Édition du vendredi 23 juillet 2021

Coronavirus
Projet de loi sanitaire adopté par les députés : les (quelques) changements à retenir 
Les députés ont adopté, à 6 heures ce matin, le projet de loi sur la gestion de la crise sanitaire, après une nouvelle nuit entière de débats. Comme on pouvait s'y attendre, le texte n'a que très peu changé par rapport au projet de loi initial, les amendements du gouvernement ayant quasiment été les seuls à être adoptés. 

C’est avec 24 heures de retard que le texte a été adopté, les députés ayant tout de même réussi à imposer de disposer d’un jour (et une nuit) de plus pour examiner les quelque 1 200 amendements déposés sur ce projet de loi. Alors que la discussion au Sénat aurait dû débuter hier soir, le texte a été adopté ce matin à l’aube et publié sur le site de l’Assemblée nationale vers 7 h. On peut donc s’attendre à un examen en commission des lois du Sénat à partir de cet après-midi, et en séance publique à partir de demain. 
Les débats ont été particulièrement âpres. D’un côté, l’opposition a tenté de faire valoir que ce texte remet en question des « droits fondamentaux » et représente une atteinte aux libertés « inadmissibles ». De l’autre, la majorité et le gouvernement ont mis en avant que ces mesures sont « le seul moyen » d’éviter de nouvelles restrictions face à la reprise de l’épidémie : « C’est soit le pass sanitaire, soit de nouvelles contraintes sanitaires. C’est soit le pass sanitaire, soit le couvre-feu. C’est soit le pass sanitaire, soit reconfinement. Le reste, c’est de la littérature », a par exemple asséné hier, dans un brouhaha indescriptible, un membre du gouvernement.

Carton plein pour la majorité

Sur les 1198 amendements examinés en séance publique, seuls 64 ont été adoptés – soit 5 %, ce qui est un taux exceptionnellement bas. Et encore, ce chiffre est, en réalité, encore plus faible. D’une part, si l’on prend en compte les amendements rédactionnels sans réelle portée normative et les amendements similaires qui ont été adoptés plusieurs fois ; et surtout, parce que le gouvernement a fait jouer le mécanisme de la « seconde délibération » pour faire annuler l’adoption de certains amendements. Rappelons que la procédure parlementaire autorise le gouvernement, à la fin de l’examen du texte, à déposer des amendements en seconde délibération – en jouant sur le fait qu’en fin de débat, il y a souvent moins de députés présents ou qu’il est possible de battre le rappel des députés de la majorité pour les faire venir dans l’hémicycle. Exemple : les députés avaient adopté des amendements supprimant l’obligation du pass sanitaire pour les personnes visitant ou accompagnant des patients dans les hôpitaux ou les Ehpad. En fin de séance, le gouvernement a présenté un amendement rétablissant cette obligation, qui a été adopté. Le pass sanitaire sera donc bien obligatoire pour accéder à l’hôpital, sauf en cas d’urgence. 
Tous les amendements présentés par le gouvernement (lire Maire info d’hier) ont été adoptés : nouvelle rédaction sur les sanctions contre les salariés et agents qui ne présenteraient pas leur pass sanitaire ou refuseraient l’obligation vaccinale, prolongation de la suspension du jour de carence dans la fonction publique jusqu’au 31 décembre, instauration de l’état d’urgence en Guadeloupe, possibilité pour les directeurs et chefs d’établissement d’accéder aux données vaccinales des élèves… 
Le gouvernement est également revenu sur certaines dispositions votées en commission. Notamment le fait de fixer par décret un « seuil » pour l’obligation de présenter le pass sanitaire dans les bars et cafés – les députés de la commission des lois ayant estimé que dans les territoires ruraux, notamment, cette obligation n’avait pas forcément de sens. Le gouvernement a fait supprimer cette tolérance, jugeant que la mesure doit s’appliquer « à l’ensemble des activités de restauration et de débits de boisson ». 

Modifications à la marge

Au final, à peine une petite dizaine d’amendements venus de l’opposition ont été adoptés, sans qu’ils apportent de changements profonds ni à la lettre ni à l’esprit du texte. 
Parmi eux, on peut retenir : la possibilité d’accéder aux données Sidep pendant six mois au lieu de trois, afin « de permettre à des personnes ayant été testées positives au covid-19 il y a plus de trois mois, d'en obtenir la preuve et d'ainsi pouvoir achever leur parcours vaccinal plus rapidement en n'ayant besoin que d'une injection ». Un durcissement des peines pour les personnes qui s’en prendraient à des biens destinés à la vaccination : ces derniers jours, plusieurs cas de dégradations (notamment par incendie) de lieux de vaccination ont été constatés. Les députés ont voté le principe d’une amende de 75 000 euros et cinq ans de prison pour ce délit.
Dans la liste des lieux qui seront soumis à l’obligation de présentation d’un pass sanitaire, qui comprenait déjà les foires et salons professionnels, les députés ont ajouté « les séminaires ». Au sujet de l’obligation vaccinale, ils ont également adopté une disposition précisant que les travailleurs handicapés employés dans les Esat ne seraient pas concernés. 
Enfin, l’opposition a obtenu la suppression d’une disposition adoptée en commission, qui prévoyait de punir l’utilisation d’un faux pass sanitaire de 5 ans de prison et 75 000 euros d’amende, jugeant que cette sanction était « complètement disproportionnée ». 

Précisions à retenir

Indépendamment de ces débats, quelques informations à noter ont été distillées hier sur l’utilisation du pass sanitaire. 
Lors de la réunion hebdomadaire de la cellule vaccination, les associations d’élus ont été informées que dans les ERP (établissements recevant du public) concernés, le pass sanitaire devait être demandé « dès le premier entrant ». Le ministère de la Santé a également indiqué que d’après ses prévisions, un pic de vaccination aura lieu au début du mois d’août : il appelle donc les communes à maintenir au maximum l’activité des centres de vaccination, en indiquant que l’État « compensera les frais engagés par les collectivités locales dans le cadre de l’organisation de la campagne de vaccination ». Un point précis sera fait, en cette fin de semaine, sur les livraisons de vaccin à venir, afin de donner de la visibilité aux centres de vaccination. 
Autre précision importante, donnée hier par la Direction générale de la Santé (DGS) : la jauge ouvrant l’obligation de demander le pass sanitaire dans certains ERP (50 personnes) doit s’appliquer en fonction de la capacité d’accueil des lieux et non du public réellement accueilli. Explication : certains établissements, notamment des cinémas, ont décidé depuis mercredi de limiter le nombre de spectateurs à 49, afin que ceux-ci n’aient pas besoin de présenter un pass sanitaire à l’entrée. Pas question, a répondu la DGS, interrogée par Franceinfo : « Dans une salle de cinéma, le pass sanitaire s’applique à partir du moment où cette salle contient plus de 50 places, même si seulement 10 sièges sont occupés lors d’une séance. (…) Il n’est pas possible pour une salle ayant une capacité d’accueil de plus de 50 personnes d’abaisser sa jauge, sous peine de sanction pour non-application du pass sanitaire. » 
Le projet de loi sur le pass sanitaire et l’obligation vaccinale va maintenant continuer son parcours parlementaire au Sénat, avant une commission mixte paritaire qui aura lieu probablement pas avant dimanche. 
Maire info, qui interrompt sa parution quotidienne à partir d’aujourd’hui et jusqu’au mercredi 1er septembre, informera toutefois ponctuellement ses lecteurs du contenu du texte adopté et des éventuels changements décidés par le Conseil constitutionnel. 

Accéder au texte adopté par l’Assemblée nationale. 




Élections
Régionales et départementales : le Sénat dénonce un « krach industriel » et un « fiasco sans précédent » dans l'acheminement de la propagande électorale
Dans un rapport publié hier, les sénateurs de la commission des lois ont mis en cause les « choix discutables » du ministère de l'Intérieur et le recours aux intérimaires du prestataire Adrexo à l'origine des innombrables défaillances dans la distribution de la propagande électorale lors des élections départementales et régionales.

« Scandale », « fiasco », « catastrophe industrielle », « krach industriel »… Les termes employés par les sénateurs sont particulièrement virulents pour décrire la série de ratés qui ont émaillé la distribution de la propagande électorale lors des élections départementales et régionales de juin dernier. Pour eux, le constat est clair : « L’État a failli à la mission qui lui incombe d’organiser les élections dans de bonnes conditions » malgré le « désastre annoncé » lors des semaines précédant les deux scrutins.

Présentées hier par le président de la commission des lois, François-Noël Buffet, lors d’une conférence de presse, les conclusions de la mission d'information sénatoriale – créée au sein de la commission des lois et dotée des pouvoirs de commission d’enquête – ciblent ainsi particulièrement le ministère de l’Intérieur, mais aussi la société Adrexo, qui a récupéré en 2020 (et pour quatre ans) une partie du monopole de La Poste à la faveur de la transposition d'une directive européenne sur l'ouverture à la concurrence du service postal.

Régionales : 4 Français sur 10 n’ont rien reçu au deuxième tour  

Premier constat, les chiffres qui ont été communiqués ont « manifestement » été « sous-estimés » tant par le ministre de l’Intérieur que par les opérateurs chargés de la logistique électorale.

Ainsi, au premier tour, on serait bien loin des 5,3 % (départementales) et 7,2 % (régionales) de non-distribution avancés par la société Adrexo. Dans les faits, un Français sur quatre n’aurait pas reçu de propagande électorale, selon les résultats d’une enquête « à paraître » du Cevipof et de l’AMF, confirmant les « remontées des préfectures qui, toutes sans exception, font état de graves difficultés d’acheminement dans les zones couvertes par cette société ». Les 9,5 % de non-distribution calculés par La Poste semblent, eux, « plus plausibles », selon le rapport.

Au second tour, « de l’aveu même des opérateurs, 26,6 % des électeurs n’ont reçu aucune propagande pour les élections départementales et 40,3 % pour les élections régionales, cette proportion se montant même à plus de 90 % dans plusieurs départements ». Et encore, « ces statistiques sont-elles vraisemblablement sous-évaluées », estiment les sénateurs qui suggèrent que ces ratés ont vraisemblablement porté « atteinte à la sincérité du scrutin » et ont « peut-être également contribué à la très faible participation » (interrogé dans le rapport, un élu local estime, par exemple, la perte de participation en lien avec ces défaillances « à 20 points » dans son village).

« Enchaînement de défaillances »

Ces derniers observent ainsi que « les graves manquements observés au premier tour dans la distribution de la propagande électorale se sont mués, malgré le scandale naissant et le resserrement du contrôle du ministère, en une véritable ''catastrophe industrielle'' au second tour, en raison des difficultés rencontrées à l’amont de la chaîne de production, lors de l’impression des documents et, surtout, de leur mise en pli et de leur routage ».

Ces dysfonctionnements « majeurs », s’ils sont dus à « un enchaînement de défaillances à plusieurs étapes du processus » d’acheminement de la propagande électorale, sont « largement imputables à l’attribution par le ministère de l’Intérieur de l’organisation d’une partie des opérations de mise sous pli, de routage et de distribution à des opérateurs qui n’en avaient pas la capacité opérationnelle ».

La compétence du prestataire Adrexo en matière de distribution de courrier est particulièrement interrogée. Celle-ci a été estimée à 87,5 % de son chiffre d'affaires lors de la passation de marché, alors que seul 3,3 % du chiffre d'affaires d'Adrexo correspondait effectivement à la distribution de courrier, le reste étant lié à la distribution d'imprimés publicitaires.

Autre critique envers le prestataire : un recours massif à des intérimaires recrutés et formés de manière « expéditi[ve] ». Pour ne rien arranger, ces derniers ont reçu des consignes de distribution « erratiques », « ce qui est en partie le fait du ministère lui-même », précisent les auteurs du rapport.

Porter à deux semaines le délai de l'entre-deux-tours 

Afin de garantir la distribution de la propagande électorale lors des prochains scrutins, notamment les élections présidentielle et législatives de l’an prochain, la commission des lois préconise ainsi au ministère de l’Intérieur de « poursuivre les investigations sur les manquements des distributeurs, notamment de la société Adrexo » et d’envisager la résiliation « dès cette année » de l’accord-cadre signé avec cette dernière.

Plus globalement, elle formule 11 autres recommandations, parmi lesquelles elle propose de « revoir les critères de sélection des candidats au marché de la distribution » et suggère de porter d'une à deux semaines le délai de l'entre-deux-tours « en cas de concomitance de deux élections générales ».

Consulter le rapport.
 




A nos lecteurs
Maire info prend des vacances
La publication quotidienne de Maire info reprendra le 1er septembre.

La publication quotidienne de Maire info s’interrompt aujourd’hui jusqu’au mercredi 1er septembre. Toutefois, en raison de l’actualité législative liée à la loi sur le pass sanitaire et l’obligation vaccinale, la rédaction informera ponctuellement ses lecteurs du contenu du texte définitivement adopté et des éventuelles censures du Conseil constitutionnel, en mettant à jour l’édition d’aujourd’hui et en la renvoyant à tous ses abonnés. 
Toute l’équipe de Maire info souhaite d’excellentes vacances à ses lecteurs, après cette nouvelle année particulièrement difficile et éprouvante. 







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