Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux
Édition du lundi 28 janvier 2019
Sécurité

Polémique sur les LBD : le tribunal administratif de Paris refuse leur suspension

Le tribunal administratif de Paris, saisi notamment par la Ligue des droits de l’homme (LDH), a refusé vendredi de suspendre l’utilisation des lanceurs de balles de défense (LBD) par les forces de l’ordre. L’usage de ces armes – ouvert y compris, sous certaines conditions, aux policiers municipaux – fait débat depuis plusieurs semaines.
Samedi encore, lors d’une manifestation à Paris, la grave blessure à l’œil d’un des leaders du mouvement des Gilets jaunes, Jérôme Rodrigues, a relancé la polémique : alors que la victime et certains témoins font état d’un tir de LBD, le ministère de l’Intérieur parle, lui, d’une blessure due à un éclat de grenade de désencerclement. Par ailleurs, samedi toujours, un militaire en permission, qui apparemment ne participait pas à une manifestation, a été blessé à la tête par un tir de LBD.

Polémiques sur le bilan
Depuis le début du mouvement des Gilets jaunes, les chiffres les plus divers circulent sur le nombre de blessés occasionnés par ces armes. C’est un sujet sur lequel il faut être prudent, dans la mesure où beaucoup de fake news (fausses informations) circulent sur les réseaux sociaux. Côté ministère de l’Intérieur, on se refuse pour l’instant à donner un bilan très précis du nombre de blessés graves dus à l’usage de cette arme – mais on reconnaît qu’elle a pu être « mal utilisée », d’où un rappel récent d’Éric Morvan, le directeur général de la police nationale, des règles d’engagement. Le ministère estime cependant que ces armes sont utiles dans la mesure, a expliqué Christophe Castaner, où il y aurait « davantage de blessés »  si elles n’étaient pas utilisées. Il a proposé que les policiers équipés de LBD soient systématiquement « doublés »  par un équipier muni d’une caméra piéton.
Du côté des médias, la source la plus fiable reste à ce jour le site « CheckNews »  du journal Libération, qui vérifie systématiquement, par contact direct avec les victimes, la réalité des informations. Ce site recense à ce jour « 82 blessés graves »  dans les manifestations, dont « une soixantaine »  par des tirs de LBD.

LBD ou « Flash-ball » ?
On entend souvent indifféremment les termes de « flash-ball »  et de « LBD ». Précisons que le nom générique de cette arme est bien « lanceur de balles de défense »  ou LBD. Le terme « Flash-ball »  est en réalité une marque commerciale, celui d’un LBD de fabrication française utilisé depuis les années 1990. Depuis l’année dernière, cette arme est progressivement retirée de l’arsenal des forces de l’ordre nationales, et remplacée par le LBD 40, une arme suisse réputée plus précise et munie d’un viseur. Contrairement au Flash-ball, qui était une arme de poing et ressemblait à un gros pistolet, le LBD 40 est une arme d’épaule.
Les LBD sont des armes de catégorie B3 ou C3 (armes à feu tirant des projectiles non métalliques).

La position du tribunal administratif
Parmi les voix qui se sont élevées récemment contre l’usage du LBD, celle du Défenseur des droits a particulièrement résonné. Le 17 janvier, Jacques Toubon, au nom du principe de précaution, a demandé « la suspension »  de l’usage de cette arme : « Annulons le risque qui existe de dangerosité de ces armes en suspendant leur utilisation », afin de « prévenir plutôt que soigner », a déclaré le Défenseur des droits. Déjà en 2015, puis en janvier 2018, le Défenseur des droits avait déjà fait part de ses sérieuses réserves sur l’usage d’une arme qu’il estimait « inadaptée à une utilisation dans le cadre des opérations de maintien de l’ordre ».
Il n’a pas été suivi par le tribunal administratif de Paris, saisi en référé la semaine dernière par la LDH et la CGT. Celui-ci s’est déclaré incompétent, renvoyant la décision au Conseil d’État ; mais il a estimé que la mesure décidée par le ministère de l’Intérieur (binômes avec un policier porteur de caméra) était de nature à réduire les risques.

Les LBD dans la police municipale
Rappelons que les policiers municipaux sont autorisés à porter des LBD avec interdiction formelle de s’en servir hors des cas de légitime défense. Ils sont tenus par l’arrêté du 14 avril 2017 relatif à la formation à l’armement des agents de police municipale de suivre une formation juridique de 12 heures et une formation pratique de 6 heures et, au titre de la formation continue, de tirer au moins quatre cartouches par an.
Selon les chiffres communiqués par la délégation aux coopérations de sécurité du ministère de l’Intérieur, 2793 agents de police municipale portaient un LBD de catégorie B en 2017 et 828 un LBD de catégorie C.
F.L.

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