Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du jeudi 19 juillet 2018
Numérique

Comment le numérique a changé les métiers de la fonction publique territoriale

Nouveaux profils d’emplois, postes requalifiés ou menacés… La transition numérique n’a pas causé à proprement parler de révolution mais les organisations et les activités des agents sont traversées par de « profonds changements ». C’est le constat opéré par le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT), qui a présenté, lundi 16 juillet, les résultats du premier volet de l’étude mesurant les « Impacts de la transition numérique sur les métiers de la fonction publique territoriale » : en 38 pages, elle analyse les effets du numérique sur les fonctions, le plus souvent en mutation, puis sur le quotidien professionnel des agents, renvoyés pour certains à leur « illectronisme »  (néologisme qui transpose le concept de l’illettrisme dans le domaine de l’informatique).
L’étude a, plus précisément, été menée par l'Observatoire de l’emploi, des métiers et des compétences de la fonction publique territoriale du CNFPT dans 9 collectivités (eurométropole de Strasbourg, communauté urbaine du Grand Poitiers, communauté de communes, ville et CCAS de Parthenay…) et auprès de 87 agents territoriaux (directeurs généraux des services et directeurs adjoints, agents et encadrants chargés du développement numérique, un élu…).

Les activités d’accueil, « un service après-vente » 
En analysant « les projets d’e-administration, de dématérialisation et de gestion de la relation avec les usagers qui correspondent globalement à la période liée au développement d’Internet », le CNFPT remarque que « plusieurs fonctions sont profondément impactées par la transition numérique. »  À terme, certains métiers sur le chemin de la standardisation, comme l’instruction des dossiers, pourraient disparaître. D’autres sont « requalifiés ». C’est le cas, par exemple, de la fonction d’accueil, qui s’apparente désormais à celle d’un service support en ligne, service après-vente ou « hotline ».
Avec la généralisation des logiques de guichet unique, certaines collectivités ont « un accueil physique continu sur toute la journée, 6 jours par semaine », fait remarquer le CNFPT. « Les agents effectuent des rotations entre les différents postes d’accueil physique et en ligne (…) Les procédures simples étant le plus souvent dématérialisées, les agents se concentrent sur les cas complexes et les demandes sensibles (impayés, réclamations et litiges…), sur l’accompagnement des citoyens qui n’ont pas accès aux services dématérialisés. »  L’étude parle par conséquent « d’accueil-médiateur ».

L’administration des données émerge
À l’inverse, d’autres fonctions, à l’instar du directeur des données, montent en puissance. « Aujourd’hui, les Data sont l’axe principal du développement de l’e-administration et de la création de nouveaux services », indique le rapport. Pour l’heure, les grands types de services développés à partir des données en ligne sont les téléservices, les systèmes d’information géographique (pionniers dans le numérique mais qui se sont fortement renouvelés ces dernières années), le « cloud computing », les compteurs intelligents, les bases de connaissances, les fichiers usagers partagés ou uniques, les profils statistiques, la lecture des plaques d’immatriculation...
Des données que les collectivités se doivent de maîtriser pour « se prémunir contre les cyber-attaques »  et « assurer la protection des données individuelles dont elles disposent ». « Pour l’heure, si les collectivités organisent le plus souvent la production de données, elles n’en assurent que rarement le traitement. Sur ce domaine encore nouveau, elles privilégient une montée en compétences par des recrutements externes ».

« Des processus hiérarchiques renouvelés » 
Au-delà des fonctions, c’est le rapport des agents à leur hiérarchie qui se trouve parfois bousculé avec le développement numérique : les organisations sont moins cloisonnées. « Désormais, les relations verticales ou hiérarchiques tendent à se combiner davantage aux relations horizontales ou fonctionnelles. Elles obligent les manageurs et manageuses à travailler de façon plus matricielle », explique l’enquête. « Le processus décisionnel lui-même n’est plus unique et seulement concentré sur un seul manageur ou manageuse, mais partagé au sein d’une chaîne d’acteurs et de responsabilités fonctionnelles. » 
Ces nouveaux rapports peuvent perturber certains managers à tel point que les changements organisationnels leur donnent « le sentiment d’une remise en cause et d’une perte d’autorité ». Pour lutter contre la fracture numérique et ce que l’on appelle « l’illectronisme », le CNFPT recommande aux collectivités d’identifier « l’acculturation numérique de l’ensemble de leurs agents comme un enjeu primordial de développement et comme un nécessaire investissement à moyen terme. » 
Le second volet de cette étude, prospectif cette fois, sera publié en 2019.

Ludovic Galtier

Télécharger l’étude du CNFPT sur « Les impacts de la transition numérique sur les métiers de la fonction publique territoriale ».

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