Crise du logement : face à la chute du neuf, le secteur du bâtiment s'inquiète d'une entrée en récession dès 2023
Par A.W.
La crise du logement s’accélère. Et c’est, cette fois, au tour de la Fédération française du bâtiment (FFB) de tirer la sonnette d’alarme alors que le secteur s’achemine vers une récession et des chiffres qu’il n’a plus connus depuis les années 90.
« Aujourd’hui la construction neuve est en décroissance complète […] et si rien n’est fait le bâtiment va s’écrouler d’ici deux ans », s'est alarmé, sur RTL, le président de la FFB, Olivier Salleron, à l’occasion de la publication de sa note de conjoncture de rentrée.
Le logement neuf en recul de plus de 5 %
Si « les carnets de commandes encore garnis permettront de terminer l’année sur une quasi-stabilisation », la baisse semble déjà enclenchée (- 0,2 %), le secteur ayant dû revoir ses prévisions pour l’année alors qu'il tablait jusque-là sur une légère progression.
Un infléchissement « historique », selon le président de la FFB, qui annonce « sûrement - 4 % ou - 5 % de croissance » pour l’année prochaine. En cause, « la chute du logement et la stabilisation du non-résidentiels ». Dans le détail, « le neuf reculerait davantage que prévu (- 3,1 %) du fait principalement du logement (- 5,1%) », tandis que la production en non-résidentiel neuf resterait quasi stable (- 0,2 %).
Dans le logement neuf, « l’effondrement des permis, toujours proche de 30 %, se répercute sur les mises en chantier qui plongent de plus de 15 % » sur les sept premiers mois de 2023, celles-ci se rapprochant « du niveau relevé en 1991, à peine supérieur à 300 000 logements ». Une année qui a précédé « les points bas historiques de 1992 et 1993 (environ 275 000 unités) ». Et « les perspectives restent très mauvaises » avec la chute des ventes observées, assure la FFB, qui rappelle qu’à « une situation tendue sur le marché du crédit sont venues s’ajouter les annonces catastrophiques du CNR logement relatives aux aides pour le neuf ».
Suppression de 150 000 emplois d’ici 2025 ?
Résultat, « des entreprises vont mettre le genou à terre dès 2024 », avertit Olivier Salleron. Car si les défaillances d'entreprises restent pour l’heure contenues, elles ont tout de même progressé de « près de 39 % entre les huit premiers mois 2022 et 2023 ».
En parallèle, « l’emploi global s’infléchit et semble s’accompagner d’un basculement vers l’intérim, sans doute du fait d’une prudence accrue des entrepreneurs face à des perspectives qui s’assombrissent », constate la fédération. Entre les deuxièmes trimestres 2022 et 2023, l’emploi salarié a ainsi perdu 1 800 postes, alors que l’emploi intérimaire affiche 1 000 postes supplémentaires.
« A l’horizon 2025, si rien n’est fait, donc si l’on laisse la crise du neuf s’enclencher, l’activité bâtiment reculera d’environ 8 % hors effet prix, soit 14 milliards d’euros en moins. S’en suivra une réelle montée des défaillances et une chute de l’emploi, avec près de 150 000 destructions de postes, salariés et intérimaires […] confondus », prévient celle-ci, alors qu’elle en prévoyait encore 100 000 au printemps, sur les 1,5 million d'actifs du secteur.
Et Olivier Salleron de mettre en garde : « Le bâtiment est un grand paquebot. Quand il s’arrête, pour le relancer, il faut un an et demi ou deux ans ».
La commande publique de retour
Reste une « bonne nouvelle », le retour de la commande publique. « De fait, les bâtiments administratifs, qui pèsent pour 14 % du non résidentiel, ressortent en hausse de 8,4 % côté permis. Plusieurs développements hospitaliers l’expliquent, mais aussi de nombreux chantiers lancés par les collectivités locales, comme en atteste la hausse prévue de 2 % en volume de la dépense en bâtiment de ces acteurs », détaille la FFB.
En parallèle, la rénovation énergétique va être « boostée » avec l’annonce du quasi-doublement de MaPrimeRénov, mais, « faut pas rêver, ce n’est pas 2 milliards d’euros par an qui va donner 200 000 embauches » en plus, tempère Olivier Salleron sur BFMTV.
Afin de « limiter l’ampleur et la durée de la crise », la FFB demande notamment le redéploiement du PTZ sur 40 % du territoire et la revalorisation de ses barèmes, mais aussi le retour au Pinel de 2022 « dans l’attente de la mise en place du statut du bailleur privé ». « Il s’agit d’un moyen de relancer rapidement le marché, de répondre à une demande bien présente, de permettre la sortie du parc locatif, mais aussi de dégager des ressources budgétaires », selon elle.
Des mesures qu’elle souhaite voir introduites dans le projet de loi de finances pour 2024.
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