Édition du mercredi 18 novembre 2020

Sécurité
Le Livre blanc de la sécurité intérieure relance le débat sur la répartition police-gendarmerie

Le très attendu Livre blanc de la sécurité intérieure a été publié hier par le ministère de l’Intérieur. Paru très tard dans le quinquennat, alors qu’il devait en être la pierre angulaire sur le chapitre de la sécurité, ce texte aborde la question du rôle du maire et celle, extrêmement sensible, d’une refonte des zones police et gendarmerie. 

« Maires défaillants »
C’est en septembre 2017 que le ministre de l’Intérieur d’alors, Gérard Collomb, annonçait la publication de ce Livre blanc. Trois ans, quatre groupes de travail et une centaine d’assises territoriales plus tard, le texte a été diffusé hier, riche de 200 propositions… dont toute une partie figure déjà dans le projet de loi Sécurité globale dont l’examen a commencé hier à l’Assemblée nationale. 
 C’est le cas, notamment, pour les propositions du Livre blanc qui touchent au « rôle du maire » dont certaines se retrouvent dans le projet de loi, notamment sur les polices municipales, dont le gouvernement souhaite élargir les prérogatives, ou la volonté d’aller vers davantage d’intercommunalisation. 
Néanmoins, le Livre blanc préconise aussi de réfléchir à certaines idées qui ne sont pas dans le projet de loi Sécurité globale, et qui posent questions. En particulier, la proposition figurant en page 134 du Livre blanc, consistant à « donner aux préfets un pouvoir de substitution effectif » au maire dans le cas où celui-ci serait jugé « défaillant », ou en cas « d’inaction du maire dans le domaine de la sécurité ». La proposition n’est guère plus précise, mais telle quelle, elle a de quoi faire sursauter tous ceux qui pensent que la libre administration des collectivités territoriales n’est pas simplement un mot en l’air, mais une obligation constitutionnelle. Que signifierait un « maire défaillant » ? Qui en jugerait ? Où commencerait et où finirait la notion « d’inaction du maire » ? Autant de questions auxquelles les maires vont certainement attendre des réponses rapides du gouvernement.

Répartition police-gendarmerie : vers de nouvelles règles ?
Autre sujet ultra-sensible abordé dans le Livre blanc : la répartition des zones police et gendarmerie. Le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, semble décidé à rouvrir cette boîte de Pandore, comme il l’a déclaré dans Le Parisien du 14 novembre : « Il y a une mauvaise répartition entre police et gendarmerie sur le plan national. » Estimant qu’il faut aller « sans tabou vers une organisation plus efficace », l’ancien maire de Tourcoing fustige une organisation qui deviendrait obsolète dans la mesure où « les agglomérations se sont étendues ». 
Le Livre blanc confirme ces orientations : il y est développé l’idée que la traditionnelle répartition (police dans les zones urbaines denses, gendarmerie ailleurs) serait de moins en moins adaptée : « L’urbain ne s’oppose plus au rural, les métropoles s’affirment tout en s’inscrivant dans des systèmes urbains bien plus larges où villes-centres et périphéries sont interdépendantes. L’émergence des intercommunalités et des regroupements de communes (communes nouvelles, communes-communautés) supplante le modèle communal ancien sur lequel la répartition des forces est basée. »
Le Livre blanc préconise donc de revoir les seuils et d’instaurer une nouvelle règle : « En dessous de 30 000 habitants, le principe serait de confier le territoire à la gendarmerie. Entre 30 et 40 000 habitants, attribution à la force la mieux adaptée aux caractéristiques de ce territoire et au-dessus de 40 000 habitants principe de compétence de la police nationale. » Tout en laissant, de toute façon, au ministre de l’Intérieur « la faculté de s’écarter de ces principes ». 
Ce chapitre du Livre blanc insiste sur l’idée que dans les zones urbaines denses et les zones rurales très peu denses, la question de la répartition ne se pose pas. Mais qu’en revanche, elle est plus complexe dans « le périurbain », où « les distinctions tendent à s’amenuiser » : « D’un périurbain à l’autre, police et gendarmerie seront alternativement en mesure d’apporter la réponse sécuritaire optimale. » Les auteurs du Livre blanc appellent donc à « dessiner une carte rénovée de la répartition territoriale », qui pourrait, dans certains cas extrêmes, aller jusqu’à « transférer à la gendarmerie nationale l’intégralité de la compétence territoriale sur certains départements ». 

La question essentielle de la concertation avec les maires
Toutes ces réflexions n’apparaissent évidemment pas absurdes. Mais, comme le rapport lui-même le souligne, cette nouvelle répartition ne pourra se faire sans l’adhésion des élus locaux, et en particulier des maires. « La consultation préalable des élus locaux concernés par une opération de redéploiement des forces de l’ordre est d’ailleurs posée comme un postulat dans chacune des contributions écrites émises par l’Association des maires de France », souligne le Livre blanc. 
Sauf que pour l’instant, la concertation n’est pas encore au rendez-vous. Témoin ce qui se passe en ce moment autour de Toulouse, où les élus ont eu la surprise de se voir cités dans l’interview donnée par Gérald Darmanin au Parisien (« dans l'agglomération de Toulouse, il y a quatre villes sous l'autorité de la police, et tout le reste de la zone, très urbanisée, sous le contrôle de la gendarmerie ») comme exemple de ce qui ne fonctionne pas. Dans la presse locale, plusieurs maires des communes de l’agglomération toulousaine se montrent stupéfaits d’apprendre que la réflexion sur le redécoupage serait engagée alors qu’eux-mêmes sont parfaitement « satisfaits de la gendarmerie » et ne voient aucune raison d’en changer, la gendarmerie étant « plus appropriée à la physionomie de (leurs) territoires ». Ces maires, toujours selon la presse locale, envisagent de « se fédérer » et d’intervenir auprès du préfet. 
Un premier épisode déjà tendu, qui met en lumière, dans ce débat sensible, l’absolue nécessité de la concertation, très en amont, entre les services de l’État et les maires.

Franck Lemarc

Télécharger le livre blanc sur la sécurité intérieure. 

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Sports
Sports : vers une sortie du confinement en décembre pour les clubs amateurs

Faut-il y voir, comme le pressent le député de la majorité, Cédric Roussel (Alpes-Maritimes), une « bouffée d’oxygène » pour le monde du sport ou un effet d'annonce ? Après s’être entretenu hier plus de deux heures avec les acteurs de la filière, Emmanuel Macron a présenté un paquet de nouvelles mesures estimé à 400 millions d’euros par l’Elysée. « Le monde du sport mérite mieux », rétorquaient hier certains membres de l’opposition.

Si bien des questions demeurent, le scénario de la reprise d’activités se dessine pour les clubs sportifs amateurs. Au sortir d’une réunion avec, entre autres, des présidents de fédérations, d’associations et de clubs professionnels, Emmanuel Macron a dit « souhaiter que le retour des mineurs dans les associations sportives puisse être effectif au mois de décembre (les dates du 1er et du 19 décembre sont évoquées, d’après L’Equipe, ndlr) selon des protocoles sanitaires qui seront travaillés avec le ministère chargé des Sports et les acteurs locaux ». Il devra s’accompagner d’une campagne de communication nationale « pour faire la promotion de la pratique sportive au bénéfice de la santé des Français ».
L’AMF avait fortement poussé à la reprise de la pratique sportive en club par les mineurs dès le mois de décembre, par la voix de David Lazarus, co-président du groupe de travail sport, insistant sur la nécessité de privilégier la pratique en club plutôt que sur les temps périscolaires. Compte tenu, en outre, des enjeux économiques pour de nombreux clubs confrontés à une perte de licenciés sans précédent et des dégâts que peuvent causer l’absence de pratique sportive pour les adhérents, il était urgent de leur donner des perspectives de reprise. 
Hier encore, le député Fabien Di Filippo (Moselle, Les Républicains) se faisait l’écho, à l’Assemblée nationale, de « l’incompréhension et (de) la colère des acteurs du monde sportif amateur et de millions de pratiquants quotidiens de tous âges » : « comment comprendre qu’il soit possible de mettre une soixantaine d’enfants dans le même bassin en cours d’EPS, mais qu’il reste interdit de reprendre des activités en petits groupes distanciés de moins d’une dizaine d’enfants ? » s’interrogeait-il. 

Un pass’sport en 2021
« Ce que nous faisons aujourd’hui, ce n’est pas ignorer les difficultés du monde sportif, c’est l’accompagner », lui a répliqué le ministre de l’Education nationale, de la Jeunesse et des Sports Jean-Michel Blanquer, répétant dans l’Hémicycle ce que le président de la République a officialisé le matin même : la création d’un pass’sport en 2021. Estimée à 100 millions d’euros, la mesure, destinée en priorité aux « plus fragiles » comme les jeunes et les personnes en situation de handicap (lire Maire info du 17 septembre), est une « aide financière pour prendre en charge une part du coût d'inscription dans un club sportif d'un jeune de moins de 16 ans », précise le ministre dans L’Equipe. Je pense qu'une aide de 50 euros, comme l'a évoquée Denis Masseglia (président du CNOSF), est une bonne base de travail. Ensuite, à nous d'en définir les modalités, c'est tout le travail qui s'engage. Il nous faudra notamment décider qui en seront les bénéficiaires ». 
En direction du monde sportif amateur toujours, l’Etat a annoncé la reconduction en 2021 du fonds d’urgence (doté de 15 millions d’euros en 2020) pour les petites associations. Il investira ainsi 15 millions d’euros dans ce fonds « positionné à l’Agence nationale du sport » (lire Maire info du 1er juillet). « En complément, une partie des crédits de l’Agence nationale du sport issus de plan de relance sera consacrée à la création d’un fonds de compensation pour amortir les pertes des fédérations sportives en termes de licences ».
A la rentrée, 122 millions d’euros sur deux ans (2021 et 2022) avaient, en effet, été accordés au sport dans le plan de relance du gouvernement (lire Maire info du 30 septembre). Parmi cette somme, 50 millions d’euros participeront à la rénovation, notamment en matière énergétique, d’équipements sportifs toujours plus vieillissants (lire Maire info du 1er septembre). 
5 000 postes de services civiques seront, enfin, fléchés vers le sport et des emplois seront créés dans les Comités régionaux olympiques et sportifs (Cros) « pour accompagner les petits clubs à se saisir des aides disponibles ». En septembre, le directeur général de l’ANS, Frédéric Sanaur, précisait que l’objectif était de passer de 5 300 emplois sportifs aujourd’hui à 7 500 en 2021 et 10 000 en 2022. 40 millions d’euros sont budgétés par l’ANS pour y parvenir.

Les spectateurs de retour dans les stades en janvier 2021 ?
Parmi les autres mesures annoncées hier, le président de la République a confirmé, pour le sport professionnel, « la mise en place du mécanisme de compensation de la billetterie à hauteur de 107 millions d’euros pour les clubs masculins et féminins ainsi que les organisateurs de manifestations sportives dont les fédérations. Cette aide exceptionnelle sera calculée en fonction des pertes et de la dépendance à la billetterie des structures. Le ministère des Sports engagera début décembre les versements dont la répartition par club sera précisée dans les prochains jours », précise un communiqué de Roxana Maracineanu. « Une exonération de cotisations sociales patronales hors retraite complémentaire et une aide au paiement des cotisations égale à 20% de la masse salariale, concernant les cotisations sociales devant être payées en octobre, novembre et décembre. Cet effort de 105 millions d’euros bénéficiera aux clubs (de moins de 250 salariés) qui n’ont quasiment plus de recettes du fait des restrictions de jauges puis du huis clos ». Le retour du public dans les stades fait, dans le même temps, l’objet d’une réflexion au gouvernement. Elle n’aurait pas lieu avant janvier 2021 avec désormais une « jauge relative ». Il ne serait plus question de fixer cette dernière à 1 000 ou 5 000 spectateurs selon les capacités d’accueil de l’équipement mais de la calculer par densité (un siège sur deux ou une personne par mètre carré).
Un groupe de travail est enfin lancé sur le dispositif du droit à l'image que réclament les acteurs avec l'appui de plusieurs parlementaires.

La majorité applaudit, l’opposition s’impatiente
Ces mêmes parlementaires ont réagi hier aux annonces de l’exécutif. Pour la majorité, Cédric Roussel (Alpes-Maritimes, La République en marche) et François Cormier-Bouligeon (Cher, La République en marche) se réjouissent de la prochaine création du pass’sport. Ils estiment, dans un communiqué, qu’Emmanuel Macron « a entendu le message du mouvement sportif. La baisse de 30 % du nombre de licenciés dans les fédérations sportives et les pertes financières sont très inquiétantes. Ce pass'sport permettra aux jeunes de revenir vers les inscriptions en club dès que la situation sanitaire le permettra. » Régis Juanico (Loire, Génération.s) et Jean-Jacques Lozach (Creuse, PS), eux, attendent des précisions sur le calendrier dans lequel ce pass'sport sera déployé et surtout sur l’enveloppe qui lui sera consacré. « L’exécutif évoque un budget de 100 millions d’euros par an sans en préciser ni la cible, ni le nombre de jeunes concernés ». 
De façon plus générale, le montant de 400 millions d’euros annoncé par l’exécutif est, selon eux, « assez faible et sous-dimensionné ». D’autant plus que « sur les 400 millions mis en avant, plus de 200 millions sont annoncés depuis plusieurs semaines et ont d'ores et déjà été adoptés par le Parlement, abonde dans leur sens le sénateur Les Républicains de l’Isère, Michel Savin. Le monde du sport mérite mieux ».

Ludovic Galtier

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Catastrophes
Inondations aux Antilles : quelles mesures d'urgence ? 

C’est une catastrophe qui passe relativement inaperçue, en métropole, du fait de l’actualité liée à l’épidémie. Mais depuis une douzaine de jours, la Martinique et la Guadeloupe sont frappées par des pluies particulièrement intenses qui ont ravagé une partie des réseaux routier et d’eau potable. Le sujet est arrivé à l’Assemblée nationale hier, lors de la séance de questions au gouvernement.

Mairies « acculées »
Routes effondrées, arbres tombés bloquants les voies, inondations, glissements de terrain… C’est une situation particulièrement difficile que connaissent les habitants des deux îles, et en particulier ceux du nord de la Martinique, depuis qu’a commencé un épisode de pluies intenses le 5 novembre, et dont on peut penser qu’elle ferait certainement davantage la une des médias si elle se déroulait en métropole. En Martinique, quatre routes départementales ou nationales essentielles sont totalement interrompues, et sept « peu praticables », selon la collectivité territoriale. Une quinzaine d’établissements scolaires ont dû fermer face à la montée des eaux. Et, plus grave encore, 55 000 habitants de l’île sont privés d’eau potable à ce jour, selon le chiffre donné hier par le gouvernement. Un homme est mort, emporté par les eaux, à Sainte-Marie. 
Lors de la séance de questions au gouvernement, hier, à l’Assemblée nationale, le député martiniquais Serge Letchimy a interpellé Sébastien Lecornu, ministre des Outre-mer. L’ancien maire de Fort-de-France a d’abord demandé au ministre si les arrêtés de catastrophe naturelle pour les communes concernées seraient pris en urgence (comme cela a été le cas récemment pour les communes frappées par la tempête Alex dans les Alpes-Maritimes). Mais il a surtout, sur le fond, posé la question récurrente de l’application de la politique du risque naturel dans les outre-mer, où de nombreuses particularités rendent inefficaces les dispositifs pourtant valides en métropole. Serge Letchimy a ainsi rappelé que « 40 % des habitations aux Antilles ne sont pas assurées, que 20 % des activités sont dans l’informel et qu’aux termes du régime assurantiel en vigueur, les dommages corporels ne sont pas indemnisés : (…)  que le fonds de secours d’urgence pour les non-assurés et les collectivités n’est doté que de 10 millions d’euros pour l’ensemble des outre-mer – nous connaissons par ailleurs les difficultés d’accès au fonds Barnier – et que les mairies concernées, vu l’étendue des dégâts, se trouveront acculées budgétairement ». 

Des mesures… un jour
Le ministre a répondu clairement sur le caractère urgent des arrêtés de catastrophe naturelle : « La réponse est oui. Cet après-midi même, les dossiers déposés par les communes sont examinés par la Direction générale de la sécurité civile. » Il a cité les cinq communes qui avaient déposé une demande de reconnaissance en état de catastrophe naturelle (Ducos, Gros-Morne, Sainte-Marie, Le Marigot, Le Robert et La Trinité) et précisé que « sept communes » seront également concernées en Guadeloupe, sans les citer. Le fonds de solidarité pour l’outre-mer « pourra être sollicité pour les différents biens qui ne sont pas assurés », a affirmé le ministre.
Sur la question de l’indemnisation des victimes et de l’inadéquation des dispositifs aux spécificités des outre-mer, Sébastien Lecornu s’est hélas montré moins précis. Il a rappelé que le projet de loi maintenant appelé « 4D » (décentralisation, différenciation, déconcentration, décomplexification) comporterait « un titre spécifique à l’outre-mer », et qu’il « souhaite » qu’y soient incorporées des mesures « découlant des travaux menés sur les risques majeurs naturels en outre-mer ». Outre que l’on ne connaît pas le détail de ces « mesures » souhaitées par le ministre, le calendrier envisagé pour ce texte ne permet pas d’espérer une adoption avant l’automne prochain, au mieux – certains étant même persuadés que le projet de loi ne verra pas le jour avant la fin du quinquennat. 
Dans tous les cas, les outre-mer et leurs communes devront donc attendre, alors que la fréquence et la violence des événements climatiques ne font qu’accélérer. 

Franck Lemarc

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Coronavirus
La reprise de l'économie française sera moins forte que prévu l'an prochain

Le rebond de l’économie sera moins fort qu’espéré l’an prochain, a reconnu mardi le gouvernement, car la croissance restera freinée par l’impact du reconfinement et la nécessité de maintenir encore des restrictions sanitaires pendant de longs mois.
Désormais, la croissance est attendue à 6 % l’an prochain contre 8 % auparavant, après une chute historique de 11 % du PIB attendue cette année, a annoncé le ministre de l’Économie Bruno Le Maire lors d’une conférence de presse.
Cette hypothèse repose sur trois éléments sanitaires : « Un ralentissement de l’activité économique de l’ordre de 12 % » en novembre avec le reconfinement, « le maintien de règles sanitaires dans les mois qui viennent pour prévenir la reprise de l’épidémie » et « qu’il n’y aurait pas de troisième confinement en France en 2021 », a expliqué le ministre. Cette nouvelle prévision sera intégrée au projet de loi de finances pour 2021, actuellement en discussion au Parlement.
« La temporalité de la crise a changé par rapport à la représentation qu’on pouvait s’en faire au départ, qui était celle d’un choc considérable mais ponctuel au printemps suivi d’une reprise vive au début et plus progressive ensuite », avait estimé dans la matinée Julien Pouget, responsable du département de la conjoncture à l’Insee, en présentant la dernière note de conjoncture de l’institut. « On s’attend maintenant à ce que l’économie et la situation sanitaire aient partie liée au moins jusqu’à la mi-2021 », avait-il ajouté.
Face à une reprise économique moins forte que prévu et au maintien de restrictions sanitaires sur la durée, certains secteurs risquent de subir encore longtemps les conséquences de la crise, comme l’hôtellerie-restauration ou les clubs sportifs.
Sur le seul mois de novembre l’activité devrait se contracter de 13 % selon l’Insee, mais la chute est de 60 % pour l’hébergement-restauration et 40 % pour les services aux ménages qui incluent les activités de loisirs.

Nouvelles aides
Si le ministre n’a pas débouché l’horizon de ces professionnels en évoquant une date de réouverture, il a assuré que le gouvernement prolongerait son soutien. Ces nouveaux moyens seront intégrés à la loi de finances pour 2021 mais détaillés ultérieurement car le gouvernement y travaille encore, a indiqué Bruno Le Maire.
Outre le chômage partiel ou les exonérations de charges, il a évoqué une modification du fonds de solidarité qui pourrait permettre aux entreprises de choisir une « prise en charge des pertes d’exploitation » selon « un pourcentage qui reste encore à déterminer », plutôt que les 10 000 euros proposés actuellement.
Le dispositif de soutien aux fonds propres des entreprises, jugé insuffisant par de nombreux économistes, devrait être renforcé. Le gouvernement prévoit des prêts participatifs à échéance de 8 ans (contre 7 ans envisagé jusqu’ici), associés à une garantie publique, ce qui doit encore recevoir l’aval de Bruxelles.
« Nous ajusterons la garantie de l’État à la demande », a assuré Bruno Le Maire, alors qu’il prévoit un maximum de 3 milliards d’euros pour un total de 20 milliards de prêts.
Même chose pour l’aide aux plus démunis, dont la crise accentue les difficultés : « Nous ferons ce qui sera nécessaire », a voulu rassurer le ministre, citant le RSA.

Plan de relance « indispensable »
Ces mesures aggraveront les prévisions de déficit et de dette pour 2021 mais les nouvelles estimations ne seront connues que début décembre. Malgré tout, Bruno Le Maire espère toujours revenir d’ici à 2022 au niveau d’activité d’avant la crise. Mais ce retour sera « décalé à fin 2022 », a-t-il concédé.
Il compte en particulier sur le plan de relance pour y parvenir, malgré les critiques de l’opposition et d’économistes. Bruno Le Maire a réitéré sa défense d’une stratégie « complémentaire » entre la relance qui vise à « inventer et promouvoir l’économie du XXIe siècle », et les mesures de protection prises ces derniers mois et encore existantes dans le budget pour 2021.
Estimant que les premières mesures du plan de relance rencontrent « un immense succès », notamment sur l’emploi des jeunes, l’apprentissage ou l’aide à la rénovation des logements, il a affirmé que « le plan de relance fonctionne, il est en cours d’accélération et il est indispensable ». (Marie Heuclin, AFP)

Télécharger la note de conjoncture de l’Insee.

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Budget de l'état
PLF 2021 : les députés adoptent le « budget de relance » en première lecture

Confrontée à de nombreuses incertitudes économiques en pleine crise sanitaire, l'Assemblée nationale a adopté, hier, en première lecture le projet de loi de finances (PLF) pour 2021 qui contient le plan de relance de 100 milliards d'euros. Son examen au Sénat débutera à partir de demain.

Ce PLF a été soutenu par 355 voix contre 202, lors du vote solennel qui s’est déroulé hier en fin d'après-midi, l’adoption définitive par le Parlement devant avoir lieu avant la fin décembre.

Budget « caduc »
Le député des Vosges, Christophe Naegelen (UDI), a ainsi critiqué un projet de budget devenu « littéralement caduc » puisque « les prévisions financières qui le sous-tendent sont désormais anachroniques ». « En voulant allier, de manière inédite, urgence et relance, (celui-ci) a perdu une partie de sa substance et de sa lisibilité », a-t-il estimé alors que l'Insee vient d'annoncer que la rechute du PIB au dernier trimestre 2020 pourrait être de 2,5 % à 6 %, selon la durée du reconfinement.
Le ministre chargé des Comptes publics, Olivier Dussopt, a assuré qu’il veillerait, « tout au long des prochaines semaines, à ce que les hypothèses sur lesquelles nous travaillons et qui figurent dans le projet de loi de finances et le projet de loi de financement de la sécurité sociale soient actualisées, afin que les textes que vous aurez à voter à la fin du mois de décembre soient construits sur des hypothèses plausibles et, évidemment, identiques d’un texte à l’autre ». 

Impôts de production, jour de carence et relance écologique
Alors que la députée de Seine-et-Marne Patricia Lemoine (Agir ensemble) a jugé que « le gouvernement a rapidement mis en place des mesures de soutien massives à destination des acteurs économiques, des collectivités territoriales et des publics les plus fragiles », c’est la baisse de 10 milliards des impôts dits de production des entreprises qui a une nouvelle fois concentré les critiques des oppositions, notamment de gauche. Celles-ci ont dénoncé une « politique de l'offre » favorable aux « grandes entreprises » et aux « géants d’internet » ainsi que l'absence de toute « contrepartie écologique ou sociale », bien qu’un amendement demandant aux entreprises de plus de 50 salariés d'améliorer leur « performance » en matière « écologique, de parité et de gouvernance » ait été adopté. Un « gadget » pour l’opposition (lire également Maire info du 13 octobre). 
« Nous baissons les impôts de production pour alléger la fiscalité des entreprises, poids sous lequel les TPE et PME courbent l’échine, et qui grève leur capacité à innover et à créer les emplois de demain », a justifié le député LaREM des Français établis hors de France Alexandre Holroyd. « Vous prévoyez 6,6 milliards de baisse d’impôts pour les 9 200 plus grosses entreprises et ETI, mais seulement 3,4 milliards d’euros pour les 560 000 petites et moyennes entreprises », a fustigé le député du Nord, Fabien Roussel (PCF), qui a enjoint le gouvernement à « aider les collectivités, plutôt que de les priver de recettes fiscales » car « ce sont elles qui recherchent des solutions pour couvrir les loyers des PME et des commerçants, pour compenser leurs pertes de recettes malgré l’argent public mis sur la table ». 
La députée socialiste du Tarn-et-Garonne, Valérie Rabault, a d’ailleurs repris les conclusions du rapport publié lundi par l’Institut des politiques publiques selon lesquelles « les entreprises qui ont le plus pâti de la crise ne bénéficieront pas particulièrement du plan de relance », contrairement à l’industrie et aux grandes entreprises. Elle a également pointé les « engagements non tenus » du gouvernement sur le jour de carence : « Le 15 septembre dernier, la ministre de la Transformation et de la Fonction publiques a déclaré (...) qu’il serait suspendu à nouveau si l’état d’urgence sanitaire reprenait. Or, l’état d’urgence sanitaire a repris », sans que le jour de carence ne soit pour autant supprimé (lire Maire info du 16 novembre).
De son côté, le député de la Marne, Charles de Courson (Libertés et territoires), a regretté que « le dispositif de soutien à la construction ne soit pas à la hauteur », constatant que « la relance écologique se fait sans les collectivités territoriales ». Aujourd’hui, celles-ci « portent 52 % de l’investissement lié à la transition écologique dans des secteurs aussi structurants que les transports en commun, la gestion des déchets ou le traitement de l’eau potable... Comment, dans ces conditions, pouvez-vous créer la confiance alors même que les incertitudes liées aux ressources des collectivités locales, et surtout à la chute de leur auto-financement, sont majeures ? », a-t-il demandé.

DMTO : le « filet de sécurité » adapté aux petites communes
Alors qu’aucun « filet de sécurité » n’est pour l’heure prévu dans le budget 2021, comme c’est le cas en 2020 pour les pertes de recettes des communes et des intercommunalités (lire Maire info des 2 et 12 novembre), le gouvernement vient d’annoncer qu’un amendement serait déposé lors de l’examen du PLF pour 2021 au Sénat afin que « les modalités de reversement des DMTO spécifiques pour les petites communes ne les pénalisent pas ». En effet, les communes de moins de 5 000 habitants qui ne sont pas classées station de tourisme perçoivent cette recette avec un décalage d’un an, ont rappelé les trois ministres Jacqueline Gourault (cohésion des territoires), Olivier Dussopt (comptes publics) et Joël Giraud (ruralité), dans un communiqué publié hier.
L’objectif est ainsi « d’étendre le « filet de sécurité » aux recettes de DMTO reversées aux communes par les conseils départementaux en 2021 afin que celles-ci ne soient pas inférieures à l’enveloppe moyenne distribuée entre 2018 et 2020 ». Le montant de cette nouvelle garantie est estimé pour l’instant par le gouvernement « entre 15 millions d’euros et 50 millions d’euros ». Deux tiers des communes qui en bénéficieraient seraient des communes de moins de 1500 habitants. 
A noter à ce sujet que le quatrième projet de budget rectificatif (PLFR 4) pour 2020, qui intègre la compensation des pertes de recettes fiscales et domaniales prévue par l’Etat pour le bloc communal en 2020 (actualisée et finalement évaluée à environ 250 millions d’euros), devait être examiné, hier soir, en commission mixte paritaire.

DETR, taxe de séjour, ZRR… 
Durant l’examen en séance, les députés ont voté un grand nombre d’amendements intéressant les collectivités. Ils ont ainsi réduit fortement, à partir de 2022, la fraction de TVA dévolue aux départements, aux intercommunalités et à la Ville de Paris pour le calcul de la compensation du foncier bâti transféré aux communes, d’un côté, et de la suppression de la taxe d’habitation sur les résidences principales, de l’autre (lire Maire info du 21 octobre). 
Ils ont également prolongé jusqu’en 2022 les zones de revitalisation rurale, les zones franches urbaines ainsi que cinq autres dispositifs zonés de soutien aux territoires en difficulté (lire Maire info du 9 novembre), mais aussi le prêt à taux zéro et le dispositif Pinel (lire Maire info du 17 novembre) et ils ont décidé d’accorder des dérogations aux collectivités sur les projets de rénovation énergétique de leurs bâtiments afin de faciliter leurs mises en œuvre (lire Maire info du 27 octobre). 
Par ailleurs, ils ont décidé, en fin de semaine dernière, de recentrer la DETR sur les territoires ruraux, de réajuster les prélèvements sur la dotation d’intercommunalité, d’autoriser les collectivités à augmenter la taxe de séjour pour les hébergements touristiques non classés, mais également de prolonger jusqu'en 2021 le fonds de stabilisation et de l’élargir à une cinquantaine de départements et de collectivités à statut particulier. Ils ont également reporté d’un an le calendrier de l’expérimentation du compte financier unique (CFU) et de deux mois, au 1er décembre 2020, la date limite des délibérations permettant aux collectivités et aux EPCI d’instaurer des exonérations de TFPB, de CFE et de CVAE dans les zones de revitalisation des centres-villes et les zones de revitalisation des commerces en milieu rural (lire Maire info du 13 novembre).

A.W.

Consulter le PLF pour 2021.

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