Édition du mardi 19 janvier 2021

Coronavirus
Vaccination : le gouvernement défend sa stratégie, les maires réclament de la « cohérence » et des « clarifications »
Vaccination en « surmultipliée » et « frustration » des maires, extinction progressive des masques « faits maison », changements à venir des règles en matière de fermeture des écoles... Le point sur les informations « covid-19 » à retenir dans ces dernières 24 heures. 

Invité sur France 5 hier, le Premier ministre s’est vivement défendu contre les critiques formulées par certains élus en matière d’approvisionnement des centres de vaccination. Depuis ce week-end, de nombreux maires déplorent le trop faible nombre de doses reçues (lire Maire info d’hier). Le maire de Cannes, David Lisnard, a par exemple écrit au ministre de la Santé pour regretter que les communes soient « forcées de décélérer la prise de rendez-vous, voire contraintes de fermer leurs centres, faute d'assurance sur la disponibilité pérenne et la livraison des doses de vaccin ». La maire de Lille, Martine Aubry, a elle aussi très vivement attaqué le gouvernement, sur France Bleu Nord, hier : « Que le gouvernement dise la vérité ! Qu'on ne recommence pas la même histoire qu'avec les masques ou les tests ! Ma conviction, c'est qu'on est vraiment en pénurie de vaccins. »
Jean Castex a réagi hier en déclarant qu’il n’y avait pas « de stocks cachés de vaccins », précisant que la France a reçu à ce jour 1,6 million de doses, dont 480 000 ont été administrées à la date d’hier. Le gouvernement va maintenant « passer la surmultipliée », a indiqué le Premier ministre. « À chaque fois que des doses arrivent, on les met immédiatement à disposition », a complété le ministre de la Santé, en visite à Grenoble, « nous sommes à flux tendu. » 
Il faut rappeler que 833 centres ont été ouverts hier. Si les quelque 500 000 doses de vaccins Pfizer qui doivent être livrées chaque semaine étaient réparties également entre chacun, cela représenterait environ 600 doses par semaine et par centre, soit autour de 100 doses par jour du lundi au samedi. Mais on sait que la répartition ne se fait pas de façon égalitaire, puisqu’elle est logiquement calculée au regard de la population de plus de 75 ans présente sur le territoire. 
On en saura plus sur la répartition en fin de semaine, puisque le ministre de la Santé, Olivier Véran, s’est engagé hier à ce que soit publié avant la fin de la semaine, sur sante.fr, « en toute transparence, le nombre précis de doses dont chaque centre de vaccination dispose chaque semaine ». 
Reste que ce matin, à l’occasion d’une réunion du comité directeur de l’AMF, de nombreux élus ont dénoncé « le manque de visibilité » sur le nombre de vaccins dont leurs centres disposeront dans les semaines à venir. Frédéric Chéreau, maire de Douai et président de la commission Santé de l’AMF, a demandé qu’il soit enfin clairement établi « qui fait quoi entre maires, préfets et ARS », rappelant que même la carte des centres de vaccination n’est pas définitive à ce jour, puisque les ARS vont demander la fermeture de certains centres et l’ouverture d’autres, dans certains territoires sous-dotés. D’autres élus ont posé la question des frais pris en charge par les communes qui ont ouvert des centres de vaccination, et de leur remboursement par l'État. Des maires se sont inquiétés des « frustrations et des incompréhensions » que suscite dans la population « le décalage entre la sur-communication du gouvernement et les moyens réels sur le terrain », ainsi que du « manque de cohérence des injonctions » d’un département à l’autre. André Laignel, premier vice-président délégué de l'AMF, a également dénoncé les « injonctions contradictoires et les paradoxes du gouvernement, la désorganisation dont les conséquences retombent sur les communes. La question des vaccins est centrale : il nous faut d'urgence des informations précises, des clarifications. »

Fin des masques artisanaux

Dans un avis qui n’a pas encore été publié mais dont les conclusions ont été dévoilées hier dans la presse, le Haut conseil de la santé publique demande d’éviter que soient désormais utilisés les masques en tissu fabriqués « à la maison », moins efficaces que les masques aux normes Afnor vendus dans le commerce. Ces masques étant moins filtrants, ils sont déconseillés dans un contexte où les pouvoirs publics tentent de stopper la progression des variants plus contagieux.  Olivier Véran a confirmé ce matin, sur France inter, cette demande : « Le masque artisanal fabriqué chez soi n'offre pas nécessairement toutes les garanties nécessaires. » 
Ce matin également, le ministre de l’Éducation nationale, Jean-Michel Blanquer, a annoncé que l’information allait être « relayée » dans les écoles, que ce soit pour les enseignants, le personnel ou les élèves. Il n’a pas exclu que « l’on arrive à quelque chose d’obligatoire dans quelques jours », c’est-à-dire l’interdiction pure et simple des masques artisanaux dans les établissements scolaires ». 

Variants : vers une fermeture des écoles dès le premier cas

Jean-Michel Blanquer a également abordé la question des nouveaux protocoles dans les cantines (lire Maire info d’hier), en particulier le « non-brassage » des élèves lors des repas. « La solution de facilité serait la fermeture des cantines », a déclaré le ministre, « ce que nous voulons au maximum éviter, vu l’importance sociale » de celles-ci. Il y aura certainement, néanmoins, « certaines cantines que nous fermerons en cas d’impossibilité technique de respecter le protocole ». 
Jean-Michel Blanquer a également évoqué la question de l’apparition des variants du virus, qui pourraient conduire le gouvernement à « changer les règles » en matière de fermeture des écoles. Jusqu’à présent, la règle est de ne fermer les établissements qu’en cas de présence de trois cas positifs. Le président du Conseil scientifique, Jean-François Delfraissy, a estimé hier qu’en cas de présence avérée d’un des variants, il fallait fermer les établissements dès le premier cas. « On va évidemment suivre cette règle », a déclaré ce matin Jean-Michel Blanquer, sans préciser pour l’instant le moment où cette décision sera officiellement prise. 

Franck Lemarc

Suivez Maire info sur Twitter : @Maireinfo2




Parlement
Proposition de loi sur la maltraitance animale : des mesures qui pourraient être coûteuses pour les communes
La proposition de loi de la majorité relative à la lutte contre la violence animale va être examinée avant la fin janvier à l'Assemblée nationale, à peine plus d'un mois après son dépôt. Un délai record, qui montre que le gouvernement sait avancer vite sur certains sujets. Certains articles de ce texte concernent directement les communes. 

Une proposition de loi déposée à l’Assemblée nationale le 14 décembre, examinée en séance publique le 26 janvier. Ce délai a de quoi surprendre, quand on connaît l’extrême embouteillage législatif – et quand on sait que la probabilité de voir débattu le projet de loi 4D sur la décentralisation avant la fin du quinquennat approche aujourd’hui de zéro. Si le gouvernement a bien dû « caser » cette semaine son projet de loi sur la prorogation de l’état d’urgence sanitaire, il n’était pas forcément attendu que la proposition de loi sur la maltraitance animale soit considérée comme une telle priorité. C’est pourtant le cas : le texte sera examiné demain en commission des affaires économiques, et sera débattu en séance publique mardi prochain. 

« Préoccupation majeure des Français »

Ce texte, signé par une grande partie des députés LaREM, MoDem et Agir ensemble, part du constat que « la question de la condition animale est devenue une préoccupation majeure des Français ». Il s’agit, d’une part, d’inscrire dans les lois les décisions annoncées en septembre par le gouvernement sur les cirques avec animaux et les delphinariums (lire Maire info du 29 septembre) ; et, d’autre part, de prendre un certain nombre de mesures concernant les animaux domestiques ou errants, l’adoption et la détention d’animaux, ainsi que les trafics. 

Stérilisation obligatoire des chats errants aux frais des communes

Plusieurs mesures, notamment dans le premier chapitre de la proposition de loi, concernent directement les maires. Premièrement, l’article 2 étend aux policiers municipaux et aux gardes champêtres un certain nombre de prérogatives prévues par le Code rural et de la pêche maritime : pour améliorer l’identification des animaux domestiques, la compétence de contrôle de l’identification des animaux domestiques serait étendue aux policiers municipaux et gardes champêtres. 
L’article 3 vise à réformer le régime applicable aux fourrières et refuges pour chiens et chats errants. Jusqu’à présent, le Code rural et de la pêche maritime dispose que chaque commune doit disposer d’une telle fourrière ou « du service d'une fourrière établie sur le territoire d'une autre commune » (article L211-24). Le texte propose de supprimer cette dernière nuance : la fourrière (ou le refuge) deviendrait donc obligatoire dans chaque commune « ou chaque EPCI ». La façon dont s’entendra ce « ou » sera certainement débattue en commission. Un amendement a d’ores et déjà été déposé pour proposer d’ajouter qu’il reviendrait aux EPCI d’abriter une fourrière « lorsqu’ils exercent cette compétence en lieu et place de la commune ». 
Un autre article de la proposition de loi va certainement susciter encore plus de  débats : l’article 4 rendrait obligatoire la stérilisation des chats errants par les communes, alors que jusqu’à présent, celle-ci n’était qu’une possibilité, décidée par arrêté du maire (article L211-27 du CRPM). La stérilisation d’un chat ayant un coût moyen de 70 euros pour un mâle et 130 euros pour une femelle, cette nouvelle obligation pourrait représenter une charge importante pour les communes, que le projet de loi ne prévoit nullement de compenser. Là encore, un amendement a été déposé pour adoucir le dispositif, prévoyant que « des dérogations soient accordées aux communes qui le demandent, en considération de la taille et des moyens financiers » de celles-ci. Un autre amendement demande que la généralisation de cette mesure fasse l'objet de « précisions par décret » :  « Afin que l'obligation de stérilisation des chats errants par les communes puisse être appliquée efficacement, il convient de préciser la fréquence à laquelle les maires devront l'honorer, si les communes de toutes tailles sont également concernées, quel indicateurs permettront de mesurer le respect de l'obligation, etc. ».

Fin programmée pour les cirques itinérants avec animaux

Le reste du texte concerne moins directement les élus. Il concerne les ventes d’animaux ou le durcissement des sanctions pour maltraitance. Le troisième chapitre du texte met en musique les annonces de Barbara Pompili sur les animaux détenus en captivité « à des fins de divertissement », en particulier les animaux des cirques itinérants. Comme prévu, les mesures vont être installées de façon progressive : pour commencer, il sera interdit – avant la fin programmée, à terme, des cirques avec animaux – de « détenir, d’acquérir et de faire se reproduire », « en vue de les présenter au public dans des établissements itinérants », les animaux figurant sur une liste déterminée par le ministère de la Transition écologique. Les autorisations d’ouvertures ne seraient plus délivrées aux établissements qui ne respecteraient pas ces mesures. 
De même, la détention en captivité des cétacés serait désormais interdite en dehors des établissements « ayant pour finalité de prodiguer des soins aux animaux blessés (…) ou affaiblis ». Cette dernière disposition entrerait en vigueur « sept ans » après la promulgation de la loi (donc a priori en 2028), sauf pour les orques (2023). 
Le texte prévoit aussi l’interdiction de « présenter » les animaux figurant sur une liste établie par le ministère, « en discothèque ou lors d’événements festifs » ou encore lors d’émissions de télévision. L’utilisation de loups et d’ours dans des spectacles itinérants serait également interdite, d’ici 2026. 

Franck Lemarc

Télécharger la proposition de loi.

Suivez Maire info sur Twitter : @Maireinfo2




Numérique
Une aide de 150 euros pour permettre aux Français de 28 000 communes d'accéder au bon débit en attendant la fibre
En attendant la généralisation de la fibre optique jusqu'à l'abonné (Ftth) en 2025, les Français peuvent se tourner vers des technologies hertziennes pour obtenir du bon débit (8 Mbits/seconde) chez eux. Pour se procurer le matériel adéquat à leur installation, les habitants de 28 000 communes peuvent prétendre, jusqu'au 31 décembre 2021, à une aide de l'Etat pouvant atteindre 150 euros.

On n’ose encore l’imaginer mais d’ici quatre ans, la connexion internet de tous les Français devrait passer par la fibre optique. Les déploiements sont en cours partout dans le pays. D’ici là, le gouvernement avait promis à chaque foyer d’accéder à du bon débit (8 Mbits/seconde) à la fin de l’année 2020.
Force est de constater qu’il y a du retard. Pourtant, le gouvernement a ouvert, en 2019, le guichet « Cohésion numérique des territoires ». Sa vocation : permettre aux entreprises et particuliers français « non-couverts correctement par les réseaux filaires » d’obtenir du bon débit via des technologies sans fil. L’Etat prenant en charge jusqu’à 150 euros le montant du coût d’équipement, d’installation ou de mise en service de la solution sans fil, « retenue par les opérateurs locaux et nationaux* et labellisée « Cohésion numérique des territoires ». » 

28 000 communes

Pour tenter encore d’accélérer le mouvement devant le besoin de bonne connexion internet exprimé par les Français pendant le confinement, le gouvernement a décidé, le 1er juillet 2020, de « simplifier l’éligibilité du dispositif ». Ainsi, « toutes les communes de la zone d’initiative publique, comprenant au moins un local sans bon haut débit filaire, soit 28 000 communes au total, ont été rendues éligibles au dispositif et donc à l’aide de l’Etat ».
La communauté de communes de Sancey-Belleherbe (Doubs) ne sera pas concernée, elle est devenue, hier, la première intercommunalité de Bourgogne-Franche-Comté à être 100 % fibrée. Toutes les communes n'ont pas cette chance. Selon les projections du gouvernement, le guichet, ouvert jusqu'au 31 décembre 2021 et accessible ici., concernerait près de 4 millions de foyers et d’établissements français situés essentiellement dans des petites villes ou en zone rurale. 

Trois technologies

Les Français qui n’ont pas accès à une bonne connexion internet peuvent donc se rendre dès à présent sur le site de l’opérateur de leur choix pour savoir s’ils peuvent bénéficier d’une technologie alternative à la fibre et par conséquent de l’aide de l’Etat. Attention, les offres labellisées ne s'appliquent que s'il est question de l'une des trois technologies suivantes, précise le gouvernement : la boucle locale radio (Très haut débit radio, Wifi, Wimax…) « qui donne accès à internet via un réseau d’antennes déployées par un opérateur spécialisé » ; la 4G fixe « qui fonctionne grâce au réseau d’antennes mobiles, installées par les opérateurs de téléphonie mobile » ; l’internet par satellite, « qui donne accès à internet par l’intermédiaire de satellites géostationnaires couvrant l’ensemble du territoire français ».

Ludovic Galtier

*Orange, NordNet, Europasat, Bouygues Telecom, Alsatis, Numerisat, Xilan, Weaccess, SFR, SRR, Outremer Telecom, Ozone, Caribsat, Dauphin Telecom, Apinet, STOI et la SPLANG.

Télécharger l'affiche du gouvernement.

Suivez Maire info sur Twitter : @Maireinfo2




Social
Débat autour d'une inexorable montée de la pauvreté
À l'appauvrissement d'une part croissante de la population s'ajoute l'effet covid-19. De tous les bancs de l'Assemblée nationale, les constats des députés convergent, mais les avis sur les moyens pour y remédier restent eux divergents.

L'aggravation de la pauvreté du fait de la crise sanitaire est désormais une évidence. C'est l'un des premiers points que l'on retiendra du débat sur les politiques de lutte contre la pauvreté, organisé mardi 12 janvier, à la demande du groupe Les Républicains.

Diagnostic partagé

Aucune voix dans les travées de l'Assemblée nationale ne conteste ce bilan forcément encore approximatif mais déjà « alarmant » selon Julien Dive, député LR de l'Aisne, ancien maire d'Itancourt : «  8 millions de Français sont obligés d’avoir recours à l’aide alimentaire ; 21 % des Français ont du mal à prendre trois repas par jour ; 20 % des Français peinent à régler la cantine de leurs enfants », énumère-t-il. Le tableau de bord des indicateurs, toujours plus sombres, est complété par les autres intervenants. « En 2021, plus de 300 000 personnes vivent encore dans la rue. En 2021, il y a encore des bidonvilles en France. En 2021, il y a encore plus de 9 millions de Français qui vivent sous le seuil de pauvreté. En 2021, une crise sanitaire, économique et sociale ravage la France, creuse les inégalités et ne fait qu’accélérer la précarisation des plus modestes », développe Joël Aviragnet, député PS de Haute-Garonne et ancien maire d'Encausse-les-Thermes. 

Pas de changement de cap

Face aux critiques sur les mesures du gouvernement jugées insuffisantes (« un plan pauvreté aux ambitions limitées, des primes insuffisantes »), le ministre des Solidarités et de la Santé, Olivier Véran, défend le bilan et les options du gouvernement, et la stratégie de lutte contre la pauvreté, lancée en 2018, renforcée à l'automne 2020. « Ce déterminisme très fort, la perte de l’emploi comme la difficulté d’en trouver un, ainsi que les séparations, tels sont les principaux facteurs de la pauvreté », explique-t-il. D'où l'attachement aux mesures dites « préventives » (dédoublement des classes dans les réseaux d'éducation prioritaire, tarification sociale de la cantine, accueil en crèches), « palliatives » (le plan un jeune une solution), ou « curatives » (le chômage partiel plutôt que la perte d'emploi). 

Le revenu universel enterré

Face aux députés qui demandaient un revenu universel, le ministre reste ferme. Qu'il s'agisse de la version proposée par Les Républicains (un « socle citoyen »), ou de celle visant plus spécifiquement les 18/25 ans (« un minimum jeunesse », « l’aide ponctuelle de 150 euros destinée aux jeunes en difficulté est un premier pas, mais elle ne saurait en rien répondre à la crise durable que subit cette population »), ces projets ne sont pas à l'ordre du jour. La relance des réflexions autour d'un revenu universel, pourtant engagée par la stratégie de lutte contre la pauvreté mais suspendue en février 2020, n'est plus d'actualité. Pour les jeunes, étudiants, apprentis, intérimaires, le ministre préfère la « garantie jeunes ». 
Il reçoit le soutien de la présidente de la commission des Affaires sociales, députée de Côte-d'Or, Fadila Khattabi (LaREM), « une personne qui entre dans le dispositif RSA en est toujours bénéficiaire quatre ans après ». Cela justifie la mise en œuvre du service public de l’insertion et de l’emploi « qui sera déployé dans trente territoires supplémentaires en mars prochain, en plus des quatorze actuellement concernés », précise l'élue. 

La part des collectivités

Les échanges ont valorisé le rôle des collectivités locales, tout en portant les projecteurs sur des territoires négligés. Ou leurs manques de moyens (comme La Réunion). «  Les collectivités ont besoin de moyens : elles connaissent la réalité du terrain, elles ont des idées, il ne leur manque que les moyens de les appliquer », défend Valérie Six, députée UDI du Nord. « L’aide financière de 100 millions d’euros qui leur est destinée (aux associations) est insuffisante. J’en veux pour preuve que de nombreuses collectivités doivent la compléter par le biais de subventions », interpelle Brigitte Kuster, députée de Paris (LR). 
Le ministre ne promet pas le grand soir, « on peut toujours faire mieux et nous ferons en sorte de faire mieux ». Interrogé sur le milieu rural, il renvoie « au volet destiné aux territoires ruraux » de la stratégie nationale de lutte contre la pauvreté, et cite « la tarification sociale des cantines scolaires avec un repas à moins de 1 euro » : « quelque 10 000 communes rurales vont dès lors pouvoir proposer une telle tarification ». Plus globalement, Olivier Véran a surtout invité les élus « à contacter (leurs) commissaires régionaux à la lutte contre la pauvreté dans vos territoires. Ils ont besoin de vous et vous verrez que vous avez aussi besoin d’eux. »
Le ministre a enfin dit sa désapprobation aux communes « qui ont mis en place des politiques d’aides sociales conditionnées au comportement de tel ou tel membre de la famille ». « Je ne me sens pas solidaire de tels dispositifs », a t-il conclu, après l'intervention d'une députée de l'Hérault.

Emmanuelle Stroesser

Suivez Maire info sur Twitter : @Maireinfo2




Numérique
Pourquoi la Cnil a interdit au ministère de l'Intérieur d'utiliser des drones équipés de caméras
La Commission nationale de l'informatique et des libertés a interdit sans exception possible, le 12 janvier, au ministère de l'Intérieur de recourir aux drones équipés de caméras tant qu'un texte ne réglementerait pas leur utilisation. Le ministère a eu recours à ces engins « en dehors de tout cadre légal » à des fins de surveillance pendant la première période de confinement (mars-mai 2020).

Les forces de l’ordre rappelées à l’ordre… A l’issue d’une procédure de contrôle, initiée en mai 2020, la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil) a décidé, le 12 janvier, de « sanctionner » le ministère de l’Intérieur (la Cnil ne peut toutefois pas infliger d’amende à l’Etat), pour son utilisation « illicite » de drones équipés de caméras. Ces engins veillaient, à ce moment-là, « en dehors de tout cadre légal », au respect des mesures de confinement. Plusieurs centaines de drones avaient été commandés par l’Etat en avril.
Au-delà de cette seule pratique, la Cnil « enjoint (surtout) au ministère de se mettre en conformité avec la loi Informatique et Libertés (et) de cesser tout vol de drone jusqu’à ce qu’un cadre normatif l’autorise ». Ce qui n’est pas le cas jusque-là ! 
Cette interdiction s’applique donc pour « l’ensemble des forces de l’ordre dès lors qu’elles agissent sous l’autorité du ministère, qu’il s’agisse de services de police ou de gendarmerie, sur l’ensemble du territoire ». Et ce en tout temps, période de confinement ou non, « quelles que soient les finalités poursuivies ». En cas de non respect de sa délibération par le ministère, expliquent nos confrères de ZDNet, la Cnil peut soit reprendre une sanction de même nature (c'est-à-dire un rappel à l'ordre rendu public), soit initier une procédure d'urgence dans le cadre de laquelle elle saisirait le Premier ministre pour qu'il prenne les mesures permettant de faire cesser la violation constatée, selon la loi de 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés.

Les personnes filmées susceptibles d’être identifiées

La Cnil s’est saisie du dossier après la parution au printemps d’articles de presse révélant l’utilisation de ces drones par les forces de l’ordre. Le 23 avril, sa présidente, Marie-Laure Denis, a adressé un courrier au ministère de l'Intérieur « afin d’obtenir des précisions sur ces dispositifs et leurs caractéristiques ». Deux semaines plus tard, le 7 mai, elle faisait « procéder à des contrôles concernant l’usage des drones ». « En réponse, rapporte la Cnil, le ministère a indiqué utiliser des drones équipés de caméras, notamment pour vérifier le respect des mesures de confinement, pour la surveillance de manifestations, pour des missions de police judiciaire (telles que la reconnaissance d’un lieu avant une interpellation ou la surveillance d’un trafic de stupéfiants), ou encore pour la surveillance de rodéos urbains. » 
Toujours est-il que ces contrôles ont surtout pu établir « que les personnes filmées par ce type de dispositif étaient susceptibles d’être identifiées », un traitement de données qui ne repose sur aucune base légale. 

Aucune base légale

Le ministère de l’Intérieur a manqué à plusieurs obligations de la loi Informatique et Libertés, en conclut la Cnil. L’une d’elles dit clairement que « les traitements mis en œuvre par l’Etat, pour prévenir ou détecter les infractions pénales, mener des enquêtes ou se prémunir contre des atteintes à la sécurité publique, doivent être prévus par un texte (législatif ou réglementaire) ». Une « analyse d’impact doit (par ailleurs) être réalisée lorsque ces traitements présentent un risque élevé pour les droits et libertés des personnes ». 
Or, aucune de ces conditions n’est respectée. « A ce jour, aucun texte n’autorise le ministère de l'Intérieur à recourir à des drones équipés de caméras captant des images sur lesquelles les personnes sont identifiables (le floutage a été mis en place à partir du mois d’août 2020 seulement, ndlr). De même, alors qu’elle est obligatoire, aucune analyse d’impact n’a été communiquée à la CNIL concernant l’utilisation de ces drones. Le public n’était pas non plus informé de l’utilisation des drones comme il aurait dû l’être. »
En décembre, le Conseil d’Etat avait déjà interdit l’usage de drones pour surveiller les manifestations sur la voie publique. En mai dernier déjà, le Conseil d’Etat, encore lui, avait suspendu l’usage des drones pour faire respecter à Paris les mesures sanitaires dans le cadre du déconfinement.
Le dispositif de floutage par intelligence artificielle, développé par la préfecture de police de Paris pour contourner cette interdiction, est, enfin, critiquable à bien des égards, selon la Cnil. « Ce mécanisme ne peut pas être exécuté directement par le drone. Des images contenant des données personnelles sont donc collectées, transmises et traitées par le ministère de l'Intérieur avant que ce système de floutage ne soit appliqué. Enfin, ce mécanisme n’empêche pas nécessairement l’identification des personnes dès lors que les services du ministère de l'Intérieur sont en mesure de désactiver le floutage. »

Le ministère « respectera les termes » de la sanction

Le ministère de l'Intérieur a déclaré qu'il prenait acte de cette décision dont « il respectera les termes », rapporte Reuters... en attendant la promulgation de la loi sécurité globale. Adopté en première lecture à l’Assemblée nationale avant son examen au Sénat en mars 2021, l’article 22 de cette loi prévoit d’autoriser l’usage des drones lors de manifestations « lorsque les circonstances font craindre des troubles graves à l’ordre public ». Cette mesure a fait l’objet de vives critiques et de manifestations de la part d’associations de défense des libertés.

Ludovic Galtier

Accéder à la décision de la Cnil.

Suivez Maire info sur Twitter : @Maireinfo2







Copyright 2020 AMF - www.maire-info.com - Tous droits réservés