Édition du jeudi 1 avril 2021

Coronavirus
Covid-19 : le gouvernement abandonne la territorialisation et revient aux mesures nationales
Le chef de l'État a annoncé hier la fermeture des crèches et des établissements scolaires pour trois à quatre semaines, selon les catégories, et l'extension des mesures de freinage renforcées à tout le territoire. Il a aussi donné, pour la première fois, des perspectives de dates de sortie de crise. 

Le chiffre n’était pas sorti, hier à 20 h, quand Emmanuel Macron a pris la parole. Mais en fin de soirée, Santé publique France a publié le nombre de contaminations pour la journée d’hier : 59 038. Ce seul chiffre suffit pour comprendre l’ampleur de la troisième vague qui touche le pays.

« Nouvelle donne »

Lors de sa prise de parole, le chef de l’État a commencé par justifier la stratégie adoptée depuis le début de l’année, c’est-à-dire depuis l’arrivée du variant repéré en Grande-Bretagne : « Nous avons décidé de freiner l’épidémie sans nous confiner. (…) Nous avons gagné des jours précieux de liberté, des semaines d’apprentissage pour nos enfants, nous avons permis à des centaines de milliers de travailleurs de garder la tête hors de l’eau sans jamais perdre le contrôle de l’épidémie. Nous avons, je le crois, bien fait. » Il reste à savoir ce que signifie « perdre le contrôle de l’épidémie », lorsque l’on en est à 60 000 nouveaux cas en une journée, 60 % des départements au-dessus d’un taux d’incidence de 250 et 98 % des capacités de réanimation du pays occupées. 
Le chef de l’État a tout de même reconnu « une nouvelle donne » depuis le début mars, avec une épidémie « plus étendue qu’au printemps dernier », car « aucune région n’est épargnée », et « plus dangereuse qu’à l’automne », parce que le variant « UK » est « plus contagieux et plus meurtrier ». Les mesures prises le 18 mars, a poursuivi Emmanuel Macron, montrent « leurs premiers effets », mais ils sont « trop limités ». L’exécutif a donc décidé de prendre des mesures au niveau national, cette fois, pour tenter de ne pas « perdre le contrôle » : samedi 3 avril au soir, les « mesures de freinage renforcées » seront appliquées à « tout le territoire métropolitain » (lire article ci-dessous). 
Le président de la République a également annoncé une mesure générale de fermeture des écoles et des crèches à partir de mardi prochain (lire article ci-dessous). 
Enfin, il a promis un renforcement significatif des capacités hospitalières, avec une capacité en lits de réanimation portée à « 10 000 lits », en mobilisant encore davantage « les étudiants en médecine, les retraités, les services de santé des armées… ». De « nouvelles capacités d’accueil » devraient être ouvertes dans les hôpitaux parisiens.

« Vacciner, vacciner, vacciner »

Après avoir dressé ces perspectives peu réjouissantes, le chef de l’État a voulu donner un peu d’espoir aux Français en traçant les perspectives d’une « sortie de crise » qui « se dessine enfin ». Rappelant que 8,5 millions de personnes ont reçu une première dose et « 3 millions en ont reçu deux », Emmanuel Macron a appelé à « accélérer encore et encore » : « Vacciner, vacciner, vacciner. Sans répit, sans jour férié. Le samedi et le dimanche comme la semaine. » Saluant « l’engagement exemplaire des maires » qui ont ouvert quelque 1 700 centres de vaccination, le président a promis que le gouvernement allait « accélérer » la livraison des doses. Il a donné un calendrier cette fois parfaitement clair : les personnes de 60 à 70 ans, quel que soit leur état de santé, pourront se faire vacciner à partir du 16 avril. Les personnes de 50 à 60 ans, un mois plus tard, le 15 mai. Et enfin, à la mi-juin, ouverture de la vaccination à tous les Français qui le souhaitent, quel que soit leur âge. L’objectif reste toujours le même : que « tous les Français qui le souhaitent » puissent être vaccinés « d’ici la fin de l’été ». 

« Réouverture progressive »

Enfin, le chef de l’État a esquissé un premier calendrier de « réouverture progressive du pays ». Un véritable « agenda » sera dévoilé « prochainement », mais Emmanuel Macron a déjà indiqué que « certains lieux de culture » pourraient rouvrir « dès la mi-mai », ainsi que les terrasses des cafés, « sous condition ». « La culture, le sport, les loisirs, l’événementiel, les cafés et restaurants » pourraient rouvrir progressivement « entre la mi-mai et le début de l’été ». 
Ce calendrier est suspendu à tant d’inconnues que les professionnels concernés restent prudents : « Chat échaudé craint l’eau froide », commentait hier un responsable de l’Umih (Union des métiers et des industries de l’hôtellerie). L’année passée a habitué à des calendriers souvent repoussés et à des promesses impossibles à tenir – rappelons que les équipements culturels étaient censés rouvrir en janvier.

Des médecins et des élus pas toujours convaincus

Le nombre de vaccins livrés sera-t-il suffisant ? De nouveaux variants vont-ils apparaître ? Quels seront les effets des mesures de « freinage » annoncées hier ? Il n’y a pas de réponse à ces questions, et les experts se montrent, depuis hier, très prudents. Philippe Juvin, chef des urgences de l’hôpital Georges-Pompidou à Paris et maire LR de La Garenne-Colombes (92), interviewé hier dans les médias, a eu beaucoup de mal à tenter de se montrer positif, sans pouvoir cacher un certain agacement : « On a perdu beaucoup de temps », ces mesures arrivent « trop tard », « la fermeture des écoles n’est pas à la hauteur ». « On fera le job », a soupiré le professeur Juvin, visiblement peu convaincu de l’efficience des mesures de confinement « light » annoncées.
Même incertitude chez Frédéric Valletoux, maire de Fontainebleau et président de la Fédération hospitalière de France, joint ce matin par Maire info, qui reconnaît que l’on a certes « franchi un palier avec la fermeture des écoles », mais qu’on est « loin de la réponse massive qu’attendaient les hospitaliers » (la FHF a demandé hier un confinement « strict »). Frédéric Valletoux constate que dans les 19 départements soumis aux mesures de freinage, « on ne peut pas dire que ces mesures ont permis d’écraser les courbes » et parle « d’empilement des demi-mesures ». « Si le prix à payer, c’est de vider les hôpitaux de tous les malades graves qui ne sont pas atteints du covid… on est loin de la mission qui est celle des hospitaliers ». Interrogé sur la promesse présidentielle de passer à 10 000 lits de réanimation, le maire de Fontainebleau se montre, là encore, peu optimiste. « Bien sûr, on y arrivera, mais là encore à quel prix ? La nuit dernière, entre 22 h et 5 h du matin, l’AP-AH [hôpitaux de Paris] organisait une formation pour les infirmières, pour leur apprendre les gestes de base de la réanimation… Sur le papier, tout est possible. Mais d’un point de vue humain… ». 
Du côté des associations d’élus, pas de réaction ce matin – mais il n’est pas certain que celles-ci fassent montre d’un enthousiasme excessif face à l’abandon de la « territorialisation », qu’elles défendent avec acharnement depuis des mois. Reprenant sa casquette de maire de Fontainebleau, cette fois, Frédéric Valletoux avoue ce matin « regretter » l’abandon de la territorialisation, qui était « bien comprise des Français ». « Maintenant, on va appliquer les mêmes mesures partout », c’est-à-dire dans le Val-d’Oise, où le taux d’incidence est de 813 et dans le Finistère où il est 10 fois inférieur (89). « Et en revanche, en Île-de-France où l’épidémie s’emballe, il n’y a rien de plus, à part la fermeture des écoles. C’est dommage. »
Philippe Laurent, maire de Sceaux et secrétaire général de l’AMF, dit la même chose plus crument encore. Il déclarait hier soir sur twitter : « L’abandon de la territorialisation pour les commerces et pour les écoles notamment est une erreur incompréhensible. Elle ne peut s’expliquer que par la lecture exclusivement centralisatrice du fonctionnement du pays. » 
D’autres élus sont plus nuancés, à commencer par François Baroin, président de l’AMF, qui a réagi hier en tant que maire de Troyes, dans un communiqué publié sur le compte twitter de la ville. François Baroin dit « approuver le renforcement des précautions sanitaires ». Il demande que « les activités des centres de loisirs municipaux » soient également fermées pendant la période – ce que Jean Castex a confirmé ce matin (lire article ci-dessous). « Dans un esprit de très grande responsabilité, nous continuerons d’être aux côtés de l’État comme nous le sommes depuis plus d’un an, pour faciliter la mise en œuvre des mesures annoncées. » 
Autre élue à approuver les mesures annoncées hier : Valérie Pécresse. La président de la région Île-de-France a parlé ce matin, en évoquant la fermeture des écoles, « une mesure nécessaire » (elle la réclamait depuis une semaine). Elle estime cependant que la mesure « aurait mérité un préavis pour les familles, qui se retrouvent au pied du mur. »




Coronavirus
Fermeture des écoles et crèches : cinq jours pour s'organiser
La mesure était certes pressentie depuis 24 heures, mais c'est tout de même un couperet qui est tombé, et qui va poser de considérables problèmes d'organisation aux maires : à partir de demain soir, crèches et établissements scolaires ferment leurs portes pour trois à quatre semaines, selon les catégories, au moins. 

La fermeture des crèches et des établissements scolaires prendra en fait effet mardi 6 avril au matin puisque, par chance, le lundi 5 avril est férié. Cela donne une journée de plus aux maires pour s’organiser, alors qu’un certain nombre de questions restent sans réponse.

Comprendre le calendrier

Il faut d’abord bien comprendre le calendrier, pas forcément très simple, livré par le chef de l’État hier. Pour ce qui est du début de la fermeture, tout le monde est logé à la même enseigne : c’est bien à partir de mardi 6 avril que tous les établissements (crèches, maternelles, écoles élémentaires, collèges et lycées) vont fermer leur porte. Il ne s’agit pas pour autant d’une avancée des dates des vacances : toute la semaine prochaine (donc du mardi 6 au samedi 10 avril), les enseignements devront être dispensés à distance. 
Ensuite, le gouvernement a décidé – mesure absolument exceptionnelle – de fusionner toutes les zones de vacances scolaires : oubliées les zones A, B et C, « la France entière, quelle que soit la zone de vacances, sera placée en vacances de printemps », a expliqué le président de la République. Ces vacances, qui devaient s’étaler du 12 avril au 7 mai selon les académies, auront donc lieu, pour tous, du 12 au 26 avril.
Les choses se compliquent un peu après cette quinzaine : à partir du lundi 26 avril, « la rentrée aura lieu pour tous ». Les écoles maternelles et les écoles élémentaires réouvriront et reprendront les cours en présentiel ; les collèges et les lycées, en revanche, resteront fermés et l’enseignement se fera à distance. Quid des crèches ? le chef de l’État a omis de mentionner hier ce qui leur adviendra le 26 avril. Jean Castex, dans son discours devant les députés, a incidemment répondu à la question ce matin : les crèches sont fermées pour « trois semaines », a déclaré le Premier ministre. Elles devraient donc rouvrir le 26 avril.
Enfin, le lundi 3 mai, collèges et lycées rouvriront pour des cours en présentiel, « le cas échéant avec des jauges adaptées ». 
Ce matin, devant les députés, le Premier ministre Jean Castex a également précisé que les « activités périscolaires et extrascolaires » seraient suspendues dans les mêmes conditions, c’est-à-dire dès mardi prochain. Les apprentis seront soumis aux mêmes règles que les lycéens, a également précisé Jean Castex. « Les concours qui auront lieu pendant cette période seront maintenus. En revanche, les examens qui ne peuvent se dérouler en distanciel seront autant que possible reportés en mai. »
Ces mesures ne s’appliquent pas outre-mer. 

Conséquence pour les communes

Ces décisions vont avoir de multiples conséquences dans les communes, qui gèrent les crèches, les écoles maternelles et les écoles élémentaires. 
Première conséquence : les personnels communaux qui travaillent dans ces établissements devront, pour partie, être réaffectés à d’autres tâches ou placés en autorisation spéciale d’absence. Tous les détails seront certainement donnés dans les jours à venir, mais il est probable que les mesures mises en place pendant le premier confinement devraient être en bonne partie reconduites. Cependant, comme au printemps là encore, les communes devront organiser l’accueil des enfants des « personnels prioritaires » (notamment les personnels de santé), dont la liste sera publiée « demain », a précisé ce matin Jean Castex. 
Autre conséquence de taille pour les collectivités et EPCI – comme pour tous les autres employeurs : la présence des enfants à la maison pendant trois à quatre semaines va empêcher de nombreux agents de pouvoir aller travailler. « Les parents qui devront garder leurs enfants et ne peuvent pas télétravailler auront droit au chômage partiel », a certifié le chef de l’État hier soir. Pour les fonctionnaires, ils auront donc droit, comme au printemps dernier, aux autorisations spéciales d’absence. 
Le Premier ministre a évoqué, devant les députés, le problème « social » posé par la fermeture des établissements, avec notamment, pour les familles les plus modestes, la difficulté posée par la fermeture des cantines scolaires. Sans annoncer de mesure concrète, le Premier ministre a indiqué que l’État serait « aux côtés » de ces familles, avec « des mesures d’accompagnement adaptées » qui seront dévoilées prochainement. 

Crèches : plusieurs questions encore sans réponse

Les élus se posent beaucoup de questions sur l’organisation concrète des choses, la semaine prochaine. Selon Xavier Madelaine, maire d’Amfreville (Calvados) et co-président du groupe de travail Petite enfance de l’AMF, joint ce matin par Maire info, « le téléphone n’arrête pas de sonner depuis ce matin, les maires veulent savoir comment procéder ». Une réunion était prévue ce matin entre les représentants des élus et le secrétaire d’État chargé de l’Enfance et des Familles, Adrien Taquet, mais elle a finalement été reportée à demain. 
La première question que se posent les maires, concernant les crèches, est naturellement celle de la poursuite des aides financières exceptionnelles décidées par la Cnaf au printemps dernier, qui avaient représenté « un apport extrêmement apprécié par les communes », souligne Xavier Madelaine. Questions aussi sur les crèches qui vont accueillir les enfants des publics prioritaires : « La Cnaf avait pris en charge une partie des surcoûts, précise le maire d’Amfreville, mais une partie seulement, à hauteur de 10 euros par jour et par place occupée ». 
L’AMF pose également la question de l’accompagnement de la PMI (Protection maternelle et infantile) des départements dans ce dispositif. « Nous souhaitons une présence renforcée des PMI dans les crèches qui accueilleront les publics prioritaires, mais aussi auprès des assistantes maternelles, qui représentent aujourd’hui un public en souffrance. » 
Les maires attendent également de connaître la liste des personnels prioritaires – qui ne devrait pas sensiblement différer de celle du printemps dernier – et « quels seront les protocoles sanitaires qu’il faudra respecter » dans les crèches qui resteront ouvertes. 
Enfin, Xavier Madelaine va demander au secrétaire d’État des précisions sur l’organisation de la vaccination des personnels de la petite enfance et, plus largement, du personnel employé dans les écoles : on se souvient en effet que si le gouvernement a promis le démarrage de la vaccination des enseignants en avril, il n’a rien dit sur les personnels des crèches ou les Atsem. 
Réponses, on l’espère, demain après-midi. Maire info reviendra sur ces questions dès son édition de mardi. 




Coronavirus
Comprendre les mesures « renforcées » qui seront en vigueur sur tout le territoire dimanche
Jusqu'à présent, seuls 19 départements étaient concernés par les mesures dites de « freinage renforcées », terme que le gouvernement préfère à celui de « confinement ». Dès dimanche matin, et jusqu'au 3 mai, elles s'appliqueront sur l'ensemble du territoire métropolitain. Retour sur ces mesures qui, désormais, concernent tous les maires.

« Certains militaient pour le retour généralisé de l’attestation comme en mars 2020. Nous n’avons pas retenu cette option », a rappelé le président de la République, hier soir. Autrement dit, il n’y aura pas de confinement « dur », pas non plus de confinement « allégé » comme à l’automne dernier, mais une extension à tout le territoire de la stratégie adoptée le 18 mars dans les départements en alerte maximale, et résumée par le gouvernement d’une formule : « Dedans avec les siens, dehors en citoyen. » Autrement dit, pas question d’obliger, comme au printemps dernier, les citoyens à rester confiner chez eux, mais un appel à la « responsabilité et au civisme » : « Chacun doit veiller non pas à s’enfermer, mais à limiter au maximum les contacts, les rencontres, les moments de proximité avec d’autres personnes. »

Les déplacements

Il sera donc possible à chacun de sortir de chez soi et de se déplacer à sa guise dans un rayon de 10 km autour de chez soi, sans limitation d’horaires – en dehors du couvre-feu, naturellement, puisque celui-ci sera bien maintenu de 19 h à 6 h du matin. 
Un certain flou règle depuis le 18 mars, dans les départements déjà soumis à ces règles, sur la nécessité ou pas de se munir d’une attestation dans certains cas : en effet, l’attestation fournie par le ministère de l’Intérieur ne permet, en théorie, de se passer de celle-ci que pour les déplacements liés à la « promenade » ou « l’activité sportive ». Il faudrait donc se munir d’une attestation, même pour des déplacements de moins de 10 km. Sauf que le chef de l’État comme le Premier ministre ont balayé cette nuance, très clairement : « L’attestation ne sera obligatoire en journée que pour les déplacements au-delà de 10 kilomètres du domicile », a déclaré Emmanuel Macron hier, sans précision de motif donc. Même son de cloche pour Jean Castex devant les députés ce matin : « Une attestation précisant le motif du déplacement sera exigée au-delà des 10 km ». 
Les Français pourront donc se déplacer librement hors de chez eux sans attestation, tant qu’ils sont en mesure de prouver, par la présentation d’un justificatif de domicile ou d’une pièce d’identité, qu’ils sont bien à moins de 10 km de chez eux. Au-delà (et à l’exception de certains déplacements jusqu’à 30 km), les déplacements inter-régionaux vont être interdits à l’échelle de tout le pays, sauf motifs impérieux (professionnels, familiaux ou de santé). 
Une des principales conséquences de ces mesures, pour les Français, sera donc l’impossibilité de partir en vacances. Le gouvernement a, en revanche, pris la précaution de faire débuter l’application de ces mesures à dimanche matin, afin de permettre à ceux qui le souhaitent de partir s’installer (« se mettre à l’abri », a dit le chef de l’État) dans un autre lieu avant le début de l’interdiction. 
Du côté des rassemblements, rien ne change : les rassemblements de plus de six personnes sur la voie publique restent interdits, et le gouvernement entend « faire respecter » cette interdiction, a dit ce matin Jean Castex. 

Plus d’alcool sur la voie publique

Le Premier ministre a également annoncé, devant les députés, une mesure jusque-là inédite à l’échelle nationale : « La consommation d’alcool sur l’espace public sera interdite. » Si les préfets avaient pu prendre, ponctuellement et localement, des mesures similaires, jamais l’État, dans cette crise, n’avait encore pris une telle décision. Il va donc être impossible, sans doute dès dimanche, de consommer une boisson alcoolisée vendue « à emporter » dans un café – comme cela se fait énormément, ces derniers jours, notamment dans les centres des grandes villes. 
Le Premier ministre a eu des mots très sévères vis-à-vis des rassemblements festifs qui ont pu avoir lieu ces derniers jours, par exemple à Lyon, à Lille ou à Paris. « Je condamne sans réserve l’irresponsabilité dont font montre certains, se croyant sans doute invincibles aux ravages de la maladie (…). Ces comportements – qu’il s’agisse des rassemblements festifs, du non-respect du couvre-feu ou du refus du port du masque – nous devons les prévenir et les sanctionner. »
Rappelons au passage que, après une mise au point faite la semaine dernière par le gouvernement, on sait à présent que ces mesures de freinage « ne font pas obstacle » à la présence du public lors des réunions des assemblées délibérantes des collectivités locales, si celles-ci ont lieu en journée (lire Maire info du 26 mars). En revanche, si les réunions ont lieu après 19 h, le couvre-feu interdit au public d’y assister.

Les commerces, premiers touchés

Ce sont finalement les commerçants qui vont payer le plus lourd tribut à l’extension de ces mesures à l’échelle nationale : en effet, c’est maintenant dans tout le pays que les commerces dits « non essentiels » vont devoir fermer leurs portes dès dimanche. Selon Bercy, le nombre de commerces fermés va passer de 90 000 à 150 000. Maire info reviendra en début de semaine prochaine, après la publication du décret, sur les règles, mais le gouvernement a d’ores et déjà prévenu qu’elles seraient les mêmes que celles en vigueur dans les 19 départements en alerte maximale. Autrement dit, la liste des commerces autorisés à rester ouverts sera assez longue, mais elle n’incluera pas, par exemple, les magasins de vêtements, les chausseurs, les parfumeries, les esthéticiens… 
« Tous les dispositifs (d’aide) mis en place » seront maintenus « tant que durera la crise », a martelé Jean Castex devant les députés. 




Agriculture
Plan de relance : 65 nouveaux projets alimentaires territoriaux sélectionnés
Ces nouveaux projets alimentaires doivent bénéficier de 5,3 millions d'euros de subventions. Une deuxième session d'appel à projets vient d'être lancée.

Quinze nouveaux départements vont désormais disposer de projets alimentaires territoriaux (PAT). A l’issue d’un premier volet d’appel à projets lancé en décembre dernier, 65 nouveaux PAT, situés dans 48 départements, ont ainsi été retenus. C’est ce qu’a annoncé le ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation, mardi, dans un communiqué, soulignant que ceux-ci bénéficieront de 5,3 millions d’euros de subventions.

80 % des départements disposent désormais d’un PAT

« Cette nouvelle vague permet ainsi à 80 % des départements d’avoir au moins un projet alimentaire territorial accompagné par l’État sur leur territoire », se félicite le ministère dont le ministre Julien Denormandie assure que « chaque département en sera pourvu d’ici 2022 ».
De son côté, le sous-directeur de la politique de l’alimentation au ministère, Cédric Prévost, se donnait, il y a deux mois, plutôt comme « but d’avoir, d’ici à 2023, au moins un PAT dans chaque département » et rappelait qu’en 2017, « il y en avait dans 26 % d’entre eux, et dans 66 % » d'entre eux il y a encore quelques jours.

Alimenter la restauration scolaire

Objectif pour les PAT de répondre « aux spécificités de chacun des territoires ». Ainsi, pami les lauréats, celui de la commune de Cilaos (La Réunion) doit permettre notamment de créer « une ferme pilote destinée tant à alimenter la restauration scolaire qu’être un lieu d’expérimentation agronomique, de formation des agriculteurs et de sensibilisation des scolaires ». Celui de la communauté de communes Arbois-Poligny-Salins « Cœur du Jura » vise à « installer de nouveaux agriculteurs en diversification et structurer de nouvelles filières autour d’équipements de transformation et de distribution, au service d’une stratégie de valorisation globale du territoire ».
Créés il y a six ans, ces projets visent plus globalement à favoriser « la relocalisation de l'agriculture et de l'alimentation dans les territoires en soutenant notamment l'installation d'agriculteurs, les circuits courts ou les produits locaux dans les cantines », rappelle le ministère qui précise également qu’ils jouent « un rôle essentiel pour accélérer la transition agricole et alimentaire en rapprochant les producteurs, les transformateurs, les distributeurs, les collectivités territoriales et les consommateurs ».
« Ils ont un développement très intéressant depuis 2014, le réseau national des PAT en recense environ 200, mais les leçons du confinement nous incitent à aller plus loin, à la fois en encourageant le lancement de nouveaux, mais aussi en aidant le développement de ceux qui existent déjà », soulignait fin janvier Cédric Prévost.

Deuxième session jusqu’au 15 avril

Pour cette raison, les appels d’offres se poursuivent. Doté exceptionnellement de 7,5 millions d’euros cette année (contre 5 millions attribués sur la période 2014 à 2018), celui lancé en décembre par le Programme national de l’alimentation vient de déployer une deuxième session de candidatures, ouverte depuis le 1er mars et qui doit se clôturer le 15 avril. Celle-ci vise cette fois-ci les PAT labellisés ou en cours de labellisation (contrairement au premier volet qui concernait les projets émergents).
« On pense qu’il y aura encore beaucoup de projets », estimait en début d’année Cédric Prévost, alors que la première session s’achevait avec 90 projets de candidatures.
Pour rappel, l’aide aux projets alimentaires territoriaux représente près de 80 millions d’euros, dont 3 millions d’euros à destination des projets émergents. Cette aide sera déclinée directement à l’échelle régionale, via des appels à projets lancés et instruits par les directions régionales de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt (Draaf). 

Télécharger la liste des 65 lauréats.
Télécharger le calendrier des appels à projets.




Santé publique
Le Sénat presse pour un virage résolu vers le maintien à domicile des personnes âgées dépendantes
Le développement d'une politique de maintien à domicile suppose d'arrêter de construire des établissements d'hébergement de personnes âgées dépendantes (Ehpad). C'est la proposition phare, inspirée du modèle danois, et pour le moins iconoclaste, du rapport sénatorial sur « le bien vieillir chez soi » rendu public le 25 mars, alors que les projets de dizaines de milliers de places en Ehpad sont plutôt de mise en France à l'horizon 2030.

Le Danemark a arrêté de construire des Ehpad en 1987. C'est l'exemple retenu par les rapporteurs,  la sénatrice Michelle Meunier (Loire-Atlantique), ancienne adjointe au maire de Nantes, et le sénateur de la Loire, Bernard Bonne, pour montrer qu'un autre choix est possible concernant la prévention de la dépendance. Cet exemple inspire largement le rapport. Car c'est également au Danemark que « les seniors ressortent régulièrement des sondages comme les plus heureux du monde », insiste Bernard Bonne. 

Virage domiciliaire

Les élus réclament « que soit enfin pris le virage domiciliaire dont il est si souvent question ». Ils posent un certain nombre de propositions réunies dans 11 recommandations générales, développées dans un rapport de 145 pages. Cela commence donc en se « fixant un objectif d'arrêt de construction d'Ehpad à un horizon raisonnable », a expliqué Bernard Bonne, lors de la présentation du rapport en commission des Affaires sociales du Sénat. Citant encore le Danemark, il décrit : « Les prises en charges, là-bas, se font par défaut à domicile ; l'adaptation du logement est plus aisée, grâce aux visites domiciliaires obligatoires chaque année ; les Danois peuvent aussi rejoindre un logement adapté ou un habitat partagé et pourvu de services médicalisés, qui n'est pas un établissement fermé ». 

Une politique de prévention brouillonne

Le constat sur les stratégies et plan d'actions pour prévenir la dépendance - ou prolonger l'autonomie -  qui se succèdent depuis une petite quinzaine d'années est sévère : tout cela « manque de coordination » comme « d'ambition » : « La part qu'occupe l'action sociale dans le budget de la Cnav ne cesse de diminuer depuis vingt ans, la part qu'occupe l'adaptation des logements dans le budget de l'Anah diminue depuis cinq ans au profit des aides à la rénovation énergétique... Il manque à ces actions l'ampleur qu'appellent les projections démographiques ». 

Remettre le département et les communes au centre

Les élus reprennent l'idée « de systématiser les visites à domicile à partir de 70-75 ans, comme le proposait déjà le rapport Broussy de 2013 ». L'enjeu est de « mieux dépister les risques », pour ensuite mieux adapter et personnaliser la réponse. Les départements auraient, dans ce cadre, un rôle renforcé, « en lien avec les communes et les centres communaux d’action sociale : pour organiser les visites à domicile et coordonner les acteurs, simplifier les démarches des usagers souhaitant adapter leur logement, et servir une aide personnalisée dont la CNSA devrait engager la réforme sur la base d’outils d’évaluation de la perte d’autonomie renouvelés ».
Cela oblige aussi à « expérimenter de nouvelles formes de tarification des services d'aide à domicile, sous l'égide de la CNSA (Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie) », revoir la conférence des financeurs (dans chaque département), etc. Mais aussi revoir la grille d'analyse qui permet de mesurer le degré de dépendance d'une personne. Le rapport propose que « la CNSA mette de l'ordre dans les outils d'évaluation dans un délai raisonnable. Mieux, à présent que la CNSA gère la branche chargée du risque de perte d'autonomie, c'est une prestation universelle personnalisée évolutive et estompant les frontières entre les GIR ».

Repenser l'habitat et ne pas oublier l'outre-mer

« L'adaptation des logements est un autre sujet crucial de prévention de la perte d'autonomie », insistent les auteurs, qui souhaitent des aides plus lisibles. Ils sont favorables au développement de résidences autonomie (les anciens foyers-logement), et à ce sujet pointent d'ailleurs le manque de ces structures en outre-mer. D'où l'appel à « un volet spécifique à l'outre-mer ». Car ces territoires, « surtout la Guadeloupe et la Martinique », « passeront dans les trente prochaines années directement des départements les plus jeunes aux départements les plus âgés de France ». 

Enième rapport

La réforme du grand âge a été repoussée de plusieurs mois par le gouvernement. Ce rapport est le dernier d’une longue liste. « Notre mission porte toutefois sur un aspect particulier, peu étudié à ce jour, qui est celui de la prévention de la perte d’autonomie. C’est un pan de l’action publique encore sous-estimé, pourtant essentiel pour une population dont le vieillissement sera tiré par les tranches d’âge les plus élevées, les plus de 75 ans », défend Michelle Meunier. 

Télécharger le rapport.







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