Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du jeudi 1er octobre 2020
Politique de la ville

(En)quête de « mieux vivre » dans les quartiers de la politique de la ville 

Décalée de quelques mois en raison du coronavirus, la publication du rapport annuel 2019 de l'Observatoire de la politique de la ville n'en est pas moins acide. Les rédacteurs de ce 5e rapport ont choisi de centrer sa première partie sur « le bien-vivre »  dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville. Un choix particulièrement opportun au regard des mois passés de confinement au printemps, et de l'incidence de l'épidémie de coronavirus, dont on sait qu'elle a touché plus durement les milieux populaires de ces quartiers. 


Des écarts persistants au sein des agglomérations
Comme le rappelle le président de l’Observatoire Jean-François Cordet, le but de ce rapport annuel est de mesurer « l’écart de développement économique et social »  entre ces quartiers prioritaires de la politique de la ville et le reste de leurs agglomérations. Cette année, il propose « une approche multidimensionnelle à partir d’indicateurs dépassant le cadre strictement économique de l’appréhension traditionnelle des conditions de vie », mêlant des indicateurs « objectifs et subjectifs ». Le résultat rendu n'est pas surprenant mais il reste d'autant plus percutant. 
Sa lecture rend en effet compte d'un cadre de vie plus dégradé dans ces quartiers (bâti sale, environnement bruyant, délinquance), de rapports mauvais avec la police, de conditions de vie moins bonnes qu'ailleurs, ainsi que de conditions de travail toujours plus précaires, surtout pour les femmes et les jeunes, et des discriminations toujours marquées, beaucoup plus en raison de l'origine supposée et la couleur de peau que de l'adresse. Comme le relèvent en contre-point les auteures du rapport, les habitants de ces quartiers ont pourtant « une meilleure accessibilité aux équipements et services du quotidien en moins de 15 minutes de marche ». Mais la proximité physique ne suffit pas à leur accessibilité. C'est notamment le cas du renoncement à des soins (surtout dentaires et d'optique) ou examens. La raison première n'est pas l'éloignement (5 % des habitants) mais le motif financier (40 %). 

Mortalité supérieure aux autres quartiers
Le zoom sur la santé n'intègre bien sûr pas l'épidémie de coronavirus, mais il fait comprendre pourquoi ces quartiers ont été plus touchés. Les habitants des quartiers se déclarent un peu moins souvent en bonne ou très bonne santé que les habitants du reste de leur agglomération. Les écarts se creusent davantage sur le surpoids, certaines pathologies comme l'asthme, le diabète, la dépression ou l'hypertension artérielle. Ces fragilités se retrouvent en termes de mortalité. Les résultats sur 32 quartiers prioritaires de 6 villes de la région du Grand Est (Colmar, Illzach, Metz, Mulhouse, Reims et Strasbourg) sont éloquents : une mortalité générale supérieure de 64 % et une mortalité prématurée (avant 75 ans) supérieure de 67 % à celles de l’ensemble de la région.
La seconde partie du rapport est composée de quarante fiches thématiques qui fourmillent d'informations à partir d'indicateurs sur les « trois piliers de la politique de la ville » : la cohésion sociale, l'emploi et le développement économique, le cadre de vie et le renouvellement urbain. Par exemple, sur le recul de l'activité des conseils citoyens, la couverture de la moitié des habitants par un conseil local de santé mentale, les emplois francs (12 000 demandes en 18 mois), etc.
In fine, ce rapport permet, comme son président le souligne, d'apporter une pièce de plus « au panorama global des quartiers ». Même s'il manque encore des travaux pour en cerner vraiment toutes les facettes, par exemple sur la qualité de l’environnement ou l'équilibre entre vie professionnelle et vie privée. 

Emmanuelle Stroesser

(1) rapport coordonné par Helga Mondésir et Noémie Oswalt pour l'ANCT.

Accéder au rapport.

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