoqués par les agents publics interrogés pour rester au sein du service public ». Contrairement à ce que pourraient laisser penser certaines idées reçues, 52 % des personnes interrogées (2 385 répondants) déclarent rester pour le service de l’intérêt général et 50 % (2 270 répondants) annoncent rester pour l’intérêt pour la mission qui leur est confiée. 70 % des agents déclarent rester pour l’un ou pour l’autre (3189 réponses).







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